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Critique de Titine75


« Je m'appelle Paula Spencer. J'ai 39 ans. La semaine dernière, c'était mon anniversaire. Je suis veuve. J'ai été mariée pendant dix huit ans. Mon nom de jeune fille est O'Leary. Mon mari est mort l'année dernière, il y a presque un an jour pour jour. Il a été abattu par les Guards. Il m'avait quitté un an avant cette histoire. Je l'ai mis à la porte. Son nom était Charles Spencer; tout le monde le surnommait Charlo. Sauf sa mère et son père. Et le prêtre chargé de ses obsèques. J'ai quatre enfants (Ils auraient pu être cinq; j'ai perdu un bébé.) »

Au début du roman de Roddy Doyle, Paula Spencer reçoit la visite d'un guard chargé de lui annoncer le décès de son mari. Cette nouvelle plonge Paula dans ses souvenirs. Toute sa vie défile : son enfance plutôt heureuse avec ses nombreux frères et soeurs ; la dureté et la vulgarité du collège où elle devient une coriace ; la rencontre avec Charlo, l'homme de sa vie. Elle est fascinée par lui, tout le monde l'admire. Il est beau, dur à cuire mais il sait être tendre avec Paula. Ils se marient, Paula est aux anges. Tout semble aller pour le mieux jusqu'à ce que Paula ordonne à Charlo d'aller se faire son thé lui-même. Une gifle part, envoyant Paula au sol. Ce sera la première d'une longue liste.

« La femme qui se cognait dans les portes » est un roman magnifique, un bijou. Roddy Doyle a réalisé un véritable tour de force pour deux raisons. La première est de nous faire oublier que l'auteur du livre est un homme. L'histoire de Paula est racontée à la première personne du singulier et c'est totalement une voix de femme que l'on entend. Ses préoccupations, ses réflexions, ses sentiments sont ceux d'une femme.Elle raconte son histoire d'un seul trait comme pour un témoignage. Elle passe d'un sujet à un autre, d'un souvenir à un autre. La voix de Paula Spencer est très forte, très belle et elle nous entraîne complètement. On s'attache à ce personnage et on ne la lâche plus jusqu'à la dernière ligne.

Le second tour de force c'est de parler d'un tel sujet sans aucun pathos. Paula est une femme battue par son mari. La violence s'abat sur elle de manière imprévue, elle n'a pas vu venir les coups. Comme nous d'ailleurs, car malgré le titre qui laissait présager du sujet, la première gifle arrive tard dans le livre, elle est une déflagration aussi bien pour le lecteur que pour Paula. Mais elle ne quitte pas Charlo, elle l'aime passionnément. Et puis les enfants arrivent, Paula ne travaille pas. Elle encaisse, se taît, couvre son mari en expliquant aux médecins qu'elle se cogne dans les portes. Pour supporter la douleur, les os cassés, les cheveux arrachés, Paula plonge dans l'alcool. « La femme qui se cognait dans les portes » raconte la déchéance de Paula, sa descente en enfer. Et pourtant pas de mélodrame, pas de tire-larmes, Paula a beaucoup d'humour, beaucoup d'auto-dérision. Elle n'épargne ni son entourage, ni elle-même et son franc-parler est d'une grande fraîcheur.

J'avais découvert Roddy Doyle avec le premier volet de la trilogie de Barrytown qui m'avait enchanté par son énergie et son humour. Là je reste scotchée par « La femme qui se cognait dans les portes ». le personnage de Paula Spencer est extrêmement touchant, c'est sans condescendance que Roddy Doyle fait le portrait de cette femme battue. La voix de Paula nous happe dès les premières pages et elle nous tient jusqu'au bout. Il est difficile de laisser un tel personnage mais heureusement Roddy Doyle a renoué avec Paula, dix ans après « La femme qui se cognait dans les portes. »
Lien : http://plaisirsacultiver.unb..
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