AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Zazaboum


Tout en n'étant pas un roman, ce livre est captivant et intéressant, bien que parfois un peu ardu pour moi avec une écriture soutenue.

L'auteur a transcrit en français contemporain le vieux français tout en conservant la structure et le sens de la phrase citée. Son essai commence à la période des Croisades et à l'installation de royaumes français outre-mer (comprendre outre-Méditerranée).

Il démontre sans difficulté que le fait d'être français ne découlait pas d'un Etat physique représenté par le Royaume de France, avec des frontières fluctuantes mais d'une communauté de langue : le français issu des différents dialectes de langue d'Oïl. Étaient français tous ceux qui parlaient cette langue quelle que soit leur localisation géographique. de l'Angleterre à Jérusalem le français écrit a servi à véhiculer les informations et la culture. Les premières publications en français sont d'ailleurs le fait de l'Angleterre anglo-normande.

C'est un livre qui ne se résume pas et quelques citations en éclairent le contenu. Il aurait été super d'avoir accès à des cartes actives pendant la lecture avec le déplacement des frontières et des associations “politiques” ainsi que du rayonnement de la langue dans les régions où elle s'est implantée.

J'ai eu plus de mal avec les deux derniers chapitres qui abordent le fondement des lois françaises et de la naissance d'un Etat et d'une identité, issus du territoire et non plus de la communauté de langue ainsi que l'évolution du mode de gouvernance.

Fan d'Histoire et de la langue française, j'ai adoré plonger dans ce livre mais j'admets qu'il faut un minimum d'attrait pour ces deux sujets sous peine d'être vite désintéressé !

Citation 1 : pages 73-74
L'écrit contribue d'une façon irremplaçable à faire d'un ensemble de dialectes une langue et à constituer l'espace francophone comme tel dans “l'élaboration littéraire, puis administratives, d'une langue commune écrite. L'origine du français comme cadre pan-dialectal réside très largement dans son accession à l'écrit. En cela, le français fut d'abord une langue écrite. Il devient d'ailleurs le véhicule d'une culture partagée qui accède à l'écrit plus tôt que les autres langues romaines. Dès le début du 12e siècle il existe une production littéraire en français. Elle est d'abord anglo-normande. Il faut le souligner “parce que les histoires classiques de la littérature française médiévale persistent à ignorer le fait que la littérature française commence, en toutes ses dimensions, dans l'Angleterre anglo-normande du 12e siècle”. Sur le continent il faut attendre la fin du 12e siècle.

Citation 2 : page 93
Définir la langue française par une conformité avec un standard Royal, finalement compris comme national, ne permet pas de comprendre l'unité linguistique de l'espace francophone ni l'utilisation du français en Europe et en Orient. Etienne Pasquier en 1560 avait raison : “Chacun se fait à croire que la langue vulgaire de son temps et la plus parfaite et chacun est en ceci trompé”

Citation 3 : pages 262-263
La communauté politique décrite par le “Livre des assises” est fondée sur l'accord et non sur la domination. L'état et l'ensemble des institutions dans lesquelles s'exprime l'existence de la communauté politique et la pérennité de l'accord qu'il a créé. le Prince est un membre de l'état non son incarnation à lui seul. Il n'est pas l'état.
Cette conception est incompatible avec la prétention à la sacralité du pouvoir royal telle qu'elle est comprise et particulièrement affirmée depuis Philippe IV (1285-1314) notamment dans ses relations conflictuelles avec la papauté. Elles constituent le cadre dans lequel prennent place le procès fait à l'ordre du Temple et les autres procès politiques de ce règne marqué par leur utilisation inédite comme méthode de gouvernement.
Ainsi que l'a souligné en 1996 une grande historienne anglaise, Janet Coleman, alors “s'élabora une théologie politique théocratique selon laquelle un peuple, plein de piété, était uni par un roi sacré”. Par la suite, “ à partir de la fin du 14e siècle la France n'a cessé de développer un modèle autoritaire de la royauté qui a conduit à la conception d'un Etat administratif. La théologie politique française s'appuyait sur une idée théocratique du gouvernement pour résoudre le problème de la double allégeance des sujets à l'église et à l'état. La France était devenue un état religieux”.

Masse Critique février 2022
Commenter  J’apprécie          304



Ont apprécié cette critique (30)voir plus




{* *}