La ligne de courtoisie

Cela m'intimidait toujours, les meneurs-nés. Ces antidotes naturels au doute qui, en dépit de la réserve qu'ils peuvent vous inspirer avec leur égoïsme et leur brutalité, finissent toujours par l'emporter sur votre délicatesse, s'attirer votre respect et vous rallier à leur bon vouloir, quand ils ne vous transforment pas carrément en servile thuriféraire.

"Le charme c'est cela [...] : des yeux qui parviennent à faire pétiller un visage tout entier."

De la même manière que partager sa vie avec quelqu'un peut parfois lui donner tout son sens, je me suis néanmoins pris à composer mentalement comme s'il me faudrait l'écrire un jour quelque part, la légitimité d'un écrivain tient à son public et à rien d'autre. Sans public, la littérature reprend aussi sec toute sa dimension de passe-temps prétentieux et improductif.

"C'est toujours un bon placement, le temps, en littérature."

"Les meilleures intentions du monde, y compris celles provenant de ceux qui vous sont les plus chers, ne s'accordent jamais aux vôtres [...]."

Des indications sonores qui, je dois l'avouer, avaient toujours suscité chez moi de l'angoisse bien davantage que de l'entrain, parce que me signifiant avant tout qu'on ne me ficherait pas la paix. Car il arrive que cela exige de l'effort, de devoir accueillir quelqu'un chez soi.

C'est le point de vulnérabilité des vrais sceptiques, qui, au fond ne doutent que d'eux-mêmes:l'aplomb des autres.

je ressentis en effet cette contrariété qui me paralysait régulièrement depuis l'enfance, lorsque je percevais les initiatives de mes camarades comme autant d'intrusions dissonantes dans ma tranquillité, tout en pressentant que rester seul chez moi à ne rien faire ne m'avancerait pas davantage.

Malgré mes ridicules désormais confirmées, ma canitie galopante, mon teint jaunissant, le lent émoussement de mes dents, le ternissement de mon regard , l'assèchement de mes joues et le rabougrissement général de ma silhouette, je n'avais pas l'impression d'avoir tant changé que cela depuis mes vingt ans.

"De la même manière que partager sa vie avec quelqu'un peut parfois lui donner tout son sens [...], la légitimité d'un écrivain tient à son public et à rien d'autre. Sans public, la littérature reprend aussi sec toute sa dimension de passe-temps prétentieux et improductif."