AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,53

sur 60 notes
5
3 avis
4
7 avis
3
3 avis
2
4 avis
1
0 avis
En rendant hommage à ses aïeux, dont René Coty dernier président de la IV république, Benoit Duteurtre romance un demi siècle d'histoire du Pays de Caux et analyse l'évolution sociologique du triangle Etretat, Paris, Le Havre où vit sa famille.

L'écrivain masque ses cousines, ses oncles et tantes, en modifiant leurs noms et prénoms mais chacun reconnait le Docteur Georges, député du Havre et gendre du président Coty, sous le pseudonyme du « docteur Charles » et les familiers identifient aisément les personnages de ce roman dont on lit l'évolution sociale et religieuse en un demi siècle.

La description d'Etretat, l'évocation de son ancien maire Raymond Lindon (père de l'éditeur Jérome Lindon directeur des Editions de Minuit) rappelle que le chemin de fer, là comme ailleurs, permit la création de cette cité balnéaire appréciée des parisiens qui trouvaient la mer à deux heures de la capitale. Maupassant, Maurice Leblanc, les impressionnistes contribuent à la notoriété de ce paradis qui attire une clientèle aussi aisée que discrète. D'où la fondation d'un casino et d'une digue « Le Perrey » protégeant une vie sociale codifiée par les us et coutumes de la bourgeoisie qui voit se succéder les générations de 1880 à 1980, époque où l'impôt sur la fortune et les taxes foncière contraignent les familles à vendre leurs villas condamnant ainsi à la ruine ces petites stations et leurs artisans et achevant, par exemple, la légendaire pâtisserie Lecoeur.

Benoit Duteurtre observe le saccage de la nature et l'exploitation à grande échelle des galets qui laissent le littoral exposé aux marées et rasent les légendaires cabines de plage. Paru en 2008, cet ouvrage n'évoque pas le parc éolien et ses 71 turbines qui vont polluer polluer ce paysage mondialement connu …

« Les pieds dans l'eau », le romancier s'amuse à peindre avec ironie et nostalgie un monde en voie d'extinction mais il conclut avec espérance « je ne connais rien de plus fascinant que ce mélange de beauté immuable et de transformation du monde ».

Etretat demeurera donc éternellement célèbre, « L'aiguille creuse » et « La véritable identité d'Arsène Lupin ou le Secret des rois de France » n'ont pas fini de nous enchanter et Benoit Duteurtre rejoint Maupassant, Maurice Leblanc et Valère Catogan (alias Raymond Lindon) au panthéon des écrivains normands.
Commenter  J’apprécie          785
Benoît Duteurtre raconte Étretat et ses falaises, ses autochtones, les Parisiens … les habitudes et les manies de tout un chacun. L'auteur, arrière petit-fils de René Coty, dernier Président de la IVème République, de 1954 à 1959, évoque ses souvenirs d'enfance, d'adolescence et des premières années de sa vie d'adulte. Les thèmes de ce roman autobiographique sont la vie au Havre et à Etretat des descendants de René Coty, Président.
Un livre intéressant, une analyse de société faite avec humour, la description des falaises d'Étretat et de sa baie, donnent lieu à quelques passages poétiques qui enjolivent le récit.
Commenter  J’apprécie          280
« Tout ce qui disparaît me désole. » Benoît Duteurtre exprime une nostalgie douce et amère pour nous raconter la fin d'un monde. Pour ce faire, il puise dans la veine autobiographique. Il retrace le parcours social de la branche maternelle de sa famille et analyse la sociologie de la station balnéaire d'Étretat qu'il fréquente depuis son enfance.

« le 23 décembre 1953, à la surprise générale, René Coty était devenu président de la République française. » Cette élection provoque un cataclysme dans l'existence de ses proches. Habitués à un effacement timide, les voilà projetés dans les fastes de la République, contraints à devoir assumer une notoriété qui leur déplaît. Les petites-filles de René Coty restent indifférentes à la hiérarchie sociale et décident d'épouser des petit-bourgeois (ingénieurs, médecins). Elles choisissent ainsi une vie simple et heureuse, loin des mondanités. le souvenir de l'illustre aïeul s'efface progressivement et chacune finit par mener une vie normale et anonyme.

