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Journal intime d'Annie Ernaux lors de sa liaison avec un diplomate. Mort, écriture et sexe fusionnent. Un ressenti très bien traduit par une écriture juste et précise.
C'est très bien écrit mais impudique et dérangeant. Un journal intime est fait pour soi pour exprimer des sentiments, des émotions, des réflexions hors du regard des autres. Je comprends sa nécessité vitale d'écrire ce jorunal, mais les liaisons d'Annie Ernaux ne nous regardent pas. Son rôle d'écrivain était de transposer cette histoire dans un roman fictif afin de préserver son intimité et de ne pas nous rendre indiscrets et voyeurs.
J'ai été plusieurs fois tentée de ne pas continuer à lire cette "nappe de souffrance égocentrique" comme elle dit elle même.
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La Feuille Volante n°1078 – Octobre 2016
Se perdreAnnie Ernaux – Gallimard.

Depuis que je connais Annie Ernaux (par la seule lecture de ses textes, cela va sans dire, mais puisqu'elle a fait de sa vie la nourriture de ses romans e que j'en suis le lecteur attentif, je peux parler d'une véritable fréquentation quasi-personnelle), il me semble que le sexe et la recherche du plaisir ont tenu une grande place dans sa vie. D'emblée, elle nous parle de S. 35 ans, un homme marié, Russe, vaguement diplomate, apparatchik et peut-être membre du KGB, dont elle fut très éprise au point de ne rien écrire de création littéraire pendant tout le temps qu'a duré leur relation en pointillés à cause de la présence épisodique de l'épouse de S., hors mis la rédaction de son journal intime. C'est en effet à partir de ce document qu'elle va refaire le chemin à l'envers. Nous somme en 1988, elle a 48 Ans, elle est apparemment déjà divorcée, femme de Lettres, libre et mère de deux enfants. Sa rencontre avec S. est le prélude à une liaison torride pour elle mais qui est vécue par lui comme une passade sans lendemain et alors qu'elle recherche avec lui une véritable perfection dans la répétition de l'acte charnel, lui au contraire ne recherche que la jouissance, ne pense qu'à la baiser, elle, la femme de lettres, célèbre de surcroît … et à boire de la vodka ou du whisky ! C'est une situation d'autant plus cruelle pour elle qu'il ne l'aime pas et elle le sait (« je suis une parenthèse érotique dans sa vie, rien de plus »), qu'il la délaisse volontiers mais qu'elle l'attend quand même. Il semble apprécier seulement d être l'amant d'une femme plus vieille que lui, peut-être d'une Française, expérimentée dans l'art de faire l'amour et, qui plus est, est connue. A l'évidence et quelles que soient les marques de passion qu'elle pourra lui témoigner, il ne quittera pas sa femme pour elle, la préférant comme maîtresse que comme future épouse. Il me semble aussi qu'il y a aussi une ambiguïté dans l'attachement qu'elle a pour lui. Elle avoue que certes elle en est amoureuse mais corrige aussitôt cet aveu en ajoutant qu'elle est surtout fascinée par « l'âme russe », par l'URSS, comme elle l'est par la littérature slave, mais redoute d'être enceinte de lui. Elle souhaite aussi, parce que « la sexualité a toujours été une angoisse dans (sa) vie », maintenir seule cette liaison, « à bout de bras » avec cet homme, même si elle l'épuise, même si leur rupture est de plus en plus prévisible.

Elle nous confie, presque au jour le jour et sans omettre aucun détail ni aucune précision (le langage cru ne me gêne pas), ce qui pourrait être érotique mais qui à la longue devient lassant, ce besoin d'amour, cette passion qu'elle ressent pour lui cette histoire d'amours clandestines et qui lui rappelle ses précédentes liaisons. C'est un peu comme si S. rachetait par sa seule présence, même épisodique, toutes ses anciennes expériences décevantes, et ce malgré l'attente qu'il impose à Annie, le désir qu'il fait naître chez elle, malgré sa passion dévorante. L'attente chez elle est dévastatrice et s'apparente à la mort, pire peut-être, elle ne peut vivre sans écrire et cette espérance de lui annihile toute possibilité créatrice qui est le propre d'un écrivain. Est-ce que cette liaison avec un homme plus jeune qu'elle, signifie, même inconsciemment pour elle la peur de vieillir ? le temps qui passe, elle le voit pourtant dans son corps qui s'enlaidit et dans cette assemblée de femmes qu'est ce colloque d'auteures dont beaucoup sont plus jeunes (et plus belles) qu'elle, dont elle est jalouse et craint qu'il ne les croise et ainsi ne l'oublie pour l'un d'entre elles. Avec le temps sa confiance en lui s'émousse même au point qu'elle craint d'avoir une remplaçante ou pire, que S. à cause des frasques et des infidélités qu'elle lui prête ne lui transmette le sida. Quant au temps qu'elle passe avec lui, il file plus vite et, de ce fait, leurs rencontres, même passionnées, sont génératrices d'absence d'autant plus que, elle le sait, leurs rêves et leurs désirs sont différents et que la rupture laisse planer sur eux son ombre. Elle finit par se faire une raison, avec lui elle a perdu son temps.

