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EAN : 9782072740480
496 pages
Gallimard (05/11/2020)
4.38/5   13 notes
Résumé :
C'est au chevet d'un Marcel Proust mourant que s'affirme la vocation littéraire de Paul Morand ; et c'est dans le vacarme d'une modernité incarnée par Jean Cocteau qu'elle va s'épanouir. Ce rejeton de la bourgeoisie parisienne, éclairée, artiste, aura connu les astres de la bohème comme de l'élite républicaine ; deux mondes étanches qui vont former sa personnalité et dessiner sa double carrière de diplomate et d'écrivain.
D'emblée, dans ses nouvelles et ses ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Excellente biographie qui éclaire sans rien occulter l'homme de lettres Paul Morand, son milieu et ses négligences morales qui ne l'ont pas porté du bon côté de l'histoire.

L'auteure offre un panorama fouillé de la vie d'un homme, d'un milieu social et d'une époque.
Les artistes côtoyés, les hommes politiques fréquentés, la correspondance avec sa mère, son épouse très très germanophile, ses amis, les voyages, les relations extra-conjugales, l'obsession de la rentabilité pécuniaire, l'ambition diplomatique comme marche-pied plus que par devoir, l'orgueil littéraire visant la reconnaissance ultime : l'Académie française, le recyclage des écrits au fur et à mesure des années, tout est évoqué, expliqué, détaillé, analysé par l'auteure qui a mené un travail fouillé remarquable.

Cet ouvrage, à travers Paul Morand, ouvre les yeux sur cet embrouillamini de l'après-guerre autour des écrivains collabos, non-collabos : où commence, où s'arrête la collaboration?

En ce qui concerne Paul Morand, on se trouve dans une zone grise, très grise et « le Journal inutile » (ainsi que la correspondance conséquente avec Jacques Chardonne) montre que ce personnage n'a rien renié de ses idées nauséabondes (antisémitisme,…).

Ce qui choque, c'est que le côté « anguille » du personnage et son entregent lui permettront d'atteindre ce but de la reconnaissance même si l'étoile n'a plus jamais brillé comme il l'aurait souhaité et est en train de s'éteindre suite aux révélations précisément de la correspondance avec Chardonne et du Journal intime parus épisodiquement depuis l'an 2000 (date fixée par Paul Morand lui-même) dont un pan important des années 40-50 est à paraître et promet probablement d'être sulfureux.

Ainsi à travers ce portrait de Paul Morand surgit celui d'une certaine bourgeoisie enfermée dans ses certitudes, hermétique à toutes pensées divergentes de la sienne et qui conduit à des comportements et des écrits qui figent cette caste dans un temps dont elle ne peut s'extraire.

En dehors du fait que se pose la question de savoir s'il faut séparer l'oeuvre de son auteur, au fait, que peut nous apporter encore Paul Morand?