La deuxième partie du roman s'intitule « La fin du christianisme ». Duteurtre illustre le déclin de la bourgeoisie catholique à travers l'exemple de sa famille. Ses parents formaient un couple à la fois progressiste et très croyant. Enfant, l'auteur appartenait à la chorale de Saint-Thomas-d'Aquin du Havre. Les petits chanteurs entonnaient des morceaux de Lully, Rameau ou Haendel pour la grand-messe. Mais l'esprit libertaire imprègne peu à peu la chorale et bientôt des refrains de guitare issus du répertoire folk américain résonnent au cours de l'office. La chorale devient mixte et perd toute raison d'être. Les premiers renoncements ont marqué le début d'une défaite totale de la tradition. L'ouverture s'est transformée en déconfiture.

Une autre partie du roman porte également un titre évocateur : « La lutte des classes à Étretat ». Ce site est célèbre pour son « aiguille » et ses hautes falaises de craie blanche. Étretat est devenue au cours du XIXème siècle une station balnéaire prisée par la bourgeoisie parisienne. Des familles aisées continuent de s'y rendre chaque saison et pratique l'entre-soi en cultivant les « relations de plage ». C'est un monde fermé qui se retrouve autour de rituels précis : arpenter le Perrey le long des falaises, prendre des bains de mer à heures régulières, manoeuvrer le canot traditionnel nommé périssoire, posséder sa cabine, participer à un gala fin août. Adulte, Benoît Duteurtre tentera de s'intégrer à la société d'Étretat. Il ne parviendra qu'à nouer quelques liens avec les personnages âgées ravies d'échanger avec ce jeune-homme charmant. La plage est partagée avec les touristes issus des campings mais aussi avec ceux issus des quartiers populaires du Havre. La cohabitation est parfois difficile…

Duteurtre regrette la disparition d'une bourgeoisie qui cultivait l'esprit et le luxe et qui savait s'inventer une esthétique. Une classe sociale qui a offert de nombreux artistes à la France et qui se faisait construire des villas de plaisance originales. Désormais, le tourisme n'est plus un privilège, il s'est démocratisé et fait désormais place à une industrie des loisirs qui gomme toutes les disparités pour livrer un divertissement standardisé.

