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sur 1395 notes
"Moderato Cantabile" est un roman de Marguerite Duras publié en 1958. C'est un de mes préféré car les leçons de piano accompagnent la musique des mots. Si l'écriture de Duras est simple et dépouillée, la façon dont elle aborde des thèmes profonds à partir d'un fait divers est tout à fait exceptionnelle et propre à l'auteure.

Anne Desbarèdes emmène son fils à sa leçon de piano du vendredi dans un appartement du port. Elle mène une vie bourgeoise sans doute trop bien organisée. Elle aime son enfant dans ses entêtements, ses oppositions farouches à l'autoritarisme du professeur de piano; elle aime cette vie difficile qu'il lui impose, même si elle ne sait comment s'y prendre pour lui faire aimer ces leçons et lui faire accepter la nécessité d'obéir.

Alors qu'elle attend avec lassitude que se termine la séance musicale, elle assiste d'un peu loin, à l'assassinat d'une jeune femme par son amant dans un café voisin. Dès lors, dans son existence saturée d'ennui, Anne va se laisser envahir par une forme de fascination plus ou moins morbide autour de ce drame passionnel. Jour après jour, inlassablement, elle va revenir sur les lieux du crime pour y retrouver Chauvin qu'elle a rencontré par hasard dans le café juste après le drame.

Tout en subtilité, l'histoire d'Anne Desbaresdes est une histoire de sexualité réprimée, de désirs inassouvis. Seule l'ivresse par le vin rouge lui permet peu à peu d'essayer de concevoir l'idée de la jouissance féminine et d'en tenter l'approche pour, à la fin, y renoncer, incapable de se libérer des contraintes qu'elle s'impose à elle-même.
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🎶 Moderato cantabile ça veut dire modéré et chantant. Bien que sa professeure et sa mère le lui rappellent constamment, l'enfant ne veut pas comprendre. Mais il doit apprendre ses gammes. Et tous les vendredis, la même scène se répète, on lui pose la question, et c'est le même vide qui s'impose à ses interlocutrices. Vraiment, c'est incroyable. Un jour pourtant, un cri vient déchirer la routine hebdomadaire, un cri puissant et qui s'arrête net. Une femme, tuée dans le bar sous l'appartement de la professeure. Par son amant. En plein coeur.

🎶 Moderato cantabile, ça veut dire modéré et chantant et c'est ainsi que la vie de chacun devrait être : toute en mesure et retenue. Mais comment faire lorsque l'inconnu surgit, lorsqu'il renverse tout sur son passage, lorsqu'il bouscule la mécanique quotidienne ? La leçon hebdomadaire devient alors le prétexte d'une rencontre, dans ce même bar où l'irréparable a été commis, et les deux amants, le mère et l'homme, s'y retrouvent pour boire du vin et parler. S'enivrer pour se livrer et discuter. de ce qui est, de ce qui pourrait être ? Parler pour tout dire ou pour ne rien dire, comment savoir ?

🎶 Moderato cantabile. Les mots n'ont plus de sens, sinon les actes. Les dialogues sont sourds, la raison vacille, et seul reste le désir, interdit, prohibé, malvenu, dans ce bar qu'une Dame ne devrait pas fréquenter, avec cet homme qu'elle ne devrait pas regarder. Oui, elle devrait être une dame, être à l'heure, elle devrait rentrer chez elle et ne pas boire, prendre du saumon quand on lui en propose, ne pas bâiller, ajuster sa robe quand son décolleté se fait trop plongeant, elle devrait répondre quand on lui parle. Mais elle s'essouffle d'être celle qu'elle n'est pas, alors la nuit, elle laisse les lumières allumées pour celui qui la regarde, la nuit elle ne ment plus, la nuit elle espère parfois, et à l'image de ce magnolia qui l'étouffe dans ce jardin si bien arboré et soigné, elle tue celle qu'elle rêve de ne plus être... avant que le petit jour se lève à nouveau.

