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EAN : 9782815900751
304 pages
L'Aube (15/06/2010)

Note moyenne : /5 (sur 0 notes)
Résumé :
Histoire d’un conscrit de 1813 : Le narrateur Joseph Bertha, apprenti chez l’horloger Goulden à Phalsbourg, voit passer les troupes de Napoléon et l’Empereur lui-même en marche vers la Russie. Amoureux de Catherine, il craint de se voir appelé sous les drapeaux, malgré sa boiterie. L’hiver est terrible et l’on apprend les défaites lointaines qui amènent finalement une conscription générale et sans exception. Joseph Bertha est enrôlé en dépit de son infirmité, et il ... >Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Diable de roman de messieurs Émile ERCKMANN (1822 [à Phalsbourg]-1899) et Alexandre CHATRIAN (1826-1890)...

Quel charmes puissants il dégage...
L'année de parution est la même que celle de leur célèbre "Ami Fritz" : 1864.

Le cinquantenaire de la fin de l'Empire et l'occasion de régler des comptes... L'Alsace n'a jamais oublié les 150.000 conscrits de 1813 : "Sur cent, on n'en voyait pas revenir un seul..."

Les bossus, les borgnes, les bigleux, les simulateurs, les boîteux... tel ce pauvre hère de Joseph Berta, amoureux de "sa" Catherine du hameau des Quatre-Vents, et logeant depuis dix ans chez son employeur, ce bon horloger de Melchior Goulden, au bonnet de coton toujours rabattu au-dessus de son sourcil broussailleux : personne ne sera "oublié" par L'Ogre...

Le brave Joseph vit et travaille (comme apprenti) à Phalsbourg et monte un jour au clocher pour remettre l'horloge à l'oeuvre : de là il découvre en plein hiver toute l'étendue merveilleuse de son pays mais aussi l'afflux des paysans et citadins venus des quatre coins du pays lire ces foutues affiches qui signent leur arrêt de mort.

On se souvient alors du merveilleux récit "Paris. Notes d'un Vaudois" (1938) de C.F. RAMUZ lorsque le narrateur décrit ses sensations vertigineuses au dernier étage de la Tour Eiffel (qui vaut celles de l'artiste acrobate Philippe PETIT [Cf. son "Traité du funambulisme"], aux prouesses excellemment mises-en-scène dans le film "The Walk" de Robert Zemeckis) ; mais aussi du souvenir purement sensoriel d'Antoine de SAINT-EXUPERY nous décrivant sa perception la plus intime d'une chambre de ferme inconnue, perdue en plein hiver, lui dans ses songes face à la mélancolie d'un feu de cheminée, dans son "Pilote de Guerre" (1942) ; puis l'odyssée triste et erratique des "Manuscrits de guerre" (2011 - posthume) ou le refuge fictionnel d' "Un balcon en Forêt" (1958) de l'ami Julien GRACQ...

"L'Avant-Guerre", justement, puis vient le temps du combat.

Sacré mégalomane de Napoléon : sais-tu au moins le prix auxquels tes satanés rêves de gloire et de "grandeur" se paieront ?

Une oeuvre exceptionnellement belle par son humilité de langage, sa sobriété descriptive et son discret humour, qui n'ont pas pris une seule ride, Dieu merci !

Grandeurs soudaines et Lumières aveuglantes du duo universaliste-"alsacien" ERCKMANN-CHATRIAN, si loin d'une supposée (sous-)"littérature" de Terroir"...