Le 11 août 1999, l'auteur observe l'éclipse totale de soleil de la plage. Ce phénomène symbolise à ses yeux la fin d'un monde à quelques mois de l'avènement d'un nouveau millénaire. La villa familiale est vendue à une famille qui a fait fortune dans la grande distribution, une cousine qui cultivait la mémoire de René Coty décède, certains rituels propres à la société d'Étretat ne sont plus suivis. Pour l'auteur, ce constat peut être étendu à la France. Il regrette la disparition d'un monde remplacé par une modernité décevante. Benoît Duteurtre se désole et relève par la satire quelques traits typiques de notre époque. Il consacre de nombreuses pages au galet d'Etretat qui seul parvient à contenir les marées et à ralentir l'expansion touristique et se moque d'une société avide de "précautions" qui en vient à interdire l'usage d'un canot dans les zones de baignade. Résigné, l'auteur nous livre une nouvelle fois son credo, il faut : "goûter à toutes les joies possibles".
Commenter  J’apprécie          230
Dans ce roman clairement autobiographique, Benoît Duteurtre évoque ses souvenirs d'enfance et d' adolescence sur la côte normande, entre le Havre et la plage d'Etretat. Arrière petit-fils de René Coty – dernier Président de la IV ème République, de 1954 à 1959 – , ses réminescences sont indéfectiblement liées à l'histoire familiale ; défilent ainsi ses cousines, ses tantes et ses oncles, sa grand-mère, sa mère... et on sent la figure de l'arrière-grand-père planer de page en page...
À travers des images, des sensations, des lieux, des odeurs, des visages, des saveurs, des bruits, l'auteur retrace des instants d'une époque aujourd'hui révolue avec des sentiments différents : tantôt avec son regard d'enfant empreint de candeur tantôt avec ses yeux d'adulte, lucide et volontiers ironique.
Conjointement, Benoît Duteurtre profite de l'évocation de la deuxième partie du XX ème siècle pour faire une sorte d'étude sur l'évolution de la société durant ces années-là (consumérisme, addiction – casino, drogues – Mai 68...) à travers le microcosme d'Etretat et de sa plage : le comportement des parisiens, des touristes, des autochtones, des jeunes des cités du Havre...
L'écriture est pleine de charme lorsqu'il entre en contemplation. Ses descriptions de la mer et de ses baigneurs sont très belles. Une atmophère un brin désuète avec le luxe des villas de la station balnéaire et les cabines du bord de mer, le poids de l'Histoire et l'influence d'un homme sur l'existence d'une famille entière de génération en génération, les falaises abruptes et les traces laissées par les impressionnistes, de jolis portraits de femmes, l'apprentissage d'un homme devenu écrivain... Une agréable promenade.
Lien : http://lesmotsdelafin.wordpr..
Commenter  J’apprécie          130
Maupassant introduit le roman de Benoît Duteurtre, Les pieds dans l'eau, avec une description d'Etretat mise en exergue. Il souffle aussi à l'auteur le titre de son 1er chapitre, Sur l'eau mais l'histoire de Benoît Duteurtre démarre au début des années soixante et retourne volontiers en arrière, lors de l'acquisition de la « Villa Cheu Nous » rebaptisée « La Ramée » par son arrière-grand-père René Coty, en 1948. Par petites touches discrètes et dans un style fluide, l'auteur retrace ses villégiatures à Etretat et dépeint les us et coutumes d'une bourgade aux rituels indéboulonnables. L'ancienneté de l'implantation de l'estivant lui procure des lettres de noblesse au sein d'un cénacle à cheval sur ses principes : « A l'ombre des falaises normandes, chaque sortie à la plage ressemble à une lutte, recouvrant une infinité de plaisirs cachés. Imperceptibles au premier abord, ces plaisirs minuscules sont l'un des attraits de l'existence du Parisien à Etretat. […] mettre les pieds dans l'eau glacée, prendre un bain de soleil sur les cailloux, résister à la bise du nord en plein mois d'août, se baigner sous la pluie, accomplir inlassablement la même promenade entre deux pans de falaise. » Il suffit de relire la chronique De Maupassant, « Etretat », rédigée en 1880 pour le journal le Gaulois. On y retrouve des rituels identiques à ceux décrits par Benoît Duteurtre. le monde pourrait s'être figé pour toujours dans la station balnéaire normande mais il n'en est rien. L'auteur parle de menues choses qui s'évanouissent définitivement. Quand on les a connues, on peut les regretter. Il y avait un vrai bonheur à goûter aux délicieux Brésiliens meringués, nimbés de « Béné » de la pâtisserie fine Lecoeur, rue Alphonse Karr, à Etretat, juste avant d'entreprendre la balade des falaises d'aval en suivant les indications données par Maupassant dans sa correspondance avec Flaubert. Lecoeur a fermé. L'itinéraire a perdu en sauvagerie ce qu'il a gagné en aménagements. Par son écriture déliée, Benoît Duteurtre réveille des souvenirs pâlis, ravive des regards embrumés, rallume des sensations enfouies, tout cela avec beaucoup de délicatesse. Il y a de la bonté d'âme dans cette écriture, une manière naturelle d'être à la bonne distance du sujet, sans pathos, sans mépris, avec une réelle compassion : « Je ne trouvais pas le passé préférable en soi ; mais je le trouvais irrésistible au moment de disparaître, quand il se réduisait à quelques personnes, quelques conversations, quelques souvenirs ». Les pieds dans l'eau est un bon titre et un bon livre.
Commenter  J’apprécie          100
Quand on se plonge dans cet ouvrage, on ne sait pas trop où on va. Difficile au premier abord, surtout quand on ne connaît pas l'auteur, de comprendre l'intérêt de cette autobiographie d'un écrivain descendant de René Coty car l'auteur en lui-même étant mal connu, au même titre que son célèbre aïeul. Mais au fil des pages, Benoît Duteurtre nous relate des événements plus intéressants, et on comprend que l'intérêt des passages colle parfaitement à l'intérêt que l'auteur donnait aux différentes périodes de sa propre vie. Ainsi, on s'ennuie quand il s'ennuie, on s'amuse quand il s'amuse, et on rêve quand il rêve et on pleure quand il pleure.
Je le conseille aux âmes nostalgiques qui ont le privilège de connaître les joies d'une maison familiale en littoral lorsqu'elles étaient enfants.
Commenter  J’apprécie          80
C'est plutôt une découverte agréable, entre chronique familiale et observation de société. le grand-père de l'auteur, René Coty, avait acheté une villa pour sa famille à Etretat, avant de devenir président de la République de 1954 à 1959. le décryptage des attitudes familiales par rapport au personnage public de leur père et grand-père, est intéressant. La peinture de la bourgeoisie normande d'Etretat ne manque pas de saveur, avec ses codes d'utilisation de la plage, ses spectacles de fins de saisons, ses demeures somptueuses mais qui partent en pièces, l'arrivée de nouveaux bourgeois au fil des années. L'éducation havraise, discrète et respectueuse des autres, de l'auteur, ses amitiés, ses loisirs, ses vacances, tout ceci constitue une jolie chronique qui ne manque pas de charme, ni d'humour… Une lecture parfaite pour des vacances en Normandie !
Lien : https://lettresexpres.wordpr..
Commenter  J’apprécie          70
J'avais une bonne raison de m'intéresser à ce livre, puisqu'il se déroule à Etretat, petite station de bord de mer typiquement normande, dans le pays De Caux, où je vais régulièrement. Etretat ce sont les falaises célèbres, Maurice Leblanc, Guy de Maupassant ; c'était aussi une grande bourgeoisie parisienne ou havraise qui venait rituellement tous les ans à la belle saison, s'efforçant de perpétuer les fastes et traditions d'avant-guerre.