J'en reviens au phénomène de l'écriture, ce besoin de confier au papier ses moindres sentiments, ses envies les plus intimes, ses expériences et ses fantasmes les plus débridés. L'auteure l'a fait en tenant un journal intime et c'est sans doute là une libération, une manière d'exorciser ses tourments en les nommant. Mettre des mots sur ses maux est une activité plutôt saine et libératrice. Annie Ernaux est une femme de Lettres qui a délibérément choisi de faire des moindres événements de sa vie la nourriture de sa démarche d'écrivain en refusant la fiction. Soit ! Dès lors un auteur peut tout dire de lui-même et bien peu s'en sont privé, racontant leur histoire qui parfois a été passionnante. Il n'y a pas en ce domaine d'interdit à part ceux qu'on s'impose à soi-même et apparemment elle ne s'en impose pas et se lâche dans la confidence. Je ne suis pas sûr pour autant que l'intérêt du lecteur soit au rendez-vous.

Je n'ai pas retrouvé ici, à cause dans doute du parti-pris de l'auteur d'adopter la forme d'un éphéméride, le style fluide que j'apprécie tant chez Annie Ernaux. En outre, l'aspect répétitif du thème choisi m'a, je l'avoue, un peu lassé, de même d'ailleurs que la fréquente allusion aux rêves. Bref, cette histoire d'une femme follement amoureuse d'un homme qui ne l'aime pas, qui n'est finalement qu'un amant parmi tant d'autres et qui va s'éclipser de sa vie sur la pointe des pieds, ne m'a que très modérément intéressé.

