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3,78

sur 276 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Je retrouve avec plaisir cette grande romancière découverte en 2005 avec"La Chorale-des maitres-bouchers puis "Dans le silence du vent "et La malédiction des colombes ", qui nous plonge dans le quotidien d'une réserve indienne du Dakota du Nord...

A travers le drame intense vécu par deux familles, je n'en dévoilerai pas beaucoup, ce serait dommage .......elle évoque , en conteuse accomplie, une histoire fascinante, qui mêle le mystère de la filiation qui lui est chère, le sentiment de faute naissant du drame, de la douleur et du manque, les coutumes ancestrales et les relations complexes , indicibles, que tissent les Indiens avec Mère Nature .
Le père d'un petit américain , Landreaux Iron, tue accidentellement un jeune voisin de cinq ans , Dusty, le fils de son voisin et ami, Peter Ravitch: il l'a pris pour un cerf.........
Louise . E.nous oblige à réfléchir sur les notions de vengeance , de pardon, de justice , de deuil , et surtout de l'amour .......
Comment peut- on survivre à la perte insondable d'un enfant ?
Comment se reconstruire ?

D'une façon intense et flamboyante, dense, elle explore le poids du passé, à travers "LaRose", prénom mixte du petit garçon du voisin, qui paiera pour la tragique méprise , selon une coutume en vertu de laquelle Landreaux Iron doit donner son plus jeune fils aux parents en deuil. ."

"LaRose" prénom que ses ancêtres indiens Ojibwé se sont passé de pére en fils et de mère en fille , en même temps que des douleurs, des sacrifices et des névroses ........

Tout en retrouvant le talent de conteuse de cette magicienne , fille d'une indienne passionnée de catholicisme et fine connaisseuse des traditions Ojibwé et d'un père allemand féru de William Shakespeare, j'ai trouvé le temps un peu long lorsqu'elle évoque les ancêtres de sa famille et leurs croyances .........
Une lecture ardue, dense , entre passé et présent , à travers de très nombreux personnages attachants, mais on s'y perd un peu ..........
Malgré tout , une belle épaisseur narrative, un charme évocateur, sur le deuil, la nature et l'amour , la hantise de la perte, une grâce dont on ne se lasse pas !
A la question: "Un homme peut- il commettre le pire des actes et pour autant continuer à être aimé?" , sa réponse est un oui magnifique , retentissant , maudit et béni à la fois!
Un livre majeur, fort et singulier !
Traduit de l'américain par Isabelle Reinharez , chez Albin Michel .

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J'aime beaucoup les romans de Louise Erdrich. Ce roman-ci, LaRose, s'inscrit dans une trilogie. J'avais beaucoup aimé son précédent livre, Dans le silence du vent. Ici j'ai trouvé le chemin narratif bien plus difficile, mais au final il laisse en moi une trace envoûtante.
L'atmosphère demeure toujours la même, je devrais plutôt parler d'espace-temps, bien que le temps soit une donnée plutôt variable en territoire ojibwé.
Nous sommes en Dakota du Nord, en 1999. Tout part d'un fait divers tragique et je dirai même, doublement tragique.
Les premières pages démarrent sur une scène de chasse. Landreaux Iron, un Indien Ojibwé traque un cerf. Il le vise et tire. L'animal poursuit sa course, tandis qu'un enfant s'effondre. Il s'agit de Dusty, le fils de son meilleur ami, Peter Ravich. L'enfant avait cinq ans. C'est une tragique méprise.
Le drame est effroyable. L'enquête conclut très vite à l'accident et le dossier judiciaire est clos aussitôt. Cependant, il reste le drame, mais aussi la coutume chez les indiens ojibwé.
En effet, pour réparer son geste, Landreaux doit se plier à une ancienne coutume ojibwé selon laquelle il doit offrir LaRose, son plus jeune fils, aux parents en deuil. C'est forcément une terrible décision et les conséquences seront douloureuses pour les deux familles concernées.
Les pages qui décrivent longuement les états d'âme, les douleurs des deux mères sont poignantes.
L'humanité vient au secours de cette fatalité, faisant entrer dans les failles des pages le doute, la douleur, les blessures, les espoirs aussi.
Voilà ainsi posée la trame narrative qui ne manque pas de sel... Cependant l'auteure n'en reste pas là et nous invite à entrer dans un monde où nos propres repères deviennent vains, tant mieux ! En effet, LaRose porte un prénom mixte, que ses ancêtres indiens ojibwé se sont passé de père en fils, ou de mère en fille. L'enfant présent est considéré comme une sorte de saint, bien que le terme ne soit pas forcément approprié ici.
Brusquement le récit nous invite autant dans le passé que dans le présent, mêlant les vivants et les morts, parfois l'âme des choses s'invite aussi dans le récit... C'est normal, nous sommes en territoire ojibwé.
Alors, il y a comme quelque chose de choral qui monte dans les pages et nous envahit peu à peu, une musique, des mots aussi, des coeurs qui battent peut-être encore.
C'est un chant, c'est un conte. Ce sont des femmes et des hommes dans une histoire qui continue.
Ici il y a encore le poids du passé, mais aussi du présent.
J'ai trouvé les personnages magnifiques, douloureux, fantasques, touchant d'émotions, fraternels aussi. La fraternité de cette communauté ojibwé jaillit comme une lumière dans les pages du livre. On voudrait s'en enivrer tout d'abord, s'en enivrer pour la suite.
J'ai adoré l'intrusion dans cette histoire d'un prêtre blanc dont le propos ne manque pas de pertinence.
Il est important de lire les livres de Louise Erdrich, ne serait-ce que pour la différence qu'ils apportent à nos vies.
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1999, Dakota du Nord . Landreau tue malencontreusement Dusty , 5 ans, fils de ses amis Peter et Nola. Ce tragique coup du sort va bouleverser les deux familles et Landreau va s'en remettre à une vieille coutume indienne , donner un enfant à Peter et Nola.

