Janvier 1919, chantier de la ligne de chemin de fer Dimbokro-Bouaké. Des ouvriers mettent au jour un coffret de métal. En voyant ce qui est à l'intérieur, un vieil indigène ordonne à un des jeunes ouvriers de fuir et d'aller cacher ce coffret au plus profond de la forêt.
Dans les années 600 avant notre ère, Enmouteff, frère du pharaon Nekao, dont le royaume s'est trouvé amoindri par une sévère défaite contre le roi Babylonien Nabuchodonosor, est chargé par le pharaon d'aller conquérir de nouveaux territoires. Les Égyptiens n'étant pas un peuple de navigateurs, ils font appels aux Phéniciens pour armer une flottille de trirèmes et faire route vers le sud, en gardant le continent africain à tribord, dans le but de revenir par la Méditerranée en passant les colonnes d'Hercule (Gibraltar).
1976 Arcachon, Alain reporter de guerre, se trouve dans la maison de ses parents dont il vient d'hériter. A l'intérieur se trouvent pas mal de souvenir du passé africain de ses parents, lances poignards et un énigmatique masque dont la face intérieure est garnie d'inscriptions. A son contact, Alain éprouve un étrange trouble, des maux de tête, et soudain, les souvenirs affluent…
« Une lame pour trancher. Un poignard pour découper. Un pic pour achever. »
Souvenirs d'une cérémonie d'initiation à laquelle il a assisté, étant enfant et qui le laissera marqué à jamais.
Dans ce même temps à Bordeaux, une série de meurtres dont les victimes sont des femmes, atrocement mutilées. Entre l'inspectrice chargée de l'enquête, une jeune métisse nommée Awa Blanc et Alain, entendu comme témoin, la sympathie qu'ils éprouvent l'un à l'égard de l'autre va se muer en un sentiment plus profond et plus fort.
« de ton corps il ne restera plus rien. Tu m'as dérobé mon bien le plus précieux. Je te volerai ton éternité. Tu n'accèderas jamais à l'immortalité.
Tu entends, tu ne seras jamais un bienheureux Osiris. »
C'est la malédiction proférée par Hannan Baal, le capitaine phénicien, lors qu'il abandonne Enmouteff sur un rivage solitaire, attaché à un arbre pour y être dévoré vivant. Enmouteff y survivra, sauvé par un jeune Africain Ubakwanda qui, après l'avoir pris comme esclave, lui rendra sa liberté, deviendra son ami et même son frère.
« Mon frère, je t'ai fait une promesse il y a bien longtemps. Je ne sais pas conserver les corps comme en Egypte mais je sais comment faire pour garder l'esprit en vie. »
Cette promesse, faite par Ubakwanda à Enmouteff, devenu Ka-Saabo pour le peuple Senoufo, marque l'origine d'une série d'évènements tragiques qui se produiront bien plus tard dans le futur.
L'enquête policière ne pésente à mon sens qu'une importance secondaire dans ce roman, servant uniquement de prétexte à nous montrer les pouvoirs maléfiques du masque, de nous conter l'histoire d'Alain et de sa rencontre avec Awa, de son frère Patrick, un égocentrique qui a toujours eu la faveur de leur mère, et de ses recherches en compagnie d'Awa pour percer le secret des inscriptions du masque.
Thriller psychologique étrange et envoûtant, que j'ai absorbé en moins de 24 heures, et en deux étapes, immergé que j'étais dans l'histoire. Destins croisés de deux hommes, à plus de vingt siècles de distance. Magnifique roman d'aventures, aux parfums iodés de la mer et aux effluves plus forts de la savane africaine, qui nous emmène dans un audacieux périple depuis la Mer Rouge, des confins du pays de Pount, jusqu'au Golfe de Guinée, pour achever sa course sur le mont Khorogo, où se rejoignent les âmes éternelles du passé et du présent.
Écrit dans un style très fluide, les divers sauts entre passé et présent donnent de l'allant à l'histoire, en nous entraînant toujours plus avant, d'un chapitre à l'autre, avides de connaître la fin de l'histoire.
On sent à chaque ligne l'amour de l'auteure pour l'Afrique, ainsi que sa profonde connaissance de ce continent. C'est superbement documenté, autant sur les traditions africaines que les techniques de navigation des phéniciens Un savant dosage entremêlant les civilisations africaine et égyptienne, leur culture, leurs croyances et leurs rites.
C'est avec une pointe de regret que j'ai refermé le livre hier soir, tant m'était agréable la compagnie d'Alain, Awa, Enmouteff et Ubakwanda. Et après vérification, les masques africains qui ornent les murs de ma maison sont tout à fait inoffensifs… Quoique… On ne sait jamais….
320 pages de total dépaysement, aussi bien dans le temps que dans l'espace.
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