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En 2001, Annie Ernaux décide de publier les pages de son journal intime concernant sa passion avec S., attaché culturel de l'ambassade d'URSS. Cette liaison, elle l'a décrite dans un ouvrage publié presque dix ans plus tôt, "Passion simple". On est frappé par la différence de ton, l'absence de distance qui caractérise forcément les écrits contemporains des faits relatés. Cette perte du sens commun décrite, disséquée, analysée dans "Passion simple" nous est ici livrée brute, sans le regard un peu extérieur qu'offre le temps qui passe. Malheureusement, la sauce ne prend pas. Les chroniques intimes sont faites pour le rester et on finit par s'ennuyer. D'autant que tout cela s'étale sur plus de 370 pages. Le ton est souvent cru, explicite. Ce n'est pas la première fois que cela m'apparaît mais ici, c'est encore plus marqué: lorsqu'elle parle de sexe, Annie Ernaux a tendance à perdre le côté neutre, blanc qui caractérise son écriture. Elle est dans l'exhibition, comme si elle avait quelque chose à prouver. Elle se complaît manifestement dans l'utilisation de tournures salaces, de termes vulgaires ou inutilement explicites. Qu'on me comprenne bien, je ne joue pas l'oie blanche ou le Père la Morale, je constate juste une différence de traitement marquée dans les descriptions liées à la sexualité. Je ne suis pas sûr qu'il y ait vraiment un intérêt à savoir qu'elle l'a sucé dans le hall ou qu'enfin il l'a sodomisée.
Bref, un avis plus mitigé que d'habitude pour ce bouquin d'une auteure qui reste, malgré tout, parmi mes préférées.
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En 1988, Annie Ernaux part en voyage en Russie soviétique. le dernier jour de la tournée, à Leningrad, elle a commencé une liaison avec un diplomate russe, en poste à Paris et marié. Il avait 35 ans ; elle, 48. Leur liaison se poursuivit à Paris. Se perdre est le journal original et inaltéré qu'Ernaux a écrit pendant leurs 18 mois ensemble.
Cette affaire a produit non pas un mais deux livres, l'autre étant Passion Simple. Comme Anna Karénine et Madame Bovary, la liaison d'Ernaux doit être comptée comme l'une des grandes liaisons de la littérature. Sa subversion n'est pas simplement la subversion du genre - une femme écrivant sa propre histoire de passion, (historiquement domaine réservé aux hommes), c'est aussi l'absence totale de honte, une des qualités qui distingue les écrits d'Ernaux.
La romance était motivée, de la part d'Ernaux, par une poursuite de la perfection; tout au long, elle a cherché à recréer - pour la dernière fois - la première nuit à Leningrad encore et encore. Pour le Russe, Ernaux était un écrivain célèbre et le meilleur 'affaire' sexuelle de sa vie. Il lui était interdit de le contacter à l'ambassade et Se perdre a été écrit pendant les journées en attendant qu'il l'appelle. Souvent, le silence du diplomate ets interpreté comme ka fin de son histoire. "Ça y est", écrit-elle souvent, "c'est fini". Une terreur constante d'être larguée détruit Ernaux tous les jours.
Elle est à genoux dès la première page, en proie à une luxure qu'elle veut cultiver. Vous vous sentez comme si son coeur était entre vos mains. Elle va à des événements sociaux ennuyeux; elle assiste à des projections de films à l'ambassade ; elle part à l'étranger pour des voyages de presse. Elle le désire partout : à toute heure de la journée, dans tous les pays qu'elle visite. Elle s'achète de nouveaux vêtements; elle fait des courses pour lui ("Je suis à la fois mère et putain"). Elle a des rêves sexuels vifs. Mais au fond de sa tête, il y a toujours l'anticipation de l'appel téléphonique.
le Russe n'a aucune présence physique à Paris, sauf lorsqu'il est dans le lit d'Ernaux. C'est un homme dont toute la personnalité pourrait se résumer ainsi : « Il baise. Il boit de la vodka. Il parle de Staline. Quand il s'habille, il énumère, vêtement par vêtement, les noms de toutes les marques qu'il porte. Donc pas vraiment communiste alors ! Sa présence est plus psychologique, ressentie abondamment à l'évocation du mot « appel ».
Simple Passion était un mémoire intelligemment conçu; Se perdre est une grande partie de sa vie et la version la plus intéressante de l'affaire. Ernaux veut que ce soit une histoire d'amour depuis le début, mais ce n'est pas le cas. Au lieu de cela, c'est une étude d'une femme à son apogée. À l'avenir. Je soupçonne que le livre deviendra une sorte de totem pour les amoureux : un manuel pour les aider à trouver leur centre quand, comme Ernaux, ils sont éperdus d'amour.
Tous ses livres ont la qualité de sauver de l'oubli de frêles détails humains. Ensemble, ils racontent, par fragments, l'histoire d'une femme du XXe siècle qui a vécu pleinement, a recherché la douleur et le bonheur de manière égale, puis a consigné ses découvertes sincèrement sur papier.
Sa vie est notre héritage.
Lien : http://holophernes.over-blog..
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Quand je suis arrivée devant le rayon consacrée à Annie Ernaux, je n'ai pas su quel livre de poche choisir (c'est un problème récurrent chez moi, me demander le top 3 de mes desserts préférés, livres préférés, etc relève quasi de la torture mentale).

J'ai hésité entre plusieurs titres... que je finirai par acheter un jour ou l'autre. Si j'ai mis longtemps à me décider à lire cette autrice (pourquoi ? je craignais que son écriture un peu "raide" me rebute, je la trouve au contraire diablement "efficace"), j'ai aujourd'hui envie de tout découvrir de ses écrits.

Je me suis perdue parmi les quatrièmes de couverture, j'ai flâné au hasard parmi les pages et puis son "se perdre" a fait écho, la forme comme un journal intime m'a plu (c'est peut être toujours le cas de ses livres ?). J'ai compris seulement en débutant ma lecture que le coeur du livre était sa relation avec S., comme dans Passion simple (le seul et premier livre que j'ai lu d'Annie Ernaux).

