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Critique de Pancrace


Benoit Duteurtre a volé mon « je » !
Il a traduit son adolescence comme si c'était la mienne, avec les mêmes filles qui absorbaient notre horizon dans les cours de récréation, avec les mêmes cours de physique-chimie où nous étudiions les paramécies.
Mais non !
Promenade dans ses quinze ans. Le Havre, été 76.
Promenade musicale, de Debussy à Led Zeppelin en passant par Zenakis, Stockhausen et Pink Floyd époque « Meddle ». « Je » s'en prends plein la gueule.
Promenade picturale aussi, de Monet à Paul Klee et de Juan Gris à Vasarely.
Vaste défi, « je » est transi.
« Je » s'intéresse à tout quand il s'agit d'art. Je voulais être peintre, musicien, écrivain, je dévalisais les bibliothèques, arpentais les musées. Mes petites ressources ne me permettaient pas les concerts ou l'opéra, tant pis, j'avais la musique dans la peau. Merci Misyé bobo !
Pour la littérature, tout y passe, « je » s'occupe de tout. Il créé son journal de collège, il prend des cours de théâtre, il va chez Salacrou un ami de son oncle, chercher conseil sur ses talents d'écrivain. Autant être bien armé pour attaquer Mallarmé.

Prêt, « j'étais fier de mon Zarathoustra sympathique et doux descendant des montagnes pour éclairer les humains ». Réparer le monde, sonder la mumène* en grignotant des méloko* dans les bistrots où les amoureux s'embrassaient sans tabous aux tables où, s'échangeait en pot, du tabac blond de Virginie que son pote Jean-Paul aimait aussi. Surréalisme cocasse.

Sérieusement, « je » tombe en amour platénuque d'Hélène extirpée avec difficulté d'une cour de récréation. Elle va le fasciner, ils vont être amis longtemps. Ils iront se promener à Paris se sentant libres et heureux comme on peut l'être dans l'insouciance des 17 ans.
N'avez-vous jamais eu ce sentiment parfait d'être entre deux vies, plus un enfant, pas encore un adulte, à une ravissante frontière imaginaire sans octroi où tout est possible ?

Hélène sera enceinte de Pierre, elle ira faire une IVG en Angleterre, il restera à la LCR*, parterre. Toute une ère !

« Les atouts physiques, tout comme les origines sociales délimitent souvent les groupes imperméables. » …gris avec des épaulettes et une martingale bien serrée à la taille qui donnait à mon père l'air acerbe, raide et martial. Sur tous les sujets, un gouffre d'incompréhension nous séparait, aussi difficile à combler que d'imaginer un duo vocal entre Tino Rossi et Alice Cooper.
Cet abîme géant, je l'imagine identique et fatidique pour « je » avec des parents petits bourgeois catholiques de province dans les années 70, bien que les parents à cette époque étaient déchirés entre laisser le libre arbitre à leurs descendants qui délaissaient allègrement leurs études de savants pour l'art avec un grand dénouement et la sanction voire le bannissement aberrant après 68 cependant.

« On dit parfois que chaque être humain, durant sa jeunesse parcourt en accéléré l'histoire de l'Humanité ».
Avec M. Duteurtre, on aura bien gambadé dans les méandres de nos adolescences tellement similaires partageant l'intimité d'un tout petit bout d'Humanité.

* (l'âme humaine) (mets locaux)
(ligue communiste révolutionnaire)
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