Beau roman sur fond de tragédie. Au delà de l'évolution des deux familles et des conséquences du don de LaRose, l'auteur retourne dans le passé pour faire revivre les traditions indiennes , à travers d'autres LaRose de 1860 à nos jours.
Il y a beaucoup d'humanité dans ce récit, beaucoup de liens avec la nature dès que l'on touche aux indiens .
Il y a aussi la rancoeur envers les colons blancs et le sentiment qu'au XXIème le siècle les plaies ne sont pas encore consolidées.
On retrouve dans ce roman l'Amérique des désoeuvrés, qui boit et se shoote.
Ce sont 500 pages denses , intelligentes qui parfois prennent le temps de livrer leur verdict mais qui peuvent en deux lignes faire basculer le lecteur.
Partie intéressante aussi sur le sport et notamment le Volley Ball. Pourquoi le Volley Ball féminin serait à ce point important dans le Dakota du Nord ? Mystère !
Beau livre donc qui autour d'une histoire sordide fait évoluer des personnages attachants , mais aussi plonge dans les racines indiennes .
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J'aime retrouver Louise Erdrich qui a souvent réussi à me faire passer par toutes les palettes de l'émotion tant son talent de conteuse n'a d'égale que la qualité de sa plume.

Dans son nouvel opus, nous découvrons deux familles au coeur d'un drame, la mort d'un enfant.
Lorsque Landreaux chasse un cerf et tue accidentellement le petit Dusty, 5 ans, il est si malheureux, écrasé par la culpabilité du chagrin qu'il impose à ses voisins qu'aussitôt, il décide d'offrir son fils LaRose à Peter et Nola, les parents de Dusty selon une tradition ancestrale Ojibwé.
«Notre fils sera votre fils maintenant. »

Louise Erdrich retrace par intermittence, tout au long du roman, le drame que vivent les deux familles et l'histoire de la première LaRose, une jeune Ojibwée vendue par sa mère à un négociant. Cette LaRose, fascinant personnage, était une guérisseuse qui a adroitement résisté à l'assimilation à la culture, aux valeurs et à la religion des Blancs.

Cette histoire n'est jamais triste, malgré la gravité du sujet.
J'ai eu cependant un peu de mal à certains moments à suivre l'action lorsque l'auteur aborde les ancêtres de ses familles avec leurs coutumes et leurs croyances.