L'auteur, arrière-petit-fils de René Coty, Président de la République, a baigné tôt dans ces rituels et nous décrit les us et coutumes de la station avec verve et légèreté. René Coty y possédait une propriété "la Ramée" qui permettait à la famille de se retrouver tous les étés

Lien : http://legoutdeslivres.canal..
Commenter  J’apprécie          60
Ce roman autobiographique est une chronique familiale pleine de charme et de nostalgie Un vrai coup de coeur.
C'est à La Ramée, la maison familiale d'Etretat que se retrouvent ou se suivent les membres de la tribu, descendante du président René Coty.
L'auteur évoque avec tendresse et ironie ses ascendants, ses nombreuses et attachantes cousines, les plaisirs minuscules, les rituels de la plage, les bains dans les flots toniques. A signaler un chapitre cocasse sur les galets d'Etretat, où, avec un formidable esprit de clocher se déploie toute la verve et le talent de l'écrivain.
Il exprime avec habileté ce difficile compromis entre le souci de respectabilité d'une honorable famille catholique engagée et les aspirations à plus de fantaisie, de liberté et d'extravagance.
J'ai aimé le regard distancié porté à la fois sur son clan et sur une société en mutation, oublieuse de valeurs désuètes mais tellement confortables.
Commenter  J’apprécie          60
Agréable roman sur la station d'Etretat et ses estivants : on retrace l'évolution de cette station balnéaire normande de 1948 à nos jours en parallèle avec la famille (filles, petits-enfants…) du président René Coty dont l'auteur est l'arrière petit-fils.
Entre nostalgie et ironie, le ton est très personnel mais on aborde des thèmes universels : à travers l'évolution des moeurs des estivants, les changements d'été en été, l'auteur brosse le portrait de la société française.
J'ai aussi aimé « reconnaître » les lieux décrits, du Havre à Etretat et le ton particulier : personnel, impliqué mais aussi distancié, analytique et sans complaisance.
Commenter  J’apprécie          50




Lecteurs (115) Voir plus



Quiz Voir plus

Les écrivains et le suicide

En 1941, cette immense écrivaine, pensant devenir folle, va se jeter dans une rivière les poches pleine de pierres. Avant de mourir, elle écrit à son mari une lettre où elle dit prendre la meilleure décision qui soit.

Virginia Woolf
Marguerite Duras
Sylvia Plath
Victoria Ocampo

8 questions
1704 lecteurs ont répondu
Thèmes : suicide , biographie , littératureCréer un quiz sur ce livre

{* *}