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Henri Mongault (Autre)Louise Desormonts (Autre)Claude Roy (Autre)
EAN : 9782070369256
512 pages
Gallimard (15/03/1977)
4.07/5   463 notes
Résumé :
La maison des morts, c'est le bagne de Sibérie où Dostoïevski a purgé comme condamné politique une peine de quatre années de travaux forcés et de six ans de « service militaire ». Mais la maison des morts, c'est aussi le Goulag. La Russie de Dostoïevski est déjà celle de Staline, de Beria, de Vychinski, des grands procès où les accusés rivalisent devant leurs procureurs de contrition et d'aveux. Comme l'écrit Claude Roy, « la Russie d'hier et la Russie moderne sont ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (43) Voir plus Ajouter une critique
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"Souvenirs de la maison des morts" (le titre littéralement serait "Notes de la maison morte") est un récit autobiographique ainsi qu'un témoignage si l'on considère qu'il s'agit du premier livre écrit sur le système pénitentiaire russe.
Dostoïevski, commencera son récit sitôt après avoir purgé une peine de quatre ans de bagne (janvier 1850- janvier 1854), il y décrit son quotidien, parle de ses codétenus avec sensibilité et évoque de nombreuses anecdotes.
Il s'agit d'un récit très prenant car si Dostoïevski est un observateur averti, il s'agit aussi et surtout d'une partie de son vécu, quatre années ce n'est pas rien.
Je me suis dis que probablement plus qu'un autre, ce témoignage pouvait éclairer sur ce qu'est l'âme slave, ce mélange subtil de fatalisme et d'acceptation de la servitude comme une forme d'atavisme, je ne suis pas spécialiste des lectures sur le thème de la détention mais cet ouvrage dégage une certaine profondeur.
Etrangement ce livre est celui que j'ai le plus apprécié de l'auteur, le plus marquant, simplement peut-être parce que ce n'est pas un roman et que la réalité d'une histoire vraiment vécue est souvent plus impressionnante.
je précise que je n'ai lu que trois autres livres de l'auteur : Crime et Châtiment, le joueur et l'idiot.
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De 1850 à 1854, Dostoïevski purge une peine d'emprisonnement en Sibérie. A sa sortie, il publie "Souvenirs de la maison des morts" aujourd'hui considéré comme un classique de la littérature concentrationnaire. C'était la première fois qu'un roman était publié sur ce sujet politiquement incorrect et dévoilait les coulisses du système pénitentiaire russe.

Dostoïevski passe par le roman pour témoigner, ce qui lui donne davantage de liberté mais on n'a pas de peine à se projeter avec lui au coeur de la Sibérie pour découvrir non seulement l'organisation pénitentiaire mais aussi sa communauté de prisonniers. La force du récit vient du fait qu'il ne s'agit pas d'un pamphlet (contrairement à Victor Hugo qui a fustigé le système judiciaire français à travers "Le dernier jour d'un condamné" et "Claude Gueux") mais bien d'une exploration sociologique de la vie au bagne. le tour de force de ce grand auteur russe est de nous rendre attachants les criminels condamnés.

Les descriptions des scènes de la vie quotidiennes sont incroyables de vie et de précision, et le lecteur est subtilement invité à se forger sa propre opinion au spectacle des usages et coutumes de la prison. L'approche psychologique est fine et sert à merveille un récit tout en action dans lequel il est impossible de s'ennuyer.

Dostoïevski est un auteur qui a été condamné à mort dans sa jeunesse. La sentence fut exécutée par un simulacre avant d'être transformée en déportation. Quand on a vécu ce type d'expérience et qu'on s'est retrouvé les yeux bandés devant un peloton d'exécution, le besoin de témoigner semble plus que légitime, indispensable pour goûter à nouveau au réel.


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Challenge MULTI-DÉFIS 2020
Challenge NOTRE-DAME de PARIS
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Bienvenue dans l'univers carcéral russe du XIXème siècle !

Certes c'est un livre pas franchement, franchement feel good. Mais bon c'est peut-être aussi le moment idéal de le lire, entre les vacances insouciantes et les jours trop courts trop gris, la Toussaint et les réveillons ...

