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EAN : 9782253936886
432 pages
Le Livre de Poche (14/09/2022)
3.53/5   198 notes
Résumé :
Dans le sillage d’une apocalypse écologique qui menace l’équilibre de la vie sur terre, l’évolution des espèces s’est brusquement arrêtée. C’est dans ce contexte instable et inquiétant, alors qu’un gouvernement totalitaire a pris les rênes des États-Unis et impose aux femmes enceintes de se signaler auprès d’un centre dédié, que Cedar Hawk Songmaker, 26 ans, apprend qu’elle attend un bébe&... >Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (76) Voir plus Ajouter une critique
3,53

sur 198 notes
Ce roman prend la forme d'une journal intime, celui adressé par une mère à son enfant à naître, comme une bouteille à la mer dans un monde devenu terrible. Un cauchemar dystopique où sévit une catastrophe génétique : l'homme a cessé d'évoluer et régresse. Comme si l'homo sapiens n'était pas l'ultime et inévitable progrès de l'humanité, les femmes accouchent de nourrissons appartenant à des espèces primitives, peu viables. Cette crise de la reproduction est exploitée par un gouvernement autoritaire théocratique qui traque les femmes enceintes pour les enfermer, à la recherche de bébé «  originaux » qui n'auront pas subi les dysfonctionnements biologiques régressifs.

Forcément, le fait de placer le pouvoir de la fertilité féminine et son contrôle au coeur du roman fait écho au chef d'oeuvre éclatant de Margaret Atwood, La Servante écarlate, même si Louise Erdrich tisse aussi des thèmes plus spécifiques, plus personnels comme l'histoire amérindienne en choisissant une héroïne, Cédar, née Ojibwé mais adoptée par des Blancs. On pense aussi à 1984 avec la figure de Mother, comme un clin d'oeil à Big Brother, figure terrifiante et omnisciente qui règne sur cet enfer dictatorial.

Durant cette lecture, je me suis souvent dit que ce roman était bancal. Débuté en 2002 puis abandonné, puis repris en 2016 face à l'urgence politique contextuelle liée à l'élection de Trump, le récit manque parfois de liant entre ses différentes parties. Des personnages très intéressants disparaissent ( notamment la demi-soeur de l'héroïne ), la relation entre Cédar et le père de son enfant est invisibilisé. Un sentiment de frustration peut naître car jamais Louise Erdrich ne donne d'explications sur ce gouvernement théocratique qui a pris le pouvoir, sur l'origine de cette apocalypse biologique. Il y a bien quelques irruptions magiques, comme celle de l'oiseau-lézard qui ressemble à un Archéoptéryx, mais elles sont très fugaces.

Malgré ces fragilités, trous d'air et imperfections, ce roman m'a parlé, très fort. le choix du journal intime, s'il n'offre qu'une focale et n'ouvre pas sur l'extérieur, permet de rester au plus près de l'héroïne, de son regard, de sa psyché, de ses émotions. La tension entre la férocité de son instinct maternel et l'horreur de la situation née du contexte et de la peur croissante que son enfant n'ait rien d'humain une fois né. le portrait de cette femme est juste magnifique et on la suit dans cette longue aventure qui la verra découvrir sa famille biologique ojibwé, fuir, entrer en clandestinité être dénoncée ou protégée, kidnappée et devenir mère. J'ai été happée par le récit très rythmé, plein de suspense et la réflexion vivifiante sur le libre arbitre féminin.

Et puis j'aime la plume de Louise Erdrich, surtout lorsqu'elle se teinte de poésie. Son approche onirique du monde apporte beaucoup de lumière dans un récit très sombre mais jamais démoralisant.

« Phil a emporté un des fusils, ce qui ne nous empêche pas de rester sur le qui-vive. Mais être dehors et marcher tous les deux librement me procure un plaisir si fort que je ressens tout trop violemment – le passage délicat de l'air sur mon visage, la souplesse du sol sous les arbres, le relief de l'écorce sous mes mains, la caresse des feuilles sur mes vêtements et ma peau. Une conscience enchantée m'envahit. Je glisse une feuille noire entre mes doigts, remonte le long de la nervure centrale rigide. J'avale l'obscurité d'un trait, le riche bouillonnement de la terre. »

«  Et je me rappelle maintenant que j'y étais, la dernière fois qu'il a neigé au paradis. J'avais huit ans(…) Chaque bain d'oiseau devint solide, et le treillage et les capitules secs des fleurs d'été furent bordés de volants blancs. Il a neigé sur chaque aiguille de pin, sur le haut des piquets, sur les voitures. Et moi je suis dedans, je tombe avec elle, je l'enfourne dans ma bouche, la lance dans les airs. La blancheur emplit l'air et il n'y a rien d'autre que la blancheur. Je suis ici, et j'étais là-bas. Et je me suis posé la question, depuis ta naissance. Où seras-tu, mon chéri, la dernière fois où il neigera sur Terre ? »

Pour apprécier ce roman, sans doute faut-il accepter de ne pas tout comprendre, sans doute faut-il se laisser porter par son impressionnisme humaniste poignant, comme une injonction à vivre qui résonne très fort en cette période éprouvante. Un roman singulier et saisissant comme je les aime.
