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EAN : 9782878626599
2 pages
Editions Thélème (15/04/2011)
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3.62/5   3218 notes
Résumé :
"Je suis créatif, je suis jeune, [...] extrêmement motivé et extrêmement performant. Autrement dit, je suis foncièrement indispensable a la société". Avec son sourire carnassier et ses costumes chics, Patrick Bateman correspond au profil type du jeune Yuppie des années Trump. Comme ses associés de la Chemical Bank,
il est d'une ambition sans scrupules. Comme ses amis, il rythme ses soirées-cocktails pauses cocaïne. À la seule différence que Patrick Bateman vi... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (312) Voir plus Ajouter une critique
3,62

sur 3218 notes
En quatrième de couverture de l'édition 10/18, Beigbeder qualifie American Psycho comme étant l'Apocalypse de notre temps et il n'en fallait pas plus à une lectrice comme moi pour me lancer dans l'aventure... Malgré les avis opposés concernant ce bouquin, j'ai pris un plaisir presque malsain à entamer cette lecture qui traîne derrière elle comme un arrière goût d'interdit... et là ce fût le choc... C'est donc ça le livre qui a fait scandale?
Politiquement incorrect, dérangeant certes... moi en tout cas je ne lui ai rien trouvé de scandaleux. Je dirai même qu'il s'avère intéressant quand on prend la peine de le lire avec attention.

L'histoire met en scène Patrick Bateman, jeune golden-boy de New-York, âgé de 27 ans. Riche, relativement bien gaulé, notre bonhomme ne porte que de la haute-couture, possède une Amex platine, ne fréquente que les restos et clubs à la mode où l'on croise uniquement le gratin de la population New-Yorkaise. Question poudre aux yeux, on peut dire qu'il assure et d'ailleurs vu qu'on est dans la poudre, il n'oublie pas de s'en mettre un petit coup dans le nez quand l'envie lui en prend, histoire d'accentuer ce petit côté ostentatoire propre à sa "détestable" personnalité.
Patrick Bateman, voilà un lascar qui vend du rêve !
Heureusement pour nous, pauvres cancrelats que le monsieur écraserait volontiers du bout de sa chaussure Armani, on va vite découvrir que notre gugusse n'est pas aussi parfait que ce qu'il montre. La nuit venue, entre deux J&B on the rocks, il viole, torture, dévore, tue les pauvres âmes qui ont eu le malheur de croiser son chemin. Clochards, prostituées, collègues de travail etc... n'ont plus qu'à faire leurs prières car la tornade Bateman déferle sur leur passage et croyez moi, quand la frénésie meurtrière habite le jeune homme, c'est presque du grand art, mais ça je vais vous laisser le découvrir par vous même...

Je crois qu'Américan Psycho, soit on aime, soit on déteste. Pour ma part j'ai ressenti les deux. Au départ je n'ai pas du tout accroché, je me suis même mise en colère, pestant intérieurement sur un éventuel foutage de gueule de l'auteur vis-à-vis de son lectorat.
Dans quel bordel me suis-je embarquée? Voilà ce que je me suis dit pendant de nombreuses pages dans lesquelles s'enchaînaient discussion futiles entre Bateman et ses cons d'amis et descriptions de vêtements de marque dont personne n'a rien à secouer... J'ai été à deux doigts d'abandonner ce foutu bouquin et à chaque fois quelque chose m'a attirée de nouveau vers lui. Il fallait que je sache, que je voie par moi même toute l'horreur dont un homme peut être capable. Et là, ô miracle, une étincelle, pas plus grosse qu'une puce, a commencé à jaillir dans mon esprit.. Les éléments s'emboîtaient d'eux mêmes, tout ce qui m'avait paru inutile prenait tout d'un coup un sens... Vous l'aurez compris, plus moyen de lâcher ce petit pavé de 526 pages !

