Dans une chronique précédente, j'avais catégorisé deux groupes de personnes : nous les amateurs/trices de romances douces et sucrées, avec un nounours à la guimauve à la place du coeur et les autres (dont fait partie Monsieur « Et toi tu lis quoi? ») qui n'éprouvent aucun intérêt particulier pour les romances douces et encore moins pour les téléfilms romantiques que nous chérissons tant, et qui ont un palpitant tout ce qu'il y a de plus biologiquement normal.
« A sa rencontre » est pour nous : la catégorie 1. Les catégories 2, je vous invite à le lire, il pourrait peut-être vous faire changer d'avis.
J'ai vraiment apprécié le style de
Chloé Duval : elle nous parle, je l'imaginais même en train de me faire la lecture. C'est une écriture vivante, dynamique et douce.
L'alternance entre les personnages de Gabrielle et d'Alexandra, chacune dans son époque, avec plus de cent années les séparant est en parfaite symbiose avec le parallèle des destinées de chacune d'elles. A peu de chose près, et à 100 ans d'écart, elles vivent des situations amoureuses et des déboires quelque peu similaires mais dans des proportions différentes. Quand Gabrielle, l'ancêtre d'Alexandra, va prendre un bateau pour résoudre une situation; Alexandra, elle, va envoyer un mail !
Que ce soit Gabrielle ou Alexandra, je les ai appréciées autant l'une que l'autre. Alexandra a un tempérament plus modérée que son ancêtre. Gabrielle est souvent dans le mouvement, à prendre les choses en main. Alexandra me semble plus dans la réflexion, à user des mots plus que des gestes, et à jurer en anglais. J'ai trouvé hyper rafraîchissant que pour une fois, une auteure française, fasse évoluer son personnage dans son temps et son époque de façon « normale » du moins surtout pour Alexandra. Je m'explique : les derniers romans d'auteures françaises que j'ai lus ont selon moi plusieurs travers :
1/ les prénoms et noms des personnages du style : Jean-Xavier, ou Angèle, j'invente mais personnellement et dans un rayon proche de 600 km, je ne connais personne qui porte les prénoms que j'ai pu voir dans certains romans ces derniers temps. Alors a) ça enlève du charme à l'histoire. Certes on a mis un prénom bien « français » et on leur fait faire des choses bien françaises comme acheter du pain et du fromage mais ça ne fait rêver personne, et b) ça me tape sur les nerfs.
Quand je commence une lecture avec « Jean-Etienne était fou de rage et pour calmer ses nerfs se prépara un sandwich au fromage avec le pain provenant de la boulangerie située en bas de chez lui où travaillait Francine. » : je suis pas emballée, pas du tout, du tout, du tout emballée et j'en suis désolée pour tous les Jean-Etienne et toutes les Francine de la terre.
Donc merci Chloé, des Gabrielle je n'en connais pas mais c'est pas grave parce qu'elle vit en 1900, mais des Alexandra oui j'en connais dans le monde réel !
Et 2/ Ici les protagonistes ne sont pas des gens perchés qui se retrouvent dans des situations improbables et font des choses encore plus improbables. Je n'aime pas du tout ces romans soit disant « réalistes » qui ne le sont au final pas du tout car aucune situation n'est raisonnablement possible. La romance est magique certes et peut-être utopique, mais elle suit ici un déroulé logique, sensé et pour le coup réaliste. Mis à part le maire de la ville qui ressemble à Tom Hiddleston.
voilà voilà…, donc mis à part cela, le reste est plus que vraisemblable. Les personnages ne sont pas des extraterrestres de la vie et n'ont pas des réflexions tout droit sorties de Psychologies magazine. Mention très bien à notre auteure, avec les félicitations du jury.
Je suis aussi touchée par cette histoire pour deux raisons bien particulières, en dehors de la romance, : 1/ Les vieux châteaux, les vieux domaines, les vieilles pierres, les souvenirs tour cela résonne en moi par rapport à mon histoire personnelle et 2/ je comprends notre auteure, ce qu'elle écrit est tellement juste,.