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« La lecture de ces milliers de feuilles volantes et manuscrites, qui m'ont parfois enchantée, parfois soulevé le coeur, mais toujours passionnée, restera le souvenir le plus marquant de mon entreprise. » Une résultante fatale d'une plongée dans le Journal intime 1940-1950 de Paul Morand, encore sous embargo depuis quarante ans par la Bibliothèque de France, et dont Pauline Dreyfus s'est abreuvée pour accoucher d'une biographie complète d'un écrivain réprouvé en regard de ses choix douteux politiques durant la Seconde Guerre mondiale. En ce sens, « L'homme a fait beaucoup de tort à l'écrivain. »
Épistolier prodigue, sa correspondance fait aussi l'objet d'un examen minutieux par l'auteure, rendant ainsi au lecteur toutes les vicissitudes de son sujet dans le détail. Grandeur et misère d'un fils unique issu de la bourgeoisie, ayant accédé à de hauts postes de la fonction publique, sinécures lui permettant d'écrire, marié à une ancienne princesse roumaine fortunée à qui il sera ouvertement infidèle, jouisseur de plaisirs fugaces, grand voyageur snobinard et par-dessus tout, arriviste acharné, tel est le Paul Morand que l'on découvre au fil des pages.
Écrivain de l'entre-deux-guerres, Morand est le témoin idéal de la première moitié du XXe siècle, et c'est ce qui m'a d'abord attirée vers cet ouvrage, rédigé par une auteure dont j'avais déjà apprécié l'écriture dans le Déjeuner des barricades. Et si la somme de travail accompli par Pauline Dreyfus ne m'a pas convaincue de lire Paul Morand, en revanche j'ai pris note d'un paquet de titres primés issus de cette époque. Un bon creuset pour combler mes lacunes littéraires.
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Paul Morand a été un personnage on ne peut plus romanesque et la biographie définitive que lui consacre Pauline Dreyfus est un modèle du genre, aussi passionnante pour comprendre l'écrivain que pour décrypter l'homme qui traversa 3/4 du 20ème siècle et dont les erreurs sont ce que la postérité a retenu de lui, bien davantage que les oeuvres pour une grande part oubliées. Sa biographe, qui a eu accès à de nombreuses sources inédites, loue son talent d'auteur à de nombreuses reprises (mais pas systématiquement), évoque longuement ses voyages autour du monde, effectués à grande vitesse, comme l'homme pressé qu'il était, son amour des mondanités, sa soif de reconnaissance et d'argent, son aura de séducteur patenté et cynique, etc. Et aussi ses amitiés qui sont allés de Proust et Cocteau à Nimier en passant par un certain Laval (aïe) dont il fut le collaborateur (ouille). Pauline Dreyfus n'esquive pas les sujets qui fâchent, et le choix de Vichy plutôt que Londres (où il était en poste en 1940) constitue évidemment le grand fourvoiement de son existence, qu'il a toujours assumé et revendiqué puisque ses valeurs l'y conduisaient naturellement. Ce bourgeois, parfois bohème, qui aimait les voitures rapides, les honneurs et les femmes, a eu le bonheur de n'être jamais "épuré", s'étant réfugié en Suisse à la fin de la guerre. Son antisémitisme, il faut bien en parler, ne l'a jamais quitté et son homophobie est aussi à mettre à son "actif." Tous les aspects de cet écrivain/diplomate sont détaillés par cette biographie remarquable qui fait la part des choses de manière pertinente, sans stigmatiser mais sans omettre les côtés les plus détestables de son sujet. le personnage de Morand n'en ressort pas grandi, l'écrivain davantage, mais le livre est aussi à lire pour sa description précise et captivante de plusieurs époques, sur les plans littéraire et politique, avec des portraits saisissants de Proust, Cocteau, Chardonne, Laval, Nimier, Blondin, Chanel, etc, sans oublier l'épouse de Morand, une épouvantable germanophile et antisémite qui mériterait à elle seule une biographie. Quoique, dans son cas, il y aurait sans doute peu de choses positives à en dire.
Lien : https://cin-phile-m-----tait..
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C'est la troisième des biographies existantes de Paul Morand que je lis et c'est à mon avis la meilleure. Pauline Dreyfus admire l'écrivain mais ne lui passe rien. Ses choix désastreux en juillet 1940, son orgueil démesuré après 1945 qui le conduit à ne jamais émettre le moindre regret, la moindre pensée pour les victimes de la Shoah et de la folie nazie.

Morand est un très grand écrivain, un extraordinaire nouvelliste, un styliste exceptionnel. « Venises » est pour moi l'un des plus grands livres du XXe siècle. C'était une personnalité diaprée, flamboyante et minable, esthète de la Belle Époque. prince des Années Folles, apôtre du cosmopolitisme dans l'entre-deux-guerres et servile envers l'Etat francais et envers le pathétique Pierre Laval qui « souhaite la victoire de l'Allemagne » le 22 juin 1942. Il est impossible d'avoir une vision monolithique de Morand, on ne peut pas ne pas admirer cette intelligence si vive et cette audace littéraire qui font de « Hécate et ses chiens » l'un des livres les plus troublants de l'après-guerre.

