Penser à ces souvenirs me rendit morose. Je savais que cette partie de ma vie, heureuse et insouciante était à reléguer dans les tréfonds de ma mémoire, à enfermer à double tour dans un coffre. Mon unique ennemi était le temps. Sans crier gare, inlassablement, il attaquerait mes rêves et mes souvenirs jusqu’à les corrompre et les diluer.
La lecture n’était pas mon activité préférée. Je préférais de loin ma console sur laquelle je me réfugiais dès que le temps et mes parents me le permettaient. Mais pour ces vacances, c’était râpé. J’allais devoir trouver une autre occupation pour passer mes journées qui s’annonçaient « passionnantes »…
Papi Henri grogna lorsque les informations débutèrent à vingt heures pile : il y avait des gestes qui restaient immuables. Je n’aimais pas les infos, on y rapportait que de mauvaises nouvelles ; toujours les mêmes cinglés qui pensaient qu’on pouvait imposer ses idées dès lors qu’on était en possession d’une arme à feu. Quant à la politique, les discours de tous ces types étaient incompréhensibles.
Les adultes parlaient de destin ou de coup du sort. Pour se rassurer, ma mère et ma grand-mère disaient que Dieu l’avait rappelé près de lui. Eh bien, il aurait pu lui demander son avis ! Je ne suis pas convaincu qu’il fût d’accord avec l’idée de quitter la vie si tôt.
Ce n’est pas marrant d’être en vacances chez ses grands-parents ; perdu au milieu de nulle part, sans aucun voisin à des kilomètres aux alentours. Ça devient même carrément glauque et mortel quand il n’y a ni internet ni console de jeux.