AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

René-Noël Raimbault (Traducteur)
EAN : 9782070721870
336 pages
Gallimard (04/01/1991)
4.28/5   27 notes
Résumé :
«Il avait seize ans. Pendant six ans, il avait écouté parler les hommes. Depuis six ans, il avait entendu la fine fleur de tout ce qu'ils disaient [...] de la brousse, des grands bois, plus vastes et plus anciens qu'aucun titre enregistré [...].
Ce qu'ils disaient des hommes, ni blancs, ni noirs, ni rouges, mais des hommes, des chasseurs [...] et des chiens, de l'ours et du cerf [...] le plus beau de tout ce qu'on entendait, les voix que l'évocation du passé,... >Voir plus
Que lire après Descends, MoïseVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Texte singulier, composé de 7 récits, dont certains ont été publiés dans des revues comme des nouvelles, avant d'être publiés en  volume en 1942.  

Il faut se rappeler qu'à l'époque Faulkner a énormément de mal à vivre de sa plume, et qu'une publication dans une revue apporte toujours un supplément financier appréciable.

Malgré cet apparent morcellement, il s'agit bien d'un roman, tout simplement l'auteur en a une conception toute personnelle, il nous conte son histoire par petit bouts, qui peuvent sembler indépendants dans un premier temps, ils se passent à des dizaines d'années d'intervalles, même si les dates précises sont rarement données, ils concernent des personnes différentes, qui peuvent même tout d'abord sembler ne pas avoir de liens entre elles. Mais petit à petit, les choses s'installent et comme dans un puzzle les pièces se mettent en place nous révélant toute la richesse et toute la beauté du motif.
 
Une fois encore, une tumultueuse histoire familiale du Sud se révèle à nous, celle de la descendance blanche et métissée de Lucius Quintus Carothers McCaslin, l'ancêtre fondateur. Parmi tous les personnages, se détache la figure d'Isaac McCaslin, l'homme qui a refusé son héritage.

Comme dans aucun de ses livres, Faulkner se pose la question des bases sur lesquelles est fondée la culture à laquelle il appartient, et en particulier de son rapport aux autres cultures qui ont partagé le même territoire: la culture indienne et la culture noire. Cela peut sembler bien pesant dans ma misérable critique, mais cela ne l'est à aucun moment dans le livre de Faulkner, une partie de chasse dans la forêt qui rappelle les coutumes indiennes lui suffit pour évoquer une vision empreinte de poésie d'un monde disparu ; un incident très concret et qui n'a rien de didactique résume la violence permanente faite aux Noirs.
 
Isaac, par son refus d'hériter n'a rien changé au monde dans lequel il vivait, il n'a pas réduit les injustices ni les misères, mais d'une certaine façon il s'est trouvé une harmonie avec le monde, une place juste. Un personnage singulièrement apaisé et serein, très différent de la plupart des héros faulknériens, et qui fait de ce livre un des sommets de l'oeuvre de l'auteur. Suite à son publication, il a d'ailleurs fallu attendre 6 ans pour qu'un autre roman de Faulkner paraisse.
 
Un de mes romans préférés de Faulkner, mais sans doute pas le plus typique pour celui qui voudrait découvrir l'auteur.
Commenter  J’apprécie          50
Ce roman, qui pourrait être aussi un regroupement de sept nouvelles, mais que je qualifierais de roman parce que, selon moi, les séparer nuirait à leur grandeur, est centré autour du plus long de ses récits, intitulé "L'Ours". Je le mets en exergue tout particulièrement parce que sa lecture provoqua en moi une vive émotion. N'étant pas un adepte de la chasse, cela pourrait paraître contradictoire qu'une histoire de traque dans les forêts du Mississippi puisse susciter chez moi une quelconque admiration. Mais cette histoire singulière, comme souvent chez Faulkner, raconte aussi la grande histoire des Etats-Unis. Cette plongée dans un monde sauvage, animal, d'un jeune blanc, apprentis chasseur, Isaac Mac Caslin, guidé par Sam Fathers, noir de sang par sa mère et indien par son père, à la recherche du vieux Ben, l'ours le plus réputé de la brousse, celui qui dévaste les lopins de maïs qui viennent grignoter inéluctablement la forêt chaque année, est une évocation d'un temps révolu, car cette brousse a laissé place, après de nombreux et inépuisables coups de hache, à des parcelles rectangulaires chargées de coton, a laissé place à une civilisation gestionnaire et comptable chargée de répondre aux exigences des nouveaux détenteurs de la vérité : les papes de la finance.
Un récit qui évoque le film "Princesse Mononoké" de Miyazaki, où l'entrée dans l'ère industrielle sonne le glas de la sauvagerie naturelle, où l'animal n'a plus sa place que dans un parc, un zoo ou un abattoir.
Commenter  J’apprécie          70
Sommet de l'oeuvre faulknérien, Go down, Moses se présente sous la forme d'un habile patchwork de sept nouvelles dont les motifs récurrents sont le poids génétique des fautes originelles -et donc l'intangibilité des êtres et de leurs affects-, la corruption des verts paradis de l'enfance et la perte de l'innocence.
Dans ces histoires cousues de fils blancs et noirs, Faulkner gravite autour du lignage frelaté de Lucius Quintus Carothers McCaslin, aïeul incestueux à la descendance métissée. Deux héritiers, issus de branches distinctes, Ike McCaslin et Cass Edmonds jouent un rôle prépondérant dans cet adieu déchirant à un Sud dénaturé.