Antisémite et homophobe, les deux personnalités qui l'ont le plus marqué sont Cocteau et Proust, il adoube Modiano, se lie avec Maurice Rheims et piapiate avec Marcel Schneider à qui il léguera sa fastueuse garde-robe... Arriviste, snob et mondain, coeur sec, hypocrite et duplice, mauvais diplomate, il décrit le siècle en train de se déployer avec une intense acuité en inventant une langue qui crépite et qui swingue. Asservi à sa folie des grandeurs bourgeoises et des positions sociales, marabouté par une princesse Soutzo intelligente mais imprégnée de l'antisémitisme rance des têtes couronnées de la mitteleuropa, il plonge peu à peu dans le désastre de la Collaboration et passe l'après-guerre dans un repli littéraire qui se terminera à l'Académie Française et livrera quelques chefs-d'oeuvres.

Je ne cesserai jamais de lire et relire avec passion « Fermé la Nuit », « Parfaite de Saligny », « Milady » ou « Londres » en imaginant la place qui serait la sienne dans notre Panthéon littéraire s'il était resté à Londres auprès du Général de Gaulle en juillet 1940.
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Excellente biographie de Paul Morand que réalise ici Pauline Dreyfus. Une écriture vive, aérée et qui ne noie pas le lecteur sous des tonnes de dates, de lieux ou de noms comme le font malheureusement souvent les biographies .
J'ai lu ce récit comme un roman et ne connaissant finalement pas grand-chose de Paul Morand découvert un homme dont la vie ne fut pas un long fleuve tranquille.
Lecture qui m'a donné l'envie également de me plonger dans l'oeuvre de ce grand de la littérature française.



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critiques presse (1)
Lexpress
10 novembre 2020
Si la publication du premier tome du Journal de guerre de l'écrivain ne va pas arranger sa mauvaise réputation, l'éblouissante biographie de Pauline Dreyfus réhabilite à juste titre son oeuvre. Sans excuser l'homme pour autant.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Prologue

"Qu'on entre dans la vie d'autrui muni de ses propres bagages, que ce cheminement tortueux s'accompagne de réminiscences et d'échos de toutes sortes, c'est l'évidence même. On ne raconte pas une existence sans y projeter l'ombre de la sienne. Aussi paradoxal qu'il paraisse, il arrive qu'une biographie soit le livre le plus personnel de son auteur. Alors, s'agit-il ici de gratter une plaie ou de solder des comptes ? Un peu des deux sans doute."

NdL : Pauline Dreyfus est la petite fille d'Alfred Fabre-Luce lui-même ami de Paul Morand. Dans cette petite société d'anciens collaborateurs, son grand-père fut condamné à dix ans d'indignité nationale quand Morand échappa à tout procès.
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Hélène Morand a quatre-vingt-dix ans et, bien que (dit-on) la méchanceté conserve, elle n’est plus que l’ombre d’elle-même (...). Son mari, admirable de dévouement, a déniché une jeune élève du conservatoire qui a accepté de venir deux fois par semaine lui faire la lecture. La jeune femme de vingt ans, Nathalie Baye, se souvient d’ Hélène, « minuscule, petite poupée de porcelaine, personnage de cire. Avec cela, remarquablement intelligente, très drôle, astucieuse ». Pas le moins du monde impressionnée car le nom de Paul Morand ne lui dit pas grand-chose, la jeune comédienne va passer deux années avenue Charles-Floquet. Moins bien payée que la femme de ménage, et confrontée à la fraîcheur initiale d’Hélène qui, malgré sa cécité, devine un mari frétillant à la vue d’une jeune fille, la lectrice finira par apprivoiser sa cliente, au point de parfois lâcher la lecture imposée par Morand pour bavarder de tout et de rien.
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La plus grande partie de son temps est désormais consacrée à ces notes prises au jour le jour. Dans ce Journal inutile, les vieilles rancœurs demeurent. Il n’a jamais cessé de vomir la Résistance, « cette prodigieuse comédie ». Les Juifs ? Des boucs émissaires, comme toujours. Avant-guerre, ils étaient rendus responsables de la crise économique ; après- guerre, ils paient pour l’exil et la réprobation endurés par l’écrivain mis à l’index. Le mot « juif », sous sa plume, finit par ne plus avoir grand sens ; il se confond d’ailleurs souvent avec le mot « résistant », qui chez Morand est loin d’être un compliment. Sans souci de cohérence, ligoté par ses phobies, il reproche à Montaigne son « vieux sang juif et communiste » ; soutient que Berl a participé au triomphe mondial de sa race (ce qui au passage témoigne d’une ingratitude certaine envers celui qui a tant fait pour qu’il puisse achever son exil suisse) ; à l’Académie, il déteste Joseph Kessel, Juif russe, donc « doublement étranger ». On ne contredira pas Henri Raczymow, selon qui Morand est cet « antisémite littéral » que Proust avait bien démasqué en lui offrant les six tomes de L’Histoire de l’affaire Dreyfus pour qu’il se garde bien de le devenir.

