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Citations sur Les Regrets (précédé de) Les antiquités de Rome (et suivi d.. (49)

Ô marâtre nature (et marâtre es-tu bien,
De ne m’avoir plus sage ou plus heureux fait naître),
Pourquoi ne m’as-tu fait de moi-même le maître,
Pour suivre ma raison et vivre du tout mien?

Je vois les deux chemins, et ce mal, et de bien :
Je sais que la vertu m’appelle à la main dextre,
Et toutefois il faut que je tourne à senestre,
Pour suivre un traître espoir, qui m’a fait du tout sien.

Et quel profit en ai-je ? Ô belle récompense !
Je me suis consumé d’une vaine dépense,
Et n’ai fait autre acquêt que de malet d’ennui.

L’étranger recueillit le fruit de mon service,
Je travaille mon corps d’un indigne exercice,
Et porte sur mon front la vergogne d’autrui.
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Si les larmes servaient de remède au malheur,
Et le pleurer pouvait la tristesse arrêter,
On devrait, Seigneur mien, les larmes acheter,
Et ne se trouverait rien si cher que le pleur.

Mais les pleurs en effet sont de nulle valeur :
Car soit qu’on ne se veuille en pleurant tourmenter,
Ou soit que nuit et jour on veuille lamenter,
On ne peut divertir le cours de la douleur.

Le cœur fait au cerveau cette humeur exhaler,
Et le cerveau la fait par les yeux dévaler,
Mais le mal par les yeux ne s’alambique pas.

De quoi donques nous sert ce fâcheux larmoyer ?
De jeter, comme on dit, l’huile sur le foyer,
Et perdre sans profit le repos et repas.

-Sonnet 52-
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Ceux qui sont amoureux, leurs amours chanteront,
Ceux qui aiment l’honneur, chanteront de la gloire,
Ceux qui sont près du Roy, publieront sa victoire,
Ceux qui sont courtisans, leurs faveurs vanteront ;

Ceux qui aiment les arts, les sciences diront,
Ceux qui sont vertueux, pour tels se feront croire,
Ceux qui aiment le vin, deviseront de boire,
Ceux qui sont de loisir, de fables escriront,

Ceux qui sont mesdisans, se plairont à mesdire,
Ceux qui sont moins fascheux, diront des mots pour rire,
Ceux qui sont plus vaillans, vanteront leur valeur ;

Ceux qui se plaisent trop, chanteront leur louange,
Ceux qui veulent flater, feront d’un diable un ange :
Moy, qui suis malheureux, je plaindray mon malheur.

-Sonnet 5-
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Veux-tu savoir, Duthier, quelle chose c’est Rome ?
Rome est de tout le monde un publique échafaud ;
Une scène, un théâtre, auquel rien ne défaut
De ce qui peut tomber ès actions de l’homme.

Ici se voit le jeu de la fortune, et comme
Sa main nous fait tourner ores bas, ores haut :
Ici chacun se montre, et ne peut, tant soit caut,
Faire que tel qu’il est, le peuple ne le nomme.

Ici du faux et vrai la messagère court,
Ici les courtisans font l’amour et la cour,
Ici l’ambition et la finesse abonde :

Ici la liberté fait l’humble audacieux,
Ici l’oisiveté rend le bon vicieux,
Ici le vil faquin discourt des faits du monde.

-Sonnet 82-
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Maintenant je pardonne à la douce fureur
Qui m'a fait consumer le meilleur de mon âge,
Sans tirer autre fruit de mon ingrat ouvrage
Que le vain passe-temps d'une si longue erreur.

Maintenant je pardonne à ce plaisant labeur,
Puisque seul il endort le souci qui m'outrage,
Et puisque seul il fait qu'au milieu de l'orage,
Ainsi qu'auparavant, je ne tremble de peur.

Si les vers ont été l'abus de ma jeunesse,
Les vers seront aussi l'appui de ma vieillesse,
S'ils furent ma folie, ils seront ma raison,

S'ils furent ma blessure, ils seront mon Achille,
S'ils furent mon venin, le scorpion utile
Qui sera de mon mal la seule guérison.
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« Vu le soin ménager, dont travaillé je suis,
Vu l’importun souci, qui sans fin me tourmente,
Et vu tant de regrets, desquels je me lamente,
Tu t’esbahis souvent comment chanter je puis.

Je ne chante (Magny), je pleure mes ennuis :
Ou, pour le dire mieux, en pleurant je les chante,
Si bien qu’en les chantant, souvent je les enchante :
Voila pourquoi (Magny) je chante jours et nuits.

Ainsi chante l’ouvrier en faisant son ouvrage,
Ainsi le laboureur faisant son labourage,
Ainsi le pelerin regrettant sa maison,

Ainsi l’aventurier en songeant à sa dame,
Ainsi le marinier en tirant à la rame,
Ainsi le prisonnier maudissant sa prison.

-Sonnet 12-
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Je n’écris point d’amour, n’étant point amoureux,
Je n’écris de beauté, n’ayant belle maîtresse,
Je n’écris de douceur, n’éprouvant que rudesse,
Je n’écris de plaisir, me trouvant douloureux :

Je n’écris de bonheur, me trouvant malheureux
Je n’écris de faveur, ne voyant ma princesse,
Je n’écris de trésors, n’ayant point de richesse,
Je n’écris de santé, me sentant langoureux :

Je n’écris de la cour, étant loin de mon prince,
Je n’écris de la France, en étrange province,
Je n’écris de l’honneur, n’en voyant point ici :

Je n’écris d’amitié, ne trouvant que feintise,
Je n’écris de vertu, n’en trouvant point aussi,
Je n’écris de savoir, entre les gens d’Église.

-Sonnet 79-
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Sceve, je me trouvay comme le filz d'Anchise
Entrant. dans l'Elysee, & sortant des enfers,
Quand apres tant de monts de neige tous couvers
Je viz ce beau Lyon, Lyon que tant je prise.

Son estroicte longueur, que la Sone divise,
Nourrit mil artisans, & peuples tous divers :
Et n'en desplaise à Londres, à Venise, & Anvers,
Car Lyon n'est pas moindre en fait de marchandise.

Je m'estonnay d'y voir passer tant de courriers,
D'y voir tant de banquiers, d'imprimeurs, d'armuriers,
Plus dru que lon ne voit les fleurs par les prairies.

Mais je m'estonnay plus de la force des pontz,
Dessus lesquelz on passe, allant dela les montz,
Tant de belles maisons, & tant de metairies.
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[...]

J’ai voulu mille fois de ce lieu m’étranger,
Mais je sens mes cheveux en feuilles se changer,
Des bras en longs rameaux, et mes pieds en racine.

Bref, je ne suis plus rien qu’un vieux tronc animé,
Qui se plaint de se voir à ce bord transformé,
Comme le myrte anglais au rivage d’Alcine.

-Sonnet 87-
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Malheureux l’an, le mois, le jour, l’heure et le point,
Et malheureuse soit la flatteuse espérance,
Quand pour venir ici j’abandonnai la France :
La France, et mon Anjou, dont le désir me point.
Vraiment d’un bon oiseau guidé je ne fus point,
Et mon cœur me donnait assez signifiance
Que le ciel était plein de mauvaise influence,
Et que Mars était lors à Saturne conjoint.

Cent fois le bon avis lors m’en voulut distraire,
Mais toujours le destin me tirait au contraire :
Et si mon désir n’eût aveuglé ma raison.

N’était-ce pas assez pour rompre mon voyage,
Quand sur le seuil de l’huis, d’un sinistre présage,
Je me blessai le pied sortant de ma maison ?

-Sonnet 25-
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