«J'aime les lourdes caisses, pleines de choses cachées, étranges, exotiques, commença le jeune inconnu. Je les contemple toujours avec émotion, à les voir ainsi fermées dans les échoppes ou sur les quais, renfermant qui sait quel fardeau ou quel trésor dans leurs parois de bois...»
"Un peigne de fer permet parfois de découvrir une civilisation", [...].
"Il tendit le bras vers le parc. Il lui sembla à ce moment précis voir tant de choses terrifiantes qu'il recommença à parler plus vite, plus vite, plus précipitamment, l'haleine courte.
La peur l'envahit, remarqua Egor. Il s'étonna de sa propre lucidité. Il était assez près de M. Nazarie, d'un homme submergé par l'effroi, et il l'observait plutôt sereinement, il pouvait même l'analyser. Il n'osait tout de même pas regarder du côté du parc. Le bras tendu, un seul instant, de M. Nazarie l'avait épouvanté bien davantage que ses paroles terrifiées. Peut-être voit-il lui aussi quelque chose là-bas, songea Egor, peut-être voit-il la même chose que Simina... Cependant, il était encore lucide; seule une très légère inquiétude fit frémir son âme.
"Vous ne devriez pas avoir peur!" dit-il soudain, interrompant l'effusion de M. Nazarie. Arrêtez de regarder par là, vers la maison...
M. Nazarie ne voulait pas, ou ne pouvait pas, l'écouter. Il restait les yeux fixés sur le parc. Il regardait de tout son être crispé, il attendait...
"Et pourtant, il y a quelque chose qui vient de là-bas", dit-il.
Egor tourna lui aussi la tête. L'ombre du parc lui parut soudain lointaine, dense. Il n'y avait rien par là. On ne voyait rien, sinon un minable scintillement vers la gauche, là où se trouvaient les maisons.
"Personne ne vient", dit-il virilement.
Au même moment, il entendit un hurlement qui lui glaçât le sang dans les veines." (L'Herne - p.63-64)
"C'était au-delà de ses forces d'endurer ce feu pareil à nulle flamme, cette sensation de serrer dans ses mains quelque chose d'impossible à apréhender... Il sentit soudain la bouche de Christina à la recherche de la sienne. Ses lèvres étaient si ardentes qu'Egor ne perçut, au premier abord, qu'une fulgurante douleur dans tout son corps. Puis la douleur vénéneuse se coula dans son sang. Il ne pouvait plus résister. Son souffle passa dans le souffle de Christina, et ses lèvres se laissèrent happer, incendiées par sa bouche délicieuse comme une maladie inimaginable. La caresse était si sauvage que les yeux d'Egor s'embuèrent, et il sentit s'ouvrir sa voûte cranienne, ses os s'amollir ; toute sa chair tressaillit en un spasme suprême."
C'était au-delà de ses forces d'endurer ce feu pareil à nulle flamme, cette sensation de serrer dans ses mains quelque chose d'impossible à apréhender... Il sentit soudain la bouche de Christina à la recherche de la sienne. Ses lèvres étaient si ardentes qu'Egor ne perçut, au premier abord, qu'une fulgurante douleur dans tout son corps. Puis la douleur vénéneuse se coula dans son sang. Il ne pouvait plus résister. Son souffle passa dans le souffle de Christina, et ses lèvres se laissèrent happer, incendiées par sa bouche délicieuse comme une maladie inimaginable. La caresse était si sauvage que les yeux d'Egor s'embuèrent, et il sentit s'ouvrir sa voûte cranienne, ses os s'amollir ; toute sa chair tressaillit en un spasme suprême.
... Et si de la sorte je ferme un oeil, je vois ma main plus petite qu'avec les deux yeux... En fait, le monde est le rêve de notre âme...
Oui, c'est vrai - des pensées traversent l'esprit d'Egor - elle a raison. A présent, je rêve. Et personne ne m'oblige à m'éveiller.
Dehors, l'obscurité béait au loin, au milieu du ciel, au-dessus de l'orme. Et il y avait une lune cruelle, blafarde, morte.
Et encore le charme des fouilles, la vie sous la tente, le frisson devant chaque objet trouvé.
C'était le commencement d'une aventure étrange, diabolique - dont il avait peur, mais qui l'attirait néanmoins comme un fruit défendu, empoisonné.
Elle avait une voix mate, comme morcelée. Egor se souvint brusquement d'une pièce de théâtre célèbre une quinzaine d'années auparavant, de la voix d'une bonne femme, une vendeuse de volaille. Mais la voix de la nourrice ne ressemblait à rien. Pas plus que ses yeux, d'un leu pourri, qu'elle gardait sans cesse à terre, fixes et humides. Des yeux d'aveugle, aurait-on dit, mais la nourrice aurait alors gardé la tête haute et raide.