Au bord de la Sandà, je me suis assise et attentive j'ai écouté cette rivière de sable me conter une histoire.
L'histoire d'un homme qui a été mais qui n'est plu… flottant entre deux mondes, entre réalité présente et fantasmée et souvenirs d'une vie.
Un homme qui a trouvé refuge à la lisière de l'unique forêt du pays, un peintre à bout d'inspiration, un peintre à bout de souffle en quête d'apaisement.
Au bord de la Sandà, j'ai été submergée par un jeu de couleurs, un camaïeu de vert, un océan de verdure entre cèdres de Sibérie et bouleaux, mélèzes et peupliers évoquant l'espoir du peintre, d'un peintre déboussolé, dans ce retour aux sources empli de silence et loin de toute agitation afin de retrouver un chemin de vie et la joie de l'acte créatif.
Au bord de la Sandà, je contemple ce tableau,
le carré vert du printemps, petit clin d'oeil à
Thór Stefánsson, le carré vert au point rouge non pas le carmen de la passion mais le rouge du désir, désir animé par l'énergie vitale, augure d'une idylle inattendue cristallisée dans cet éclat de braise traversant la toile.
Pourtant dans cet océan de verdure, seuls des petits soleils fragmentés, les rodhioles aux fleurs jaunes, diffusent leur lumière, esquissant l'éclosion à la vie que l'hiver avait gardé sous son manteau, pour illuminer cette vision et rayonner tout l'été. Les signes annonciateurs de l'hiver révéleront l'immense solitude de notre peintre...
Au bord de la Sandà de
Gyrdir Eliasson ou l'histoire d'un loup solitaire qui rôde dans l'enchevêtrement de sa vie. Au fil des saisons, de deux saisons, l'été et l'automne, comme un dyptique, l'homme au pinceau nous offre un itinéraire visuel, sonore et pictural à travers l'exploration de son monde intérieur, de son imaginaire et l'observation du monde terrestre: un vagabondage que j'ai suivi avec plaisir de Chichkine à Hokusai, d'Alex Katz à Basquiat, de Chagall à
Van Gogh …
Une écriture aussi précise que celle d'un naturaliste, fluide comme l'eau qui s'écoule de la Sandà,
Gyrdir Eliasson promène le lecteur au gré des courants et des gués sillonnant entre échappées oniriques et passages réalistes.
Une douce et belle lecture traversée peut-être par une ondine, paisible presque contemplative, un voyage universel et poétique accompagné de l'écho des vibrations telluriques et illustrés d'impressions artistiques.
Au bord de la Sandà c'est être au bord du temps, au bord du songe… une invitation pour essayer d'attraper le vent.
Une pépite islandaise aussi attractive qu'une fraise des bois sur un tapis de mousse.