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sur 2872 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
La petite bille noire roule, roule, fait des petits bonds de cabri avant de s'immobiliser dans une case. Ceux qui sont autour, qui suivent sa farandole, retiennent leur souffle et peut-être ferment-ils les yeux pour ne pas voir. Tous sont soumis à ce « hasard ». Vont-ils perdre ou
gagner ? Pour perdre et gagner à nouveau ou tourner le dos et partir ? Dostoïevski fait dire à un de ses protagonistes qu'il faut du courage pour tourner les talons et s'enfuir de la table de jeu. Alexeï Ivanovich, malgré toutes ses promesses, finit par se retourner, telle la femme de Loth. Frappé d'immobilisme, comme englué à sa condition de joueur il ne peut plus rien pour lui-même. Car la petite bille noire n'est-elle pas la main du Destin frappant au hasard et scellant l'humain à sa condition ? Peut-il l'infléchir ?
Dostoïevski trace une fatalité implacable dans l'âme de ses personnages. Ils sont tous dans le bain du jeu de la vie. Ce sont des pions, des numéros qui ont l'illusion d'avoir un libre arbitre, une volonté farouche de contrôler leur existence. Mais ce n'est que fourvoiement. Dostoïevski pose la question dans ce petit roman :
Pourquoi toute cette agitation ? Pour cette absurdité qu'est la vie ? Pleine de mensonges, de faux-semblants, de peu de gloire ? Comment supporter tout ceci sinon en s'en moquant ? En riant ?
Alexeï Ivanovich rit souvent, de lui-même, des autres. Il est plein d'allant avec une pointe de cynisme. Jeune homme très intelligent et lucide, il se laisse emporter par sa destinée comme un fétu de paille balloté par le vent. Parce qu'il croit toujours se « refaire », comme tous les joueurs. Il a toutefois des doutes sur sa santé mentale. Peut-être qu'en fait, il ne se trouve pas dans cette ville d'eau en Allemagne mais dans un asile de fou et qu'il y écrit ce qu'il croit vivre ?
Voici une petite histoire cocasse et pathétique qui a sa part de cruauté et d'obscurité. Tout va vite, on se croirait parfois dans une bouffonnerie : Un général russe désargenté qui n'attend que la mort de la grand-mère pour faire main basse sur l'héritage. Car c'est un général russe vieillissant, amoureux d'une jeune demi-mondaine parisienne cupide. le décor est planté. le général néglige ses enfants, fait des dettes ; doit de l'argent à un escroc français, Des Grieux, qui se dit de descendance noble. Et la grand-mère que tout le monde avait déjà enterrée, arrive. L'effervescence monte d'un cran.
Alexeï Ivanovich est le précepteur des enfants du général. Il se consume d'une passion violente pour la belle-fille de celui-ci : Polina. Ses supposés rivaux sont Des Grieux et Mr Astley, son ami anglais. Mais le fervent Alexeï est un joueur dans l'âme. Joueur de ses sentiments, de ses envies, de sa vie en général. Avec, quand l'occasion s'en présente, un renoncement presque effrayant. Plutôt un panache désespéré. Dostoïevski fut longtemps un
dépendant du jeu. Quand il dicta « le Joueur » il arpentait encore les tables des casinos ; donc, c'est aussi une confession en creux. Fédor Dostoïevski dit : Alexeï Ivanovich c'est moi. Il porte ma folie, mon amertume, mes splendeurs, ma lucidité, mes contradictions et mes passions dévorantes. Il incarne l'âme russe.
Dostoïevski même s'il encense « l'esprit russe », est féroce avec ses contemporains et avec lui-même. L'abîme… toujours l'abîme…
Il dicta ce roman très rapidement, ne prenant pas la peine de l'écrire. Je ne peux que remercier le traducteur de l'avoir livré tel quel, sans chercher à corriger pour « faire de la belle littérature » ; c'est de toute façon étincelant. La langue vibrionne, moderne, brute, accrochée à la pensée d'Alexeï Ivanovich, le narrateur ; nous sommes suspendus à ses lèvres. C'est un
tourbillon, un mouvement de roulette fou. Phrases inachevées, répétitions, ping-pong verbal, pensées déroulées d'un seul jet. Comme jetées sur une table de jeu. Un récit qui se clôt brusquement comme si tout avait été misé.

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Le Joueur' a la réputation d'être le texte le plus abordable de Dostoïevski. C'est vrai, mais il a de mon point de vue un deuxième intérêt : il illustre parfaitement le curieux rapport de l'auteur aux femmes.

