AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Afleurdelivres


Imagé, fort et émouvant l'auteure scénariste et metteur en scène envoûte avec ce récit aux influences cinématographiques et dresse un sidérant portrait de femme et d'un pays, la Turquie, à travers une ode au théâtre classique et aux films anciens. Après des années de silence mutuel la mère d'Hülya (la narratrice qui vit en France) Esra Zaman grande icône du cinéma turc, « Trésor National » vivant, la recontacte pour une dernière mise en scène extravagante, celle de sa propre mort. Âgée et malade elle demande à sa fille d'écrire un éloge funèbre pour son « show mortuaire » dont elle a déjà réglé tous les détails.
Son appel réactive la mémoire d'Hülya qui se remémore aussitôt son passé et leur relation tourmentée. Refusant d'abord d'écrire cette oraison c'est finalement un roman qu'elle écrira sur ce destin exceptionnel et sur son « mal de mère » sous forme de monologue. En quête de vérité, elle la raconte entre « moteur » et « cut » jusqu'au « clap de fin » à travers ses grands rôles, navets ou succès, pour tenter de la comprendre « Moi, je veux ma version du Trésor. Pas celui qui est le National ». le récit s'ouvre sur trois coups de théâtre qui font écho à trois coups d'état turcs ayant jalonné son parcours et scellé son destin en trois actes pour un lever de rideau sur un destin exceptionnel dans le moyen-orient des années 60 à 80. Un des putschs coïncide avec la disparition de son père photoreporter. Alors que le sombre amant de sa mère semble avoir joué un rôle trouble dans cette tragédie Hëlya se rebelle. Esra Zaman, personnage aussi flamboyant et fourmillant que sa « ville-monde » l'éclatante Istanbul qui lui ressemble, exaspère autant qu'elle attire, agace autant qu'elle touche.
Mère absente, éprise de 2 hommes, trop absorbée par la gloire elle perd sa fille qui s'éloigne « Je suis comme beaucoup d'ados : c'est physique, je ne te supporte pas. Se construire contre sa mère n'est en rien original, ce qui l'est plus, c'est d'être obligée de montrer publiquement son admiration pour la sienne ».
Elle la rejette au point d'effacer toutes traces d'elle, refusant « tout héritage émotionnel », de renier ses origines et de modifier son prénom.
« Tu m'as bâtie sur des mensonges ».
La raison cachée de ce rejet maternel se dévoile peu à peu et nous tient en haleine. Ce roman sera celui de la résilience et de la réconciliation. Alors qu'elle enquête sur son passé une amie de sa mère lui confie un sac empli d'affaires de ses parents : affiches de cinéma, coupures de presse, lettres … chaque objet lui permet de se souvenir et de raccorder les plans dispersés de la pellicule du film de sa vie pour en reconstituer la trame et en éclaircir les derniers mystères dans une Istanbul aux troubles politiques récurrents. Une intrigue policière sous jacente où se mêlent amours interdites et services secrets entretient le suspense.
Un trésor à lire, vraiment.
Commenter  J’apprécie          944



Ont apprécié cette critique (89)voir plus




{* *}