🎶 Moderato cantabile ... un coup de coeur comme je les aime ❤️ !
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Ouh là, c'est du lourd !
J'en suis encore toute retournée.
Ceux qui me suivent savent que je fais en ce moment une cure de Marguerite Duras, en même temps que la lecture d'autres livres (il faut bien, boulimique de livres, ma PAL va bientôt s'écrouler, mais il y a tant de choses intéressantes à lire en moment !).
J'avais été un peu déçue par Hiroshima mon amour, désorientée serait le terme le plus juste.
Là, point de tergiversation : c'est un livre exceptionnel.
Une histoire d'amour floue, étonnante, aberrante.
Tant par son fond que par sa forme.
Très étrange par ailleurs.
On retrouve les thèmes chers à Duras ; la mer (mère), le crépuscule, soleil couchant qui ombre le café, l'alcoolisme, l'amour naissant, la vacuité de la vie, les répétitions, l'enfance, l'amour qu'Anne porte à son petit garçon (très touchant son désir qu'il grandisse vite...).
J'aurai bien vu ce livre plutôt au théâtre, avec ses répliques bizarres et comme décor le café et la maison d'Anne, bourgeoise qui s'ennuie ferme dans sa prison dorée. D'ailleurs, le chapitre pendant la réception où elle arrive en retard est criant de vérité. Elle n'est manifestement pas à sa place et pas heureuse.
Roman étrange donc, difficile à cerner.
Les dialogues sont décousus, chacun parle à l'autre sans véritablement l'écouter, ce qui donne à l'ensemble quelque chose de bizarre. Comme une étrangeté. Chacun suit son idée, et passe très souvent du coq à l'âne.
On ressent bien l'ennui, la vacuité de la vie d'Anne, par contre Chauvin a une obsession : épier et espionner Anne, ce qu'il lui avoue d'ailleurs rapidement. Mais finalement, Anne aussi a une obsession : le meurtre de la femme au début.
L'alcoolisme est omniprésent durant tout le roman, essentiellement du vin. En grande quantité, des le début de la rencontre.
Cela donne un roman comme je n'ai jamais lu, avec un style épuré, une distanciation évidente, des dialogues parfois absurdes, comme si Duras n'était plus maître de son livre, mais que les personnages lui forçaient la main, comme si elle était totalement étrangère à son roman. Comme si elle s'etait mise de côté. Je comprends la perplexité des critiques de l'époque.
Elle dit sans dire, elle écrit sans écrire, elle déconstruit le roman, elle nous offre une lecture vide, et pleine à la fois.
Je peine à raconter ce que je ressens, mais cet ennui, cette vacuité sont bien réels pourtant.
Quelle prouesse ! Quelle originalité !
Sacrée Marguerite.
Elle m'épatera toujours.

PS : allez hop, maintenant, en route pour le Ravissement de Lol V.Stein.

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j'ai autant adhéré à ce livre qu'une poêle Tefal neuve... Bref au bout de 60 pages je me suis dit : est-ce bien la peine de poursuivre et de s'ennuyer comme un rat mort avec cette morne description de l'alcoolisme quotidien. Bref dans les Marguerite, je choisis Yourcenar.
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C'est difficile d'écrire une critique à propos de ce roman au charme indéfinissable.On ferme la dernière page avec la sensation d'avoir regardé un court métrage: deux personnages sont inéluctablement happés l'un part l'autre, fascinés, éblouis… on sent la chaleur précoce du printemps, on ressent les regards pesants des clients du café, on éprouve l'ivresse produite par le mauvais vin. On se sent spectateur aussi, un peu voyeur .
L'écriture maîtrisée et précise de Marguerite Duras permet tout cela…c'est une lecture intéressante, et surtout très différente de ce que j'ai pu lire depuis quelque temps. Ça ne fait pas de mal de sortir de sa zone de confort !