Car enfin, c'est son texte le plus autobiographique ! le démon du jeu, il connait, il en a tâté. Des nuits entières à suivre des yeux la bille de la roulette, des fortunes gagnées et aussitôt perdues, il en a connu. L'oubli de toute préoccupation extérieure, à n'en pas savoir si l'Europe est en guerre ou en paix mais que le rouge est sorti quinze fois de suite la semaine précédente, il en est passé par là aussi. Et qui le tirera de tout cela ?

Une femme ! Une certaine Anna Grigorievna Snitkina… Qu'il avait embauché pour relire le manuscrit du Joueur. Et dont il perdit pas mal d'argent au cours de rechutes. Et certes il ne la connaissait pas encore, mais on n'en constate pas moins que ses personnages féminins sont curieusement stéréotypés.

Il y a d'abord et avant tout la femme détruite, devenue elle-même destructrice. Ici c'est Pauline, dont le narrateur est amoureux, qui elle aussi l'aime, et qui pourtant, après une nuit d'entente parfaite le rejette brutalement et l'abandonne à Mademoiselle Blanche et au jeu. C'est Nastasia Philipovna dans l'Idiot, c'est Grouchenka et Liza dans ‘Les frères Karamazov', c'est Katerina Marmeladova dans ‘Crime et Châtiment'…

La deuxième catégorie, c'est la femme plus âgée, qui joue un rôle stabilisateur et n'en cultive pas moins une excentricité. C'est ici la grand-mère, que tout le monde espère voir mourir et qui surgit brutalement, jaillissant comme un coup de tonnerre avec sa suite et ses domestiques, écrasant tout par sa présence, remettant chacun à sa juste place… Et in fine perdant une fortune au casino. A rapprocher de la mère de Raskolnikov, de la tante du prince Michkine…

Mademoiselle Blanche n'est, je pense, pas tant à voir comme un personnage féminin que comme l'incarnation du vice français pour Dostoïevski. Corruptrice, comme l'élégance de la pensée française ayant séduit la cours des tsars au XVIIIème, et in fine dévoreuse comme la Grande Armée. Seule la Baboulinka, incarnation de l'âme russe, peut résister à son pouvoir de corruption.

Des archétypes dont les modèles sont à chercher dans le passé de l'écrivain. Heureusement pour lui, c'est une femme d'un tout autre acabit qu'il embaucha pour coucher sur le papier ce manuscrit… Et il y a grand à parier que c'est elle qui l'empêcha de finir comme son héros !
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Pour reprendre la célèbre distinction kantienne, tous les romans de Dostoïevski sont dénués de beauté puisqu'ils sont consacrés au sublime. C'est d'ailleurs particulièrement le cas dans ce roman, où se déploie dans une tension presque insoutenable la facticité humaine la plus médiocre.
En effet, les personnages sont ici réduis à de creux grains de poussières, vivotants dans l'impression trompeuse d'une appartenance propre en attendant que le hasard provoque leur mouvement : « Par moment, j'ai encore l'impression que je suis pris dans ce tourbillon, que l'orage va se déchaîner, me saisir au passage avec son aile et que, perdant l'équilibre et le sens de la mesure, je vais me mettre à tourner, tourner, tourner… » (p.179)
La passion règne en maître, elle emporte tout et décide tout, faisant et défaisant l'échelle hiérarchique sans aucune entrave. On y voit un général renvoyer son précepteur pour une peccadille et revenir le jour suivant le supplier de le sauver; des femmes mépriser et admirer un même homme selon l'efficacité avec laquelle il peut leur offrir quelque prestige reconnu; une vielle vivant en réclusion et qu'on aimerait voir morte devenir soudain la reine du bal sitôt qu'elle se présente, etc.. Tout ce tourbillon absurde où chacun s'entre dévore force le lecteur à vivre l'instabilité absolue de l'atmosphère passionnelle qui m'apparaît être le véritable sujet du roman.
Quant au jeu, l'exposé psychologique en vaut franchement le détour. L'état d'inconscience du joueur en action, frappé de plein fouet par la vitesse inouïe où se déroule l'enchaînement machinal du jeu est rendu de manière très frappante. le cynisme du mécanisme qui se déploie dans les salles de jeu, comme le fait que le pire qui puisse arriver pour faire le joueur compulsif soit qu'il gagner une forte somme le premier coup, (dans la mesure, évidemment où notre classe sociale nous en fait sentir la valeur (p.37)) et que même les joueurs les plus aguerris savent à quel point il est presque « impossible de s'approcher de la table de jeu sans immédiatement subir la contagion de la superstition »(p.39) font sentir quelque chose comme un vertige devant ce gouffre. Quant à l'état du joueur compulsif, il se montre, dans l'extrait suivant, au coeur de l'horizon clair obscur d'un obsédé, dans un rare instant de semi-conscience: « Je vis dans une angoisse continuelle; je joue très peu à la fois et j'attends, je fais des calculs; je reste des journées entières près de la table de jeu…mais cependant il me semble que je me suis endurci, que je me suis embourbé dans la fange » (p.245). Sitôt qu'elle est prise par la passion, le jeu devient implacable et irrésistible, comme le fer et la poussière de l'existence, une aimant.
Toutes ces descriptions sentent le vécu et l'auteur, qui s'est sorti d'une vie de joueur, ne pouvait conclure autrement qu'en présentant la possibilité de s'en sortir. Aussi, pour arrêter le jeu, comme pour n'importe quelle autre passion digne de ce nom, Dostoïevski nous indique qu'il « suffirait, une seule fois, d'avoir du caractère et, en une heure, je peux changer toute ma destinée. L'essentiel, c'est le caractère » (p.255). le caractère qui rendrait la vie aux creux grains de poussières, qui pourrait libérer de l'emprise des vents et marées que le hasard voudra bien apporter, tout est là. Mais cette possibilité n'y est qu'évoquée.
Reste donc à savoir comment le caractère peut devenir effectivement possible...mais est-ce, justement, à savoir?
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Le titre ne décrit pas une condition actuelle mais une condition à venir.

