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Serge Quadruppani (Traducteur)
EAN : 9782864246459
416 pages
Editions Métailié (22/01/2009)
3.81/5   8 notes
Résumé :
A la fin du xixe siècle, les frontières entre le nord du Mexique et le Texas varient au gré de la politique, des alliances des chefs de guerre et des défaites des armées sudistes.

La Coulée de feu raconte, depuis la frontière avec les États-Unis, l’émergence, sur trois décennies, de la nation mexicaine.

S’y entrecroisent les destins de dizaines de personnages de toutes conditions, emportés dans le tourbillon des guerres et des révolut... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Le Mexique, 1860-1890 : l'exceptionnel roman historique de Valerio Evangelisti.

Publié en 2005, traduit en français en 2009 chez Métailié par Serge Quadruppani, « Il collare di Fuoco » inaugurait le mini-cycle dit « du Mexique », écrit par Valerio Evangelisti après les deux Pantera (« Black Flag » en 2002 et « Anthracite » en 2003).

Délaissant à cette occasion le fantastique si intelligemment halluciné qui percole tout au long des huit tomes disponibles en français du cycle Eymerich, et qui nimbe d'un halo si particulier l'extraordinaire personnage qu'est Pantera, Valerio Evangelisti nous donne ici un impressionnant roman historique, qui se hisse d'emblée parmi les tout meilleurs du genre.

Pour raconter la terrible histoire du Mexique entre 1860 et 1890, l'auteur italien a su choisir une bonne dizaine de points de vue, enracinés d'abord à la frontière texane, près de l'embouchure du rio Grande, avant de se répandre progressivement, au fil des années, dans tout le pays : capitaine raciste et corrompu de rangers américains, riche propriétaire terrien en quête de statut, veuve joyeuse vouée aux plaisirs coupables, pistolero ne se vendant pas au plus offrant, général loyaliste guettant l'opportunité de se faire seigneur de la guerre, officier français s'improvisant spécialiste de contre-guérilla, jeune fille innocente devenant activiste sociale, et bien d'autres encore.

Il fallait sans doute cette mosaïque pour saisir ces instants-clés de l'histoire du pays, lorsqu'en 1861, les conservateurs contestant le pouvoir aux libéraux élus décident de s'en remettre aux puissances européennes, que la puissante Église mexicaine appuie de toutes ses forces, usant des leviers de l'appétit mercantile anglais, de la nostalgie de sa grandeur passée espagnole et du rêve impérial de Napoléon III, pour proposer et imposer Maximilien à la tête du pays, porté par les troupes françaises, en profitant à fond du fait que les États-Unis, seul véritable soutien du gouvernement légitime de Benito Juarez, ont les mains liées par la guerre de Sécession qui explose alors.

Il fallait certainement cette mosaïque pour montrer et faire sentir au lecteur que derrière cette histoire pour la galerie, faite de politique étrangère et de grands principes, qu'ils soient aristocratiques ou démocratiques, il s'agit toujours et avant tout d'histoire politique et sociale, et qu'à l'issue de ces trente ans chaotiques, lorsque s'affirme la dictature de Porfirio Diaz, il n'y a au fond qu'un seul vainqueur sur place, le capitalisme, toutes nationalités unies pour célébrer le profit extrait des bas coûts locaux et des avantages consentis par les gouvernants en échange de soutien au moment opportun face à leurs rivaux, et qu'un seul véritable vaincu, le peuple, presque toutes classes confondues, qui glisse sans discontinuer d'un esclavage officiel à un asservissement officieux à peine moins dur…

Cette vision quasiment marxiste de l'histoire mexicaine (en attendant et espérant la traduction en français du deuxième tome du cycle, qui nous amène jusqu'à la révolution, à Pancho Villa et à Emiliano Zapata), aussi passionnante qu'elle soit, ne serait toutefois pas complètement à la hauteur du talent de Valerio Evangelisti s'il ne s'y ajoutait cette capacité rare à se glisser dans les recoins tordus des personnages, de leurs passions, de leurs idéalismes comme de leurs abjections, de leurs appétits féroces comme de leurs générosités bienveillantes, pour mêler étroitement, comme toujours chez l'auteur, la lutte pour sauvegarder son humanité à celle pour faire triompher ses idées et son pouvoir.

Un très grand roman historique, auréolé du ton brutal, sarcastique et terriblement intelligent qui est devenu au fil des années la marque de fabrique de Valerio Evangelisti.
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Ce roman présente les différents guerres civiles et révoltes populaires qui ont agité le Mexique entre 1859 et 1890 et dans lesquelles sont intervenus le voisin étasunien mais aussi des pays européens comme la France de Napoléon 3. Après avoir chassé les conservateurs, les libéraux prennent le pouvoir sous la direction de Benito Juárez ou Porfirio Diaz. Leur objectif est de moderniser le pays pour le faire sortir de son arriération sociale et économique. le modèle à atteindre est celui des Etats-Unis. Pour cela les richesses naturelles sont cédées à des compagnies étrangères, les communautés villageoises privées de leurs terrains communaux qui sont privatisés et les Indiens, considérés comme inassimilables, sont massacrés ou réduits en esclavage. Les Etats-Unis participent à toutes ces exactions. A la fin de la guerre de Sécession des suprématistes blancs venus du Texas essaient de fonder au Mexique une colonie esclavagiste dans laquelle ils pourraient vivre comme si le Sud avait gagné. le peuple, toujours victime, se révolte à l'occasion, certains meneurs charismatiques deviennent des chefs de bandes de voleurs à la Robin des bois.

