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3,59

sur 1547 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Oui, bon, Annie est amoureuse. Annie c'est un peu comme Martine, elle vit toutes sortes d'expériences dont elle nous fait profiter et qu'elle nous raconte par le menu.

Ce coup-ci Annie aime un homme plus jeune qu'elle (exit le mari, je n'ai pas lu cet épisode mais je suis sûre qu'il existe), un bellâtre venu du froid, genre Alain Delon blond aux yeux verts, marié, riche et pas intellectuel pour un sou. Et comme l'élu de son coeur est peu disponible, entre des shoppings pour acheter des dessous affriolants, ses cours et la correction de copies, Annie se morfond, rêve de situations scabreuses avec A (dont elle est obligée bien sûr de masquer le nom) et souffre de s'imaginer trompée.

Moi je la trouve un peu vieille pour ce genre de fantaisies, Annie. Elle devrait, je ne sais pas, faire de la broderie, jouer au bridge, peindre sur porcelaine ou écrire un livre sur l'art d'être grand-mère. Tout plutôt que nous narrer ses fantasmes avec un homme de l'Est. Même si elle se confesse avec talent, je trouve ça vaguement déplacé, un peu déplaisant. Je mets trois étoiles quand même à Annie, au nom du droit à la sexualité des personnes âgées.
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L'histoire d'une attente, celle d'un coup de téléphone, celui qui annoncerait à la narratrice (auteure) que A., l'homme marié avec lequel elle entretient une relation-que dis-je une relation, plutôt une passion démesurée, du moins pour elle - lui annonce sa visite.
Durant ces deux années, de 1989 à 1990, elle n'a pratiquement vécu que pour cela, attendre qu'il l'appelle. Toutes ses passions d'avant n'ont plus la même saveur sans lui, sans ses caresses, sans son odeur. Pourtant, elle sait très bien qu'il est marié et qu'il y a forcément d'autres femmes dans sa vie, du moins au moins une, sa femme officielle, et qu'un jour viendrait où il devrait la quitter. Etant étranger, c'est d'ailleurs ce qui arriva lorsqu'il lui annonça qu'il retournait chez lui, dans les pays de l'Est. Ce fut tout d'abord une déchirure mais avec le temps, même les blessures de coeur, qui sont parfois les plus douloureuses, finissent par guérir.

Avis assez partagé sur ce livre car, même si je dois reconnaître que l'écriture d'Annie Ernaux est très belle, le lecteur est lui aussi dans l'attente - l'attente qu'il se passe quelque chose - mais voilà, il ne se passe rien ! Celle-ci réussit néanmoins à trouver les mots exacts pour décrire ce qu'est une passion dans l'amour, quelque chose de très intense mais qui ne s'étend pas nécessairement sur la durée et en cela, elle en rend parfaitement compte dans cet ouvrage !
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Passion simple est un court roman sur une passion amoureuse de la narratrice. Il est à rapprocher des autres oeuvres d'Annie Ernaux, mais en tant que lecture indépendante, il m'a laissée sur ma faim.

Une femme est amoureuse. Voilà, voilà.
Et ? Eh bien, elle attend. Annie Ernaux décrit, très bien d'ailleurs, l'attente et la fin de l'histoire.
Est-ce intéressant ? Oui et non. Oui, parce que tout le monde n'a pas connu cette situation, non, parce qu'Annie Ernaux arrive après Marcel Proust ou Albert Cohen.

Comme souvent, l'émotion est absente, ce qui, quand on parle de passion, est assez déroutant.