Lecture difficile mais nécessaire. Dostoïevski est un excellent observateur et nous décrit parfaitement ses compagnons de bagne, tant sur le plan physique que sur le plan psychologique, leurs conditions de vie et les travaux forcés. Il nous parle des coups de verge et autres punitions corporelles, des chaines portées pendant cinq ou dix ans, de la corruption des gardiens, des vols entre détenus et des trafics en tout genre dans le camp, de la malnutrition, du manque d'hygiène (épisode mémorable de la chemise de nuit qui passe de malade en malade à l'hôpital du camp, sans jamais être lessivée, accumulant sueur et autres sécrétions corporelles – pour rester décente). Mais aussi il évoque les moments plus légers, comme la représentation de théâtre au moment des fêtes, moment privilégié où « on avait permis à ces pauvres gens de vivre, ne fût-ce que quelques instants, à leur guise, de s'amuser, de passer une heure autrement qu'en galériens – et ces brèves minutes les avaient moralement transfigurés ». Ou encore le très touchant partage des croissants donnés en aumône par les habitants du village.

C'est un témoignage historique aussi, bien sûr. Mais surtout une expérience grandeur nature de sociologie et de psychologie. Dostoïevski décrit admirablement le crétinisme des petits chefs qui appliquent le règlement à la lettre, la perversion de certains individus qui s'enivrent de leur pouvoir de vie ou de mort sur les bagnards. Mais surtout je trouve qu'il parle excessivement bien de la misère morale des hommes voués à effectuer une tâche qui n'a pas de sens, de la soif insensée parfois de liberté que chacun de nous porte au plus profond de ses entrailles, du pouvoir effrayant de l'argent dans ces lieux où il permet d'acheter un semblant de liberté, celle de le dépenser comme bon nous semble. Et il rappelle fort justement que « aucun homme ne peut vivre sans un but qu'il s'efforce d'atteindre ; s'il n'a plus ni but ni espoir, sa détresse fait de lui un monstre ».

Un livre essentiel. Pour essayer de comprendre l'Homme. Et méditer sur notre époque.
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Peut-être au fond ‘Souvenirs de la maison des morts' est-il le roman russe le plus intéressant de la fin du XIXème. Un paradoxe pour ce texte froid et austère, souvent dédaigné au profit des grands romans. Mais il y a deux arguments à faire valoir.

Le premier est lié au caractère autobiographique, mais pas pour celui-ci en tant que telle. Des livres évoquant la misère des étudiants et de jeunes artistes, les dettes et les jours sans pain, on en trouve à foison et on reconnait bien vite quand ils ne sont pas le fruit de l'imagination. Mais même dans la pauvreté, l'homme instruit ne se mêle pas à l'ouvrier. le jeune homme pauvre reste dans son galetas humide, ressassant ses échecs et relisant ses précieux livres. Il fréquente d'autres jeunes déclassés, parfois quelques grisettes. Il ne manie pas les outils de ses mains trop blanches, ne partage pas le pain noir et la piquette avec l'ouvrier. Qu'on se rappelle Vallés, Vallés le communard, essayant de s'embaucher dans une imprimerie ; Tolstoï jouant les paysans…

Mais Dostoievski, lui, l'a vécu au bagne. Subi. Lui a vécu à leur côté, les a observé, a touché du doigt son inutilité quand il s'agissait d'aider de ses mains. Il décrit nombre d'entre eux – le petit juif d'une endurance insurpassable au sauna, le vieux-croyant banquier… Mais aussi leurs interactions, leurs habitudes, leurs rares distractions. Un témoignage unique sur la Russie des tsars, loin des palais de Saint-Pétersbourg et des babouchkas dans les isbas.

Mon second argument découle du premier, car il s'agit du constat implacable qu'il fait alors : même en prison, les barines et les gens du peuples ne vivent pas dans le même monde. Que les premiers puissent se dire leurs camarades n'engendre que l'incrédulité et le dédain chez les seconds. Un mur invisible et infranchissable les sépare, que Dostoïevski contemple avec tristesse et impuissance, quand Tolstoï se cogne dedans avec obstination.