« LaRose » est un roman très dense, long, au rythme soutenu dans lequel les dialogues s'insèrent sans guillemets, sans pause, sans repos.
Un récit entrecoupé entre présent et passé qui m'a perdue parfois, j'ai dû m'accrocher dans ce récit, qui navigue entre de nombreux personnages, mais cependant, à aucun moment je n'ai eu envie de lâcher cette lecture comme envoutée par la prose magnifique de l'auteure.
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Ma première rencontre avec cette auteure dont ma bibliothécaire ne tarit pas d'éloge.
Une lecture plaisante, beaucoup d'émotions, le personnage de Larose, cet enfant donné en échange de celui qui est tué, est très touchante. Tout en douceur et avec beaucoup de patience il apporte son regard et sa bienveillance sur ces deux familles frappées par le malheur.
Les sentiments des personnages, qui gardent dans leur coeur leurs traditions, sont justes et révèlent toute la sensibilité de la plume de l'auteure.
Une écriture qui m'a plu, je lirai sûrement d'autres romans de cette auteure
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Ne connaissant Louise Erdrich que de nom, je me réjouissais de pouvoir découvrir son dernier roman dont le résumé m'a plus qu'intriguée. J'ai reçu ce livre grâce au partenariat du Picabo River Book Club, un club de lecture sur Facebook qui met en avant la littérature nord-américaine, et je suis partie en voyage dans une Amérique qui m'était inconnue, celle des Indiens Ojibwé.

Nous sommes dans le Dakota du Nord en 1999. L'histoire débute par un terrible accident qui emporte Dusty, un petit garçon de 5 ans, tué au cours d'une chasse. C'est Landreaux, un Indien Ojibwé qui a tiré par erreur sur Dusty, le fils de son ami et voisin, Peter Ravich. Pour consoler les parents effondrés, Landreaux et sa femme Emmaline décident de leur donner leur propre fils, LaRose, comme le voulait une vieille coutume indienne.

Avec ce beau roman Louise Erdrich nous plonge non seulement dans le quotidien de deux familles indiennes touchées par un drame mais aussi au coeur de l'histoire d'un peuple en voie de disparition. Nous accompagnons LaRose aux côtés de ses quatre parents, ses frères et soeurs mais nous remontons aussi plus d'un siècle et demi dans le temps pour connaître l'histoire de la première LaRose, un prénom qui sera transmis ensuite de génération en génération.

J'ai beaucoup aimé l'ambiance un peu particulière de ce roman, un mélange d'histoire, de rêves, de traditions et de banalités de la vie. J'ai aimé suivre les personnages dans leurs peines, leurs questionnements, leurs doutes, leur joies et voir comment ils évoluent. L'écriture de Louise Erdrich est puissante mais aussi pleine de grâce et je ne manquerai pas de découvrir les autres romans de cette grande écrivaine américaine.

Lien : http://edytalectures.blogspo..
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Je découvre Louise Erdrich avec ce roman.
Nous sommes dans une réserve chez les indiens Ojibwés. Dès les premières pages, le cadre est posé : Landreaux, en voulant abattre un cerf, tue accidentellement le petit garçon de ses voisins.
Afin de réparer son acte, et reprenant en cela une coutume ancienne, il offre le dernier de ses fils aux parents éplorés. le petit LaRose va donc s'installer chez les voisins puis alterner son quotidien entre les deux maisons.
Il va « réparer » au sens propre comme au sens figuré la terrible faute commise par son père.

Moi qui adore les histoires d'amérindiens, je me suis régalée avec la galerie de personnages de ce roman : LaRose en premier lieu, magnifique petit garçon qui va éviter que le drame ne se poursuive et panser les blessures. Josette, Neige, Emmaline, Landreaux, Maggie, Roméo, Hollis etc c'est à une véritable valse de personnages que nous invite l'auteur. Cette multitude complique parfois un peu la lecture d'autant qu'il y a aussi des allers et retours entre passé et présent, entre réel et imagination. C'est donc une lecture un peu exigeante.

Comme toujours chez les amérindiens, c'est tragique et cela tord le coeur. J'ai pensé aux récits de Wagamese que j'aime tant : mêmes destins brisés par le pensionnat, par les maladies ou l'arrachement aux racines.

J'ai également pensé aux écrits magnifiques de Boyden qui à mon sens, sont un cran au-dessus par leur souffle romanesque que je n'ai pas trouvé dans LaRose.
C'est toutefois une très belle découverte qui me donne envie de continuer à découvrir cette auteure.