Lien : https://dequoilire.com/passi..
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Une fois ce petit livre refermé, avant d'écrire ces quelques lignes sans intérêt, je me suis permis de parcourir les critiques produites par mes amis babéliotes l'ayant lu, "juste pour voir" comme dirait un habitué de Roulettenbourg...
Et j'ai ri ! Franchement, certaines d'entre elles méritent récompense, que l'on partage l'avis ou non.
Personnellement, homme binaire hétérosexuel blanc non racisé (allusion à ma dernière lecture de BD), il m'est impossible ou presque de me retrouver dans la situation décrite par Mme Ernaux. Mais mes chances d'être de l'autre côté du miroir, à la place du visiteur épisodique jamais décrit complètement dans le roman mais tellement attendu, sont presque à leur maximum de probabilité, au statut social près.
J'ai donc dévoré ce petit roman comme une explication de ce que serait potentiellement amenée à penser, à ressentir, à imaginer, une dame avec laquelle j'entretiendrais ce genre de relation si... Vous noterez le conditionnel, toute ressemblance avec ... etc...
De ce point de vue, j'ai trouvé certains passages intéressants, touchants, révoltants, aberrants et je me demande cependant si tout cela n'est pas un peu daté. Je doute que la génération en âge de s'adonner à ces plaisirs sophistiqués et codifiés se languisse comme l'auteure semble l'avoir fait.
Est-ce complètement autobiographique, largement romancé, mythomanié, abracadabrantesque... allez savoir.
C'est suffisamment bien écrit pour se laisser consommer comme un bonbon, sucré pour les uns, amer pour les autres, homéopathique pour tous.
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Mon premier Anne Ernaux... et je ne sais si j'ai aimé ou pas. Quoiqu'il en soit, je me suis retrouvée bien souvent dans ce petit bouquin. L'attente d'un homme engagé, tous les sentiments contradictoires que nous font vivre cette relation, entre l'envie de lui appartenir et celle de lui dire qu'on en a assez, l'avoir constamment en tête, voyant tous les gestes qu'on aimerait faire avec lui, et mettre en pause sa vie au moment où lui est disponible. Et puis, interpréter tous ses gestes, toutes ses paroles, leur donner un sens qu'elle n'ont pas, pour se faire croire que cette relation est plus que ce qu'elle est. Bref, les mots d'Ernaux ont vibrés de vérité pour moi.... mais... on en fait vite le tour, et bien que ce livre soit court, je l'ai trouvé long, tout en restant sur ma faim... Un peu étrange comme sensation... J'aurai vu ce texte plutôt comme un chapitre dans un roman, et non comme un roman en soit. Mais c'est mon avis bien personnel et il n'engage que moi.
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Dans ce très court roman autobiographique, Annie Ernaux raconte sa passion pour A. un homme marié originaire d'un pays de l'Est. Elle n'en dévoile pas plus sur cet homme qui a choisi d'être dans sa vie mais pas dans son livre, mais elle nous raconte cet épisode de sa vie, l'attente des coups de fil, les après-midi passionnés, le manque après la séparation.
Elle réfléchit aussi à l'écriture et à la démarche de raconter cette passion. J'ai d'ailleurs trouvé cet aspect du livre très intéressant, sans doute plus que le récit en lui-même que j'ai trouvé trop court.
Il aurait pu sembler paradoxal à première vue que l'écriture plate d'Annie Ernaux serve à raconter une passion, mais au final cela fonctionne plutôt bien (même s'il aurait fallu que le roman soit plus long pour en juger pleinement) et j'ai pris plaisir à lire ce livre, même si ce n'est pas l'ouvrage d'Annie Ernaux que j'ai préféré.
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Passion simple ou comment Annie Ernaux vit une passion simple...Je la verrais bien parler d'elle à la troisième personne...D'autant plus que l'objet de sa passion ressemble à Alain Delon...En toute modestie... " Alain Delon est une légende, un mythe, Annie Ernaux aussi..."
Annie aime un Étranger, un Homme de l'Est, à l'accent sexy slave, et elle découvre que l'objet du désir est toujours, lui aussi, un étranger, quelqu'un que l'on ne connait pas ...waouh ! Heureusement que c'était pas déjà dit dans tous les textes depuis Homère ...
Annie ne vit plus que dans l'attente d'Alain (A. pour les non intimes ) et son accent slave - elle s'achète des fringues pour être belle, se maquille, vit dans un monde parallèle ...J'ai déjà lu ça quelque part ? Est- ce dans Twilight ou dans la Princesses de Cleves ? En tout cas, c'était plus intéressant dans les deux cas.
Annie ne sait pas ce que pense l'Autre, ce qu'il ressent...Moi, j'ai comme un pressentiment :
-il ne lui offre rien
-il téléphone juste avant de venir quand il a une "opportunité"
-il ne parle de rien, il se rhabille et il repart
-il disparait sans laisser d'adresse
Bon, vous en pensez ce que vous voulez. Il ne me semble pas qu'il y ait grand mystère là dedans...Bon, en même temps, ce n'est pas vraiment son sujet. Son sujet, c'est Annie Ernaux. le problème, c'est que là, Annie Ernaux, elle veut nous fait croire qu'elle découvre l'Amérique alors que c'est juste le perif aux heures de pointe, un truc tellement rebattu, dans la littérature et dans la réalité, que j'avais l'impression que j'en avais déjà moi- même écrit toutes les phrases ( autrefois,quand j'étais en 4eme, dans mon journal intime, avec un A. pour Alex, Arnaud ...)



