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Virgile Dureuil (Autre)
EAN : 9782203223523
136 pages
Casterman (03/11/2021)
3.99/5   45 notes
Résumé :
Deux siècles après la retraite de Russie, Sylvain Tesson refait la route de l'armée napoléonienne déchue... en side-car et en plein hiver. Ils sont cinq : trois Français et deux Russes. Unis par l'amitié et par un grand défi, ils décident de commémorer à leur façon le bicentenaire de la retraite de Russie : en suivant le chemin emprunté par les troupes françaises en pleine débâcle.
Partis de Moscou, Sylvain Tesson et ses amis traversent l'immense Russie, la ... >Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Cette BD adapte le récit de voyage Berezina de Sylvain Tesson, dans un bel album de 136 pages dessiné par Virgile Dureuil.
Sans connaître le livre de Tesson, il est clair que les textes de la BD doivent largement reprendre des passages du livre. Tant mieux, car le double récit, celui d'une aventure humaine et celui d'un fait historique, ressort en totale harmonie avec des images travaillées qui évoquent vraiment bien des décors glacés infinis.

Tesson et ses amis, deux français, Thomas Goisque le photographe et Gras, et deux amis russes, décident pour les 200 ans de la campagne de Russie de refaire le trajet retour de la Grande Armée à partir de Moscou. Ils chevauchent de vieux side-car Oural des années 60 à travers l'hiver russe. Ce faisant, au milieu des camions en file indienne, de frontière en frontière, ils réalisent un petit exploit, malgré les problèmes mécaniques.
Chaque étape est l'occasion pour Sylvain Tesson de rappeler ce qu'a pu être la désastreuse retraite de Russie de Napoléon. Voilà une armée immense qui parvient jusqu'à Moscou, s'en empare, la voit incendiée, tarde trop à repartir, et recule vers l'Ouest en affrontant le début du terrible hiver russe et le harcèlement des cosaques et des populations locales. Malheur aux soldats ralentis, isolés, qui finissent avalés par la neige et le gel. Pas de bataille avec Koutouzov, qui préfère suivre en attendant le bon moment. Un bon moment qui a failli être le passage de la Berezina : Napoléon encerclé qui ne doit son salut qu'aux ponts jetés sur le fleuve par des soldats qui se sacrifieront dans l'eau gelée. Un mythe naissait.

Tesson raconte tout cela fort bien et la mise en image permet faire revivre l'épopée motocycliste autant que le temps historique. Les dessins sont agréables et livrent quelques belles vues des sites traversés (notamment les images en tête de chapitre). Un beau voyage à double lecture.
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Récit de voyage en side-car Oural, hommage au sacrifice des Grognards de la Grande Armée, ode à la Russie, « Berezina » est tout cela et plus encore. Sylvain Tesson a réussi un livre inspiré, engagé qui pose in fine une seule question : quel peut-être aujourd'hui le terrain d'expression de l'héroïsme ?

C'est de Moscou que Tesson avec ses deux compères français Gras et Goisque et ses deux amis russes Vitaly et Vassili s'élance sur la parcours de la Retraite de Russie, Borodino, la Berezina, Smolensk, Vilnius pour suivre ensuite les traces du voyages retour de Napoléon jusqu'à Paris : « Pourquoi ne pas faire offrande de ces quatre mille kilomètres aux soldats de Napoléon ? A leurs fantômes. A leur sacrifice. En France, tout le monde se fout des Grognards. Ils sont tous occupés avec leur calendrier maya. Ils parlent de la « fin du monde » sans savoir que leur monde est déjà mort ».

L'auteur fait état de la théorie de son ami Gras sur les « hauts lieux » (hauts lieux de la tragédie, hauts lieux spirituels, hauts lieux géographiques, hauts lieux du souvenir, hauts lieux de la création, hauts lieux héraclitéens), mais c'est de son côté obsédé par les souffrances endurées par près d'un million d'hommes que Tesson se lance dans cette folle aventure et de toutes ces horreurs qu'il sait qu'il aura du mal à oublier, à force de les toucher à chaque étape de plus près. Il ne s'en rend compte qu'une fois parvenu en Lituanie : « Les soldats oubliés du charnier de Siaures miestelis avaient été inhumés dans le cimetière en 2003. Pour la première fois, nous abordions un lieu tangible de la Retraite, un espace qui n'était point seulement un décor du souvenir ou un théâtre historique. Il y avait sous cette neige les ossements des hommes dont nous suivions les traces depuis Moscou. Nous cessions de courir après les spectres. Nous nous tenions devant leurs restes ».