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Je viens de terminer la lecture de L'enfant de la prochaine aurore. L'univers de Louise Erdrich commence à m'être familier.
Lorsque je dis « commence », je prends mes précautions car chez cette auteure c'est un univers toujours mouvant, instable, inattendu. Ici bien sûr j'ai été à la fois étonné, déstabilisé par le sujet, en même temps rassuré de savoir que peut-être l'auteure, avec la simple magie des images et des mots, saurait me sauver de ce désastre qu'elle déploie sous nos yeux... En tous cas, essayerait...
L'univers dans lequel Louise Erdrich nous invite est terrifiant. Il me fait peur tout simplement parce qu'il paraît possible et palpable. C'est cela l'angoisse, la peur d'un possible quelque chose qui peut parvenir. Qui, peut-être, est déjà là...
Le décor est contemporain. Nous sommes dans le Minnesota, un peu plus tard que maintenant.
Une catastrophe écologique ravage la planète, bien plus avancée que celle que nous connaissons déjà aujourd'hui.
Le gouvernement est en alerte. Les scientifiques sont dans l'atermoiement. C'est l'état d'urgence. Les femmes enceintes sont invitées à se signaler au plus vite, au motif qu'un mystérieux virus est susceptible de causer des malformations génétiques.
Cedar Hawk Songmaker est une jeune femme enceinte de quatre mois. Elle nous partage son journal intime qui est une longue lettre adressée à l'enfant qu'elle porte. Cedar est amérindienne, d'origine ojibwée, adoptée par un couple progressiste blanc de Minneapolis.
Le journal commence au moment où Cedar apprend l'existence et fait la connaissance de sa mère biologique et c'est peut-être cela l'élément déclencheur qui la pousse à laisser une trace écrite auprès de l'enfant qui va naître...
Mais dans quel monde va-t-il naître ?
Car bientôt le récit devient un cauchemar, le décor une sorte de fin du monde. Les femmes enceintes sont traquées. Il faut se cacher, fuir. Cela prend la forme d'une traque. Des femmes disparaissent sans laisser de traces...
Ce qui rend totalement réaliste ce roman dystopique, ce sont certaines scènes de la vie quotidienne. Les magasins sont pris d'assaut, la pénurie alimentaire se fait bientôt sentir. Personne ne sait exactement ce qui se passe. Il est désormais impossible de désactiver la géolocalisation des téléphones portables. Les délations se multiplient pour dénoncer à la police les femmes enceintes, encouragées par des récompenses.
Bientôt, un gouvernement religieux remplace le gouvernement fédéral. Les noms des rues sont rebaptisés par des versets de la Bible...
Et puis, comme un malheur terrestre n'arrive jamais seul, il est question aussi de changements climatiques. L'hiver bientôt disparaît...
Quel sort sera réservé alors aux enfants qui viendront au monde ? Au bébé de Cedar ? Aux autres ? Venir au monde... Quelle drôle d'expression subitement ! Mais pour quel monde devenu ou en devenir ?
Car ce journal intime prend peu à peu des allures philosophiques dans un style onirique où j'ai retrouvé les respirations de Louise Erdrich, sa manière d'approcher le monde, notre monde avec ce qu'il nous est possible de voir, mais aussi ce qu'il nous est possible de deviner, de sentir, de faire venir à nous. Par moment, c'est comme un chant presque mystique.
Et dans cette longue lettre qu'elle écrit, Cedar ne renonce jamais, puise dans ce chant de la terre toute la joie et l'amour qu'elle peut offrir à cet enfant qui va naître. C'est beau.