American Psycho est une démarche audacieuse, une analyse pertinente d'une société dépourvue d'humanité où chacun se crée ses propres codes dans l'indifférence la plus totale. Je pense que c'est ce qui peut choquer quand on fait la connaissance de Patrick Bateman, il est logique de se demander "Pourquoi quelqu'un qui a tout peut avoir de tels agissements?". Finalement on se rends compte que l'argent, la situation sociale, les biens matériels, ne donnent pas l'essentiel, car, en plus d'être schizophrène, Patrick Bateman est un complexé chronique. Il trouve un exutoire à son infériorité dans la souffrance qu'il inflige aux autres.
D'ailleurs, il paraît que le côté choc du livre réside dans les scènes de meurtres, moi je trouve qu'elles sont utiles au récit, même si elles sont gore. Cela nous permet de comprendre un peu plus l'étendue des dégâts dans le cerveau de ce cher Patrick et c'est ce qui fait la richesse du livre.
Finalement j'ai vraiment bien aimé et je lui met 4 étoiles de notations. Je relirai sûrement American Psycho car je suis convaincue que ce livre ne dévoile pas tout quand on l'aborde la première fois.
Pour ceux qui voudraient tenter l'expérience, je vous conseillerai de ne pas vous fier aux avis existants afin de vous faire votre propre opinion.
A découvrir !
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Patrick Bateman est un golden boy dans les années 80 aux USA. Dans un monde des apparences, où chaque objet a un prix, où l'on n'achète que le meilleur, où chaque rapport sexuel est à hauteur du prix du restaurant dans lequel on dine avant, tout pourrait paraitre lisse et sans saveur, griffé Armani. Mais Patrick a des petits passe-temps bien à lui pour tromper l'ennui et donner un petit peu de piment à sa vie.