Je me souviens lorsqu'un professeur à l'université nous disait que l'auteur qui a le plus gêné et préoccupé Freud c'était Dostoïevski. Cela est sûr, il n'y a pas deux comme Alexeï Ivanovich dans le monde littéraire. Ce personnage à lui seul mérite une ample analyse. Un homme qui aime jusqu'à l'humiliation une femme pour laquelle il pourrait se jeter du haut d'une montagne, il déguste avec délectation cet abaissement. En discussion, il préfère les propos les plus déplacés et embrouillés avec la plus grande éloquence arrivant à bouleverser ses interlocuteurs voire les convaincre. Ce personnage curieux qui étonne même les autres protagonistes par son caractère lunatique se détruit au fur et à mesure pour se perdre.

Avant de lire ce roman, je croyais qu'il s'agissait de l'histoire (à vrai dire monotone) que mène un amoureux du jeu, gagnant tantôt et perdant tantôt. Or, la trame ingénieuse que choisit Dostoïevski est surprenante et a aboli mon horizon d'attente. L'histoire est digne d'un drame en cinq actes avec ses coups de théâtre et les relations conflictuelles qu'on y trouve. D'un rythme effréné de la narration, Fiodor nous captive. Et dire que ce livre a été écrit en vingt sept jours seulement. Dostoïevski n'a pas beaucoup chercher pour trouver l'essence de son roman puisque lui aussi joueur et amoureux de la roulette. Par ailleurs, Dostoïevski n'oublie pas d'y mettre une critique acerbe envers les allemands et les français calculateurs et pragmatiques et de vanter la négligence et la simplicité des russes.
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Un court roman passionné et passionnant
Dostoïevski était un joueur de roulette compulsif, toujours à cours d'argent. Il a également vécu une folle passion pour une certaine Pauline. Au début des années 1860, la roulette est interdite en Russie. Les riches aristocrates rallient donc les "Roulettenbourg" que sont les villes d'eau allemandes : Baden-Baden, Hambourg, Wiesbaden ou suisses comme Saxon-les-Bains près de Genève.
le narrateur, Alexeï , qui vient d'arriver à Roulettenbourg est un noble cultivé qui ne possède rien. Il est le précepteur des enfants d'un général russe ruiné qui sauve les apparences grâce à un train de vie fastueux. le général est entouré de ses deux enfants ; de sa belle-fille Pauline dont le narrateur est follement amoureux ; du marquis des Grieux, son créancier français aimé de Pauline et honni du narrateur ; de Blanche sa maîtresse française et de la mère de celle-ci. Toute la famille et les parasites qui l'environnent attendent ardemment le télégramme annonçant la mort de la tante du général, la richissime comtesse Antonina Vassilievna. Mais celle-ci débarque toute fringante sur son trône à porteur avec la farouche intention de bien profiter du séjour. Après avoir rembarré le général et jugé toute sa cour , elle charge Alexeï de la guider au casino...
Jusqu'à l'arrivée de la "Baboulinka", il est surtout question de passion amoureuse et d'argent. le narrateur Alexei est éperdument amoureux de Pauline, une femme de caractère, arrogante, cruelle et aussi orgueilleuse que lui. Elle l'envoie insulter un baron allemand pour ensuite se moquer de lui. Il est son bouffon, sa chose. Alexeï en est parfaitement conscient, se rebelle, se montre insolent avec elle mais il finit toujours par retomber à son état d'esclavage. Comme Pauline a de pressants besoins d'argent, elle lui demande de jouer pour elle. Elle n'a pas prévu ce qu'il va se passer. Lui non plus. Il deviendra l'esclave de la roulette comme il a été celui de Pauline. Cependant Alexeï est toujours lucide. Il se sait malade compulsif et nous dresse un compte rendu très clinique de son esclavage : fébrilité, effervescence, fièvre, angoisse, euphorie, désarroi, certitude de pouvoir se refaire...Il décrit la folie du jeu, la dénonce le plus souvent mais vante aussi le tempérament passionné des Russes, tempérament tellement supérieur à celui de ces froids et cupides calculateurs français.