Je pense que ce n'est pas un hasard si l'auteure a voulu poser le début de l'écriture du journal intime de son héroïne au moment où il est possible à celle-ci de se pencher sur ses racines, esquisser le territoire d'où elle vient, à défaut de savoir où elle va avec l'enfant qu'elle porte, dans ce futur improbable. Dans cette réserve indienne du Minnesota ses retrouvailles avec sa famille biologique sont surprenantes, cocasses, touchantes. C'est une belle quête d'identité à laquelle elle va pouvoir s'accrocher dans ce monde en furie, qui s'effondre.
J'ai senti aussi que ce journal intime était pour Cedar comme une bouée de sauvetage. Quand autour de soi tous les repères s'effondrent comme des châteaux de sable, écrire devient une citadelle imprenable.
Ce récit m'a tenu en haleine jusqu'aux ultimes pages.
Et puis les personnages sont beaux, traversés de lumières. C'est aussi une merveilleuse variation sur l'identité, l'adoption, nos racines...
Ce fut un coup de coeur autant pour la narration que pour la voix de Louise Erdrich que j'ai retrouvée ici, intacte, lumineuse, inspirante.
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C'est le Grand Basculement dans le dernier Louise Erdrich, le réalisme magique de LaRose laisse la place à une dystopie.
Les Indiens restent bien sûr présents dans cet univers un peu différent de ce à quoi l'auteur nous avait habitués, mais pour une fois, ce ne sont pas forcément les plus mal lotis, ils ont au moins l'avantage d'avoir déjà vu leur monde s'effondrer. Et dans le chaos régnant, ils espèrent récupérer leurs terres - même si ça n'a peut-être plus tant d'importance, sans doute que « les plus riches s'empareront de la technologie pour se reproduire, et ... nous posséderont, nous, le reste de la population, les singes. » En attendant, le très beau personnage qu'est Eddy, salement dépressif auparavant, lui qui avait l'intuition de la catastrophe à venir, se métamorphose et s'épanouit en une sorte de brillant chef indien.
Une dystopie, oui, où le Patriot Act est renforcé, où les femmes enceintes sont parquées dans des Centres, avec une Big Mother intrusive et des frappes de drones basés sur la reconnaissance vocale et faciale, des drones tout petits, qui ressemblent à des insectes. Mais Louise Erdrich ne s'intéresse pas vraiment à la description méthodique d'un monde qui bascule dans une dimension inquiétante, beaucoup de choses restent dans le flou, on ne sait même pas s'il y a encore un gouvernement central, peut-être n'est-il « que l'une des méga-entreprises ayant engagé les armées de mercenaires qui n'ont pour toute patrie que le billet vert ». Elle s'attache plutôt au ressenti de celle qui vit dans ce monde qui se détraque et part en vrille, à ses sensations, ses émotions, ses réflexions. L'incertitude de l'individu dans un monde qui tourne mal, sa perception de «l'étrangeté des choses», de «l'étrangeté de la catastrophe» intéressent bien plus l'écrivaine que la mise en place exhaustive de l'organisation d'une société terrifiante.
« Selon toute apparence - sauf que personne ne le sait -, notre monde régresse. Ou progresse. Ou peut-être marche en crabe, d'une façon qui nous échappe encore. Je suis sûre qu'un jour ou l'autre quelqu'un finira par mettre un nom sur ce que nous vivons, mais je n'arrive pas à imaginer comment tout ce qui nous entoure et tout ce qui est en nous pourrait être réparé. »
C'est ce que j'aime dans ce roman, la voix prenante et attachante de la narratrice, Ceddar, s'adressant à l'enfant qu'elle porte, l'écriture profonde de Louise Erdrich, à la fois sensuelle et intelligente, parlant de choses sombres tout en restant plutôt lumineuse. Je suis moins convaincue par la construction du roman, mais malgré cela, ce livre m'a beaucoup plu.