C'est donc l'un des rares romans russes où se montre le point de vue du peuple. Et la profondeur de la fracture sociale, à bien des égards, permet de mieux comprendre l'incroyable déchainement de violence de la révolution russe.
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Souvenirs de la maison des morts me rappelle beaucoup Une journée d'Ivan Denissovitch, écrit par Alexandre Soljenitsyne en 1973. C'est étrange de constater que, malgré la centaine d'années et le changement de régime (de celui des tsars à celui des communistes de Staline) qui les séparent, ces deux oeuvres se rejoignent, l'une faisant écho à l'autre. Camp de travail forcé, goulag, à croire que le temps n'avait rien changé dans cet immense empire. Les deux auteurs ont été condamnés au bagne et cette expérience les a amené à raconter ce qu'ils y ont vécu.

Dostoïevski raconte la vie d'un prisonnier dans un camp de Sibérie. L'arrivée, d'abord, comment survivre à ces premières journées, se faire des amis ou, du moins, ne pas se faire d'ennemis, tant parmi les forçats que les gardiens. Surtout le travail et les façons de s'occuper les longs mois d'hiver. Aussi les petits gestes quotidiens (s'occuper du chien, se faire raser la tête, etc.). Sans oublier l'eau de vie que certains parviennent à faire entrer dans le camp. Puis les fêtes occasionnelles, Noël, Pâques, qui permettent de rompre avec la routine. Quelques uns profitent de séjours à l'hôpital.

Mais ce sont surtout les petites histoires qui touchent. Pourquoi un tel se trouve-t-il ici? Qu'a-t-il commis? Un meurtre? Certains, oui. D'autres ont peut-être imprimé de la propagande jugée dangereuse? Après tout, une bonne partie des prisonniers sont des lettrés, des intellectuels. Comme l'écrit l'auteur, à très peu d'endroits dans la Russie du 19e siècle on ne peut trouver un groupe de 250 personnes dont la moitié sait lire et écrire…

Le tout est écrit avec sobriété et réalisme. On ne s'apitoie pas sur le sort des prisonniers, on ne cherche ni à les excuser ni à les condamner. le lecteur assiste au châtiment de ces hommes, jour après jour après jour… Jusqu'à la libération, pour ceux qui s'y rendent.
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Citations et extraits (112) Voir plus Ajouter une citation
Un type de meurtrier que l’on rencontre assez fréquemment est le suivant : un homme vit tranquille et paisible ; son sort est dur, — il souffre. (C’est un paysan attaché à la glèbe, un serf domestique, un bourgeois ou un soldat.) Il sent tout à coup quelque chose se déchirer en lui : il n’y tient plus et plante son couteau dans la poitrine de son oppresseur ou de son ennemi. Alors sa conduite devient étrange, cet homme outrepasse toute mesure : il a tué son oppresseur, son ennemi : c’est un crime, mais qui s’explique ; il y avait là une cause ; plus tard il n’assassine plus ses ennemis seuls, mais n’importe qui, le premier venu ; il tue pour le plaisir de tuer, pour un mot déplaisant, pour un regard, pour faire un nombre pair ou tout simplement : « Gare ! ôtez-vous de mon chemin ! » Il agit comme un homme ivre, dans un délire. Une fois qu’il a franchi la ligne fatale, il est lui-même ébahi de ce que rien de sacré n’existe plus pour lui ; il bondit par-dessus toute légalité, toute puissance, et jouit de la liberté sans bornes, débordante, qu’il s’est créée, il jouit du tremblement de son cœur, de l’effroi qu’il ressent. Il sait du reste qu’un châtiment effroyable l’attend. Ses sensations sont peut-être celles d’un homme qui se penche du haut d’une tour sur l’abîme béant à ses pieds, et qui serait heureux de s’y jeter la tête la première, pour en finir plus vite. Et cela arrive avec les individus les plus paisibles, les plus ordinaires. Il y en a même qui posent dans cette extrémité : plus ils étaient hébétés, ahuris auparavant, plus il leur tarde de parader, d’inspirer de l’effroi. Ce désespéré jouit de l’horreur qu’il cause, il se complaît dans le dégoût qu’il excite. Il fait des folies par désespoir, et le plus souvent il attend une punition prochaine, il est impatient qu’on résolve son sort, parce qu’il lui semble trop lourd de porter à lui tout seul le fardeau de ce désespoir.
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Notre bagne se trouvait à l'extrémité de la forteresse, au bord du rempart. Quand, à travers les fentes de la palissade, nous cherchions à entrevoir le monde, nous apercevions seulement un pan de ciel étroit et un haut remblai de terre, envahi par les grandes herbes, que nuit et jour des sentinelles arpentaient.(...)

