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Paul Gorceix (Éditeur scientifique)
EAN : 9782070329700
356 pages
Gallimard (13/02/1997)
3.67/5   9 notes
Résumé :
La chanson de la rue Saint-Paul. Chansons d'amures. Les délectations moroses. Aegri somnia

Par Max Elskamp
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A ma mère.

Ô Claire, Suzanne, Adolphine,
Ma Mère, qui m'étiez divine,

Comme les Maries, et qu'enfant,
J'adorais dès le matin blanc

Qui se levait là, près de l'eau,
Dans l'embrun gris monté des flots,

Du fleuve qui chantait matines
À voix de cloches dans la bruine ;

Ô ma Mère, avec vos yeux bleus,
Que je regardais comme cieux,

Penchés sur moi tout de tendresse,
Et vos mains elles, de caresses,

Lorsqu'en vos bras vous me portiez
Et si douce me souriiez,

Pour me donner comme allégresse
Du jour venu qui se levait,

Et puis après qui me baigniez
Nu, mais alors un peu revêche,

Dans un bassin blanc et d'eau fraîche,
Aux aubes d'hiver ou d'été.

Ô ma Mère qui m'étiez douce
Comme votre robe de soie,

Et qui me semblait telle mousse
Lorsque je la touchais des doigts,

Ma Mère, avec aux mains vos bagues
Que je croyais des cerceaux d'or,

Lors en mes rêves d'enfant, vagues,
Mais dont il me souvient encor ;

Ô ma Mère aussi qui chantiez,
Parfois lorsqu'à tort j'avais peine,

Des complaintes qui les faisaient
De mes chagrins choses sereines,

Et qui d'amour me les donniez
Alors que pour rien, je pleurais.

Ô ma Mère, dans mon enfance,
J'étais en vous, et vous en moi,

Et vous étiez dans ma croyance,
Comme les Saintes que l'on voit,

Peintes dans les livres de foi
Que je feuilletais sans science,

M'arrêtant aux anges en ailes
À l'Agneau du Verbe couché,

Et à des paradis vermeils
Où les âmes montaient dorées.

Et vous m'étiez la Sainte-Claire,
Et dont on m'avait lu le nom,

Qui portait comme de lumière
Un nimbe peint autour du front.

*

Mais temps qui va et jours qui passent,
Alors, ma Mère, j'ai grandi,

Et vous m'avez été l'amie
Aux heures où j'avais l'âme lasse,

Ainsi que parfois dans la vie
Il en est d'avoir trop rêvé

Et sur la voie qu'on a suivie
De s'être ainsi souvent trompé.

Et vous m'avez lors consolé
Des mauvais jours dont j'étais l'hôte,

Et m'avez aussi pardonné
Parfois encore aussi mes fautes,

Ma Mère, qui lisiez en moi,
Ce que je pensais sans le dire,

Et saviez ma peine ou ma joie
Et me l'avériez d'un sourire.

*

Claire, Suzanne, Adolphine,
Ô ma Mère, des Écaussinnes,

À présent si loin qui dormez,
Vous souvient-il des jours d'été,

Là-bas en Août, quand nous allions,
Pour les visiter nos parents

Dans leur château de Belle-Tête,
Bâti en pierres de chez vous,

Et qui alors nous faisaient fête
À vous, leur fille, ainsi qu'à nous,

En cette douce Wallonie
D'étés clairs là-bas, en Hainaut,

Où nous entendions d'harmonie,
Comme une voix venue d'en-haut,

Le bruit des ciseaux sur les pierres
Et qui chantaient sous les marteaux,

Comme cloches sonnant dans l'air
Ou mer au loin montant ses eaux,

Tandis que comme des éclairs
Passaient les trains sous les ormeaux.

Ô ma Mère des Écaussinnes,
C'est votre sang qui parle en moi,

Et mon âme qui se confine
En Vous, et d'amour, et de foi,

Car vous m'étiez comme Marie,
Bien que je ne sois pas Jésus,

Et lorsque vous êtes partie,
J'ai su que j'avais tout perdu.
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A mon père.

Mon Père Louis, Jean, François,
Avec vos prénoms de navires,
Mon Père mien, mon Père à moi,
Et dont les yeux couleur de myrrhe,

Disaient une âme vraie et sûre,
En sa douceur et sa bonté,
Où s'avérait noble droiture,
Et qui luisait comme un été,

Mon Père avec qui j'ai vécu
Et dans une ferveur amie,
Depuis l'enfance où j'étais nu,
Jusqu'en la vieillesse où je suis.

*

Mon Père, amour m'était en vous,
Que j'ai gardé toute ma vie,
Ainsi qu'une lumière luie
En moi, et qui vous disait tout ;

Mon père qui étiez ma foi
Toute de clarté souriante,
Dont la parole m'était loi
Consentie par mon âme aimante,

Mon Père doux à mes erreurs,
Et qui me pardonniez mes fautes,
Aux jours où trop souvent mon coeur
De sagesse n'était plus l'hôte,

Mon Père ainsi je vous ai su
Dans les heures comme elles viennent
Du ciel ou d'enfer descendues,
Apportant la joie ou la peine.