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Fille d'Indienne Ojibwé, Louise Erdrich appartient au mouvement de la Renaissance amérindienne (Native American Renaissance) créé pour qu'on n'oublie pas ce peuple, ses coutumes, sa mythologie et qu'il continue d'exister à travers la voix d'auteurs modernes.
Dans ses romans, Louise Erdrich fait revivre une culture et des traditions amérindiennes, espérant maintenir vivante la mémoire des anciens. Et le sens même de son écriture se trouve peut-être là, précisément, dans ce projet de lutte contre l'oubli.
C'est donc un monde un peu étrange que le lecteur découvre, monde dans lequel, par exemple, les morts peuvent revenir partager l'existence de ceux que l'on appelle les vivants, les frontières entre les deux « états » étant plus poreuses que dans nos sociétés rationnelles.
En 1999, dans le Dakota du nord, Landreaux Iron part à la chasse au cerf, cérémonial obligé pour célébrer l'arrivée de l'automne. « C'était un catholique pieux et respectueux des coutumes indiennes, un homme qui, lorsqu'il abattait un cerf, remerciait un dieu en anglais et faisait une offrande de tabac à un autre en ojibwé. » Landreaux est un excellent chasseur : lorsqu'il voit l'animal, il n'hésite pas une seconde et tire. Il tue accidentellement Dusty Ravich, petit garçon âgé de cinq ans, le fils de son voisin et ami Peter Ravich.
C'est le drame, la tragédie absolue.
La mort d'un enfant.
Or, la coutume indienne veut que, pour se racheter ou tenter de se faire pardonner, on doive donner son plus jeune enfant à la famille qui a perdu le sien : c'est ainsi que le petit LaRose Iron part vivre chez les Ravich.
Offrande incroyable, offrande impensable…
Et pourtant...
Comment Landreaux va-t-il pouvoir continuer à vivre avec un immense sentiment de culpabilité et un si terrible chagrin? Comment les deux familles vont-elles cohabiter sans chercher à s'entre-tuer, sans vivre dans la haine, sans désir de vengeance et en respectant les coutumes de leurs ancêtres ?
Que va devenir cet enfant, LaRose, partagé entre deux familles ? Peut-on se construire de cette façon ? Et les frères et soeurs dans l'une et l'autre famille vont-ils savoir contenir leur douleur, leur ressentiment, leur souffrance ?
Quant aux mères, Nola et Emmaline… Qui aura la force de pardonner ? de quelle façon une justice peut-elle être rendue ? La sagesse des anciens est-elle capable de panser les plaies, d'aider chacun à supporter un réel à peine pensable ? Une forme de solidarité, d'entraide est-elle encore possible ?
C'est le quotidien bouleversé de ces deux familles que nous découvrons, leur façon de gérer chaque heure, chaque jour qui passe, chacun se reconstruisant, petit à petit, comme il le peut, en passant par des phases de douleur extrême, de désir de mort, de solitude profonde, de haine viscérale, d'amour ou de don de soi.
Ces différents personnages, enfants et adultes, ont tous quelque chose de fascinant : ils n'ont rien de manichéen, loin de là, et sont très humains dans leurs réactions et très touchants donc. Je pense notamment à la figure du prêtre, le père Travis, toujours à l'écoute des autres, lui dont les sentiments pour une femme le mettent au supplice. Je pense aussi au personnage de Romeo, père biologique d'un des enfants élevés par Landreaux, la figure même de l'antihéros malmené par la vie, dépossédé de tout et qui semble, dans l'ombre, préparer une terrible vengeance. A moins que...
L'auteur, fine observatrice, a le souci du détail : une mimique, une expression, un geste permet de visualiser le malaise, la tension ou la joie de tel ou tel personnage. L'effet de réel est saisissant. J'ai beaucoup aimé la minutie de ses descriptions qui en disent tant sur les gens et qui traduisent si bien la complexité des sentiments.
De nombreux retours dans le passé permettent de mieux comprendre le poids des traditions, des croyances qui se heurtent parfois à la modernité et expliquent le comportement de certains personnages, ce qu'ils sont devenus avec le temps. S'ils vivent tous au XXe siècle (et dans une Amérique où l'on noie dans l'alcool ou la drogue son ennui et son désespoir), leurs racines les rattachent à un passé ancestral dont ils ne peuvent s'affranchir complètement. Ils sont les héritiers de coutumes d'un autre temps, vivent en équilibre instable entre deux mondes.
LaRose est un récit ambitieux : si les nombreuses digressions, les retours en arrière retraçant, par exemple, la généalogie des LaRose sur quatre générations nous éloignent momentanément du récit principal, ils permettent surtout au lecteur de découvrir une culture, une mythologie, des croyances surnaturelles et magiques avec lesquelles il est nécessaire de se familiariser pour mieux interpréter le texte.
LaRose est donc un roman exigeant qui se mérite, et j'avoue qu'il m'a fallu une seconde lecture pour me sentir plus à l'aise et plus à même de mieux appréhender cet univers.
Mais c'est ainsi que j'ai eu le sentiment de pénétrer dans un texte d'une grande richesse de par son écriture et sa construction bien sûr, mais aussi de par la vivacité et la complexité de ses personnages. L'évocation de cette culture amérindienne, monde fascinant où les morts jouent avec les vivants, discutent avec eux, monde où rêve et réalité se mélangent, m'a fascinée.
Enfin, ce qui touche dans cette oeuvre, c'est qu'au fond, même les plus mauvais se révèlent finalement avoir une âme sensible et généreuse et l'on sent à chaque page le regard bienveillant que l'auteur pose sur l'humanité.
Par les temps qui courent, on peut dire que ça fait du bien !
Un texte intense que je n'oublierai pas.
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Un roman très dense dans le monde amérindien contemporain du côté du Dakota Nord.
Deux familles, liées par un enfant porteur des destinées ancestrales, qu'on regarde évoluer pendant les 3 ou 4 ans suivant le drame qui déchire tout.
Une histoire qui emmêle beaucoup de thèmes indirects et dilate le temps, comme les descendants des peuples premiers ont à faire avec des souffrances passées et modernes, des questions universelles et intemporelles (l'adolescence, la parentalité, le couple, l'accident), et un monde des esprits où les têtes peuvent rouler seules.
Une histoire à la fois très directe et très suggérée, qui m'a un peu donné l'impression d'un fourre-tout mais qui a une force d'émotions indéniable. (Et puis des pages sur le volley-ball !!!)
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J'ai découvert Louise Erdrich avec Dans le silence du vent après la lecture d'une chronique d'elle que j'avais lue dans America.