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Une femme mère célibataire se confie par écrit sur sa liaison avec un homme marié, sur son obsession pour lui...

Ce texte, néanmoins très rapide à lire, pose toutefois plusieurs questions ou amène à plusieurs réflexions.
Tout d'abord, l'entrée en matière, qui cite les films X qui passaient sur Canal+ à partir d'une certaine heure dans les années 90, laisse assez pantois : relier une scène de film de luc à l'acte d'écriture comme un don de soi, une confession de ses pensées les plus intimes sans chercher à se faire juger, c'est espérer un exercice acrobatique de la part du lecteur !
Et puis ce titre, "Passion simple", antagonique, un pur oxymore vu le contenu du texte qui fait état d'une femme absolument obsédée par un homme, de manière quasi maladive, dépendante au point de ne plus exister que par lui (ce qui au passage a un côté archi pathétique), aux actions qui n'ont rien de simple et qui pourtant en ont tout l'air, parce qu'aussi bien l'amour que la dépendance sont aveugles et particulièrement déraisonnés. Pour résumer : c'est pourtant simple sans être simple.
Ainsi, cette femme s'épanche sur son addiction sans jamais lui associer quoi que ce soit de négatif. Des faits, rien que des faits. Pourquoi, si au final elle sait qu'elle doit le quitter ? C'est une femme volontairement assujettie à l'emprise de cet homme qui a happé sa vie, pour son plus grand plaisir, mais qui de son côté ne doit certainement pas vivre les choses de la même manière...
Il y a un côté dérangeant dans cette confession comme dans un journal intime, pourtant voué à publication dès le départ (le jeu, en fin d'ouvrage, sur la mince frontière entre la fiction et l'autobiographie donne un relief supplémentaire à l'aspect global du texte). En somme, que retirons-nous de la déclaration aussi intime d'une femme qui se livre à l'opinion générale mais ne veut pas y être soumis ? L'aspect navrant de cette histoire reste quand même saisissant et touchant, probablement parce qu'il est candide, sincère et spontané, qu'il a un arrière-goût de déjà-vu et d'authenticité, de quelque chose qui a tout du plausible.
La qualité littéraire n'est pas forcément au rendez-vous, mais le personnage se livre de manière humaine, assujetti à des sentiments visiblement bien plus forts que lui. Ce n'est pas le livre du siècle, mais son petit nombre de pages fait qu'on peut y jeter un oeil curieux.
Lien : http://livriotheque.free.fr/..
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Nous deux – le magazine – est plus obscène que Sade.
ROLAND BARTHES

L'épigraphe ici présent est l'épigraphe de la Passion Simple d'Annie Ernaux. Annie Ernaux est-elle plus ou moins obscène que le magazine qui est lui-même plus obscène que Sade ?

À nous, lecteurs, d'en juger à partir de ce qu'elle écrit dès le début de la Passion Simple : https://www.babelio.com/auteur/Annie-Ernaux/3976/citations/2923581 (merci de confirmer que vous avez bien plus de 18 ans avant de cliquer sur ce lien).

Hey mais attends, Annie Ernaux elle fait dans le porno ?

Là, tout de suite, un jeu de mot me vient sur son nom mais je vais m'abstenir par respect d'une collègue qui s'appelle Annie et par respect pour vous si vous passez par ici et que vous vous appelez Annie (ne me remerciez pas).

En tout cas, c'est très visuel ce qu'elle décrit dans la citation, c'est même télévisuel, et il me semble qu'on peut parler de voyeurisme de la part de la spectatrice qu'elle est, tout comme on peut parler de voyeurisme dans mon cas et d'exhibitionnisme dans le cas d'Annie Ernaux qui nous raconte dans la Passion Simple son aventure avec un Russe (Oh my god, a Russian ! So chocking! Please read this novel!)