*

Or paix et qui était en vous
En l'amour du monde et des choses,
Alors que mon coeur un peu fou
Les voyait eux, parfois moins roses,

C'était vous lors qui m'apportiez
Foi en eux qui n'était en moi,
Lorsque si doux vous souriiez
À mes craintes ou mon émoi,

Et vous étiez alors mon Dieu,
Et qui me donniez en silence,
Et rien que par votre présence
Espoir en le bonheur qu'on veut.

Pour mieux accepter en l'attente
L'instant qui est, le jour qui vient,
Et sans que doute les démente
Croire aux joies dans les lendemains.

*

Ô mon Père, vous qui m'aimiez
Autant que je vous ai aimé,
Mon Père vous et qui saviez
Ce que je pensais ou rêvais,

Un jour où j'avais cru trouver
Celle qui eut orné ma vie,
À qui je m'étais tout donné,
Mais qui las ! ne m'a pas suivi,

Alors et comme je pleurais,
C'est vous si doux qui m'avez dit
Rien n'est perdu et tout renaît
Il est plus haut des paradis,

Et c'est épreuve pour ta chair
Sans plus mais d'âme un autre jour,
Tu trouveras le vrai amour
Eternel comme est la lumière,

Et pars et va sur les navires
Pour oublier ici ta peine,
ue c'est ce que tu désires,
Et bien que ce soit chose vaine,

Va, mon fils, je suis avec toi
Tu ne seras seul sous les voiles,
Va, pars et surtout garde foi,
Dans la vie et dans ton étoile.

*

Or des jours alors ont passé
De nuit, de brume ou d'or vêtus,
Et puis des mois et des années
Qu'ensemble nous avons vécus

Mon Père et moi d'heures sincères,
Où nous était de tous les jours
La vie ou douce, ou bien amère,
Ainsi qu'elle est et tour à tour,

Et puis en un matin d'avril
Les anges noirs eux, sont venus,
Et comme il tombait du grésil
Sur les arbres encore nus,

C'est vous mon Père bien aimé,
Qui m'avez dit adieu tout bas,
Vos yeux dans les miens comme entrés
Qui êtes mort entre mes bras.
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Puis rue qui s'en va.

Puis rue qui s'en va
Chercher les bassins,
Bouges, galetas,
Où vont les marins,

Maisons à rideaux
Baissés mais qui bougent,
Filtrant un jour clos
De lumière rouge,

C'est filles anglaises
Occupées à boire,
Vêtant pour aimer
Des maillots de moire,

Dans le jour qui pèse
Dehors et si lourd,
Dans le soir d'été
Qui vendent l'amour.

Mais liqueurs au choix
Lors comme la chair,
Aquavit danois,
Anis grec amer,

Whiskey irlandais,
Rhum américain,
Saké japonais,
Opium indien,

Et glaces mirant
En jaune et en noir
Les cuivres luisants
Au dos du comptoir,

Femmes et qui causent
Les épaules nues,
Ou bien se reposent
En long étendues,

Bagues à leurs mains,
Rêvant mal ou pire,
Ou trouvant leur bien
Enfin à dormir.

Lors temps qui s'espace
Dit en heures lentes,
Et jour qui se passe
Ici dans l'attente,

Yeux comme une rampe
Les suivant les murs,
Et sur des estampes
Qui s'arrêtent durs :

On voit le Vésuve
En feu qui se pâme,
Ainsi qu'une cuve
D'enfer et de flammes,

Et rouge et carmin
Plus loin appendu,
Le pont de Brooklyn
Dans l'air suspendu.
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Mais maintenant vient une femme,
Et lors voici qu'on va aimer,
Mais maintenant vient une femme
Et lors voici qu'on va pleurer,

Et puis qu'on va tout lui donner
De sa maison et de son âme,
Et puis qu'on va tout lui donner
Et lors après qu'on va pleurer...

HUIT CHANSONS REVERDIES dont quatre pleurent et quatre rient
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Le consul anglais.

Le consul anglais
Y met son drapeau,
Le consul anglais
Le jour de la Reine,

De gais matelots
Leur couteau au dos,
Y passent farauds
Toute la semaine,

Jean le Hollandais
Quand c'est mai y vient,
Ses paniers aux mains,
La vendre la fraise,

Jean le Hollandais
Parti de Breda
Avec à ses pieds,
Les sabots qu'il a ;

Puis tout soleil, Août,
Dans le ciel qui pèse,
Odorant la graisse,
La bière et le moût,

Sortis les Géants,
Gens bus et kermesse,
Sur leurs chars roulant
Les dieux qui se dressent :

On voit Antigon,
On voit la Baleine
Et nu Cupidon
Sur son dos assis,

Et gais les Dauphins,
Et la Nave pleine,
De joyeux marins
Qui poussent des cris ;

Puis soir advenu
Violons éteints,
Accordéons tus,
Tout sentant le vin,

Lors voix haut montées
Dans la nuit qui pâme,
Musiques allées
Et dehors les femmes,

Sortis les couteaux
Qu'appelle la chair,
C'est de face ou dos
A la mort qui vient,

Amour matelot,
Amour de marins,
Même en le sang clair
Qui trouve son bien,

Et dans la nuit chaude
Lune qui s'incarne
Mort ou vie qui rôde
Sans cris et sans larmes.
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