AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782226242945
720 pages
Albin Michel (22/08/2012)
3.97/5   178 notes
Résumé :
"Champion du double jeu, j'en suis à ne plus savoir qui j'étais, ni quelle vie était véritablement la mienne" : un aveu qui résume le sujet d'un livre ayant pour toile de fond le Paris de la Collaboration. Anglais et Français, résistant et collaborateur, traître et héros, vivant et mort, Guillaume Berkeley, animé par des "fidélités successives", a revendiqué, à un moment ou à un autre de sa vie, chacune de ces identités.
Aucun personnage n'est réellement ce... >Voir plus
Que lire après Les fidélités successivesVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (51) Voir plus Ajouter une critique
3,97

sur 178 notes
Dans Les fidélités successives, roman feuilleton et fresque exceptionnelle, Nicolas d'Estienne d'Orves nous montre comment la mécanique des sentiments peut tout broyer sur son passage.

Il nous raconte une histoire de frustration et de jalousie familiale dans le meilleur de sa veine d'auteur qui possède à la fois l'élégance du style, une plume alerte osant les répliques qui font mouche, un humour au second degré confinant parfois à l'absurde et un vrai sens du conteur historique.

Le travail de recherche est dantesque, digne du journaliste, mais surtout digne de l'héritage du petit-neveu d'un officier de la marine française, Honoré d'Estienne d'Orves, héros de la Seconde Guerre Mondiale, mort pour la France en tant que martyr de la Résistance.

L'auteur opte pour une intrigue où Paris occupée par les allemands, Paris des collabos et des marchés noirs, devient une sorte de huis clos, refusant toute échappatoire à ses personnages, pris dans un engrenage fatal.
Le récit est jalonné d'humanité, d'amour, d'horreur et cette complexité compose une histoire déchirante.

NEO exploite le hasard des rencontres et la conjonction de destinées qui poussent les êtres à prendre des décisions incohérentes et paradoxales, devenant des jouets du sort, des funambules flottant entre deux mondes et s'accommodant d'une conscience modulable au gré des circonstances.

La fin est un régal d'intelligence et de sens de l'intrigue. En surplus le message en filigrane, calqué sur l'absence de jugement de la part de l'auteur, qui aimerait que le lecteur se questionne sur ce qu'il aurait fait s'il s'était retrouvé dans la peau des personnages.


Commenter  J’apprécie          674
Si je vous dis NEO, les plus cinéphiles d'entre vous m'évoqueront Matrix. D'autres, aussi férus de religion que d'à peu près, me parleront d'un gars qui construisit une barcasse avant le déluge. Certains, enfin, taperont dans le mille avec Nicolas d'Estienne d'Orves, romancier que j'avais déjà découvert avec Les Orphelins du Mal, petite comédie romantique traitant des Lebensborn et plus généralement des expérimentations nazies. J'en gardais un souvenir plaisant mais pas impérissable contrairement aux Fidélités Successives qui tape fort et juste.

Malderney, petite île Britannique, 1936.
Victor et Guillaume Berkeley,comme tous les étés, se languissent de voir débarquer leur ami Simon Bloch. Il faut dire que les occasions de se distraire sont plutôt rares et qu'il devient vite fatigant de se balader pour se demander au bout de 10 mn si l'on est pas déjà passé par là. Deux personnalités qui se complètent parfaitement. Victor, fort et intrépide. Guillaume, plus en retrait adorant dessiner. L'objet de la discorde, Pauline, la fille espiègle du beau-père fraîchement rapatriée d'Amérique et qui se fera un malin plaisir de titiller les susceptibilités. Début des emmerdes pour la fratrie. Amorce d'un exceptionnel destin pour Guillaume l'exilé.

Son parcours est inclassable. Façonné par l'hérédité, ballotté par L Histoire, il aura eu mille vies. Certaines magnifiques, d'autres beaucoup plus discutables en ces temps d'Occupation. Tout est question de déraison, de circonstances. Guillaume ne se projette jamais. Il vit juste l'instant présent, se laisse porter par ses aspirations. Son problème récurrent, un esprit de synthèse aux abonnés absents, une propension à se laisser déborder par ce qu'il ne maîtrise pas. Pour autant, il n'est pas un salaud. Juste un gamin influençable qui aura eu le tort de faire de mauvais choix aux mauvais moments.

