Citations sur Quatuor (55)
La musique remédie à tout.
Partir vers la maison, vers Jochem, vers la table de la salle à manger, vers le cours de violoncelle. Si elle suit bien ce parcours fléché, le jour s'en ira de lui-même. (p. 20)
On est tellement obsédé par le verbe qu'on veut tout nommer, tout expliquer. Le son est indéfinissable. Il faut simplement l'entendre.
Gare aux effusions : ses propres sentiments, elle doit les traduire par l'intonation et par le maniement de l'archet. Les auditeurs ont le droit de pleurer, pas les musiciens, disait toujours son professeur. (p. 247)
Maintenant, se dit Heleen, il faut garder cette concentration. Continuer à surveiller le doigté des autres pour rester en phase, même si ce n'est pas la peine car à présent, ils sentent le rythme, ils vibrent tous les quatre aux mêmes pulsations. Comment ça se fait, quelqu'un a imaginé cette musique il y a combien de temps, au XVIIIe, et plus de deux cents ans après, ces mêmes notes déclenchent en nous quelque chose qu'on ne peut pas expliquer ? (p. 186)
Un fourgon blindé passe le portail en vombrissant, quelqu'un crie, la barrière s'abaisse pour aussitôt remonter.
(...)L'univers de crime et des châtiments, refoulé par la musique le temps d'une soirée, la prend au dépourvu. Elle se détourne de la fenêtre comme pour revenir à l'endroit où, juste auparavant, elle était entourée de sons et emplie d'une quiétude à présent évanouie. (p. 188)
Le désordre, c'est un signe de vie, un présage de rangement, l'annonce de projets et d'entreprises à venir. (p. 126)
- Moi, je m'appelle Reinier.
-Vous avez du travail ? Ah mais non, vous êtes un grand-père, alors vous n'avez pas besoin de travailler.
-Jouer du violoncelle était mon travail, dit Reinier d'un air compassé. Le garçon le dévisage avec stupéfaction.
"Les gens payaient pour ça ? " (p. 77)
Elle détaille les faits comme ils se sont déroulés, mentionnant sa véritable profession, le type d'instrument qu'elle pratique, le nom de ses amis. Elle pense brièvement à toutes ces règles qu'elle enfreint, mais ne se laisse pas effleurer par le doute. J'en ai ma claque de toujours faire ce qu'on attend de moi, ça suffit ! Maintenant, c'est moi qu'on va écouter. (...)
Si ces paresseux de fonctionnaires ouvrent mon courrier et le rejettent, grand bien leur fasse, se dit-elle. La communication entre les humains, c'est ça l'important. Qui pourrait être contre ? (p. 125)
"Une autre ! " réclame Djamil.
il finit par jouer la suite jusqu'au bout. Tous les mouvements. Puis il couche le violoncelle par terre, à côté de sa chaise. Bach l'a rendu à sa vie active, à sa vie productive. Il estime avoir bien joué, avec de la retenue, mais aussi de l'expressivité. Et tout le temps juste. Finalement, ça ne va pas trop mal. Les choses ne sont pas aussi graves qu'il le pensait. Et tant qu'il y aura des gamins comme celui-ci, capables d'écouter toute une suite en retenant leur souffle, la culture n'est pas encore définitivement perdue; En allant s'asseoir dans le fauteuil, il a l'impression de se tenir plus droit qu'avant. (p. 78-79)