Autre cause d’urticaire : « les PD ». C’est tardivement que Morand s’en est pris aux homosexuels, que dans sa jeunesse il fréquentait avec bonheur (Étienne de Beaumont, Lucien Daudet, Cocteau, Proust, Henri Bardac, Christian Bérard). Sa tolérance était telle qu’il avait même la plus grande indulgence pour les hommes mariés, comme René de Chambrun ou Jacques de Lacretelle, dont nul n’ignorait les liaisons avec d’autres hommes. Cette stigmatisation récurrente apparaît dans la correspondance avec Chardonne, au cours des années cinquante. Aurait-il été révulsé par les préférences sexuelles de l’un de ses proches ? Toujours est-il que Morand se découvre à cette époque des préjugés inédits. C’est moins la différence qui le heurte que le lobby, qu’il appelle « la franc-maçonnerie des pédés », notamment dans le milieu littéraire ; encore une fois, il faut trouver un bouc émissaire à son laborieux retour sur le devant de la scène. Il existe aux archives de l’Académie française un projet d’article rédigé par Morand en 1926 (et à notre connaissance jamais publié) qui s’intitule « Les pédérastes ». Morand y évoque une « nouvelle internationale comme tant d’autres libérée par la guerre », qui lui fait regretter « les bons pédérastes inoffensifs et convaincus de notre enfance, bagués de pierres mystiques, poudrés et cravatés par Charvet et poursuivis par les gamins criant à la chienlit ». Symboles d’une certaine décadence des mœurs, « ils viennent se jeter sur le corps moribond de la société en criant Maman ! Maman ! ». Ce que Morand leur reproche au fond, c’est d’être devenus visibles.
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On évoque les femmes et les plaisirs de la vie. Nimier cause moteurs, chevaux, vitesse; avec Blondin hélas, impossible de causer voiture: il n’a pas le permis. « Vous avez essayé de tenir un volant et un verre en même temps ? » s’excusera-t-il au soir de sa vie.
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Il le savait : ce qui reste d'un écrivain, c'est une oeuvre, avec ses pépites et ses cailloux. À la fin d'une vie qu'il considérait dans le rétroviseur avec un regard plus surchargé de repentirs qu'un jeu d'épreuves de Proust, il s'est souvent reproché sa paresse, sa légèreté, sa désinvolture.
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Videos de Pauline Dreyfus (14) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Pauline Dreyfus
Pauline Dreyfus vous présente son ouvrage "Le Président se tait". Parution le 17 août aux éditions Grasset. Rentrée littéraire automne 2022.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2639268/pauline-dreyfus-le-president-se-tait
Note de musique : © mollat Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
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