Fresque historique, héros pathétique, NEO amalgame le tout avec brio. L'écriture est captivante. le contexte fascine tout comme ces illustres personnages - Cocteau, Marais, Céline...- intégrés à ce roman fiction. Les anonymes ne sont pas en reste. Truculents en ces temps de morosité, ils apportent la petite touche fraîcheur indispensable à un équilibre émotionnel parfait.
Les Fidélités Successives ou la chronique d'une mort annoncée. Passer à côté serait à l'aune du sentiment récurrent qui habita Guillaume Berkeley pour son plus grand malheur, irresponsable...


Commenter  J’apprécie          5911
« Pour Laurence, qui a finalement acheté Les fidélités successives et qui fait la joie de son auteur…»

Oui oui, je me la pète avec cette dédicace.
C'est qu'au détour d'un mini salon littéraire du neuf-deux, NEO avait su gentiment me persuader de lire son dernier roman.
Il a bien fait.

Deuxième guerre mondiale. Déraciné de sa petite île anglo-normande pour rejoindre Paris occupé, le jeune Guillaume Berckeley se cherche. Ses expériences le mèneront d'un extrême à l'autre presque malgré lui, de l'opportunisme collaborationniste au supposé grand frisson du mouvement résistant. Les méandres complexes qui orienteront inéluctablement ce destin pour le moins ambigu se déploient au fil des rencontres et des péripéties qui jalonnent ce récit luxuriant.

Et il y en a pour tous les goûts : Les fidélités successives est une fiction romanesque doublée d'une chronique historique abordant cette période trouble de l'occupation de façon plutôt originale. Mais c'est aussi, et à mon avis le plus remarquable, un portrait intime illustrant sans manichéisme combien choix de vie et compromissions peuvent s'avérer paradoxaux et bien moins évidents qu'on aimerait le croire (« Tout ce que j'ai fait, je l'ai fait de bonne foi, sans haine, sans animosité, avec une candeur sans doute excessive, une naïveté de jeune insulaire, une fraîcheur que j'ai peu à peu perdue au contact d'un monde vicié »). L'expression très juste de cette ambivalence douloureuse se trouve habilement portée par une écriture élégante et précise, le si joli titre du roman en est à lui seul une savoureuse illustration.

NEO… merci de m'avoir convaincue, j'ai passé un agréable moment à vous lire.


Lien : https://minimalyks.tumblr.com/
Commenter  J’apprécie          616
C'est l'histoire d'une fraternité brisée, la séparation irrévocable de deux jeunes frères, amoureux de la même femme.

C'est l'histoire de celui s'éloigne, car il en faut bien un...

Guillaume laisse donc le champ libre à son frère Victor, jeune potentat britannique de son ile anglo-normande. Il part à la conquête d'un monde jusqu'alors inconnu, toujours magnifié depuis son rocher insulaire.
S'ouvre un parcours d'apprentissage dans la France des années de la drôle de guerre, le monde des Lettres, des idées, des artistes ( Aragon,Triolet, Céline, Gide, Picasso, Cocteau, Marais...), des courants de pensées antisémites, racistes, fascistes, communistes, colonialistes...
Entrainé par un pygmalion, grisé dans un tourbillon de nouveautés et de rencontres de hasard, doué pour le dessin et l'écriture, il se laisse porter dans la légèreté de ses vingt ans, encombré de ce tempérament d'observateur dilettante.
Cela devient un engrenage, une fuite en avant irréfléchie et irrésistible dans la collaboration, avec la toile de fond de Paris occupé, affamé et sous couvre-feu.

Les compromissions insidieuses avec les allemands dans les milieux artistiques, les opportunismes des mondains, de la presse, des artistes, la mentalité anti juive de bon ton, la mouvance fasciste, la gaité perverse et artificielle des fêtes faussement fraternelles, les trafics, Guillaume vivra tout, observera tout, tel un insecte piégé dans une toile.
Il lui faudra néanmoins faire des choix, des fidélités successivement choisies ou imposées.

Un livre dramatiquement passionnant, à la plume alerte, quasi historique en recréant une période ambigüe de la société française sous tutelle nazi, analysant avec précision les mécanismes des engagements individuels et les coups fourrés que la vie réserve aux hommes de bonne volonté.

Impossible de juger le passé avec la connaissance du présent. Qu'aurions nous fait?
"Une destinée marquée du sceau de l'infamie".
Commenter  J’apprécie          370
Nicolas d'Estienne d'Orves m'étonne par les fins de ses livres qui me semblent aussi improbables qu'invraisemblables.

Les « orphelins du mal » m'avaient déconcertés par une conclusion totalement déjantée, « les fidélités successives » s'achèvent sur une page incroyable.

