Le postmoderne et moi, c'est deux. Mais je me prête à l'exercice à l'occasion, comme pour cette oeuvre,
Moscou-sur-vodka. Il s'agit d'un roman paru tout d'abord sous forme de samizdat, une sorte de feuilleton interdit. Quand on sait qu'il est impossible d'éviter la censure soviétique, il faut recourir à la publication clandestine. C'est une raison suffisante pour vouloir la lire… Et heureusement que
Venedikt Erofeïev l'a fait ! Son roman satirique, sous couvert d'humour, tourne en dérision (et autodérision) les revers de la société russe. Sacrilège !
Son anti-héros, Vénitchka (double de l'auteur), déambule à moitié ivre dans les rues de la capitale russe. C'est le début du long parcours de cet intellectuel alcoolique, de la gare de Moscou à celle de Pétouchki, en passant par Karatchavoro, Tchoukhlinka, etc. Pendant ce long trajet, il ne cesse pas un instant de boire et il ne se limite pas à la vodka ! Tous les spiritueux y passent, gnôle, vermouth, etc. Il ne manque que le cocktail Molotov…
Mais Vénitchka n'est pas le seul à boire. Il vit dans un monde d'alcooliques, tous ne survivent dans ce pays difficile que grâce à la bouteille. C'est triste. Ensemble, ils se laissent aller aux confidences, à parler politique, art et littérature (Blok, Gorki, Dvorak, Marx, etc), à philosopher. En fait, ils divaguent. Surtout, tous y vont de leurs trucs pour continuer à boire. C'est pathétique. Est-ce vraiment l'image qu'Erofeïev se faisait de ses concitoyens ?
Dans tous les cas, Vénitchka est tellement bourré qu'il s'endort dans le train qui, après être arrivé à destination, fait demi-tour. le pauvre homme se retrouve là où son périple a commencé : Moscou. La finale m'a beaucoup surpris mais je la trouve appropriée. En effet, il ne pouvait que se retrouver victime d'autres alcooliques.
Mais pourquoi tout ce beau monde est ivrogne ? Il y a tant de raisons ! Certaines sont sérieuses et d'autres, moins. C'est là que le côté satirique d'Erofeïev ressort. C'est déjanté, irrévérencieux, je peux comprendre pourquoi le régime soviétique de l'époque n'aurait pas apprécié. Mais est-ce suffisant ? Original, oui. Fascinant, je n'en suis pas convaincu. Je peux comprendre que de telles oeuvres soient importantes mais, d'un point de vue strictement littéraire, je ne peux pas dire que ce soit ma tasse de thé… Pardon, ma bouteille de vodka.