Pour rester dans la thématique de l'écriture, je voulais souligner ce passage où elle explique le terme anglais « longing » pour lequel elle est bien en peine de trouver un équivalent en langue française : je suis complètement d'accord. Je ne suis pas bilingue mais j'ai une grande passion pour l'anglais : je le lis, je le parle, je le comprends dans un très bon niveau ma foi. Tout ça pour dire qu'à l'évocation de « Longing« , le jukebox s'est mis en route et ma lecture s'est poursuivie à partir de ce point avec la chanson "Open Arms" de Mariah Carey.
Pourquoi cette chanson ? Oui parce que j'aime inconditionnellement Mariah Carey, certes, mais surtout et principalement parce que je trouve que c'est une bonne définition de « longing » et qu'elle se marie très bien avec l'histoire.
« Longing » m'a donc beaucoup parlé, au point que j'en disserte dessus… Mais j'ai été à deux doigts de faire un free hug à mon Kindle quand j'ai lu : « Je vivais dans ma tête, plus que dans ma vie« . Cette petite phrase c'est purement et simplement la définition ce que je suis, sauf que je ne me l'étais jamais dite et être face à cette vérité m'a beaucoup émue : Merci Chloé une fois de plus !
Maintenant que nous avons parlé des dames, parlons de ces messieurs et des gros appels du pied de notre auteure pour lire Outlander et faire la connaissance de Jamie… Que dire, si ce n'est que notre narratrice s'est fait plaisir avec nos gentlemen un peu bourrus mais pas méchants pour deux sous, qui ont tous deux un passé tragique : le Thomas de Gabrielle plus que le Eric d'Alexandra. Thomas réunit tous les codes du héros de romance historique tant par son physique que par son histoire. D'ailleurs, pourquoi tous les personnages masculins ou du moins la majorité ont-ils systématiquement ces cheveux pour pub L'Oréal et leur couleur noir corbeau ? Non que ça me dérange mais c'est intrigant…
Commençons par Thomas, l'ancêtre d'Alexandra, à qui j'attribue la médaille d'argent. C'est un personnage avec le physique que nous attendons et espérons dans ce contexte romantico-historique, il a un côté sombre, une histoire douloureuse, il est renfermé mais pas insensible.
Quant à Eric, le mâle de notre époque, c'est Monsieur Bourru qui ne parle que quand c'est nécessaire et s'il y est forcé : surtout face à Alexandra qui prend un malin plaisir à l'asticoter. le duo Eric/Alexandra que l'on aurait aussi bien pu baptiser « Suis mois je te fuis et fuis-moi je te suis » parce qu'ils illustrent complètement la théorie de l'élastique.
Entre Thomas et Eric qui choisir ? Difficile, j'aime bien le côté chevaleresque et gentleman de Thomas, mais j'aime plus je crois la subtilité d'Eric qui malgré son aspect « ours » est un passionné.
J'ai évoqué l'écriture, les personnages, maintenant parlons de la romance en elle-même : tous les ingrédients, tous les codes y sont, ainsi que de grosses références genre appel de phares dans la nuit noire : la belle et la bête, nos écossais en kilt, Roméo et Juliette, tout ça pêle-mêle. N'oublions pas la frustration : combien de baisers manqués alors que tout était réuni pour le grand plongeon ??? le « longing » nous l'avons bien intégré maintenant, Chloé.
Pour finir et résumer le tout : Double romance, double histoire, double plaisir, et le tout dans un seul livre !
C'est un livre qui m'a fait beaucoup de bien, très plaisant en cette période, je le conseille à toutes les âmes romantiques ou non parce que nous avons tous besoin d'une petite parenthèse de douceur.
Lien :
https://ettoitulisquoi.fr/20..