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EAN : 9782818014660
368 pages
P.O.L. (15/05/2013)
4.19/5   29 notes
Résumé :
Mort à trente-neuf ans, Guillaume Dustan (1965-2005) laisse une œuvre dont l'aspect provocateur n'a pas facilité la transmission. La dispersion de ses écrits entre plusieurs éditeurs et l'évolution spectaculaire de son écriture et de sa pensée ont brouillé son image. À la suite d'Hervé Guibert, Guillaume Dustan est un des grands autobiographes de notre temps. Il fallait, pour saisir l'importance de ses livres, une édition complète. Ce premier volume des Œuvres, qui ... >Voir plus
Que lire après Oeuvres, tome 1 : Dans ma chambre - Je sors ce soir - Plus fort que moiVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Les éditions P.O.L. font paraître les oeuvres complètes du romancier Guillaume Dustan. Trois romans constituent ce premier volume, "Dans ma chambre", "Je sors ce soir" et "Plus fort que moi", accompagnés d'une préface générale, de notes et d'introductions de Thomas Clerc. Thomas Clerc est un essayiste représentatif de l'actuelle culture dominante Woke, mais ses réflexions érudites, approfondies et élaborées, font voir au lecteur un visage inattendu de cette culture, qui nous apparaît le plus souvent comme un fanatisme imbécile. La lecture de ses préfaces est pleine d'intérêt, par le mélange qu'elles présentent de réflexion philosophique et de mythologie de gauche.

Par contraste, les trois "textes" de Guillaume Dustan semblent étrangers à toute théorie et à toute pensée abstraite. C'est le choix de l'auteur, qui n'était pas un ignorant : son parti-pris d'écriture relâchée, soigneusement désaffiliée de tout héritage culturel, résulte d'une esthétique et d'une idéologie, que l'on voit aussi à l'oeuvre chez des auteurs comme Angot, Ernaux ou Despentes. Il présente ailleurs ces trois ouvrages comme une "autopornographie", et il lui a paru bon de raconter ses récits sexuels dans le style le plus laid possible. Bien sûr, lui et ses pareils s'imaginent que l'entrée de la sexualité "crue" dans la littérature est une libération en soi, alors qu'au fond ce n'est qu'un changement de rhétorique, une stylistique et une esthétique nouvelles (ou non). Tout cela n'a rien de cru, de trash et de tripal : par définition, écrire c'est créer de la culture, accumuler effets de style et de langue qui miment et imitent le langage parlé et sa crudité. Jamais un homme inculte n'écrirait comme cela : l'inculture s'accompagne d'un respect profond et irréfléchi pour la langue savante et classique. Il faut au contraire être un bourgeois cultivé pour savoir éliminer tout l'héritage culturel reçu et inventer une langue imaginaire parlée par des ignorants.

Comment expliquer l'omniprésence du sexe, ou plus précisément de l'homosexe, dans ces trois romans ? L'auteur a choisi de ne parler que de cela, et de ce qui s'y rattache : drogues, boîtes de nuit, musique, vêtements de marque, maladie du sida, sado-masochisme, etc... Dans l'univers de Guillaume Dustan, l'identité des personnages, à commencer par le narrateur, repose sur le sexe : après tout, ce sont des homo-sexuels, à savoir des êtres qui se définissent uniquement par leur sexualité, dont la "fierté", et l'essentiel de l'existence, consistent en cela. Un des mythèmes amusants de Thomas Clerc est l'expression "communauté homosexuelle" : Guillaume Dustan fournit au lecteur un document sur la vie de cette "communauté", à la fin du XX°s et dans les lieux où elle se concentre. On ne lui reprochera pas plus de se consacrer à cette minorité de minorité, qu'à Proust d'écrire sur les duchesses du Faubourg Saint-Germain.

Reste à dire un mot sur la nature romanesque de ces ouvrages, sous-titrés "romans". Un récit, même consacré à des faits réels, à l'exclusion de toute fiction, par sa structure, peut passer tout aussi bien pour un "roman" que pour une "autobiographie", ou une "autofiction". Il n'existe aucune définition formelle fiable du genre romanesque. On peut toutefois rappeler que le roman tel que nous le connaissons, relate les difficultés et les déboires d'un individu face à une société, ou à des groupes sociaux. Guillaume Dustan, en bon écrivain moderniste, répudie cette fonction critique, souvent ironique, toujours décalée, du roman et de son héros : son narrateur est un spécimen représentatif de la faune "communautaire", face à laquelle il n'a absolument aucun recul, ni aucun regard critique. Il est très bien intégré, il est parfaitement comme les autres. On est donc loin du roman véritable, ce qui n'est pas surprenant, puisque la culture woke rejette tout héritage, surtout quand il pourrait éveiller l'esprit.