Bon là, Mme Ernaux m'arrête tout de suite parce qu'elle dit dans son livre, je cite : « C'est […] par erreur qu'on assimile celui qui écrit sur sa vie à un exhibitionniste, puisque ce dernier n'a qu'un désir, se montrer et être vu dans le même instant. » Sauf qu'il me semble, enfin si je ne m'abuse, qu'il n'est aucunement dit dans la définition de l'exhibitionniste que l'exhibition doit être instantanée. En effet, Ernaux, si elle est retorse et perverse, peut tout à fait écrire et jouir de l'effet produit sur elle même à l'instant T de l'écriture (il me semble que l'auteur se fait lecteur à partir du moment où il se relit) ; et elle peut tout à fait jouir, aussi, de la certitude qu'elle sera lue dans un avenir plus ou moins proche selon la date de publication de son texte et se représenter le lecteur en imagination, comme elle se représente son amant en imagination dans le roman …

Du coup, je me permets d'insister, il s'agit bel et bien pour moi d'exhibition dans son écriture. Même si elle préfère le terme d'« exposition », parce que ça fait plus « art », sans doute …

Mais est-ce de l'art ? Annie Ernaux n'écrit-elle pas comme le pigiste d'un magazine féminin ? Elle-même le dit : « Tout ce temps, j'ai eu l'impression de vivre ma passion sur le mode romanesque, mais je ne sais pas, maintenant, sur quel mode je l'écris, si c'est celui du témoignage, voire de la confidence telle qu'elle se pratique dans les journaux féminins, celui du manifeste ou du procès-verbal, ou même du commentaire de texte. » Bon, étant donné qu'elle même le genre du journal féminin au genre du témoignage, très bien, je veux bien concéder qu'il puisse s'agir de littérature. D'autant plus que le traitement du temps dans le roman est assez intéressant, mais elle ne laisse aucune place à l'analyse, car elle s'en charge elle-même en note de bas de page ( elle doit croire que ses lecteurs incapables d'analyser un texte).

Vous aurez sans doute remarqué que je n'aime pas particulièrement Mme Ernaux. Mais j'ai apprécie la lecture de la Passion Simple (bien plus que la lecture de la Place). du coup, je me permets de poursuivre ma critique jusqu'à la fin ayant après tout poursuivi ma lecture de la Passion Simple jusqu'à la fin.

La Passion Simple, c'est la Passion dans toutes ses acceptions : C'est la relation d'une relation, c'est le récit d'une aventure avec un homme marié, qui fait souffrir ( non pas le couple car elle s'en fout du couple celle qui raconte), mais la maîtresse, celle qui raconte. Qui ne se considère d'ailleurs pas comme une troisième personne mais comme celle qui se laisse traverser par la présence ou l'absence de l'homme marié. Et toute l'histoire ne tourne qu'autour d'elle et de lui. C'est la passion qui est racontée mais jusqu'à la folie (car il est question d'obsession, de dépendance, de maladie mentale, la limérence, dite la maladie d'amour – bien qu'il ne s'agisse pas vraiment d'amour). Ainsi, cette relation se fait toxique, et la femme entretient férocement son obsession pour cet homme marié, nourrissant son anxiété en ne vivant que pour lui, survivant en son absence grâce aux troubles obsessionnels plus ou moins compulsifs. Et elle oublie tout le reste ressassant sans cesse l'image de cet homme. Et elle en devient de plus en plus vivante diraient certains, moi je dirais de plus en plus morte, comme si elle se vidait et comme si elle en oubliait tout, y compris elle-même, y compris son humanité :

« Quand il me laissait un intervalle plus long, trois ou quatre jours entre son appel et sa venue, je me représentais avec dégoût tout le travail que je devrais faire, les repas d'amis où je devrais aller, avant de le revoir. J'aurais voulu n'avoir rien d'autre à faire que l'attendre. Et je vivais dans une hantise croissante qu'il survienne n'importe quoi empêchant notre rendez-vous. Un après-midi, alors que je rentrais chez moi en voiture et qu'il devait arriver une demi-heure plus tard, j'ai eu la pensée rapide que je pourrais avoir un accrochage. Aussitôt : « Je ne sais pas si je m'arrêterais. »

