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Critique de Arakasi


En littérature, il existe deux types de vengeance. D'abord la vengeance juste, celle à la Paul Féval, où le bon massacre les méchants et les éjecte du terrain comme autant de quilles à la grande satisfaction du lecteur. Puis il y a l'autre type de vengeance, la crade, la sauvage, celle qui fonce aveuglement devant elle à la façon d'un taureau enragé, frappe à gauche, à droite, en causant tellement de dégâts collatéraux que le lecteur vaguement horrifié ne sait plus à quels saints se vouer : « Tu as foutu ma vie en l'air ? Eh bien, je vais trucider ta femme, tes parents, tes enfants, ton chien et même ton foutu hamster ! Crois-moi, tu vas bien le sentir passer, mon gars… » Comme je suis un poil perverse, j'ai toujours préféré la seconde, nettement plus intéressante et réaliste à mon goût. Et de tous les romans de vengeance que j'ai pu lire (et j'en ai lu un bon paquet, ma bibliothèque peut en témoigner), aucun ne m'a plus marqué, plus révulsé, plus fasciné que « le Comte Monte Cristo » de mon gros romancier préféré, Alexandre Dumas.

Pour avoir été maint fois portée à l'écran, presque autant que celle de mes chers Mousquetaires, l'intrigue est archi-connue, mais prenons tout de même la peine de la résumer. L'histoire commence comme tout bon roman d'aventures avec un jeune premier au coeur loyal et l'âme proprette : le brave Edmond Dantès, brillant marin marseillais amoureux d'une pauvre pêcheuse catalane, Mercedes. Ils sont beaux, ils sont jeunes, ils sont fous l'un de l'autre, tout semble donc leur sourire. Mais dans l'ombre des ennemis inconnus lorgnent jalousement la destinée du jeune marin et, le jour même de ses noces, Dantès est accusé d'être un agent bonapartiste et emprisonné au Château d'If, prison perdue au milieu des mers.

Il y restera douze ans. Douze ans pendant lesquels la candeur et la générosité du jeune Edmond vont lentement s'éroder pour laisser place à une haine féroce contre les infâmes qui l'ont condamné à la lente agonie de l'emprisonnement. Heureusement, il trouvera dans la personne de son voisin de cellule, l'abbé Faria, un ami et un professeur qui lui apprendra les sciences, la philosophie, l'Histoire, mais surtout l'emplacement secret d'un fabuleux trésor dissimulé sur l'île rocailleuse de Monte Cristo. Quand Edmond parvient enfin à s'échapper, il n'est plus le même homme. Il est plus instruit, plus accompli et considérablement plus riche, mais la rage et l'amertume ont dévoré son coeur, en chassant presque tout sentiment chaleureux. Il ne vivra désormais plus que pour sa vengeance et pour précipiter un à un dans l'abîme les hommes qui ont comploté sa ruine : le procureur Villefort, le catalan Fernand amoureux lui aussi de la belle Mercedes et le comptable Danglard. Edmond Dantès est mort, vive le Comte de Monte Cristo !

J'avais été littéralement soufflée par ma première lecture du « Comte de Monte Cristo », balayée sauvagement d'un sentiment à l'autre : compassion, dégout, fascination, effroi, admiration… Des véritables montagnes russes émotionnelles ! En m'y replongeant des années plus tard, j'y découvre bien quelques faiblesses – quelques longueurs et divagations, deux ou trois deus ex machina, une fin légèrement en queue de poisson – mais le charme agit toujours, puissant et vénéneux. Lire « le Comte de Monte Cristo » c'est un peu comme assister à un gigantesque accident de train : on voit la locomotive accélérer, accélérer, accélérer, on sent la catastrophe arriver à des kilomètres, mais on n'arrive pas à détourner les yeux, fascinés que nous sommes par le mécanisme diabolique qui se met en place sous nos yeux. On ne niera pas ensuite qu'il y a une certaine beauté dans les cataclysmes… Certaines de ces pages comptent parmi celles qui ont le plus marqué mon existence de lectrice. Peut-être le roman le plus noir écrit d'Alexandre Dumas et assurément l'un des plus brillants : un vrai mythe fondateur, absolument indispensable si il manque à votre palmarès de fan !
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