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EAN : 9782070220984
145 pages
Gallimard (30/11/-1)
2.94/5   8 notes
Résumé :
Pièce de théâtre.
Un couple de quinquagénaires bien tranquille a accompli un crime imprévisible dans « une existence jusque-là si conforme à la morale courante », ils ont assassiné une vieille cousine sourde et muette, l’ont dépecée et, d’un viaduc de Seine et Oise, ont jeté les différents morceaux de son corps dans les tenders des trains qui passaient. Ils ont la police à leurs trousses et attendent leur arrestation.

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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Les Viaducs de la Seine-et-Oise a été publié en 1960. Duras s'était inspirée, pour l'écrire, de deux crimes rapportés dans les faits divers des journaux, que l'auteure scrutait alors de façon très régulière. le meurtre qui a donné sa forme au crime perpétré par les protagonistes de la pièce fut commis dans la vie par une femme qui, après avoir tué son mari, l'avait découpé en plusieurs morceaux, qu'elle lança l'un après l'autre depuis un viaduc dans des trains, afin que le corps éparpillé ne soit pas identifiable. Arrêtée, elle dit qu'elle n'en pouvait plus de la tyrannie de son mari. Duras a repris le lieu du crime, et la méthode de brouillage des pistes. En revanche, on trouvera ici un couple, qui fait référence à un autre meurtre (un homme et sa maîtresse avaient assassiné l'épouse de l'homme), dont le procès avait été commenté par Duras et à propos duquel elle avait écrit : "Je crois qu'il faut tuer (puisqu'on tue) les criminels De Choisy, mais qu'une fois pour toutes on renonce à interpréter ces ténèbres d'où ils sortent puisqu'on ne peut pas les connaître à partir du jour." C'est dire que ce qui intéresse Duras à l'époque, en composant une pièce à partir de faits divers sordides, ce n'est pas le motif d'un crime, mais le mystère qui lui est attaché.


Donc, ici, nous avons un couple apparemment très ordinaire d'une soixantaine d'années, Claire et Marcel Ragond, vivant à Épinay-sur-Orge. Claire a poussé Marcel à tuer Marie-Thérèse Ragond, leur cousine handicapée qui vivait avec eux ; le corps a été démembré et jeté dans des trains en partance pour toute la France. le premier acte les voit attendre, parler pour ne rien dire, parler du crime, vaguement, qui n'a pas encore été découvert. le meurtre ne semble avoir été motivé par rien, si ce n'est que Marcel est probablement passé à l'acte par amour pour sa femme (à supposer que ce soit là un motif), et l'amour qu'ils se portent tous deux est d'ailleurs mis en avant. Claire Ragond se dit tout le temps très intelligente, elle est frustrée de sa vie dans un coin perdu où personne ne les connaît. Il est pas mal question de reconnaissance, ou plutôt du fait que tous deux passent inaperçus, même après avoir commis ce meurtre, puisqu'il n'a pas été résolu. D'où le second acte, qui les voit se rendre dans un café ouvert tard dans la nuit, avec l'intention de, disons, se faire connaître. Peu à peu, dans des termes abscons et dans une mise en scène curieuse, ils révéleront leur crime en public.


Plus que le sujet hyper morbide - et pourtant, ce genre de fait divers, c'est pas trop ma tase de thé -, c'est le style qui m'a rendu la pièce pénible, ô combien pénible. Il a fallu que je porte toute mon attention à la notice pour que je me force à m'intéresser à la pièce, qui m'avait tout d'abord paru d'une platitude et d'un artifice fatigants. Et résultat, si je reconnais que les arguments de la notice aident à une compréhension, disons, un tantinet approfondie, le sentiment que j'éprouve reste le même : je trouve la pièce assez vaine. Alors oui, on comprend qu'il y a frustration chez Claire Ragond, frustration d'une vie qui ne s'est pas épanouie contrairement à celle de Marie-Thérèse, la cousine, qui, elle ,vivait sa vie sans se poser de questions - du moins du point de vue de Claire, car après tout, on n'entendra jamais la voix de Marie-Thérèse. Duras n'essaie pas d'expliquer par là le meurtre, elle cherche plutôt à montrer que cette frustration mène à une sorte de mystère, de volonté nébuleuse de créer quelque chose qui sorte complètement de l'ordinaire. Je trouve que ça ne marche pas, mais alors pas du tout.


Le coup de l'empathie pour les meurtriers comme pour la victime, comme il est écrit dans la notice : zéro. Tous sont tellement tenus à distance que je ne vois pas comment j'aurais pu ressentir quoique ce soit. le coup de l'amour et de la mort entremêlés, thèmes que Duras a souvent traités ensemble (pensons à Moderato Cantabile écrit juste avant cette pièce, ou encore à Savannah Bay, écrite bien plus tard) : zéro. J'ai pas vu l'intérêt. le jeu de la révélation en public, avec un Marcel qui raconte une histoire et se met à tourner en rond dans la salle du café tel un prédateur, bientôt suivi de sa femme : zéro. J'ai trouvé ça grotesque. J'ai trouvé les dialogues artificiels au possible, et je n'ai à aucun moment retrouvé l'atmosphère que Duras est parfois si douée à faire ressentir.


