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Critique de Marti94


Tout d'abord je remercie les éditions iXe et Babelio pour cet ouvrage qui m'a été offert dans le cadre d'une opération masse critique.
Je me suis intéressée à ce livre après avoir été interpellée sur le terme « autrice » revendiqué par Chloé Delorme notamment quand elle évoque son dernier livre "Mes bien chères soeurs" (que j'ai adoré). Jusque-là j'utilisais plutôt le terme « auteure », veillant depuis longtemps à féminiser les noms de métiers. Mais après la lecture de ce livre je vais changer mes habitudes.

"En compagnie" est un titre très bien choisi pour ce petit livre par sa taille mais grand par son contenu. D'abord il m'évoque le théâtre mais aussi le collectif et la sororité.
C'est un recueil composé de deux textes de nature différente. le premier présente un travail universitaire réalisé par Aurore Évain "Histoire d'autrice de l'époque latine à nos jours" suivi d'un épilogue et d'une bibliographie. le deuxième texte est une pièce de théâtre de Sarah Pèpe intitulée "presqu'illes". C'est une comédie qui a été inspirée par le travail d'Aurore Évain.
C'est effectivement un travail de recherche très sérieux qui met à bas certains préjugés concernant l'incongruité du féminin "autrice" et son incapacité à désigner la femme qui écrit.
Alors que le terme était utilisé au Moyen-Âge, il est renié dès le 17ème siècle parce que le prestige littéraire et social doit rester masculin aux yeux de certaines élites. Il est contraire en cela au terme « actrice » qui est resté dans l'usage.
Les académiciens vont entériner la valeur générique du masculin pour nommer la femme qui écrit, considéré comme le seul genre capable d'inclure et de représenter l'universel. Alors que de plus en plus de femmes aspirent à faire carrière dans les lettres, la politisation de la langue va faire disparaître le terme « autrice ».
C'est à partir des années 60 que le mouvement féministe conduit les écrivaines à reposer le lien entre féminisation et légitimation dans une vaste réflexion sur le rapport sexué au langage. Elles n'ont plus à lutter avec l'interdit d'écrire mais avec une langue qui leur résiste.
On sait grâce à Aurore Évain que le nom « autrice » n'est pas un néologisme et qu'il puise sa légitimité terminologique dans l'histoire. C'est très important quand les débats d'actualité portent sur la féminisation des noms de métiers, ou plutôt sur leur démasculinisation.
Et puis il y a le théâtre lié à l'histoire de ce mot car les femmes de théâtre ont grandement contribué à le faire renaître dans l'usage. La pièce de Sarah Pèpe va dans ce sens avec l'histoire d'une petite fille qui cherche à comprendre pourquoi elle a fait une faute d'orthographe en n'appliquant pas la règle du masculin qui l'emporte. La question est bien posée et j'aimerais beaucoup voir cette pièce jouée.
Il faut ajouter que la maison d'édition iXe a le courage d'inviter les autrices et les auteurs qu'elle publie à appliquer la règle dite de proximité, de voisinage ou de contiguïté, qui accorde en genre, et en nombre, l'adjectif, le participe passé et le verbe avec le nom qui les précède ou les suit immédiatement. Ce qui va en surprendre plus d'un c'est que cette règle était appliquée jusqu'au 16ème siècle.

Bravo aux autrices de ce livre que je suis contente de mettre dans ma bibliothèque.


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