EXIL
Dans tes yeux,
Mon enfant,
J'ai lu l'exil.
Toi, qui es né
Loin du pays,
Tes cheveux ont la couleur de l'olive
À laquelle nous n'avons plus
Le droit de toucher.
Dans l'éclat de tes dents serrées,
Mon enfant,
Je regarde
Des milliers d'étoiles calcinées,
Nos terres volées,
Nos maisons bombardées,
Des bouquets de poings
Tombant sous les orangers.
Dans le mercure de tes larmes,
Mon enfant,
J'ai lu l'exil,
L'exil d'un peuple.
Cendres errantes
Je traîne mes savates d’algues,
Dans les couloirs ivres
De mes nuits sans étoiles.
L’ailleurs
Où m’attendent mes cohortes d’anges bleus,
Mes miroirs d’oubli,
M’appelle, des ondes assoiffées
Où se consument les symphonies du cristal muet.
Je t’appelle, muse crucifiée !
Allons replanter les jasmins,
Renaître plus loin
Que nos cendres gémissantes,
Que le verbe agonisant,
Retracer les mèches des résurrections.
Répondras-tu à mon appel,
Ange de cire ?
Je t’attendrai aux carrefours des grands départs.
Librations
Jusqu’où peut aller la danse,
Dans le tumulte d’un tapis nocturne ?
Qu’accompagne, au juste,
Cette lumineuse euphorie ?
Les mains, semblables à des fruits aveugles,
À des fruits de questions,
Froissent la page d’éther
Qu’entretient le quiet phénix.
Et la robe, de ses flammes, enveloppe
La danse qui se lave à l’ivresse de l’éphémère.
Tant que semblent durer
Cette nuit, cette barque,
Ce port, ce pont, ce phare,
Je chanterai cette lune aux arabesques fœtales.
Lierres sanguins
Pour tout bouclier,
La feuille qui tremble
Et un masque de roses
Habité par ton ombre
Qui se sépare de son collier de cris
Semé aux quatre tracés du futur tu.
Ciel gelé,
Sous la crasse gluante d’une mémoire
Qui n’en finit pas de se multiplier
En lierres sanguins.
Astre inondé d’astres.
La porte du livre se referme
Sur le roucoulement du pigeon
Et les lettres, en cage, recousent
La mèche de l’alphabet.
Ma caravane
Aux quatre points cardinaux de ma souffrance,
De mes rêves fous, de mes soupirs et espérances,
Ma caravane sillonne le désert.
Les pas ivres des dromadaires
Dansent sous les lames chaudes du soleil.
Je parle l’enfer des mains noyées,
Dans le sable carnivore,
La tristesse diluée
Dans le corps fumant d’un ciel que j’explore,
D’un ciel que j’implore !