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EAN : 9782070387076
384 pages
Gallimard (13/10/1995)
3.35/5   20 notes
Résumé :


« Vous voyez, quelquefois je faisais des articles pour les journaux. De temps en temps j’écrivais pour le dehors, quand le dehors me submergeait, quand il y avait des choses qui me rendaient folle, outside, dans la rue – ou que je n’avais rien de mieux à faire. Ça arrivait. »

Outside rassemble une soixantaine de textes, suscités par des événements quotidiens, par l’actualité, écrits avec rapidité à la manière du journaliste, articles «... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Entre deux livres Marguerite Duras écrit des articles pour les journaux. Certes, c'est un travail alimentaire mais c'est aussi une façon d'être dehors de regarder le monde autour d'elle.
C'est au début de l'année 1981 qu'un recueil de ses textes paraîtra chez Albin Michel sous le titre "Outside". A l'initiative de Jean-Luc Henning, Yann Andréa, le nouveau compagnon de Marguerite Duras, a rassemblé cinquante-neuf textes écrits entre 1957 et 1980. C'est elle qui les classera comme elle a envie.
Duras choisit de commencer par « Les fleurs de l'Algérien », un texte publié en 1957 par France-Observateur, montrant ainsi son engagement, le journalisme n'étant pas objectif. C'est d'ailleurs ce texte qui m'a donné envie de lire "Outside" parce qu'il fait partie du spectacle intitulé « Sorcière » joué sur scène par Macha Méril et que j'ai eu la chance de voir au Théâtre de Poche à Paris en octobre 2020, entre deux confinements.
Le titre de cette pièce fait d'ailleurs écho à la revue Sorcières dans laquelle Marguerite Duras a publié dans les années 70 six articles de ce recueil. Il se compose essentiellement de texte de presse rédigés pour une grande majorité à la fin des années 1950 et au cours des années 1960 dont trente et un pour France-Observateur et six pour Vogue. Les plus récents viennent du Nouvel Observateur, des Nouvelles littéraires, du Monde ou du Matin de Paris, ainsi que quelques inédits ou extraits de catalogues d'exposition, il y en a même un qui a été rédigé pour une pochette de disque.
On voit donc la richesse des genres de cet « Outside ». L'entretien, par exemple, est fréquent. Il est parfois accompagné d'une enquête traité sous forme de récit.
Ce que j'ai particulièrement apprécié c'est que l'on retrouve des éléments de l'oeuvre de Marguerite Duras et, contrairement aux apparences, des lignes de cohérence apparaissent entre les textes.
Parmi les éléments autobiographiques, elle évoque ses lieux (Paris ou Neauphle-le-Château par exemple), son enfance en Indochine, son premier bébé mort-né ou le retour de son mari des camps de concentration (en référence à La douleur). Certains faits historiques montrent son engagement politique à gauche quand elle évoque par exemple les conditions de vie des algériens à Paris ou le ghetto de Varsovie.
Mais ce qui la passionne de façon récurrente ce sont les faits divers, ce qui nous permet de lire notamment un entretien avec un ex-taulard, voyou sans repentir qui raconte ce qui se passe en prison.
Ce que j'ai le plus apprécié, ce sont ses nombreuses références littéraires et cinématographiques, les livres de jeunes auteurs ou autrices qu'elle aime et bien sûr ses actrices préférées dont certaines sont ses amies.
Marguerite Duras sait leur rendre hommage comme elle sait parler des enfants ou des gens simples, toujours fascinée.


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LES FLEURS POUR L'ALGÉRIEN

C'est dimanche matin, dix heures, au carrefour des rues Jacob et Bonaparte, dans le quartier Saint-Germain-des-Prés, il y a de cela une dizaine de jours. Un jeune homme qui vient du marché de Buci avance vers ce carrefour. Il a vingt ans, il est très misérablement habillé, il pousse une charrette à bras pleine de fleurs : c'est un jeune Algérien qui vend, à la sauvette, comme il vit, des fleurs. Il avance vers le carrefour Jacob-Bonaparte, moins surveillé que le marché et s'y arrête, dans l'anxiété, bien sûr.