P.S. : tiens, ré-écoutons (en prenant tout notre temps) les chansons enjouées de ce bon Roger SIFFER : "Ich hab di garn", "Mad'moiselle Anne-Marie", "In Strossburi gett's ké jumpfra méh" ...
Lien : http://fleuvlitterature.cana..
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"Notre pauvre petite fusillade était comme le bourdonnement d'une abeille au milieu de l'orage".
Le pauvre Joseph se trouve pris au milieu d'une bataille - et même d'une campagne - qu'il nous raconte à hauteur d'homme. Comme Fabrice del Dongo à Waterloo, il n'arrive pas à savoir ce qui se passe, quels sont les enjeux stratégiques, comment se déroule la bataille. Il ne connaît que le pan de mur sur lequel il s'appuie, ou le petit bois dans lequel il passe. Ce récit rejoint donc la Chartreuse de Parme, dans la mesure où il ne peut y avoir d'épopée, de chevalerie, dans cette guerre moderne qui oppose des centaines de milliers d'hommes. le chef lui-même, Napoléon, même armé de sa lunette, ne peut en saisir toute l'ampleur.
Mais, contrairement à Fabrice à Waterloo, Joseph n'est pas animé par la gloire, ni par le patriotisme. Il part se battre parce qu'il est conscrit, parce qu'on lui a demandé. Il n'a pas de haine contre les Allemands - lui qui parle leur langue en tant qu'Alsacien. Contrairement aux "soldats de l'an II" célébrés par Victor Hugo, les idéaux révolutionnaires ne motivent plus les soldats, dans une société où les valeurs ont cédé face aux intérêts : les armées de 1792-94 voulaient diffuser les valeurs des Droits de l'Homme, la liberté et l'égalité. Plus d'égalité et de patriotisme quand les généraux ne pensent qu'à devenir maréchaux, les ducs nouvellement créés à revoir leurs richesses, les soldats à avoir la croix.
Par-delà le contexte très précis, il y a donc une forme d'universalité de la guerre qui est présentée, vue à travers des familles ordinaires : la fiancée qui attend, les mères qui prient, la peur des jeunes gens, les chefs à l'abri qui envoient les autres à la mort... Les émotions sont sincères, car universelles, on ressent beaucoup d'empathie pour Joseph et Catherine.
Pour finir, en tant que professeure d'histoire, ce serait le roman parfait pour expliquer à mes élèves de terminale la conception de la guerre absolue théorisée par Carl von Clausewitz : un feu d'artillerie constant, un objectif de destruction de l'ennemi avec une violence extrême, des effectifs considérables - près de 500 000 hommes combattent à Leipzig.
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En 1813, à Phalsbourg (Alsace), le jeune Joseph Bertha est le compagnon horloger du brave Monsieur Goulden. Il est amoureux de la belle et tendre Catherine qu'il pense pouvoir l'épouser bientôt. Mais, Napoléon ayant subi de terribles revers en Russie, relance la conscription, cet injuste tirage au sort servant de critère à un engagement de sept ans. Malgré qu'il soit handicapé (boiteux, il marche très mal car il a une jambe plus courte que l'autre), il n'est pas réformé. Il tire même un mauvais numéro et se retrouve pris dans des marches forcées à travers l'Allemagne puis engagé dans des batailles particulièrement sanglantes. Il sera blessé à l'épaule à la bataille de Lutzen, soigné quelque temps et renvoyé au combat dans une ambiance apocalyptique...
Ce récit émouvant et magnifiquement écrit nous fait découvrir de l'intérieur la réalité de la vie de soldat dans des armées napoléoniennes en pleine débâcle. Et elle fut loin d'être aussi glorieuse que certains autres romans historiques pourraient le laisser imaginer. Tout n'est qu'un long et inutile calvaire. Il faut marcher par tous les temps sur des distances importantes, supporter le froid, la faim, la maladie (le typhus fait des ravages) et dormir n'importe où dévoré par la vermine. Les descriptions de batailles sont également fort terribles. Les techniques d'extermination systématiques n'ont pas débuté avec la guerre de 14. L'expression « les horreurs de la guerre » convient parfaitement à cette histoire que l'on dirait écrite par un survivant alors que le duo n'était pas né à l'époque et n'a publié ce texte, qui eut un grand succès, qu'en 1864. Surtout connus pour le charmant « Ami Fritz », les deux écrivains alsaciens, romanciers de terroir avant l'heure, sont un peu tombés dans l'oubli aujourd'hui et c'est bien dommage parce qu'un livre comme celui-ci vaut largement le détour.
Lien : http://www.etpourquoidonc.fr/
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"Histoire d'un conscrit de 1813" et "Waterloo" (la suite)
Joseph Bertha est un jeune horloger en apprentissage chez M. Goulden à Phalsbourg (Lorraine). Celui-ci l'aime comme son fils. Joseph souhaite épouser Catherine mais la conscription va l'en empêcher…
Il doit partir. Il participe à la bataille de Leipzig et rentre très mal en point. Bien entouré et guéri, il se marie enfin et goûte au bonheur retrouvé. Mais Napoléon Bonaparte revient (les cent jours) et Joseph doit repartir se battre! Bataille désastreuse de Waterloo. Il en réchappe et revient au pays.