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Au xixè à Roulettenbourg en Allemagne, dans une petite ville thermale à l'apparence paisible se déchaîne la passion pour le jeu dans un casino fréquenté par la haute société.
Un jeune précepteur russe Alexis Ivanovitch est au service d'un général retraité et de sa famille composée de deux enfants et de sa belle fille Paulina Alexandrowna dont Alexis est follement épris.
Autour de cette famille russe, vient se greffer des personnages tels que Blanche jeune et belle française opportuniste convoitée par le vieux général, Astley jeune et riche anglais amoureux de Paulina, et le marquis Des Grieux un français homme d'affaires sans scrupules aimé de Paulina qui possède l'hypothèque des biens du général ruiné.
Paulina qui est liée à une dette, traite cruellement le précepteur, Alexis fou d'amour s'avilit tel un esclave aux exigences de la jeune femme, au point de se risquer à tous les dangers quitte à mourir pour elle. Celle-ci lui demandera de jouer à la roulette afin de résorber sa dette.
Dans l'attente de l'héritage escompté de sa vieille tante qui doit prochainement mourir, le général espère épouser Blanche et rembourser le marquis, un marquis impatient de saisir des opportunités sur ce fameux héritage.
Mais un beau jour la vieille tante « La Baboulinka » débarque à la surprise de tout ce petit monde, la vieille dame acariâtre qui n'a pas de leçons à recevoir, se risque au jeu de la roulette au grand désespoir du général, de Blanche et du marquis angoissés à l'idée que sa fortune se dilapide.

Mais la chance du débutant ne dure pas, et la passion du jeu prend le dessus sur la raison !

Alexis est également emporté par la fièvre du jeu, conscient que lui seul pourrait changer sa destinée « renaître et ressusciter », il aimerait redevenir un homme capable de tenir bon et de ne pas rechuter afin que l'amour ressorte vainqueur et que la passion du jeu se perde.
Mais Alexis est un esclave du jeu mais surtout esclave de lui-même !

Un livre sur les passions de l'amour et du jeu, « le joueur » roman autobiographique vous entraîne dans une tension diabolique, on vit le jeu de la roulette avec frénésie, comme le joueur nos jambes tremblent, nos mains sont moites, nos fronts ruissellent, la peur nous saisit en attendant les annonces du croupier.
En parallèle Dostoïevski dépeint la noblesse russe, la positionne sur un piédestal face à une Europe qu'il a tendance à dénigrer : « je vis ce vilain, ce faux sourire français que je déteste » mais qu'on lui pardonne ce roman est (à mes yeux) un petit chef d'oeuvre.
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Ecrit en quelques semaines seulement, ou plutôt dicté à celle qui deviendra la future femme de Dostoïevski, entre deux chapitres de Crime et Châtiment, le Joueur révèle ce sentiment d'urgence jusque dans ses phrases brusques, ses dialogues exclamatifs et dans le tempérament à la fois passionné et enthousiaste d'Alexei! Comment ne pas s'attacher à lui que rien n'arrête, qui vit la vie passionnément, quitte à tout perdre! Et la baboulinka, n'en parlons pas! Quel caractère, quelle force d'esprit! Rétive à l'idée de lire un récit autour des jeux d'argent, j'ai vite été conquise par le rythme endiablé du livre et sa vivacité.
Un bonheur!
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Premier roman que je lis de ce célèbre écrivain russe dont je n'avais, lors de mes études, lu que des extraits. J'ai choisi ce roman, car d'après mes quelques recherches à l'occasion du bicentenaire de sa naissance, il s'agit de son texte le plus autobiographique et ce roman marque un tournant dans son oeuvre, annonçant les grands récits qui marqueront la littérature.
Cette lecture fut un réel plaisir et me donne envie de découvrir d'autres romans de ce géant de littérature russe. On y trouve dans un style à la fois intelligent et malicieux des personnages d'une rare profondeur et plein de surprises. de plus, est traitée de manière très habile, l'addiction au jeu.
Un roman que je conseille tant il est accessible à ceux, qui comme moi auraient envie de lire Dostoïevski.
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Qui mieux qu'un joueur peut instruire, la descente dans l'enfer du jeu? Courant les grands casinos européens, dans le désordre et l'agitation, Dostoïevski, harcelé par ses banquiers écrit ce court roman le JOUEUR. Il fait parti de ces romans qui font battre le coeur, et volupté suprême, vous donne à penser.