Surtout, j'ai eu la sensation que Duras parlait d'elle-même à travers Claire : une femme très, mais vraiment très intelligente, qui sort complètement du lot commun, qui crée quelque chose de nouveau et profondément original... Ca m'a semblé terriblement... ben égocentrique, quoi. Duras elle-même s'est montrée assez dure avec sa pièce (même si je me méfie de telles réactions, et avec elle plus qu'avec quiconque - je me souviens trop du coup de Suzanna Andler), voulant la reprendre au moment où Laurence Olivier voulait la monter en Grande-Bretagne, n'y parvenant pas, jetant l'éponge et disant plus tard que les personnages lui paraissaient "antipathiques et faux", analyse que je partage totalement. Finalement, elle écrira plus tard le roman L'Amante anglaise, à partir de la même matière, puis l'adaptera en pièce avec le Théâtre de l'Amante anglaise.


Tout n'est sans doute pas à jeter dans cette pièce (les thèmes auraient pu être bien mieux traités) ; il y a bien cette omniprésence du bruit des trains qui passent régulièrement hors-scène, par exemple, et qui est une très bonne idée dramaturgique. Mais ce que je ne peux m'empêcher de retenir, c'est le sentiment d'avoir lu une pièce, je le répète, égocentrique, et par-dessus le marché de mauvais goût. Mais sur ce point, on sait que Duras allait faire encore plus fort en 1985 à propos d'une autre affaire criminelle. Hélas.
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Livre très rare. Mon mari me l'a offert pour la Saint-Valentin. C'est une très belle preuve d'amour d'autant plus qu'il s'agit de l'édition d'origine de 1960.
« Les viaducs de la Seine-et-Oise » est une pièce de théâtre en 2 actes qui représente le début de Marguerite Duras dans la dramaturgie.
Elle a été inspirée par un fait divers de 1954 qu'elle va dépasser même si la dimension sociopolitique de la pièce n'apparait pas de prime abord; elle est pourtant bien là avec des allusions à la banlieue et aux travailleurs immigrés. Car Duras s'intéresse à la banlieue et à une population marginalisée voire mise au ban de la société française ou soufrant de racisme.
L'histoire se déroule à Epinay-sur-Orge (dans l'ex Seine-et-Oise, aujourd'hui en Essonne) qui va symboliser la ville de banlieue.
Un crime va être perpétré par deux sexagénaires, retraités de la SNCF, Claire et marcel Ragond, complice et exécutant. le corps de leur cousine sourde et muette, Marie-Thérèse, va être découpé et les fragments vont être dispersés dans les trains de marchandises qui passent sous le viaduc.
Mais la pièce ne raconte pas cela. Elle montre que ces gens simples ne comprennent rien à leur pulsion de mort et n'ont pas conscience de leur enfermement dans la douleur de vivre. C'est comme s'il devait se passer quelque chose dans leur vie pour qu'ils sortent de leur condition d'anonymes.
Le premier acte se passe dans la maison des Ragond. Les coupables attendent tous les deux d'être arrêtés et parlent pour vaincre la peur. Ils tentent de s'expliquer ce qu'ils ont fait. Dans le deuxième acte, les Ragond conversent avec quatre personnages dans un café : Bill, le barman et Alphonso, l'ouvrier agricole italien, sont des familiers d'Epinay alors que les deux autres sont des amoureux de passage. C'est dans cet acte que s'amorce la reconstitution de la pensée criminelle.

Par son talent, Duras articule la trivialité des existences médiocres, la noblesse d'un désir de bonheur et la monstruosité d'un meurtre. On y retrouve un thème qui lui est cher, celui de la folie mais plutôt que de la perversion mentale, il s'agit plutôt de la perturbation déviante de la volonté de vivre.
Vraiment excellent !


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Le texte de la pièce de théâtre Les viaducs de la Seine-et-Oise n'a jamais été réédité et il est quasiment introuvable, sauf dans le premier tome de la Pléiade consacrée à Duras. Cela s'explique peut-être par le fait que l'autrice a renié cet écrit et qu'elle a repris la même histoire quelques années plus tard dans L'Amante anglaise.

Duras était fascinée par les faits divers, comme miroir d'un profond malaise sociétal. Celui dont elle s'est inspirée pour écrire Les viaducs est particulièrement sordide. La pièce de théâtre met en scène un couple âgé qui, après avoir tué une cousine, a disséminé les morceaux de son cadavre en les jetant dans des trains qui passaient près de chez eux. Les thèmes de la folie, de l'ennui, de la pauvreté et de l'exclusion sociale sont abordés à travers le récit de ce meurtre gratuit. Intéressant, mais la mouture dramaturgique de L'Amante anglaise s'avère effectivement beaucoup plus aboutie.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
On peut retarder la vieillesse d'arriver sur vous, ne serait-ce que par l'étonnement profond qu'on éprouve à ne pas pouvoir l'esquiver.
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Marcel
La sénilité nous gagnait et il fallait bien que je me trouve, qu’on se trouve un motif pour durer encore un peu. Chercher comme je le faisais, à soixante ans passés, le pourquoi des soixante ans devenait déplacé, indécent ! C’est pourquoi la Seine-et-Oise est entrée dans ma vie.
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Marcel
[…] Une chance sur mille d’être compris vaut la peine qu’on s’exprime. (Un temps). Et je dirai même mieux : aucune chance sur dix mille d’être compris vaut la peine qu’on s’exprime.

Alphonso
Pourquoi ?

Marcel, agressif.
Je ne sais pas.
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Claire
Maintenant, tu vois, tout ce que je sais encore, c’est précisément que je ne sais plus rien. Ça, je ne peux pas dire… je le sais encore, que j’ai su. Et je sais aussi bien que je ne sais plus ce que j’ai su.
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Claire
De la musique… On aurait pu faire de la musique… par exemple… quel oubli !
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