Le trio amoureux Guillaume, Pauline, Victor, ne m'a pas séduit et Pauline m'a semblé psychologiquement incohérente mais il est vrai que nous avons affaire à deux citoyens britanniques et à une américaine … personnages par essence incompréhensibles et ajoutons à leur décharge que survivre à Paris entre 1940 et 1944 devait être singulièrement compliqué.

Mais si la dimension romanesque de ce livre ne m'a pas convaincu, la dimension historique est remarquable et fait de ces pages un chef d'oeuvre !

Nicolas d'Estienne d'Orves est le neveu du héros de la Résistance, et donc apparenté à Antoine de Saint Exupéry et Louise de Vilmorin. C'est aussi l'exécuteur testamentaire de Lucien Rebatet, l'écrivain collaborationniste et il connait les moindres détails de ces années d'occupation notamment dans le monde de l'édition dont il rappelle les errements de Grasset, Denoël, Baudinère, etc.

Drieu la Rochelle et Rebatet, mais aussi Brasillach et les Luchaire, père et fille, Göring et Céline, Jean Cocteau, Sacha Guitry, Jean Marais, sont les acteurs tragiques de ce drame dont les victimes furent Simon Bloch et tant de juifs.

Le monde culturel s'est en partie prostitué durant l'occupation et ce roman nous le rappelle à juste titre.

Mais ne généralisons pas … Romain Gary, Antoine de Saint Exupéry, Jean Bruller (Vercors) et Irène Nemirovsky, pour ne citer qu'eux, ont écrit des pages sublimes qui les ont parfois menés au sacrifice suprême !

« la gloire des maudits » est dans ma pile de lecture … j'aurais donc l'occasion de revenir sur l'oeuvre de Nicolas d'Estienne d'Orves.
Commenter  J’apprécie          282


critiques presse (2)
Actualitte
10 août 2012
Nous restons longtemps saisis par les abîmes de l'ambivalence, d'humanité chancelante creusée derrière le récit de cette destinée. […] On pourrait, désormais, être infiniment fidèle à ce grand écrivain.
Lire la critique sur le site : Actualitte
LePoint
18 juillet 2012
Passionnant, perçant, éclairant, l'oeil romanesque porté sur une époque archi-connue, lue, rebattue semble neuf ; grâce à un travail d'orfèvre sur l'intimité, le cerveau, le ventre de cette perle de héros (ou d'anti-héros).
Lire la critique sur le site : LePoint
Citations et extraits (33) Voir plus Ajouter une citation
J’étais trop ambigu pour mon époque, trop inclassable. La France aime les cadres et les cases. Sortez du carcan bon-méchant, blanc-noir, affront-vengeance, et l’on vous regarde avec méfiance, comme si vous étiez plus dangereux qu’un assassin. C’est là une maladie très française, ce besoin cartésien de mettre des étiquettes, d’inventorier, de trouver une logique. Il n’y a pourtant aucune logique dans ma vie. Juste un destin. Le destin d’un homme à cheval entre deux cultures, deux mondes, deux pays, deux rives, deux aspirations, deux familles d’esprit, deux rêves de gloire, deux amours.
Commenter  J’apprécie          180
Deux jours après mon arrivée, l'Angleterre déclarait la guerre à l'Allemagne, entraînant derrière elle tout le Commonwealth : Inde, Canada, Australie, Afrique du Sud et Nouvelle-Zélande.
L'après-midi même, tandis que le clocher de Notre-Dame sonnait cinq heures (j'étais alors monté contempler la vue depuis la cathédrale, encore plus impressionnante que celle de ma chambre), la France est à son tour entrée dans le jeu. "La France en guerre contre l'Allemagne !" ont hurlé les crieurs, dès le lendemain matin, par un 4 septembre qui sentait encore l'été malgré les marronniers grillés et les platanes brunis.
Dans les rues, c'était la panique. Les gens se parlaient, les inconnus s'apostrophaient, inquiets, terrifiés, ou juste surpris :
Vous avez entendu ? C'est donc la guerre ?
Il paraît qu'elle va être encore plus longue que la précédente...
Ça ne va pas recommencer, s'est lamenté un quadragénaire à béquille, à l'angle de l'avenue
Georges V et des Champs-Elysées, devant le restaurant Fouquet's où j'avais tenté d'apercevoir quelques vedettes de cinéma.
Il a exibé sa jambe gauche.
La droite est restée à Verdun, en 17; et je n'ai pas l'intention de perdre celle-ci...
Soyez sans crainte, l'a rassuré un militaire qui descendait la célèbre avenue au bras d'une
élégante, notre armée est la plus forte du monde, nous ne ferons qu'une bouchée de ces Fritz. Et si certains parviennent à percer la ligne Maginot, ils seront coincés. Ils ne pourront pas aller plus loin...
Le militaire avait l'air si sûr de lui que le petit attroupement qui s'était formé sur le trottoir a semblé rassuré. Seul l'infirme, agrippé à sa béquille, faisait grise mine.
Dieu vous entende, mon colonel..., a-t-il maugréé en levant vers le ciel un oeil perplexe, car le temps tournait à l'orage.
Le colonel a haussé les épaules avec désinvolture, offrant un sourire charmeur à sa cavalière avant de répondre, comme une boutade :
Dieu est français, soldat !