Faire la route dans le froid et dans la boue est également l'occasion de plaisirs plus légers : « Ce voyage était certes une façon de rendre les honneurs aux mânes du sergent Bourgogne et du prince Eugène, mais aussi une occasion de se jeter de nids-de-poule en bistrots avec deux de nos frères de l'Est pour sceller l'amour de la Russie, des routes défoncées et des matins glacés lavant les nuits d'ivresse ». Il donne aussi l'occasion à l'auteur d'exprimer son admiration pour le peuple russe : « Ô nous aimons ces Russes. Chez nous, l'opinion commune les méprisait. La presse les tenait, au mieux, pour des brutes à cheveux plats, incapables d'apprécier les moeurs aimables des peuplades du Caucase ou les subtilités de la social-démocratie et, au pire, pour un ramassis de Semi-Asiates aux yeux bleus méritant amplement la brutalité des strates sous le joug desquels ils s'alcoolisaient au cognac arménien pendant que leur femmes rêvaient de tapiner à Nice. Ils sortaient de soixante-dix ans de joug soviétique. Ils avaient subi dix années d'anarchie eltsinienne. Aujourd'hui, ils se revanchaient du siècle rouge, revenant à grands pas sur l'échiquier mondial. Ils disaient que des choses que nous jugions affreuses : ils étaient fiers de leur histoire, ils se sentaient pousser des idées patriotiques, ils plébiscitaient leur président, souhaitaient résister à l'hégémonie de l'OTAN et opposaient l'idée de l'Eurasie aux effets très sensibles de l'euro-atlantisme. En outre, ils ne pensaient pas que les Etats-Unis avaient vocation à s'impatroniser dans les marches de l'ex-URSS. Pouah! Ils étaient devenus infréquentables ».

En filigrane et au travers des siècles, la présence de Napoléon qui ne manque pas de fasciner Tesson : « le spectacle était étrange de ces énarques du XXIe siècle, clapotant dans l'entre-soi et la cooptation et dégoisant sur « le Mal napoléonien » sans reconnaître que l'Empereur avait su donner une forme civile et administrative aux élans abstraits des Lumières ».
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"L'espoir meurt en dernier"... Sous le coup de crayon de Virgile Dureuil, nous suivons Sylvain Tesson et quatre amis français et russes sur les traces de la Campagne de Russie, et plus précisément de la retraite de Russie - celle qui a anéanti la quasi totalité du demi million d'hommes qui constituaient l'armée impériale de Napoléon en 1812. Voyageant en Oural (ces gros side-car russes) contre vents et verglas de Moscou à Paris, ils roulent dans les pas de nos prédécesseurs, traversant les "hauts lieux" encore hantés par les fantômes du passé. Interrogeant l'Histoire, le sens de l'héroïsme, l'humanité et la déchéance, les aventuriers du froid et de l'hiver s'embarquent dans un périple de plusieurs milliers de kilomètres. Sur place, la nature a gardé ses droits, des stèles ont été érigées par endroits, et l'immensité du vide remplit l'espace-temps. Les dessins servent très bien ce récit et montrent ce que l'imagination ne sait créer : Moscou en flammes, les cohortes de lambeaux vivants se traînant dans la neige, les vastes landes blanches sans fin... et Napoléon, toujours debout pour ramener ce qu'il reste de son armée, bercé par l'illusion qu'il la reconstruira pour prendre sa revanche, et refusant de regarder en face le déclin de son Empire.

Ce qui distingue cette BD de la série "Bérézina" de Frédéric Richaud que j'avais également lue, est la touche savoureuse et géniale apportée par les mots de Sylvain Tesson, ainsi que la remise en perspective de notre existence actuelle face à cette épopée tragique deux cents ans auparavant.

Je remercie Babelio et Casterman pour m'avoir fait gagner cette BD lors d'une Masse Critique, et je vous recommande vivement cette lecture ainsi que le récit original pour prolonger le plaisir.

Et pour finir une des citations les plus marquantes à mon sens : "Un haut lieu, c'est un arpent de géographie fécondé par les larmes de l'Histoire, un morceau de territoire sacralisé par un geste, maudit par une tragédie, un terrain qui, par-delà les siècles, continue d'irradier l'écho des souffrances tues ou des gloires passées. C'est un paysage béni par les larmes et le sang. Tu te tiens devant et, soudain, tu éprouves une présence, un surgissement, la manifestation d'un je-ne-sais-quoi. C'est l'écho de l'Histoire, le rayonnement fossile d'un événement qui sourd du sol, comme une onde. Ici, il y a eu une telle intensité de tragédie en un si court épisode de temps que la géographie ne s'en est pas remise. Les arbres ont repoussé, mais la Terre, elle, continue à souffrir. Quand elle boit trop de sang, elle devient un haut-lieu. Alors, il faut la regarder en silence car les fantômes la hantent."
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Après avoir brillamment adapté le récit de voyage de Sylvain Tesson Dans les forêts de Sibérie, Virgile Dureuil s'attaque cette fois à Berezina, toujours du même auteur.

Sylvain Tesson et deux amis entreprennent, après un bref séjour à Moscou pour un salon du livre, de regagner Paris en suivant le même chemin que les troupes napoléoniennes lors de la retraite de Russie, dont on célèbre cette année là (2012) les 200 ans.
C'est à bord d'un side-car Oural qu'ils vont accomplir leur périple, en hiver, collant ainsi aux conditions climatiques rencontrées par les soldats.

L'écrivain voyageur est accompagné de deux amis : Thomas Goisque, un photographe habitué aux voyages extrêmes et Cédric Gras, un géographe russophile. Deux Russes seront également du voyage.