Une deuxième lecture de cette auteure que l'on me recommandait sur les réseaux sociaux et dont je sors avec un avis peut-être plus mesuré.

Le thème principal du roman est le deuil  : la perte d'un enfant peut-elle être remplacée par un autre enfant, du même âge, enfant fils de celui qui a accidentellement tué votre propre enfant ? Montrer ainsi que l'on subit la même douleur en perdant soi-même un enfant.

Le thème est fort et apparemment lié à une tradition dans la communauté indienne où se déroule l'action.

Le récit est découpé en plusieurs parties qui vont de 1879 à 2003, ne respectant pas l'ordre chronologique, mais les entremêlant mais je n'ai aucune difficulté concernant les différentes époques sauf parfois pour me retrouver dans les LaRose(5 générations je crois)..... difficulté liée au même prénom, porté indifféremment par filles (le plus souvent) ou garçon pour la dernière génération

Les LaRose sont souvent doués d'une intelligence et d'une connaissance sur la nature, les plantes mais aussi sur les animaux et l'espèce humaine et le dernier de la lignée est particulièrement philosophe, observateur et intuitif, malgré son jeune âge.

L'auteure développe énormément sur la vie des deux familles, amies par le passé, les Iron (dont fait partie Landreaux responsable du décès accidentel de l'enfant) et les Ravich, qui respecteront la tradition du don d'enfant et dont LaRose est le dernier descendant. Elles sont opposées dans leur style de vie mais très semblables dans le sens où les femmes sont les éléments dominants : Emmaline, enseignante, respectueuse des traditions et Landreaux, kiné, qui a connu l'addiction à la drogue, laissent beaucoup de libertés à leurs enfants, tandis que Nola et Peter Ravich sont plus rigoureux, strictes, organisés.

Elle traite également les thèmes de l'amour, de la perte mais aussi de la vengeance, du pardon, de la nature, des traditions et des croyances. Il flotte continuellement des zones de mystères, d'histoires d'ancêtres, la transmission est présente même si l'on comprend à plusieurs reprises de sa perte au fil du temps et des ravages du monde moderne mais aussi de la perte d'identité de la communauté.

La vie dans les réserves est largement évoquée avec les ravages que l'arrivée des hommes blancs ont provoqué parmi elles.

Elle était archaïque et avait surgi de la terre en ébullition. Elle avait sommeillé, mené une vie latente dans la poussière, s'était élevée en fin brouillard. La tuberculose s'était élancée en une vague impétueuse pour s'unir à la chaleur de la vie. Elle était présente dans chacun des nouveaux mondes et dans tous les anciens. D'abord elle aima les animaux, puis aussi les personnes. Parfois elle se posait dans une prison de tissus humains séparée par un mur des frondes nourricières du corps. Parfois elle s'élançait, filait sans entraves, creusait des galeries dans les os ou métamorphosait les poumons en dentelle raffinée. Parfois elle allait n'importe où. Parfois elle n'arrivait à rien. Parfois elle élisait domicile dans une famille, ou bien démarrait ses voyages sans répit dans une école où les enfants dormaient côte à côte. (p263)

La vie des hommes et de la nature sont intimement liées, Louise Erdrich se plaît à entremêler les situations où la nature (faune et flore) est omniprésente et symbole de leur liberté, du respect perdu, de leur perte d'identité et de pouvoir.