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« L'Enfant de la prochaine aurore » est la toute première incursion de Louise Erdrich dans le domaine de la dystopie. C'est un roman passionnant, un récit engagé, écologique et surtout féministe. Louise Erdrich signe avec « L'Enfant de la prochaine aurore » LE roman de cette rentrée littéraire de janvier 2021. Il paraît le 6 janvier aux éditions Albin Michel dans la très belle collection « Terres d'Amérique » qui démarre fort cette année avec ce roman, qui nous fait réfléchir, et ne peut nous laisser indifférent. C'est à découvrir absolument, si vous ne deviez lire qu'un livre en cette rentrée littéraire, vraiment, je vous recommanderais celui-ci. Un énorme coup de coeur pour ma part car Louise Erdrich conserve son style sublime alliée à la puissance de sa réflexion sur ce monde dystopique qui doit autant à Orwell (pour les actes de trahison et de torture) qu'à Margaret Atwood et sa « Servante écarlate » qui sont très clairement les deux sources d'inspiration de l'auteure qui a souhaité inventer un monde que n'aurait pas renier ces deux immense auteurs. Mais c'est surtout vers Margaret Atwood et son univers que penche ce roman. Une forme d'hommage de Louise Erdrich pour Margaret Atwood et son combat féministe et progressiste. Dans les deux livres, la constitution américaine et le Congrès ont été abolis au profit d'un régime autoritaire, un nouveau gouvernement fondamentaliste religieux qui se met en place avec à sa tête l'Église de la Nouvelle Constitution. Ces derniers réduisent les femmes à leur seules capacité à procréer qui devient un enjeu majeur pour le pouvoir en place. Il y a moins de bébé garçon que de bébés filles. Les organes génitaux pour les bébés garçons sont souvent absent ou mal formés. Les femmes sont opprimées et menacées tandis que l'évolution écologique et biologique régressent. L'analogie avec la situation écologique désastreuse de notre monde d'aujourd'hui est criante. le corps des femmes, leur ventre gravide devient un objet de convoitise à l'échelle étatique des États-Unis. Partout, on assiste à des arrestations de femmes enceintes par la police, les milices religieuses. Elles sont emmenées de force dans des hôpitaux où elles sont enfermées. L'angoisse monte au fil des pages de façon très efficace. Que fait-on de ces femmes enceintes arrêtées et emmenées de force dans ces hôpitaux ? Que deviennent les bébés ?

Cedar, l'héroïne de ce roman doit fuir ! Cedar est une indienne Ojibwé de vingt-six ans. Ses parents adoptifs s'appellent Sera et Glen et ils sont pleins d'amour pour Cedar. Son nom blanc est Cedar Hawk Songmaker, fille adoptive d'un couple progressiste de Minneapolis. Cedar part à la recherche de ses origines indiennes et elle rencontre sa mère biologique du nom de Trésor Mary Potts « Presque Senior ». Mère et fille sont catholiques toutes les deux et c'est l'un de leur point commun lorsqu'elles se rencontrent pour la première fois. Trésor et Eddy son mari (mais qui n'est pas le père de Cedar) vivent dans une réserve indienne. Cedar est née Mary Potts. Louise Erdrich questionne le lien filial, l'adoption, la maternité. Au sein de la réserve, Trésor, ancienne toxicomane a dû abandonner sa fille. Les personnages de la grand mère indienne, presque centenaire, de Cedar et de sa soeur adolescente de seize ans accroc à la Meth et gothique apportent une touche attachante et excentrique à cette famille indienne un peu déglinguée. le lien se tisse peu à peu alors que l'on guette la fin du monde aux Etats-Unis, en proie aux convulsions possédées d'illuminés persuadés que la foi doit prédominer. Peu à peu, le monde s'effondre tandis que Cedar cherche à comprendre son passé, elle qui doit mettre au monde un bébé d'ici quelques semaines. Cedar écrit un journal pour que son futur bébé comprenne ce qu'il s'est passé et surtout qu'il puisse s'imaginer et penser qu'il y a eût un avant à ce monde totalitaire. Et s'il n'y avait plus d'hiver, si notre planète vivait une longue et inéluctable agonie. Louise Erdrich signe de magnifiques portraits de femmes. On y évoque aussi l'évolution de l'ADN, des gènes, des mutations qui peuvent se produire. Dans cette dystopie orwellienne qui est aussi un hommage assumé à Margaret Atwood, Louise Erdrich signe un récit envoûtant qui offre le premier rôle aux femmes, objets de convoitises et de trahisons sous un gouvernement fondamentaliste et religieux qui fait froid dans le dos. L'écriture est ciselée, magnifique comme à chaque fois avec Louise Erdrich. Un roman engagé, fruit de la réflexion de l'auteure sur les maux de notre temps. On est captivé par cette histoire de bout en bout, tremblant pour ces femmes enceintes. C'est également une réflexion sur la foi, la transcendance, sa pratique et ses excès lorsqu'ils tombent dans le fondamentalisme. « L'Enfant de la prochaine aurore » de Louise Erdrich est à découvrir absolument !
Lien : https://thedude524.com/2021/..