Quel livre, non mais quel livre !!! Je ne sais même pas si j'ai détesté ou adoré ! Et il m'aura fallu également pas mal de temps pour comprendre ce que me racontait ce livre. Et pour lui trouver une interprétation qui m'aille bien. A défaut d'autre chose, American Psycho aura testé ma résistance sur le descriptif d'habits, de mobilier, de restaurant, de fil dentaire, de femmes (oui, oui, dans l'esprit de Bateman, toutes ces choses sont de même niveau...), avant de m'horrifier par quelques passages tombant littéralement dans le gore, le porno, la torture la plus extrême. On trouve très peu de ces derniers éléments au départ, ils sont noyés dans les éléments du décor (au sens propre). Ils deviennent par la suite de plus en plus fréquents, au fur et à mesure que le délire de Bateman prend le pas sur sa réalité. du coup, Armani et consort, ça repose !
De nombreuses critiques évoquent American Psycho comme une critique acerbe (certes !) de la société capitaliste, libérale et consumériste, notamment américaine (pour moi, cela renvoie au premier mot du titre). Les personnes qui les ont écrites en parleront beaucoup mieux que moi ! Dans American Psycho, aujourd'hui, moi, je voudrais vous parler du côté Psycho. Et en premier lieu, du désert affectif dans lequel évolue notre héros. le monde tel que Bateman le voit, c'est un monde capitaliste, libéral et consumériste (la différence avec ce que je disais juste avant, c'est que là, je ne parle que du monde tel que le perçoit Bateman, son interprétation propre), dans lequel ce qui compte, c'est ce qui se voit, de préférence le plus cher et le plus clinquant. Tout se juge et se jauge à partir de critères rationnels et quantifiables, aussi bien la cravate que la musique (d'où quelques analyses amusantes de groupes de musique américains dans le livre!). Dans ce monde, ce qui est terrifiant je trouve, c'est l'interchangeabilité des choses, mais surtout des gens, au même titre que les chemises. Les noms sont interchangeables, les personnes, et même ces fameux traders côtoyés quotidiennement (on tuerait sa mère pour obtenir un nouveau portefeuille convoité). Il n'y a qu'à voir toutes ces références à, lors des diners entre collègues dans les restaurants à la mode, "ce ne serait pas untel ?", "ce ne serait pas la femme de celui-ci ?"... Alors les SDF, les prostituées, les petites amies mêmes, les animaux, on s'en cogne. S'il en manque à l'appel, il y en a des dizaine qui prendront la relève. Dans ce monde, Bateman lui aussi est interchangeable et non nécessaire, le statut n'a au final d'importance que sur le moment, et la vie n'a pas beaucoup d'intérêt. On est vivant aujourd'hui, on sera mort demain, quoi !
Bref, Ellis Easton nous fait entrer dans la réalité de Bateman, en nous faisant croire que c'est la réalité tout court. J'ai mis beaucoup de temps à voir cette différence, un peu plus de 500 pages quoi... Et pourtant, les indices trainent et sont semés tout au long du texte... Je me rappelle d'un dialogue entre Bateman et sa petite amie qui le gonfle, et à laquelle il ne répond pas poliment (quelque chose comme "ta gu*" ou "tu m'emm*"). Sauf qu'elle ne l'entend pas. Parce qu'il ne l'a pas vraiment dit, excepté dans sa propre réalité. Batemant navigue constamment entre fantasmes et réalités, une navigation largement facilitée par l'alcool et la drogue. Il est plein de routines, d'idées fixes, méticuleux à l'extrême, obsessionnel pourrait-on dire. Il ne rate jamais la diffusion du Patty Winters Show, au pire, il l'enregistre. Il loue toujours la même cassette vidéo porno. Et il s'éclate toujours en la voyant. Les misérables, chef d'oeuvre de la littérature française, revient tout au long de l'ouvrage, en référence. A se demander qui ils sont, ces Misérables là !
Et puis, quand Bateman tue l'un de ses collègues, ce dernier est pourtant vu plus tard, à Londres. D'ailleurs, quand il se rend à son appartement dont il a conservé les clés, il ne reconnait même plus le bâtiment ! Bref, des indices qui montrent le délire de Bateman, il y en a tout un tas, disséminés dans le texte, au lecteur de les prendre. Ou pas. Parce que le problème, c'est que tout ce qui est écrit parait diablement crédible, horriblement réaliste, toujours dans ce style froid et factuel. Il y a bien quelques moments d'émotion, au plus fort de la folie meurtrière et sadique, lors d'un concert de U2, de façon totalement inattendue, ou lors d'un diner avec sa secrétaire. Mais ces moments-là sont très rares. du coup, American Psycho apparait comme un livre ambigu laissant à chacun sa propre interprétation : fantasme, réalité, mélange des deux.
C'est une parodie poussée jusqu'au bout des travers de la société capitaliste des années 80, une critique sociale horriblement cynique, qui titille la part sombre qui est nous. Bateman y apparait comme un monstre engendré par ce monde, qui cherche en lui-même des limites qu'il ne trouve pas en-dehors, élargissant ainsi le cercle de la torture et de la mise à mort. Mais qu'on se le dise : serial killer ou pas, le business comme le sexe continuent de faire tourner le monde. Et ça, ça fait froid dans le dos ! Impressionnant !
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American Psycho, le livre qui a ébranlé l'Amérique, a un titre aussi intraduisible que son contenu est inclassable. La vision qu'offre Bret Easton Ellis de la déshumanisation des rapports sociaux, émaillée de crimes sexuels d'une violence extrême, fait passer notre Houellebecq national pour un Bisounours philanthrope.

On pourrait résumer ce roman à la caricature glaçante d'une génération perdue, car matérialiste et sans idéaux : la génération nommée X en sociologie du travail, née dans les années 60 et 70 (Ellis est né en 1964). Contrairement aux précédentes, cette génération n'a pas dû se battre pour ses libertés, a toujours connu le confort lié au progrès technique mais a grandi dans le contexte de la guerre froide et d'une une économie déstabilisée par les chocs pétroliers, avec comme diktat la réussite sociale (entendez financière), encore plus prégnante aux États-Unis qu'en Europe.