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Un livre court, un peu plus de 120 pages, lu et relu, pour m'imprégner de cette atmosphère extraordinaire.
Le récit a une trame simple, mais comme toujours chez Duras, les niveaux de lecture et l'ouverture des possibles sont à l'origine d'un monde complexe et poétique.
Une femme, Marie Desbaredes, qui accompagne son enfant à une leçon de piano est le témoin d'un meurtre d'une femme par son amant dans un bar voisin. Elle reviendra régulièrement sur les lieux avec son enfant et cherchera avec Chauvin, un homme rencontré dans le bar, à comprendre ce qui a pu amener l'homme à tuer la femme, et dans quelle mesure ce n'est pas l'amante qui lui a demandé d'aller jusque cette extrémité. Au fur et à mesure, Anne et Chauvin fusionneront avec ces deux là, jusqu'à ce que Chauvin stoppe brutalement cette plongée terrible, et qu'ils se séparent.
Mais, en résumant ainsi, on ne rend pas compte de toute la richesse de ce roman, impeccablement construit en 8 chapitres.
On pourrait évoquer tout ce qui plane: la tension qui traverse tout le roman, la détresse d'Anne, femme délaissée par son mari, Directeur des usines de la Côte, qui n'apparaît que comme une ombre méprisante le soir où elle rentre tard et ivre à une soirée organisée chez elle, la difficulté d'élever un enfant qui n'est peut-être pas le fils de son mari, la violence des hommes qui affleure dans le récit, la fascination de la mort que l'on ressent pour elle comme une liberation heureuse, etc...
Et puis il y a l'atmosphère de cette ville portuaire, merveilleusement décrite, le temps chaud qui engourdit les esprits, la sensualité d'Anne, et la passion sans doute ancienne que lui porte Chauvin.
Et toute une symbolique: le rouge du sang, du vin dans lequel se noie Anne, le tricot rouge de la patronne du bar ; la maison d'Anne, prison dans laquelle elle guette les bruits du dehors, et tant d'autres choses..
Et l'écriture, bien sûr, magique, comme toujours.
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Je reprends le parallèle bartokien de Claude Roy, évoqué par l'ami Andras à qui je dois en grande partie cette lecture (je l'en remercie), et je pense que Bartok illustre parfaitement la caractéristique de l'écoute musicale définie par Daniel Levitin (que je viens de lire) : une dialectique entre anticipation d'une structure mélodique reconnue et sa violation qui provoque la surprise. J'adhère également à l'idée que la lecture préalable de le Square est presque une condition nécessaire pour la reconnaissance de la mélodie de Moderato cantabile.
Quels sont donc les éléments reconnaissables ?
D'abord le petit garçon. Ici cependant, le fils d'Anne Desbaresdes possède des fonctions narratives beaucoup plus développées que la simple interruption du dialogue entre l'homme et la femme et le rappel à celle-ci des obligations du réel. L'enfant et la contrainte sociale de la leçon de piano qui lui échoit, les réactions fines de Madame Desbaresdes face à la violence de la pédagogie de Mademoiselle Giraud dénotent d'emblée le premier aspect du bovarysme d'Anne. Surtout, il est extrêmement significatif que la chute du roman, l'ultime aspect de ce bovarysme, advienne lorsque la mère a cédé à l'injonction de la prof de piano et que le garçon n'est pas là.
L'incommunicabilité des motifs du dialogue, et son caractère elliptique. Dans ce roman, on croit longtemps avoir affaire à un dialogue de sourds, qui ne serait éventuellement qu'un prétexte à l'ivresse : Anne Desbaresdes s'obstine à demander à Chauvin les mobiles de l'assassinat de la jeune femme, Chauvin à lui parler, avec une jalousie de classe à peine dissimulée, de la villa où elle habite et de son jardin. Ce n'est qu'à la moitié du roman que l'on commence à apercevoir un premier aspect d'identification d'Anne avec la morte, alors même que, subtilement, son questionnement porte davantage sur l'intentionnalité (suicidaire assistée, pour ainsi dire) de celle-ci ; de son côté, progressivement, Chauvin révèle son véritable voyeurisme à l'égard d'Anne, et les indices qu'il livre ou invente sur la personnalité de la femme assassinée (alcoolique, adultère...) suggèrent ou renforcent l'identification d'Anne, de façon assez perverse et culpabilisante. Son dessein n'apparaît qu'à la chute, qui, comme dans le Square, reste cependant ouverte :