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On compare beaucoup le nouveau roman de Louise Erdrich à La Servante écarlate de Margaret Atwood et la maison d'édition elle-même met en avant cette proximité sur la quatrième de couverture. N'ayant vu que la série adaptée du roman, je serais bien en peine d'établir une comparaison solide entre les deux textes mais il est clair que les propos sont proches. Quant à Louise Erdrich, je l'ai découverte en 2009 avec La Chorale des maîtres bouchers et je me souviens avoir été happée par cette histoire et séduite par l'écriture. C'est donc avec une grande envie que j'ai ouvert L'Enfant de la prochaine aurore. On y fait la connaissance de Cedar Hawk Songmaker, personnage principal mais aussi narratrice, à travers les mots qu'elle dépose dans ce qui constitue son journal intime. Elle nous présente un monde en mutation, qu'elle découvre presque autant que nous, par bribes, et qu'elle interroge, alors qu'elle fait elle-même face à un grand bouleversement personnel puisqu'elle porte la vie. Nous comprenons très vite que cela fait d'elle un être à part. Nous la suivons lorsqu'elle part à la rencontre de sa famille biologique afin d'en apprendre plus sur ses origines amérindiennes, puis lors de son séjour dans un hôpital où sont regroupées les femmes enceintes et, enfin, lors de sa fuite, seule échappatoire possible au milieu de ce chaos qu'est en train de devenir le monde. Si j'ai beaucoup aimé faire la connaissance de ce personnage de femme forte et découvrir quelques-unes des conséquences du désastre climatique brièvement évoqué dans le roman, j'ai en revanche été gênée dans ma lecture par une certaine confusion du propos et un manque d'informations essentiellement dus, à mon avis, au fait que nous avons connaissance des événements et de la situation par le biais d'une narratrice interne. C'est généralement un choix narratologique pertinent mais peut-être aurait-il fallu ici mêler la voix de Cedar à une autre voix… Certaines digressions m'ont également laissée à l'écart et ne m'ont pas permis d'apprécier ce roman à sa juste valeur. Point positif, j'ai désormais très envie de relire un roman de Louise Erdrich pour retrouver le plaisir ressenti en 2009.

Lien : http://aperto-libro.over-blo..
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critiques presse (4)
LaPresse
15 mars 2021
Voici un roman dystopique de Louise Erdrich plutôt surprenant et réussi. L'action se déroule chez nos voisins du Sud, dans un futur assez proche. Le pays vient de déclarer l'état d'urgence à cause d'un virus !
Lire la critique sur le site : LaPresse
LeJournaldeQuebec
15 février 2021
Au final, une dystopie qu’on a adorée. Non seulement parce que l’avenir que nous permet d’entrevoir l’Américaine Louise Erdrich est franchement inquiétant, mais parce que son récit n’est pas sans rappeler un autre excellent livre : La servante écarlate de Margaret Atwood.
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
LeMonde
02 février 2021
L’avenir va mal, et les femmes en souffrent le plus. Mais l’écrivaine amérindienne sait se jouer du genre dystopique.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Bibliobs
25 janvier 2021
Dans une dystopie apparentée à « la Servante écarlate », de Margaret Atwood, la grande romancière amérindienne dénonce la montée, aux États-unis, du fondamentalisme religieux.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Citations et extraits (47) Voir plus Ajouter une citation
Et pendant tout ce temps, alors que le soleil décline, nous baignant dans un embrasement magnifique, mon cœur se fend peu à peu. L'or profond aux reflets orangés est pure nostalgie. Une très ancienne clarté se diffuse déjà sur cette belle vie que nous partageons. Je deviens lourde, enracinée dans ma chaise longue. Tout ce que je dis et tout ce que disent mes parents, les amis qui vont et viennent, la saveur piquante de la citronnade, le vin sur leur langue, les cris d'oiseaux ensommeillés et les écureuils qui s'élancent de branche en branche, sans crainte, dans les hautes cimes des vieux érables et des féviers, tout cela est en phase terminale. Il n'y aura plus jamais d'autre mois d'août sur terre, pas comme celui-ci ; il n'y aura plus jamais cette sorte de bien-être et de justesse. Les oiseaux changeront, les écureuils tomberont des arbres, et qui se rappellera comment on fait le vin ?
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Je ferme ensuite les yeux et j'écoute le grondement et le fracas du monde qui passe en trombe. Nous aussi, nous passons en trombe. Le vent cinglant nous double. Nous sommes si brefs. Un pissenlit d'un jour. L'enveloppe d'une graine ricochant sur la glace. Nous sommes une plume tombant de l'aile d'un oiseau. Je ne sais pas pourquoi il nous est donné d'être tellement mortels et d'éprouver tant de sentiments. C'est une blague cruelle, et magnifique.