Le moins qu'on puisse dire c'est que la période est troublée. Je ne connaissais pas du tout l'histoire du Mexique et j'ai parfois du mal à en suivre les soubresauts d'autant plus quand, d'un chapitre à l'autre, l'auteur saute plusieurs années. Il me faut alors un petit moment pour comprendre, à des allusions, ce qui s'est passé entre temps. Heureusement il y a une chronologie détaillée en début de roman qui permet de s'y retrouver. Valerio Evangelisti raconte les événements par le biais de nombreux personnages dont certains traversent tout le roman. Il y a notamment Marion Gillespie et ses deux enfants, Rupert et Christine. Veuve d'un sous-officier tué par les Comanches, Marion est une Texane de Fort Brown, convaincue de sa supériorité de Blanche américaine sur les Mexicains, tous métis d'Indiens ou même "demi-nègres". Elle est cependant très avide d'ascension sociale et de reconnaissance et pour cela prête à mettre de côté ses sentiments racistes. En effet, elle ne voit qu'une façon de parvenir : coucher avec celui qui a le plus de pouvoir. Et au Mexique il arrive qu'il soit Mexicain.

On croise aussi William Henry, soldat sudiste qui devient tueur à la solde de Porfirio Diaz ou Margarita Magón, jeune fille du peuple, victime de viols de la part d'Américains, devenue révolutionnaire.

J'ai été intéressée par ce que j'ai appris de l'histoire du Mexique et du rôle que les Etats-Unis y ont joué avec leurs tentatives de colonisation ou de conquête économique. Je suis choquée par le racisme sûr de son bon droit qui sous-tend ces intrusions. Je déplore cependant que les personnages féminins soient réduits à deux grands types : la putain ou la sainte (révolutionnaire). le personnage de Marion, notamment, me paraît régulièrement outré ou caricatural. Je veux bien croire que le Mexique soit un pays très machiste mais il me semble que l'auteur traite bien mal cette femme perdue.
Lien : http://monbiblioblog.revolub..
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Une hallucinante épopée.

Plongée au coeur de deux nations en construction, le Mexique, les Etats-Unis.
Des situations dramatiques, des personnages hauts en couleur.
Avec en toile de fond, un génocide sans frontières envers les Indiens.

Une ambiance de films de S.Leone, forcément plutôt "Il était une fois la révolution" ici.
Pour les lectures, "Equateur" de A.Varenne s'en rapproche un peu.
(plus d'avis sur PP)
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Normalement, Marion était moins brusque à l’égard d’Eliah et il n’était pas rare qu’elle se montrât affectueuse. Mais là, ce n’était pas le moment. Une crainte la tenaillait : celle que les Mexicains en révolte s’unissent aux nègres et, qui sait, aux Comanches aussi. Les Mexicains n’avaient-ils pas beaucoup de sang indien ? Avec les nègres, en outre, ils avaient en commun la couleur sombre de leurs peaux. Il n’existait sans doute pas un seul Texan anglo qui n’eût été troublé, plusieurs fois dans sa vie, par la perspective d’une apocalypse de ce genre.
Ces pensées incitèrent donc Marion à se montrer désagréable avec Sarah, pendant que la jeune fille, cadette de la famille d’ELiah, l’aidait à passer une jupe sans dentelles et un chemisier commun de soie blanche au col très haut. À un certain moment, elle lui demanda sans détour :
- Dis-moi la vérité, Sarah. Toi, ils te plaisent, les Mexicains ?
L’esclave écarquilla les yeux.
- Oh, je ne sais pas, maîtresse ! Il y en a des bons et des mauvais. Mais si vous parlez des hommes qui ont tué tant de gens cette nuit…
- Ne fais pas la maligne avec moi, Sarah, l’interrompit Marion, sévère. Je parle des Mexicains en général. Ils ne font pas un peu partie de ton peuple ?
- Non, non, maîtresse ! Il n’y a aucun rapport avec mon peuple ! Les plus pauvres travaillent comme nous, mais ils sont libres et ils mènent une vie différente ! Ils parlent aussi une langue que je ne comprends pas !
Le ton de Sarah paraissait sincère, cependant l’inquiétude de Marion ne s’évapora pas. Tandis qu’elle retournait dans la rue, elle pensa que la phrase la plus importante prononcée par la jeune fille était celle qui faisait allusion à la « liberté » des Mexicains. En vérité, l’existence des peones sous le fouet des hacendados ressemblait beaucoup à celle des nègres. Mais la révolution qui avait conduit à l’indépendance du Texas et à la domination des Anglos avait eu, entre autres causes, justement l’abolition de l’esclavage au Mexique. Difficile de penser que les nègres texans, éternellement obsédés comme tous les autres par la pensée de la liberté, n’eussent pas subi l’influence de ce très mauvais exemple.
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Vidéo de Valerio Evangelisti
Il y a bientôt un an, Valerio Evangelisti nous a quitté, à l'âge de 69 ans. Valerio Evangelisti, c'est d'abord une oeuvre. Considerable, essentielle, aussi intelligente qu'engagee. Sensible et radicale. Une oeuvre qui restera, aucun doute. Écrivain protéiforme, Evangelisti est connu de ce côté-ci des Alpes pour son cycle de Nicolas Eymerich, mais son oeuvre est loin de se limiter aux aventures de l'inquisiteur. Afin de poursuivre l'hommage que Bifrost lui a rendu dans son numéro 109, nous vous convions à une discussion avec Mathias Échenay, des éditions La Volte, et Hugues Robert, libraire et collaborateur au Monde des livres. Animation : Erwann Perchoc Illustration : Corinne Billon https://www.belial.fr/revue/bifrost-109 https://lavolte.net/auteurs/valerio-evangelisti/
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