« - Je voudrais que vous soyez morte, dit Chauvin.
- C'est fait, dit Anne Desbaresdes. » (p. 123).
La critique sociale. Sourdant uniquement des propos des deux protagonistes dans le Square, en particulier de la bonne qui était témoin de la vie de la bourgeoisie, dans ce roman elle est critiquée par la description de l'auteure davantage que par les mots de Chauvin, en particulier dans le très bel avant-dernier chapitre, le VII, où il est question du dîner chez les Desbaresdes, avec sa synecdoque autour du saumon et de canard à l'orange. Sous ce même point, je place l'habileté des noms des personnages et leur usage : ainsi la protagoniste est invariablement nommée par son prénom et nom, ce qui produit un effet de longueur et une assonance qui sonnent juste, alors que de l'ouvrier chômeur, prophétiquement nommé Chauvin, nous n'apprenons le nom qu'en même temps qu'il est reconnu par elle...
Enfin le titre du roman est une antiphrase évidente – ni moderato ni a fortiori cantabile. le petit garçon a bien raison de refuser de mémoriser ces mots !
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En pleine mutation, le roman de la seconde moitié du XXe siècle se veut "nouveau roman" par opposition au roman psychologique. Marguerite Duras évoque ici la rencontre autour d'un meurtre de deux personnages seuls qui s'ennuient et qui m'ont passablement ennuyée aussi... Je n'ai pas du tout apprécié ce roman devenu pourtant un classique de la littérature moderne. Ne me frappez pas ;), il en faut pour tous les goûts mais ce roman ne correspond pas aux miens.
Lien : http://bibliblog.net/moderat..
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Le principe même du livre étant le dénuement le plus total en matière d'intrigue, d'émotion, et d'intelligence des dialogues dans le but de créer une atmosphère pesante basée sur la répétition de la même scène ad nauseam, le résultat est un très profond ennui de la première page à la dernière. J'écrivais récemment dans une autre critique (Un long chemin) qu'une lecture pouvait être pénible même si elle débouchait sur une réflexion. Ici la vacuité du propos du livre ne débouche sur rien.
Alors autant considérer ce récit comme un exercice de style : comment faire résonner l'écho d'un hurlement dans la banalité du quotidien ? le silence qui suit un morceau de Mozart est encore de Mozart paraît-il, le néant narratif (pas littéraire, c'est très bien écrit) qui suit ce dramatique hurlement est de Marguerite Duras. Quelqu'un l'a fait, bon, c'est bien, mais ce n'est peut-être pas la peine de lire le livre.
J'ai écrit une critique bien hargneuse, je m'en excuse auprès des fans de Duras.
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Moderato Cantabile, ou un des emblèmes de ce qu'on a appelé le "Nouveau Roman", là on l'on remet en cause l'histoire, le personnage. On ne peut pas dire que ce roman en soit réellement un, ou alors il serait plutôt un roman psychologique. Il n'y a pas réellement d'intrigue : on assiste à une routine qui se met en place entre Anne Desbaresdes et un homme dans un café, tous deux captivés par un crime passionnel, ce qui aboutira à un semblant d'amour entre eux, non consommé, inachevé. Cette femme nous échappe sans cesse, entre son obsession pour le meurtre, cet homme, son enfant... le lecteur assiste comme impuissant à cette successions de scènes, à travers des dialogues brefs mais forts, ne sachant rien.

Si je ne mets que trois étoiles, c'est parce que je ne peux pas dire que cette histoire m'ait transportée comme L'Amant, on reste ici très terre à terre. Cependant, Marguerite Duras reste une écrivaine hors du commun, un style reconnaissable au premier coup d'oeil, une écriture légère, musicale, à lire, forcément.
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