Ce petit livre m'a été recommandé par une sympathique libraire de l'une des grandes librairies du centre de Rabat, il y a deux semaines de cela. Indécis devant le choix des nouveautés marocaines francophones, je lui avais demandé de me proposer le(s) livre(s) « qu'il fallait avoir lu(s) ». Voilà qui est fait. Ce n'était pas une grosse affaire. C'est écrit gros avec un interligne laissant assez de place pour prendre des notes voire s'adonner soi-même au plaisir de l'écriture ou de l'enluminure. Ce livre ne brille ni par son style, ni par la syntaxe et encore moins par l'orthographe. Alors, quel intérêt ? En fait, plus que d'une oeuvre littéraire c'est d'un témoignage autobiographique qu'il s'agit, un récit qui parle au coeur de la jeunesse marocaine. «
J'ai trahi mon destin » est un hymne à l'auto-détermination, au libre choix de sa vie privée et professionnelle, et, c'est là que cela se complique sérieusement, dans le respect de la tradition. La tradition, y compris dans le milieu plutôt aisé décrit par l'auteur (qui passe en revue sa vie depuis ses 14 ans jusqu'à aujourd'hui, c'est-à-dire ses 25 ans), ca veut dire se taire en présence d'un adulte, tout faire pour répondre aux attentes des parents. Tout ou presque est fixé dès la naissance. L'auteur se libère de ce carcan et finit par se réconcilier avec ses parents. Pas de quoi tuer un chat ? A croire que si : l'auteur est une star adulée dans la vie réelle comme sur le net. La lecture de ce manuel moderne sur le sens de la vie, qui a pour but principal d'encourager les autres à prendre leur destin en mains, est assez éprouvante. Les répétitions de clichés autour du rêve tournent vite au cauchemar. Plus intéressant pour un vieil individualiste privilégié comme je le suis sont les choix faits par l'auteur pour se libérer (après avoir testé et rejeté drogues et alcool): le rap, le marketing sur les réseaux sociaux, et, le plus convaincant : la joie de fournir un tremplin pour l'épanouissement personnel et en particulier artistique d'autres jeunes qui veulent « vivre leur vie ». Avec le « printemps arabe » et la « crise des migrants » en tête, on comprend vite le succès de cette première oeuvre qui est assez loin d'être un chef d'oeuvre, mais qui a le mérite d'aborder le bon sujet au bon moment, ce vraisemblablement dans la bonne langue (qui n'est pas la mienne). Toutes me félicitations à l'éditeur, la Librairie Dar Assalam. Un deuxième livre est en préparation…