Je me demande en lisant de telles phrases si Annie Ernaux nous interpelle, sollicite, réclame notre jugement moral ? N'est-il pas de bonne hygiène pour nous lecteurs, de nous laver les mains lorsqu'elle écrit que naturellement, après le départ de son amant, elle ne se lave pas avant le lendemain pour garder son sperme ? Désolée si je suis crue, mais je ne fais que la citer (je ne suis donc pas responsable de ces propos, je m'en lave les mains et j'espère que vous aussi vous vous êtes bien lavés les mains et le corps même).

Cette relation amoureuse en tout cas, ne m'a en rien émoustillée. Rends l'argent Annie ! Car cette histoire, pour moi, c'est trop commercial. En fait, je trouve Annie Ernaux commerciale, c'est ce qui me dérange chez elle, j'ai enfin mis le doigt dessus. Bon, certes, je dis ça après avoir particulièrement souffert de ma lecture de la Place et désolée Mme Ernaux, je sais que vous ne voulez en rien ressembler à vos parents qui tenaient un petit commerce, mais il me semble que Mme Ernaux est devenue commerçante de livres maintenant, non ? Mais elle a le mérite de fabriquer ses propres produits et de ne pas les importer de l'étranger, certes, certes. Mais j'insiste, c'est commercial la Place, et c'est commercial la Passion Simple. D'ailleurs elle écrit dans ce dernier qu'elle et son amant « épuisai[en]t un capital de désir ». Elle est en plein dans la société de consommation quoi.

« Les seuls moments heureux en dehors de sa présence étaient ceux où j'achetais de nouvelles robes, des boucles d'oreilles, des bas, et les essayais chez moi devant la glace, l'idéal, impossible, consistant en ce qu'il voie à chaque fois une toilette différente. Il apercevait à peine cinq minutes mon chemisier ou mes escarpins neufs qui seraient abandonnés n'importe où jusqu'à son départ. Je savais aussi l'inutilité des fringues devant un nouveau désir qu'il aurait eu pour une autre femme. Mais apparaître dans une toilette qu'il avait déjà vue me paraissait une faute, un relâchement dans l'effort vers une sorte de perfection à laquelle je tendais dans ma relation avec lui. Dans la même volonté de perfection, j'ai feuilleté dans une grande surface Techniques de l'amour physique . Sous le titre, il y avait « 700 000 exemplaires vendus ».

Maintenant qu'elle a décroché le Prix Nobel, elle doit vendre plus de 700 000 exemplaires. C'est la réussite. Mais attendez, que lis-je en note de bas de page ? Elle révèle le secret de sa réussite ! Elle nous donne la recette pour écrire et surtout pour finir un livre ! C'est généreux de sa part. Allez, moi aussi je suis généreuse, et je la transmets cette recette. Il suffit de provoquer un accident pour en arriver à l'accident d'écrire. Ainsi :

« J'ai souvent l'habitude de mettre en balance un désir et un accident que je provoquerais ou dont je serais la victime, une maladie, quelque chose de plus ou moins tragique. C'est une manière assez sûre de mesurer la force de mon désir – peut-être aussi de défier le destin – que de savoir si j'accepte d'en payer le prix en imagination : « Cela m'est égal d'avoir ma maison incendiée si je réussis à terminer ce que je suis en train d'écrire. »

Si sa maison a dû brûler pour que la Passion Simple soit terminée et publiée, qu'a-t-elle souhaité pour être Prix Nobel ? Une troisième guerre mondiale ? C'est possible. du coup, elle serait drôlement puissante Mme Ernaux. Je sais pas vous, mais moi je vais faire en sorte de ne pas la rencontrer. Sait-on jamais ? Elle fait souvent des voeux en plus. Lorsqu'elle veut revoir son amant, elle souhaite un crash d'avion. « J'ai désiré que l'avion dans lequel je revenais de Copenhague s'écrase si je ne devais jamais le revoir ». Je vous souhaite de ne jamais monter dans le même avion qu'elle, parce que son amant ne reviendra peut-être jamais. Comme ça, elle ne pourra pas mettre votre vie en balance. Quoique, si ça se trouve, un jour, elle a formulé le voeu d'obtenir le Nobel, en mettant la vie de ses lecteurs en balance ! Mais non, ça serait bête de sa part, parce qu'elle aurait certes décroché le Nobel, elle aurait en contrepartie perdu pas mal de benéfices, car si ses lecteurs meurent, elle ne pourra plus se payer de robes pour se faire belle pour son amant. Ouais non ça va, on doit être protégés quand on lit ses bouquins, du coup il vaut mieux la lire, ouais, si ça se trouve, dans le doute.