Il n'est donc pas surprenant que Patrick Bateman, le psychopathe du roman, soit un golden boy de Wall Street élégant, brillant et beau comme un ange de l'enfer. L'auteur insiste sur la domination de l'argent en décrivant avec une précision chirurgicale les tenues, les repas et les vaines distractions de Bateman et de ses amis (si l'on peut qualifier d'amis ce groupe de personnes égocentriques). Mais cette apparente perfection cache un gouffre intérieur que la drogue ne suffit pas à combler et qui rend Bateman imperméable à tout sentiment. Convaincu de sa supériorité, il éprouve un tel dégoût pour le reste de ses semblables que la nuit venue, à l'instar de Mr Hyde, il va assouvir ses pulsions meurtrières, en toute impunité et dans l'indifférence générale. Cela débute par la mutilation d'un clochard et évolue vite vers de macabres chorégraphies pornographiques, plus perverses les unes que les autres, et décrites avec la même précision que sa garde-robe.

Après l'émoi et l'indignation bien légitimes suscités par la publication d'American Psycho, Bret Easton Ellis a laissé entendre qu'il fallait prendre les agissements de Bateman au second degré. Les scènes de crimes seraient seulement fantasmées : cela expliquerait l'étrangeté de certains passages, notamment le fait que Bateman ne soit jamais identifié ou arrêté.

Reste une lecture violente, entre horreur et fascination, dont les images me hantent encore plusieurs années après. Elle fait même tinter une petite sonnette d'alarme quand il m'arrive de rencontrer un individu arrogant à la mise tellement parfaite qu'elle en devient suspecte...
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ABANDON !! Oui et je vous jure que ça me fait bien râler (pour rester un tant soit peu polie) parce que ce roman, je voulais à tout prix le découvrir, surtout en lisant toutes les critiques positives sur Babelio.

Et oui, je savais ce qui m'attendait, du moins en ce qui concerne les scènes gores.

En fait, ce n'est pas ça qui m'a fait décrocher, mais les quantités de ce que je nommerai "des élucubrations" (celles d'Antoine me faisaient rire, pas celles des personnages du roman).

Déjà, dès les premières pages, j'ai soupiré en découvrant la scène du taxi et les dialogues sans queue ni tête. Surréaliste...

Et ce ne fut qu'une longue suite de soupirs en tournant les pages et en tombant sur des pavés indigestes de bla-bla, de liste de marques pire que si je me trouvais sur une chaîne consacrée aux pubs.

Ok, c'est bien que l'auteur insiste sur le fait que l'argent a fait d'eux des esclaves, que le dieu fric est leur maître et que ces gens ont perdu toute notion de ce qu'est la réalité. Mais de là à nous décrire, jusqu'à l'indigestion, les détails de leurs repas et toutes leurs vaines distractions... Soupirs, soupirs.

Heureusement que ces divagations endormantes étaient entrecoupées de scènes plus sanglantes pour me réveiller.

Patrick Bateman, notre personnage principal est psychopathe à ses heures perdues et il dézingue des SDF. On passe son temps comme on peu, non ?

Golden boy friqué, il est élégant, ne porte que des costumes qui valent votre mois de salaire, il est plus brillant qu'un sapin de Noël illuminé et nous pouvons dire que c'est une espèce de bôgosse. Bôgosse infernal et infect, oui !

Le pire, c'est que nous entrons à un moment dans l'ère du surréalisme poussé à pleine puissance puisque personne ne s'émeut des traces de sang sur les draps, le sol, les journaux imbibés de fluide vital que la femme de ménage dépose tout simplement dans la poubelle.

Il l'a vraiment fait ou pas ? Il a rêvé, fumé, disjoncté tout seul ?

Je n'en sais rien parce qu'au final, j'ai zappé des centaines de pages, les tournant en grimaçant pour finir par lancer le livre sur la table, de rage.

Même le sang qui giclait m'énervait à cause de tout le reste.

Le plus râlant ? Au boulot, tout était terminé, plié, encodé, clôturé, bref, j'avais le droit de m'affaler dans mon fauteuil de bureau, de mettre les pieds sur la table et de lire durant 4h...