Que ce roman est actuel !
La liste de mes envies, pourrait être le maillon annonciateur d'un roman à écrire en 2017, il nous servirait la même trame, en ne modifiant que les noms.

Dostoïevski a l'art de se moquer de lui-même, de dire pis que pendre de ses motivations comme de ses actes, il sait bien qu'il va dans le mur, que le jeu brûle tout, qu'il est le rêve et se nourrit de ses propres passions.

Il est à la mesure des faux espoirs comme des gloires éphémères : «  il voulait seulement que le lendemain tous ces princes, tous ces maîtres d'hôtel, toutes ces belles dames, de Baden, parlent de moi, racontent mon histoire, m'admirent, me complimentent et s'inclinent devant moi ».

Alexis est employé d'un général russe endetté auprès de son entourage. Paulina, pupille du général, demande à Alexis de jouer pour elle, son rang lui interdisant les jeux de hasard. Elle a besoin d'argent sans dire pourquoi à Alexis, l' amoureux transis.

le général attend la mort d'une tante et son héritage, condition pour pouvoir épouser Blanche de Comminges, une femme plus jeune que lui. Mais, voilà, que la tante découvre le jeu de la roulette...


les uns et les autres finiront sans doute ruinés. Nous sommes tous des joueurs, tous, aux prises avec notre amour propre, fascinés par ces gains rapides, prêts à confier notre destin aux caprices d'une boulette, réclamant la liberté d'agir et puis sautant allègrement dans la démesure, et tout dans l'espoir d'un seul bien matériel, l'argent.

Dostoïevski fait luire une autre étoile, suggère une autre voix, imagine une autre voie, Alexis porte en lui celle de l'intérêt général du bien commun, de l'usage fructueux de l'héritage, mais Baboulinka est devenue aveugle, sourde plutôt, engluée dans ses errements.

Je pense à ces officines, comme aux polonais qui distillent des conseils foireux, aujourd'hui des officines font miroiter, des gains rapides, qui suscitent l'admiration des milieux financiers, ce fonds par exemple qui, grâce à Vivarte a doublé sa mise en 2 ans, fonds d'investissement PAI partners, spécialisé en LBO, Vivarte contrainte à licencier 1800 personnes en 2016. Les entreprises pour ces spéculateurs sont de purs objets marchands qu'il faut survaloriser pour vendre au meilleur prix.

Le Joueur prend alors une teinte bien plus sombre, il est actuel. Dans son livre Grégoire Delacour , introduit deux chemins l'un humain l'autre funeste tiré des ténèbres.

Fonder une société rationnelle et résoudre les problèmes humains, c'est l'espoir qui fait battre le coeur D Alexis, mais Paulina à d'autres projets éphémères et inconséquents, qui font bling ! Bling !

La grande force de ce roman est de nous dire stop, la vie c'est autre chose, pour celui qui a vécu l'enfer de la prison.
Le style est prodigieux, les phrases roulent comme une boule infernale, passant du noir, aux rouges sanglants, ruissellent comme un fruit trop mur que l'on a mâché trop vite, à bientôt Fedor Mikaîlovitch.
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Une ville d'eau en Allemagne, un hôtel, un grand parc pour les promenades et...un casino. C'est dans ce lieu que se retrouve une poignée d'immigrés russe. de noblesse, ils n'ont plus que le titre. Dostoïevski crée une ambiance très feutrée, où les personnages se croisent à tour de rôle.
Une galerie de portraits pathétiques où le "paraître" est la règle.
Bien sur, il y a le côté "torturé" des individus commun à l'auteur, on pourrait presque parler de masochisme, de folie.
Avez-vous jamais joué à la" roulette russe" ? Ce livre est pour vous.
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