Représentez-vous une vaste cour de deux cent pas de long et de cent cinquante de large, en forme d'hexagone irrégulier .Une palissade de pieux éléments, profondément plantés dans le sol, fortement accolés les uns aux autres, maintenus en travers par des lattes, et taillés en pointe au sommet, l'enclôt de toutes parts et forme le mur d'enceinte de notre bagne. Sur un des côtés de la palissade, une solide porte cochère, toujours fermée, toujours gardée par une sentinelle, ne s'ouvre que par ordre pour laisser passer les forçats qui se rendent à leur travail.

Au-delà de cette porte, il y avait le monde lumineux de la liberté. (...) Notre monde à nous n'avait rien d'analogue avec celui-là : c'étaient des lois, des coutumes, des mœurs particulières, une maison mort-vivante, une vie à part et des hommes à part. Voilà le coin que je voudrais décrire.
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L’espérance d’un prisonnier diffère essentiellement de celle que nourrit l’homme libre. Celui-ci peut espérer une amélioration dans sa destinée, ou bien la réalisation d’une entreprise quelconque, mais en attendant il vit, il agit : la vie réelle l’entraîne dans son tourbillon. Rien de semblable pour le forçat. Il vit aussi, si l’on veut ; mais il n’est pas un condamné à un nombre quelconque d’années de travaux forcés qui admette son sort comme quelque chose de positif, de définitif, comme une partie de sa vie véritable. C’est instinctif, il sent qu’il n’est pas chez lui, il se croit pour ainsi dire en visite. Il envisage les vingt années de sa condamnation comme deux ans, tout au plus. Il est sûr qu’à cinquante ans, quand il aura subi sa peine, il sera aussi frais, aussi gaillard qu’à trente-cinq. « Nous avons encore du temps à vivre », pense-t-il, et il chasse opiniâtrement les pensées décourageantes et les doutes qui l’assaillent. Le condamné à perpétuité lui-même compte qu’un beau jour un ordre arrivera de Pétersbourg : « Transportez un tel aux mines à Nertchinsk, et fixez un terme à sa détention. » Ce serait fameux ! d’abord parce qu’il faut près de six mois pour aller à Nertchinsk et que la vie d’un convoi est cent fois préférable à celle de la maison de force ! Il finirait son temps à Nertchinsk, et alors... Plus d’un vieillard à cheveux gris raisonne de la sorte.
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Le bagne, les travaux forcés ne relèvent pas le criminel; ils le punissent tout bonnement et garantissent la société contre les attentats qu'il pourrait encore commettre. Le bagne, les travaux les plus pénibles ne développent dans le criminel que la haine, que la soif des plaisirs défendus, qu'une insouciance effroyable. D'autre part, le fameux système cellulaire n'atteint, j'en suis convaincu, qu'un but trompeur, apparent. Il suce la sève vitale de l'individu, l'énerve dans son âme, l'affaiblit, l'effraie, puis il vous présente comme un modèle de redressement, de repentir, une momie moralement desséchée et à demi folle.
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Notre médecin s’arrêtait ordinairement devant le lit de chaque malade, l’interrogeait sérieusement et attentivement, puis prescrivait les remèdes, les potions. Il remarquait quelquefois que le prétendu malade ne l’était pas du tout ; ce détenu était venu se reposer des travaux forcés et dormir sur un matelas dans une chambre chauffée, préférable à des planches nues dans un corps de garde humide, où sont entassés et parqués une masse de prévenus pâles et abattus. […] Aussi notre médecin inscrivait le faux malade sur son carnet comme affecté d’une « febris catharalis » et lui permettait quelquefois de rester une semaine à l’hôpital. Tout le monde se moquait de cette « febris catharalis », car on savait bien que c’était la formule admise par une conspiration tacite entre le docteur et le malade pour indiquer une maladie feinte, les « coliques de rechange », comme les appelaient les détenus, qui traduisaient ainsi « febris catharalis »[…]
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« Les frères Karamazov » , de Dostoïevski, c'est à lire en poche chez Actes Sud Babel.
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