J'ai été frappée par la lucidité de l'écrivaine sur sa façon d'agir et de réagir, sans concession et la finesse de son analyse. En lisant un article sur la jalousie, j'ai vu que son livre "L'occupation" était cité. Ce sera probablement mon prochain "Annie Ernaux" sans avoir besoin de choisir : )
Lien : https://www.instagram.com/p/..
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Grosse déception pour moi en ce qui concerne ce livre. J'ai lu "Passion simple" juste avant qui, même s'il ne m'a pas franchement emballée était plutôt agréable et je m'attendais à pénétrer enfin au coeur de cette passion dévorante que vivait l'auteure avec un diplomate Russe... il n'en fut rien.
Ce livre, très personnel, puisqu'il s'agit de la retranscription exacte du journal intime de l'auteure, n'a été pour moi qu'une longue et douloureuse plainte. Annie Ernaux reste finalement très en surface des choses de l'amour ( peut-on vraiment parler d'amour ici d'ailleurs? ) et du sexe pour ne s'appesantir que sur ses déceptions, la crainte permanente et souvent irraisonnée de voir cette histoire se finir, son était quasi dépressif entre deux rendez-vous ( elle utilise d'ailleurs le mot "déréliction" à tour de bras )...
Bref, je ne le recommanderais pas!
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C'est une narration obsessionnelle et quotidienne racontant sa relation sexuelle avec S., un diplomate russe plus jeune qu'elle qui constitue le corps du récit. le caractère épisodique et exclusivement sexuel de leur rencontre est toujours à l'initiative de S. selon sa disponibilité et son envie, il entraîne incertitude et angoisse permanentes consignées dans un journal, substance des atermoiements de l'auteure. L'acceptation de son sort, sans remise en cause du déséquilibre patent de leur relation, narrée au jour le jour finit par être pesante pour le lecteur. Malgré une grande qualité d'écriture, la lassitude s'installe, et ni les rêves évoqués sur le passé, ni les digressions sur le contenu (pourtant parfois intéressant) des voyages qu'elle effectue ne parviennent à colorer le noir de l'histoire.
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Il m'avait été vivement conseillé de lire cet auteur, malheureusement je n'ai pas du tout aimé et ai eu très rapidement le sentiment de "perdre mon temps" à la lecture de "se perdre"... Je ne suis donc allée plus avant dans ma lecture !!!
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tellement vrai ! pas d'ennui à la lecture de cette passion dévorante et obnubilante obsessionelle ; on se prend à souhaiter qu'elle rencontre une personne qui la comble davantage ; bonne surprise avec l'ennui de "l'autre fille".
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Fébrilement, dans l'interstice du désir avec Ernaux !

Se perdre c'est le journal intime qu'Ernaux tenait quand elle fréquentait le russe ! C'est aussi la version intense & sexuelle de Passion Simple. Et moi, en le feuilletant, j'ai attrapé une mélancolie comme on attrape un rhume, en marchant sous ses mots, sans me soucier du froid.
Je vis, j'attends & je souffre avec Annie ! Annie totalement soumise à lui. Je lis a chaud ses émotions a son sujet. S, dont elle ignore tout. Sauf qu'il est russe, marié & qui se révèle amant irrégulier !

Annie écrit, Annie décrit l'attente, le chant solitaire de la passion qui la dévore, l'espoir qu'elle léche impatiemment & le désir qui la consume ! le manque, le vide & le trop plein emmêlés. le jaillissement soudain hors de soi de ce qui ne tient plus & ce qui crie pour respirer.
Annie écrit, Annie décrit les lèvres trempées d'émoi, les mains serrées, les corps nus, son âme pénétrée, le déséquilibre, l'allégeance, la douleur & la soumission. Elle confie les questionnements, l'envie absolue, le désespoir, l'orgasme, les larmes, l'amour fou, brut, violent, la vie renversée, les rendez-vous manqués, l'obsession, la fusion, l'incompréhension, l'épuisement, le tremblement, les noeuds & les aller-retour !

Vivre, serait-ce frémir d'une espérance encore confuse ? Serait-ce être dans l'ambivalence affective entre le désir, la crainte & l'appréhension ?

Annie écrit, Annie décrit cette chose qu'on ne peut se résigner ni à accepter, ni à lutter contre !
J'ai aimé ces confidences autant que je les ai détesté, ce goût âcre qui me monte a la gorge & cette lourdeur dans les membres qui renvoie au temps achronique de l'attente passionnelle qui rend chaque instant fade ! Non je n'ai pas détesté, j'en été malade !

Écriture parsemée de références à ses écrivains préférés, parfaite pour pallier à toutes les peines de coeur !
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