L'unique point de divergence du narrateur avec ses congénères, c'est qu'il écrit. Mais ce que l'écriture pourrait avoir de démystificateur, d'éclairant sur les mensonges d'un groupe humain et sur sa mythologie, est totalement écrasé par l'obsession sexuelle et l'abrutissement des drogues. L'univers décrit peut fasciner et troubler, ces romans de Dustan sont très intéressants, malgré l'autolimitation et les parti-pris de l'auteur.

Thomas Clerc fait de Guillaume Dustan un écrivain dérangeant et iconoclaste. Non, c'est un conformiste.
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J'ai eu du mal avec Dans ma chambre, vite lassé par le sexe, mais Je sors ce soir m'a tout de suite happé, et le style de Plus fort que moi était peut être plus mûr que le premier roman. Les quelques écarts sur la mort et la peur du VIH m'ont beaucoup touché et on sent en général que la séropositivité et la maladie sont omniprésentes, même quand elles ne sont pas mentionnées directement. Édition réussie, les commentaires sont pertinents
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critiques presse (3)
Liberation
24 juin 2013
Les trois livres sont poreux : on retrouve des personnages, des références, des médicaments, des gestes, des figures, des airs de musique, des sentiments. La répétition noue l’action : Dustan et ses partenaires pédalent dans une roue enchantée, infernale.
Lire la critique sur le site : Liberation
Telerama
19 juin 2013
Connu pour sa radicalité sexuelle et son goût de la provocation, Guillaume Dustan écrivait dans l'urgence, avec âpreté. Sa franchise impressionne encore.
Lire la critique sur le site : Telerama
Lexpress
11 juin 2013
En redécouvrant ces ouvrages parus de manière confidentielle, on sera aussi frappé par la force de cette écriture, simple et clinique, qui capte remarquablement la crudité des situations et les pulsions du narrateur.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Citations et extraits (2) Ajouter une citation
J'en ai rempli un autre, un vieux moche. Il me l'avait demandé mais ça m'a flippé quand même. J'ai revu l'infirmier. Il est arrivé avec un Balzac en Pléiade, ça m'a surpris. Je me suis demandé pourquoi il lisait si c'était pour se faire juter dans le cul à côté. Moi je n'avais rien lu depuis sept ans, à part Less Than Zero ...

Plus fort que moi, p.338
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Jamais je ne vieillirai.
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Videos de Guillaume Dustan (8) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Guillaume Dustan
OEUVRES II DE GUILLAUME DUSTAN Rencontre avec Thomas Clerc & Frédéric Boyer
C'est le deuxième volume des oeuvres complètes, après un premier tome paru en 2013. Génie divin, LxiR et Nicolas Pages (Prix de Flore 2000), publiés aux éditions Balland dans la collection « le Rayon » entre 1999 et 2002, forment la trilogie de ce nouveau volume. Les trois livres marquent un tournant décisif dans l'oeuvre de Guillaume Dustan, mort en 2005. Là où la première trilogie déroulait un thème unique (le sexe) dans des cadres strictement définis (la chambre, la boîte de nuit, les back-rooms), ces trois livres, notamment Nicolas Pages, prouvent que Dustan n'est pas seulement un pornographe accompli, mais aussi « un capteur du sentiment amoureux », comme l'explique l'écrivain Thomas Clerc qui dirige cette édition, auteur d'une longue préface. La pensée et les textes de Dustan contrastent fortement avec l'époque de moralisation et de régression qui est la nôtre. La première trilogie exposait un mode de vie essentiellement axé sur le plaisir sexuel, Dustan prolonge cette revendication pour en faire un programme de vie, une sorte de projet politique. Il relie politique du désir et progressisme social, sur le double modèle du libéralisme et du libertarisme.
À lire – Guillaume Dustan, Oeuvres II, POL, 2021.
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