Garance déteste les embrassades du matin. Celles du soir aussi, mais elle arrive à les éviter assez facilement. Elle ne comprend pas cette manie qu’ont les gens, déjà obligés de se supporter toute la journée, de s’embrasser à tous bout de champ. Le regard dans le vide, en s’effleurant à peine les joues, l’espace d’une demi seconde. C’est grotesque. Mais tous le monde trouve ça normal.
Si les gens sont si méchants, c’est peut- être seulement parce qu’ils souffrent, mais le temps est long qui sépare le moment où ils ont cessé de souffrir de celui où ils deviennent un peu meilleurs .
Elle n’en veut pas parce qu’elle ne peut pas supporter la simple idée d’entendre le téléphone sonner. Ou même ne pas sonner.Rester muet. Impassible.Pour elle, c’est un instrument maléfique et elle n’y peut rien.
L’amour, c’est toujours une histoire de malheur.
Hallucinée, comme ces explorateurs qui parcouraient l’Afrique à la recherche des sources du Nil, des sources de la vie. Après avoir passé des mois à marcher dans des contrées inconnues, au milieu de peuplades hostiles, ils s’arrêtent, épuisés et hagards, devant un grand lac. Ils se disent, c’est là. Garance se dit la même chose. C’est là. Les sources de la vie.
Le vide est toujours plus rassurant que la peur.
Les préservatifs, un vieux conseil de son père. Un des rares qu’il ait écouté. Parce qu’avec les filles, on ne sait jamais. Surtout si elles te jurent leurs grands dieux qu’elles prennent la pilule.
Elle a pris le temps d’apprendre. Plus on est loin des autres, plus on est proche de soi.
Un regard, c’est abstrait tant qu’on ne le croise pas, tant qu’on ne le cherche pas dans le visage d’un vis-à-vis. Pourtant, c’est très lourd quand on le sent sans le voir, quand on le devine sans le croiser.
Les passions sont faites pour s’éteindre. Elles sont faites pour être un destin qui ne se réalise jamais.