De là, il aperçoit de la colline et plonge son regard dans l'essence même de cette ville de réserve. Défoncé et mentalement anéanti comme il l'est, il voit dans chaque cœur. La douleur, éparpillée partout, monte en flamboyant des puits profonds que sont les poitrines de son peuple. A l'ouest les cœurs des morts battent encore, ils brûlent et jettent de douces lueurs vertes dans leurs cercueils. Ils font jaillir de la terre une lumière pale. Et au sud il y a les bisons que la tribu a achetés dans un but touristique. Un rassemblement sombre. Leurs cœurs eux aussi embrasés par l'horrible message de leur extinction. Leur assemblée fantomatique, désormais. Comme nous, ils déambulent et tournent en rond dans un petit enclos d'herbe, et engraissent. Comme nous, cœurs visibles pareils à des lampes dans la poussière. (p465)



Elle apprit à nettoyer les maisons des Blancs au cours du programme extrascolaire, à racler au couteau la poussière coagulée dans les recoins. A polir les veines grises des sols en marbre. Elle faisait aussi reluire les boiseries et étinceler les chauffe-eau en cuivre. Et puis elle avait une très jolie écriture et savait décomposer des grands nombres en facteurs premiers. Elle connaissait les fleuves du monde et les guerres qu'avaient menées les Grecs, les Romains, les Américains, écrasant les Anglais puis les Sauvages. Une liste de races qu'elle dut mémoriser plaçait la blanche au sommet, ensuite la jaune, la noire et enfin la sauvage. Selon le programme scolaire, son peuple se trouvait au bas de l'échelle. (p281)

L'histoire est bien construite, les personnages se dévoilent tout au long du récit et l'on obtient les réponses pour certains que vers la toute fin. D'autres comme le prêtre Travis, sont récurrents dans les deux livres que j'ai lus, ancien soldat ayant combattu et blessé, qui trouve refuge dans la religion. Par contre je n'ai pas trop compris l'utilité de créer entre lui et une des deux femmes, une relation amoureuse....

Louise Erdrich a une écriture magnifique, très descriptive, elle met en place très vite le fond du livre : la perte, le deuil, l'absence et la tentative de réconciliation mais peut-on réparer en s'amputant soi-même de la présence d'un enfant. Les deux familles vont souffrir : toutes les deux de l'absence même si elle n'est pas similaire mais aussi chez Nora d'une dépression dont les enfants vont être les témoins et les sauveurs.

J'ai beaucoup aimé tout ce qui touchait aux enfants, leur complicité, leur espièglerie, leurs relations et particulier celle qui unit Maggie et LaRose et qui démarrait pourtant bien mal.

J'ai, même si je donne une note similaire, préféré Dans le silence du vent : l'histoire m'a plus touchée, émue, où j'ai trouvé les personnages plus captivants, l'intrigue m'a plus tenue en haleine. Dans LaRose j'ai moins été dans l'attente de découvrir ce que chacun cachait ou était réellement. Dans celui-ci l'environnement culturel, générationnel et symbolique y est très présent, mais l'ayant déjà trouvé dans ma première lecture, j'y ai été moins sensible cette fois-ci.

Cela n'enlève rien à la qualité de la narration : un souffle romanesque, une écriture fluide, accessible et une construction intéressante sachant tenir le lecteur jusqu'au bout et avec la découverte d'une ethnie qui se perd, dont bientôt il ne restera que peu de témoins.

Le lendemain, elle vit un ours occupé à déterrer une sorte de racine à côté d'un marécage. Une autre fois, un renard bondit, monta en arc de cercle haut dans l'herbe et s'en fut en trottinant, une souris dans la gueule. Des cerfs allaient au pas, tous les sens aiguisés, s'arrêtant pour remuer les oreilles et flairer les senteurs avant de s'aventurer à découvert. Elle regarda la terre voler derrière un blaireau qui creusait un terrier. Des souris à pattes blanches aux yeux adorables, des hirondelles bleues fendant l'air, des faucons lancés dans un vol libre mystique, des corbeaux cabriolant sur des courants aériens aussi solides que d'invisibles poutres d'équilibre. Elle commença à se sentir davantage chez elle dehors que dedans. (p310)
Lien : http://mumudanslebocage.word..
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