Il a raison. Il n'y a pas dix minutes qu'il est là - il n'a pas encore eu le temps de vendre un seul bouquet - lorsque deux messieurs "en civil" s'avancent vers lui. Ceux-là débouchent de la rue Bonaparte. Il chassent. Nez au vent, flairant l'air de ce beau dimanche ensoleillé, prometteur d'irrégularités, comme d'autres espèces, le perdreau, ils vont droit vers leur proie .

Papiers ?

Il n'a pas de papiers lui permettant de se livrer au commerce des fleurs.

Donc, un des deux messieurs s'approche de la charrette à bras, glisse son poing fermé dessous et - ah ! comme il est fort ! - d'un seul coup de poing il en renverse tout le contenu. Le carrefour s'inonde des premières fleurs du printemps (algérien).

Eisenstein n'est pas là, ni aucun autre pour relever cette image de ces fleurs par terre, regardées par ce jeune homme algérien de vingt ans, encadré de part et d'autre par les représentants de l'ordre français. Les premières autos qui passent, et cela on ne peut l'empêcher, évitent de saccager les fleurs, les contourne instinctivement.

Personne dans la rue, sauf, si, une dame, une seule :

- Bravo ! messieurs, crie-t-elle. Voyez-vous, si on faisait ça chaque fois, on en serait vite débarrassé de cette racaille. Bravo !

Mais une autre dame vient du marché, qui la suivait. Elle regarde, et les fleurs, et le jeune criminel qui les vendait, et la dame dans la jubilation, et les deux messieurs. Et sans un mot, elle se penche, ramasse des fleurs, s'avance vers le jeune Algérien, et le paye. Après elle, une autre dame vient, ramasse et paye. Après celle-là, quatre autres dames viennent, qui se penchent, ramassent et payent. Quinze dames. Toujours dans le silence. Ces messieurs trépignent. Mais qu'y faire ? Ces fleurs sont à vendre et on ne peut empêcher qu'on désire les acheter.

Ça a duré dix minutes à peine. Il n'y a plus une seule fleur par terre.

Après quoi, ces messieurs ont eu le loisir d'amener le jeune Algérien au poste de police.

(France-Observateur, 1957)
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Je trouve une image et je vous la donne : elle (Delphine Seyrig) parle comme quelqu'un qui vient d'apprendre le français, qui aurait des dispositions fantastiques pour le français mais qui n'en aurait aucune habitude et qui éprouverait un plaisir extrême, physique, à le parler. On dirait qu'elle vient de finir de manger un fruit, que sa bouche en est encore toute humectée et que c'est dans cette fraîcheur, douce, aigre, verte, estivale que les mots se forment, et les phrases, et les discours, et qu'ils nous arrivent dans un rajeunissement unique. Et l'anglais, me dit-on, elle le parle de la même façon, inimitable.
(Delphine Seyrig, inconnue célèbre)
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- Comment vous imaginez-vous l'espace?
- F.A. 6 ans : Tout blanc.
N.R. 11 ans : Tout noir.
E.L. 9 ans : Comme une masse noire qui devient lumineuse toutes les deux heures.
J.M. 10 ans : Immense, gris, extraordinaire, incompréhensible avec l'organe de notre tête.
(Les enfants du spoutnik...)
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La force du livre, incomparable, c'est qu'une fois qu'on l'a refermé on ne sait plus quoi penser, rien. Oui, c'est ça, le livre ne s'éloigne pas, reste dans la tête à l'instar d'une pensée vide, à venir, mais qui serait décisive de toutes les autres.
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- Qu’est-ce qui les fait vous battre, vous tuer, d’après vous ? La peur de vous ?
X.- Je ne crois pas. La haine. Remarquez, toujours, toujours, les Arabes ont été insultés. Mais tant qu’il était inoffensif, qu’il était pittoresque dans les rues, l’Arabe était seulement insulté. C’est depuis qu’il a essayé de relever la tête, qu’il n’a plus seulement été une bête de somme, qu’il a voulu sa dignité que ça n’a plus marché. Alors, il y a eu les coups.
[Les deux ghettos, France-Observateur, 1961]
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