Non, je n'avais rien d'autre à lire avec moi... et là, ce fut un long cri de douleur. Mes collègues ont cru que le PC avait planté, serveur y compris et que toutes les données étaient perdues. Z'ont eu peur.

No stress, c'était juste ma frustration de lecture après quelques chef-d'oeuvre littéraires. American Psycho ne sera pas mon coup de coeur et ma critique ira dans le sens contraire des autres.

Le livre qui a ébranlé l'Amérique ne m'a pas ébranlé, moi...

P'têt que le film avec Christian Bale sauvera les meubles ?

Lien : http://the-cannibal-lecteur...
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Bret Easton Ellis dresse ici le tableau de la jeunesse dorée Américaine dans tout son cynisme et son arrogance, dépeinte avec froideur et réalisme comme dans ses précédents ouvrages. Le rendu est puissant.

Le point essentiel de nos personnages est leur apparence dans la société; ils sont superficiels, totalement inconsistant et ne surnagent dans leur monde que grâce aux quantités d'anti-dépresseurs, alcool, drogue et sexe qu'ils consomment quotidiennement. Et c'est dans ce cadre que nous suivons les pérégrinations de notre héros Patrick Bateman qui travaille (il faut vite le dire) à Wall Street et est par ailleurs un dangereux psychopathe! Les quelques longueurs lors des descriptions vestimentaires ou analyses de groupes de musiques sont à mon sens nécessaires à la pleine caractérisation de notre cher Bateman.

Bret Easton Ellis nous montre ici, toujours avec le même brio, jusqu'où cet américanisme infernal peut amener certains individus.

A noter l'excellente et réputée adaptation cinématographique du roman.