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Nous nous laissons flotter dehors. La lumière de l'été finissant s'écoule comme du sang, interminablement. Mes parents partagent une bouteille de vin sans remarquer que je bois plutôt de la citronnade, que je n'arrive pas à finir mes pancakes. Nous sommes assis sur la galerie, à l'arrière la maison. Ils adressent des signes aux voisins, trottinent jusqu'à la clôture pour bavarder, essuient la sueur qui perle de leur front. Nous faisons des projets pour rester, nous enfuir, nous cacher, vivre normalement. Nous décidons de rester vigilants, puis discutons pour savoir si oui ou non la vigilance est une stratégie. Et pendant tout ce temps, alors que le soleil décline, nous baignant dans un embrasement magnifique, mon coeur se fend peu à peu. L'or profond aux reflets orangés est pure nostalgie. Une très ancienne clarté se diffuse déjà sur cette belle vie que nous partageons. Je deviens lourde, enracinée dans ma chaise longue. Tout ce que je dis et tout ce que disent mes parents, les amis qui vont et viennent, la saveur piquante de la citronnade, le vin sur leur langue, les cris d'oiseaux ensommeillés et les écureuils qui s'élancent de branche en branche, sans criante, dans les hautes cimes des vieux érables et des féviers, tout cela est en phase terminale. Il n'y aura plus jamais d'autre mois d'août sur terre, pas comme celui-ci ; il n'y aura plus jamais cette sorte de bien-être et de justesse. Les oiseaux changeront, les écureuils tomberont des arbres, et qui se rappellera comment on fait le vin?
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Son expression ne change pas. Il est possible que mon identité, notre place dans le temps, la rivière boueuse de la réalité, que tout cela soit noyé d'ombre. Pourtant, elle a peut-être enregistré le mot "enceinte" parce qu'il déclenche une histoire, puis une autre, toute une foule d'histoires. En l'écoutant je me dis que ses récits sont tellement au point que Grand-mère Virginia doit sûrement les raconter sans arrêt, à n'en plus finir. Et me voilà, un nouveau public! Peu importe qui je suis. Sa mémoire se transforme. Tout ce qui compte, c'est la narration. Elle semble avoir vécu de multiples versions de sa propre histoire. Dès qu'elle se met à parler, rien ne peut plus la déconcentrer. J'ai droit à l'Histoire de l'enfant aux deux visages, à la Tombe cracheuse de dents, au Tambour doué de parole, à Quand les grenouilles chantaient comme des oiseaux, à l'Histoire du chien qui a chié une bague en diamants, à la Religieuse qui a donné son bébé à manger à une truie, à la Religieuse qui a avalé un ruban blanc qui est ressorti à l'autre bout tout aussi blanc, aux Vingt défunts qui sont apparus à la messe, à une Avalanche de poissons, à la Soeur très désorientée, à Comment un jumeau a tué l'autre, à une Pomme légère comme l'air, à la Pluie bouillante, et à d'autres encore dont je n'arrive pas à me souvenir à cet instant précis.
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Il m'est impossible de la regarder. Je suis non seulement jalouse de sa liberté, mais aussi du fait qu'elle va retrouver son mari, qui a un droit sur elle alors que je n'en ai aucun, moi qui ne suis qu'une amie. Je suis seulement quelqu'un qui l'aime comme on tombe amoureux d'un être avec qui on a traversé toutes les épreuves de la vie.
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Vidéo de Louise Erdrich
Premier épisode de notre nouveau format vidéo : DANS LES PAGES... de François Busnel !
Partez à la découverte des livres marquants dans sa carrière de journaliste, d'écrivain et de réalisateur. Au programme :
"Betty" de Tiffany McDaniel@EditionsGallmeister "Crossroads" de Jonathan Franzen @editionsdelolivier9469 "Les saisons de la nuit" de Colum McCann @universpoche "Water Music" de T. C. Boyle @editionsphebuslibretto2994 "La chorale des maitres bouchers" de Louise Erdrich @VideoAlbinMichel "Feuilles d'Herbe" de Walt Whitman @lesbelleslettres7227
Réalisation, montage et prise de son : Arthur Scanu Mastering : Antoine Daviaud
Merci @lagrandelibrairieet Ines de la Motte Saint-Pierre !
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