En plus, c'est chouette de la lire, parce qu'en lisant Passion Simple, on peut se programmer mentalement, comme elle, à avoir un amant pour mieux s'auto-flageller après. Je m'explique. Après avoir écrit qu'écrire fait partie des moyens qu'elle a de faire revenir son amant ne serait-ce qu'en pensée, après avoir donc avoué qu'écrire lui permet d'entretenir son obsession ( pour mieux l'exorciser peut-être, ça je dis pas ; ces mécanismes psychologiques complexes m'échappent), elle se demande pourquoi elle partage ça avec nous.

« Je me demande si je n'écris pas pour savoir si les autres n'ont pas fait ou ressenti des choses identiques, sinon, pour qu'ils trouvent normal de les ressentir. Même, qu'ils les vivent à leur tour en oubliant qu'ils les ont lues quelque part un jour. »

Alors moi je lis cette phrase et je m'interroge. Même si on a vécu ou ressenti des choses identiques, pourquoi devrions-nous trouver ça « normal » de les ressentir ? Pourquoi vouloir normaliser ou banaliser une relation toxique ? L'obsession qui va jusqu'à la maladie mentale ? Pourquoi souhaite-t-elle, aussi, que le lecteur vive la même passion, la même douleur ? Pour qu'elle souffre moins en sachant que d'autres souffrent ? Pour que d'autres souffrent moins en sachant que d'autres souffrent comme eux et se confortent dans leur souffrance et dans leur folie ? Pourquoi vouloir normaliser la passion, le manque de raison ( car la passion s'oppose à la raison) ? Pourquoi vouloir banaliser le manque de jugement ?

PS pour moi-même : Des fois, je me demande s'il faut juger ? Ou s'il ne serait pas préférable de ne pas juger (pour être dans la compréhension, dans l'empathie ou que sais-je encore).

Car j'entends souvent qu'il ne faut pas juger.
Mais, je me souviens qu'on disait, avant, qu'il faut se départir de ses préjugés.
Et qu'il faut donc prendre le temps d'analyser, de lire, de comprendre, pour ensuite se forger un avis, une opinion, pour pouvoir juger, justement, critiquer.
En fait, il me semble qu'il ne faut pas perdre notre capacité de jugement, ne serait-ce que pour éviter le manque de jugement.
Mais qu'il faut faire attention à la définition de « juger », qui est bien trop souvent à mon goût réduite à une seule de ses acceptions, l'acception judiciaire.
Ici je précise que je ne fais pas le procès d'Annie Ernaux, mais que j'essaie de comprendre dans ma critique ce qui m'éloigne d'elle.
Enfin, je me rends compte que j'ai certes détesté La Place mais que j'ai apprécié cette relecture d'Annie Ernaux, cette lecture de la Passion Simple, car ça m'a permis de mieux comprendre pourquoi je ne la relirai sans doute pas ( ne me forcez pas s'il vous plaît).
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Un petit roman de 76 pages qui se lit en à peine 2 heures. L'histoire d'une passion, d'un amour interdit ou impossible.
L'histoire d'une femme qui préfère attendre un appel de son amant, attendre qu'il donne un signe de vie, attendre qu'il vient chez elle, attendre ces quelles heures passées ensemble.
On ressent des sentiments vrais et vécus par l'auteure, on ressent aussi une souffrance. Une souffrance d'avoir fait partie d'une vie sans en faire partie...

J'ai bien aimé le style employé, mais il manquait quelque chose dans cette histoire que je n'arrive pas à décrire pour dire qu'elle me plaisait vraiment. On peut se poser la question : Est-ce qu'attendre entretient la passion ou avec le temps éteint la passion ?

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