Par ailleurs une très bonne traduction d'Alain Defossé.
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Citations et extraits (80) Voir plus Ajouter une citation
Il existe une idée de Patrick Bateman, une espèce d'abstraction, mais il n'existe pas de moi réel, juste une entité, une chose illusoire et, bien que je puisse dissimuler mon regard glacé, mon regard fixe, bien que vous puissiez me serrer la main et sentir une chair qui étreint la votre, et peut-être même considérer que nous avons des styles de vie comparables, je ne suis tout simplement pas là. Signifier quelque chose : Voilà ce qui est difficile pour moi, à quelque niveau que ce soit. Je suis un moi-même préfabriqué, je suis une aberration. Un être non-contingent. Ma personnalité est une ébauche informe, mon opiniâtre absence profonde de cœur. Il y a longtemps que la conscience, ma pitié, l'espoir m'ont quitté, s'ils ont jamais existé. Je n'ai plus de barrière à sauter. Tout ce qui me relie à la folie, à l'incontrôlable, au vice, au mal, toutes les violences commises dans la plus totale indifférence, tout cela est à présent loin derrière moi. Il me reste une seule, une sombre vérité : personne n'est à l'abri de rien, et rien n'est racheté. Je suis innocent, pourtant. Chaque type d'être humain doit bien avoir une certaine valeur. Le mal, est-ce une chose que l'on est ? Ou bien est-ce une chose que l'on fait ? Ma douleur est constante, aigüe, je n'ai plus d'espoir en un monde meilleur. En réalité, je veux que ma douleur rejaillisse sur les autres. Je veux que personne n'y échappe. Mais une fois ceci avoué - ce que j'ai fait des milliers de fois, presque à chaque crime -, une fois face à face avec cette vérité, aucune rédemption pour moi. Aucune connaissance plus profonde de moi-même, aucune compréhension nouvelle à tirer de cet aveu. Je n'avais aucune raison de vous raconter tout cela. Cette confession ne veut rien dire.
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Où était la nature et la terre, l'eau et la vie, je vis un désert sans fin, semblable à quelque cratère, si dépourvu de raison, d'âme et de lumière que l'esprit ne pouvait le concevoir, à quelque niveau de conscience que ce fût et que, si l'on en approchait, l'esprit reculait, pris de vertige. C'était là une vision si claire, si réelle, si essentielle, qu'elle en était presque abstraite dans sa pureté. C'était là une chose que je comprenais, c'était ainsi que je menais ma vie, ce que je bâtissais avec mes moindres gestes, c'était ma façon d'aborder le tangible. C'était la géographie autour de laquelle gravitait ma réalité : il ne m'était jamais, jamais venu à l'esprit que les gens pussent être bons, ou qu'un homme pût changer, ou que le monde pût être meilleur au travers de ce plaisir que l'on prend à tel sentiment, telle apparence ou tel geste, à recevoir l'amour ou l'amitié de son prochain. Rien n'était affirmatif, le terme de "bonté d'âme" ne correspondait à rien, c'était un cliché vide de sens, une sorte de mauvaise plaisanterie. Le sexe, c'est la mathématique. L'individualité n'a plus lieu d'être. Que signifie l'intelligence? Définissez ce qu'est la raison. Le désir... un non-sens. L'intellect n'est pas un remède. La justice, morte. La peur, le reproche, l'innocence, la compassion, le remords, le gaspillage, l'échec, le deuil, toutes choses, toutes émotions que plus personne ne ressent vraiment. La pensée est vaine, le monde dépourvu de sens. Dieu ne vit pas. On ne peut croire en l'amour. La surface, la surface, la surface, voilà ce dans quoi on trouve une signification... C'est ainsi que vis la civilisation, un colosse déchiqueté...
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Il existe une idée de Patrick Bateman, une espèce d'abstraction, mais il n'existe pas de moi réel, juste une entité, une chose illusoire et, bien que je puisse dissimuler mon regard glacé, mon regard fixe, bien que vous puissiez me serrer la main et sentir une chair qui étreint la vôtre, et peut-être même considérer que nous avons des styles de vie comparables, je ne suis tout simplement pas là. Signifier quelque chose : voilà ce qui est difficile pour moi, à quelque niveau que ce soit. Je suis un moi-même préfabriqué, je suis une aberration. Un être non-contingent. Ma personnalité est une ébauche informe, mon opiniâtre absence profonde de cœur. Il y a longtemps que la conscience, la pitié, l'espoir m'ont quitté, s'ils n'ont jamais existé. Je n'ai plus de barrière à sauter. Tout ce qui me relie à la folie, à l'incontrôlable, au vice, au mal, toutes les violences commises dans la plus totale indifférence, tout cela est à présent loin derrière moi. Il me reste une seule, une sombre vérité : personne n'est à l'abri de rien, et rien n'est racheté. Je suis innocent, pourtant. Chaque type d'être humain doit bien avoir une certaine valeur. Le mal, est-ce une chose que l'on est? Ou bien est-ce une chose que l'on fait?
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Mon allégresse macabre a fait place à de l'amertume, et je pleure sur moi-même, sans parvenir à trouver la moindre consolation dans tout cela, je pleure, je sanglote "Je veux juste être aimé", maudissant la terre, et tout ce qu'on m'a enseigné : les principes, les différences, les choix, la morale, le compromis, le savoir, l'unité, la prière - tout cela était erroné, tout cela était en vain. Tout cela se résumait à : adapte-toi, ou crève.
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Je possédais tous les attributs d'un être humain - la chair, le sang, la peau, les cheveux - , mais ma dépersonnalisation était si profonde, avait été menée si loin, que ma capacité normale à ressentir de la compassion avait été annihilée, lentement, consciencieusement effacée. Je n'étais qu'une imitation, la grossière contrefaçon d'un être humain.
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Vidéo de Bret Easton Ellis
À travers ses romans, Bret Easton Ellis offre une plongée vertigineuse dans les abysses de la société de consommation américaine, explorant les excès d'une génération avide de luxe et de privilèges, tout en dévoilant les fissures béantes de cette façade dorée.
Pour en parler, Tiphaine de Rocquigny reçoit deux invités : Alexia Blin, maîtresse de Conférences en Histoire et Civilisation des États-Unis Pierre Guglielmina, écrivain et traducteur de Bret Easton Ellis
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