D'emblée, on est saisis par le caractère aventurier des trois compagnons de route, qui roulent dans des conditions peu évidentes dans les campagnes enneigées. le froid glacial engourdit plus d'une fois Sylvain Tesson, qui avec sa témérité légendaire poursuit malgré le sommeil qui le gagne la chevauchée avec ses acolytes confiants (fous ?) à côté. Les Russes, qui retardés à cause de soucis techniques, doivent les rejoindre plus tard, puis le soir, puis le lendemain, donnent à l'aventure une nonchalance amusante : il n'y a pas de problème, que des solutions, tout va bien se passer. Ce qui de toutes façons colle plutôt au caractère des trois Français, habitués aux situations inconfortables.

Là où la BD dépasse le récit de voyage, c'est qu'elle met en images les troupes napoléoniennes sur les mêmes routes que l'équipée sauvage en Oural. Tout à coup, ce qui nous était abstrait prend une consistance effarante. On voit ces soldats, affaiblis par le froid, la faim, la peur sans doute, malgré un vif sens du courage et de l'honneur, déambuler dans des paysages hostiles, sachant que l'armée russe est à leurs trousses et que les villageois sont prêts à leur tomber dessus à tout moment.

Le parallèle quotidien entre le voyage de la retraite de Russie et celui de Sylvain Tesson est rendu de façon très nette. On visualise parfaitement le trajet, et pour qui ne connaît pas dans les détails (ni même dans les grandes lignes) l'évènement historique, c'est incroyablement instructif et édifiant. Pour tout vous dire, n'ayant jamais étudié cette période sur les bancs de l'école, je ne connaissais rien. Et maintenant j'ai l'impression de savoir tout.

Graphiquement, c'est une réussite. Les planches sont très belles et truffées de détails. Chaque vignette mérite qu'on s'y attarde. Il se dégage à la lecture, avec cette neige omniprésente et ces villes grises, une ambiance russe prégnante. Les armées sont représentées avec minutie. Tout est incroyablement fin et précis. C'est superbe.

Comme toujours, je suis harponnée par la langue de Sylvain Tesson, soignée et arrosée d'ironie. Il porte un regard sur le monde, sur les gens et sur l'aventure qui me fascine. le groupe qu'il forme avec ses amis et les Russes m'a fait passer un très bon moment, entre rires, émotions et savoir.

Je suis sous le charme de cette lecture. J'y ai trouvé de l'amitié, de l'aventure, de l'Histoire et une profonde sympathie pour ces soldats de 1812. C'était passionnant. J'espère que la collaboration entre Virgile Dureuil et Sylvain Tesson ne s'arrêtera pas là !
Lien : https://lejardindenatiora.wo..
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Quelle drôle d'idée a encore eu Sylvain Tesson ? Réaliser deux siècles plus tard la route de l'armée napoléonienne déchue en side-car…en plein hiver !

Virgile Dureuil réalise avec brio l'adaptation du livre mêlant histoire et récit de voyage. Comme « Dans les forêts de Sibérie », voilà donc l'ami Tesson, voyageur infatigable, devenu personnage de BD.

Et ça marche diablement bien. Bien sûr c'est surtout récitatif. Mais pourquoi s'en priver tant l'écriture de Sylvain Tesson est imagée, riche et pleine d'humour ?! On est très vite embarqué dans cette folie : rallier en 13 jours Moscou à Paris en suivant peu ou prou le trajet de la retraite des grognards. Tout ça dans le froid, la neige et la vodka… pas dans le carrosse de Napoléon mais presque. Ce side-car russe nommé Oural devenant lui aussi un personnage essentiel…

C'est passionnant. Entre récits quotidiens du trajet de la Grande Armée, histoires de batailles, tout cela habilement mis en parallèle avec l'épopée de Tesson et ses amis. On ne s'ennuie pas une seconde et on est glacé par le dessin hivernal, précis et inspiré de Virgile Dureuil.

Au final, quel régal que cet album qui illustre « avec panache » le voyage fou de Tesson et met en relief un épisode méconnu de l'histoire de France. J'en redemande !
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critiques presse (2)
BDGest
17 janvier 2022
Bérézina se maintient en équilibre entre le roman historique et l’écrit « escapiste ». La mise en images offre une nouvelle lecture, d’un essai porté, en son temps, par de belles tournures et une prose crue et guerrière !
Lire la critique sur le site : BDGest
Sceneario
10 janvier 2022
Bérézina se lit avec beaucoup de plaisir, de préférence au coin du feu pour tenter de contrebalancer le froid qui imprègne les deux récits parallèles, bien servis par le dessin de Dureuil, autant appréciable dans la représentation des combats, que dans celle des paysages contemporains de ces villes d’une Europe de l’Est traversée 200 ans plus tard !
Lire la critique sur le site : Sceneario
Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Nous autres, latins, nourris de stoïcisme, nous tentions de saisir le bonheur partout où il était chatoyant.
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L'espoir meurt en dernier.
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