Tout le monde ne partageait pas hélas l'optimisme de cet officier.
Je te l'avais annoncé, Guillaume, c'est une vraie catastrophe ! m'a dit Simon le soir de la funeste nouvelle, tandis que je revenais d'une immense promenade qui m'avait conduit de l'Institut au bois de Boulogne, de Longchamp à Montmartre, du Sacré-Coeur au Père-Lachaise et de la Nation à la Cité... Une promnade qui s'est achevée sous la pluie, car l'orage avait fini par éclater, déchirant le ciel parisien d'éclairs presque aussi éffrayants que ceux de la Manche.
Trempé, vidé, je me suis effondré dans le canapé du salon, ôtant mes chaussures pour laisser respirer des pieds aussi douloureux que des brûlures à vif.
Simon était assis à son petit bureau d'acajou, de l'autre côté de la pièce, près de la fenêtre giflée par les gouttes. Plussieurs journaux ouverts devant lui, il observait les passants qui fuyaient la pluie, sur le quai.
- Il va falloir être discret, ami. Si tu n'étais pas étranger, tu serais bon pour la mobilisation
générale. Mais n'attirons pas trop l'attention ssur toi, car tu pourrais être renvoyé en Angleterre pour être aussitôt sous les drapeaux...
Soldat ? Moi ? me suis-je récrié.
Simon a tourné vers moi un visage soucieux, celui qu'il prenait pour m'expliquer des vérités, pour "élever mon âme", comme il disait avec ironie.
- En France, comme en Angleterre, beaucoup d'hommes entre seize et cinquante ans vont être appelés sous les drapeaux
Commenter  J’apprécie          10
En prison, le pire ennemi, c'est la bêtise.
La bêtise du lieu, la bêtise des autres, votre propre bêtise : celle qui vous guette, se niche derrière chacun de vos gestes, menaçant de vous transformer en automate, en animal.
Commenter  J’apprécie          260
A Malderney, les années passaient avec la douceur d’un rite ancestral. Les colères de Virginia, les silences de Philip, l’éternelle absence de Pauline et les rêves contrariés des deux frères, rien ne changeait.
L’automne venu, tandis que la lande prenait sa teinte rousse et que les chemins de bruyère tournaient à la boue, Victor et Guillaume Berkeley redevenaient les jeunes hobereaux de leur étrange enclave féodale.
Commenter  J’apprécie          130
En écrivant cela, je me fais l’effet de ces condamnés de l’épuration, qui justifiaient leurs bassesses en rétorquant : « Mais j’’ai aussi sauvé des gens » J’apprendrais un jour qu’il n’y a pas d’arithmétique humaine. Une vie est une vie ; une mort, une mort.
Commenter  J’apprécie          200

Videos de Nicolas d' Estienne d'Orves (32) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Nicolas d' Estienne d'Orves
Les passionnés de cinéma ont en mémoire le visage et la gouaille d'Arletty avec sa célèbre réplique : « Atmosphère, atmosphère, est-ce que j'ai une gueule d'atmosphère ??? »… Se mettant dans la peau de Garance, l'héroïne des « Enfants du Paradis », Nicolas d'Estienne d'Orves nous raconte Arletty, dans l'ombre et dans la lumière.Coup de coeur Web TV Culture !
Retrouvez l'émission intégrale sur https://www.web-tv-culture.com/
autres livres classés : iles anglo-normandesVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (356) Voir plus



Quiz Voir plus

Quelle guerre ?

Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell

la guerre hispano américaine
la guerre d'indépendance américaine
la guerre de sécession
la guerre des pâtissiers

12 questions
3125 lecteurs ont répondu
Thèmes : guerre , histoire militaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..