Le lecteur suit pas à pas ce héros malgré lui.
C'est passionnant de vivre l'Histoire (avec sa terrible grande hache) du point de vue de l'homme du peuple (et non du point de vue des grands hommes). Emile Erckmann et Alexandre Chatrian excellent à ce jeu-là avec leur style simple, chaleureux, humain.
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Napoléon que beaucoup vénèrent encore comme un grand homme.. Que les écoles enseigne de lui ses campagnes, ses défaites, mais est-il question aussi de l'atrocité de tout ceci, du martyre, voient-ils cela au programme ?
Savent-il que par exemple lors de la campagne de Russie plus de 300 000 hommes ont péris ? Que même après cela il força encore plus d'homme à rejoindre les troupes.
Tout cela "pour sa gloire ainsi que celle de ses frères" comme le dit un homme dans le récit.
C'est donc l'histoire d'un homme parmi tant d'autre que ce livre conte,
un apprenti horloger qui ne demandait qu'à vivre sa vie avec son élu Catherine. Mais que le destin lui fit prendre un autre chemin.
La guerre est une chose terrible, toutes ces gens qui vont à l'abattoir dans un souci de "servir la nation."
Le jeune homme pense même à déserter, mais il aurait été "mal vu", pris comme un déserteur, etc.
J'ai lu ce livre avec beaucoup d'attention, j'ai été pris dans l'histoire.
Comme il est écrit dans la préface d'Yves Berger :
"avec La Conquête du courage", de l'Américain Stephen Crane, l'"Histoire d'un conscrit de 1813" est l'un des grands livres que la guerre ait inspirés.
Je vous le recommande sans soucis.
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
" Alors je regardai dans la nuit grisâtre, et je vis, à cinquante pas devant moi, le colporteur Pinacle, avec sa grande hotte, son bonnet de loutre, ses gants de laine et son bâton à pointe de fer. La lanterne pendue à la bretelle de la hotte éclairait sa figure avinée, son menton hérissé de poils jaunes, et son gros nez en forme d'éteignoir ; il écarquillait ses petits yeux comme un loup, en répétant : "Qui vive !" [...] "

[ERCKMANN-CHATRIAN, "Histoire d'un conscrit de 1813", 1864, chapitre III – page 26 de la collection "la Petite Vermillon", Editions de la Table Ronde]
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" Mais ce qui me frappa le plus, au milieu de tous ces capitaines qui faisaient trembler l'Europe depuis vingt ans, c'est Napoléon avec son vieux chapeau et sa redingote grise ; je le vois encore passer devant mes yeux, son large menton serré et le cou dans les épaules. Tout le monde criait : "Vive l'Empereur ! " – Mais il n'entendait rien... il ne faisait pas plus attention à nous qu'à la petite pluie fine qui tremblotait dans l'air... "

[ERCKMANN-CHATRIAN, "Histoire d'un conscrit de 1813", 1864, chapitre XVIII – pages 178-179 de la collection "la Petite Vermillon", Editions de la Table Ronde]
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Tout leur grand génie et toutes leurs grandes idées de gloire ne sont rien, car il n'y a qu'une chose pour laquelle un peuple doit marcher, c'est quand on attaque notre Liberté, comme en 1792 ; alors on meurt ensemble ou l'on gagne ensemble.

la victoire n'est pas pour quelques uns , elle est pour tous. Voilà, la seule guerre juste, toutes les autres sont honteuses.
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Ceux que tu n'as pas vus revenir sont morts, comme des centaines et des centaines de mille autres mourront car l'Empereur n'aime que la guerre.
Il a déjà versé plus de sang pour donner des couronnes à ses frères, que notre grande Révolution pour gagner les Droits de l'Homme.
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« Enfin, me dit Zébédé, nous avons tout contre nous : le pays, les pluies continuelles et nos propres généraux, las de tout cela. Les uns sont ducs, princes, et s’ennuient d’être toujours dans la boue, au lieu de s’asseoir dans de bons fauteuils ; et les autres, comme Vandamme, veulent se dépêcher de devenir maréchal, en faisant un grand coup. Nous autres, pauvres diables, qui n’avons rien à gagner que d’être estropiés pour le restant de nos jours, et qui sommes les fils des paysans et des ouvriers qui se sont battus pour abolir la noblesse, il faut que nous périssions pour en faire une nouvelle ! »


Je vis alors que les plus pauvres, les plus malheureux ne sont pas toujours les plus bêtes, et qu’à force de souffrir on finit par voir la triste vérité.
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Video de Erckmann-Chatrian (2) Voir plusAjouter une vidéo

Erckmann et Chatrian : Gens d'Alsace et de Lorraine
Olivier BARROT signale la publication aux Presses de la Cité (collection Omnibus) de "Gens d'Alsace et de Lorraine" d'ERCKMANN-CHATRIAN. Ce gros ouvrage rassemble six des Romans et Contes des deux célèbres Alsaciens.
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