Dans trois des nouvelles ici rassemblées, l'apprentissage de la vie sauvage à travers la chasse permet à Ike de remonter le fil de sa mémoire : son baptême sanglant, rite initiatique offert par Sam Fathers, son mentor Indien, sa confrontation aux forces primitives de la forêt ou son allégeance à la beauté du cerf ou à la majesté de l'ours lui permettent d'oublier un instant l'altération irrévocable de la nature primordiale.

Il se souvient que Vieux Ben, le coriace plantigrade, résistant déconcertant aux changements du monde, a fini par mourir sous les attaques conjointes d'un chien belliqueux, Lion, et d'un poivrot rustique et que Sam Fathers, presque simultanément, s'est éteint comme un feu de camp à l'aube pour mieux se fondre à l'humus de sa sylve natale.

Ailleurs, de vieux papiers oubliés réveilleront les ombres d'une sale histoire familiale imbibée de sang et de larmes et réactiveront les affres de l'esclavage et de la ségrégation.

L'écriture faulknérienne, luxuriante, ondoie, serpente, s'insinue ; rêche à force d'abstraction, elle sait se faire suave et évocatrice. Les sens en alerte, le lecteur se blesse aux écorces des grands arbres, s'enfonce dans le terreau des sous-bois, flaire les effluves animales : cette errance adamique des premiers jours de l'humanité est d'une terrible beauté.

Et puis la nouvelle parfaite, le noir sied au bouffon (Pantaloon in black), blues déchirant sur un deuil impossible ! Inoubliable Rider, Orphée dérisoire qui ne peut retenir le fantôme de sa noire Eurydice et exorcise sa douleur dans le travail, l'alcool et la violence.

Sidéré!

" Oppressed so hard they could not stand
Let my people go!"

Lien : http://lavieerrante.over-blo..
Commenter  J’apprécie          50
DESCENDS MOÏSE de WILLIAM FAULKNER
Tout d'abord oubliez la référence biblique qui pourrait vous freiner, Moïse est un chien et en l'occurrence il est dans un arbre!
Sept nouvelles composent ce livre, mais qui sont si imbriquées les unes dans les autres qu'on peut considérer qu'il s'agit d'un roman qui s'étire sur presque un siècle. En remontant l'histoire de la famille MacCaslin, Faulkner reprend ses thèmes favoris, ceux de la faute originelle avec les indiens et la tâche inaltérable avec les noirs. On retrouve également les deux oncles jumeaux, Buck et Buddy, présents dans Sanctuaire. Beaucoup de scènes de chasse initiatiques, celle de l'ours étant sûrement la plus emblématique du Sud faulknerien. Plusieurs récits se suffisent à eux mêmes, le premier particulièrement avec une chasse au renard qui va se transformer en chasse à l'homme. Lucas, petit fils noir d'un McCaslin qui s'échappe d'une plantation ( comme il le fait une ou deux fois par an) pour retrouver la même femme qu'il veut épouser. Une affaire qui donnera lieu à des tractations qui seraient hilarantes si le statut d'esclavage n'était pas omniprésent, puisqu'on négocie des hommes.
Plusieurs de ces nouvelles sont carrément burlesques ce qui allège l'ambiance lourde du contexte.
Un des plus beaux Faulkner, peut-être une façon de commencer avec lui.
Commenter  J’apprécie          20

Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
— (…) Songe à tout ce qui est arrivé ici sur cette terre. Tout le sang chaud et fort pour la vie et pour le plaisir qui est retourné en elle. Pour le chagrin et la douleur aussi, bien sûr, mais en en tirant toujours quelque chose pour tout cela, en en tirant beaucoup, car, après tout, on n’est pas obligé de continuer à supporter ce que l’on croit être de la souffrance : on peut toujours choisir de l’arrêter, d’y mettre fin. Et même le chagrin et la souffrance sont mieux que rien ; il n’y a qu’une seule chose pire que de ne pas être vivant, et c’est la honte. Mais on ne peut pas vivre éternellement et on use toujours la vie avant d’avoir épuisé les possibilités de vivre. Et tout ce qu’il y a peut-être quelque part ; tout ce qui n’a pas été inventé et créé tout bonnement pour ne servir à rien. Et la terre n’est pas bien profonde : il n’y en a pas beaucoup avant d’arriver au roc. Et la terre ne tient pas simplement à garder les choses, à les conserver précieusement ; elle veut s’en resservir. Regarde la graine, les glands, ce qu’il advient même de la charogne quand on essaie de l’enterrer : elle se rebelle, elle aussi, elle grouille, elle lutte elle aussi, jusqu’à ce qu’elle soit de nouveau arrivée à l’air et à la lumière, toujours en quête de soleil.

("Gens de jadis", p. 159)
Commenter  J’apprécie          50
« — Les temps ne sont plus les mêmes maintenant, dit un autre. Il y avait ici du gibier dans ce temps-là.
— De plus, dans ce temps-là, on tirait aussi des biches. Comme maintenant, nous n’avons pas qu’un chasseur de biche dans…
— Et les hommes qui la chassaient valaient mieux », fit Edmonds. Il était debout à l’extrémité de la table faite d’une planche brute, en train de manger rapidement et sans s’interrompre, tandis que les autres dînaient. Mais, de nouveau, le vieillard jeta un brusque regard sur le beau visage maussade et pensif qui, en ce moment, à la lueur de la lanterne fumeuse, paraissait encore plus sombre et plus maussade. « Voyons allez-y. Dites-le.
— Je n’ai pas dit ça, répondit le vieillard. Il y a des hommes de valeur partout, à toutes les époques. La plupart le sont, certains ne sont que malchanceux, car la plupart des hommes valent un peu mieux que les circonstances dans lesquelles ils se trouvent ne leur donnent l’occasion d’être. (…)
— Aussi vous avez vécu presque quatre-vingts ans, dit Edmonds. Et c’est ce qui a fini par vous instruire sur les autres animaux parmi lesquels vous vivez. On peut, je crois, vous poser cette question : Où donc avez-vous été tout le temps que vous étiez mort ? »

("Automne dans le delta", p. 287-288)
Commenter  J’apprécie          50
Tout d’abord, le garçon n’en crut pas ses oreilles ; il fallut que le major de Spain le lui dît. Alors il monta sur la mule borgne que n’effrayait pas le sang des bêtes sauvages, regardant du haut de sa monture le chien immobile à l’étrier du major, le regardant dans le jour ruisselant et gris, aussi grand qu’un veau, plus grand qu’il ne le croyait en réalité — la tête énorme, la poitrine presque aussi large que la sienne, la peau bleue sous laquelle les muscles demeuraient inflexibles, insensibles à tout contact, puisque le cœur qui leur portait le sang n’aimait rien ni personne — restant immobile comme un cheval reste immobile, et pourtant différent d’un cheval qui ne suggère qu’une idée de poids et de vitesse, tandis que Lion suggérait non seulement celle de courage et de tout ce qui contribue à renforcer la volonté et le désir de poursuivre et de tuer, mais l’endurance, la volonté et le désir de supporter dans sa chair au-delà des limites imaginables dans le but de rejoindre et de massacrer.

("L’Ours", p. 201)
Commenter  J’apprécie          50
Alors Boon courut. Le garçon entrevit la lueur de la lame qu’il avait à la main, il le vit bondir parmi les chiens, les bousculer, les écarter à coups de pied tout en courant, enfourcher lui-même l’ours comme il avait fait de la mule, ses jambes étreignant le ventre de la bête, son bras gauche sous la gorge de l’animal, à l’endroit où Lion était rivé, puis l’éclat du couteau quand il se leva et retomba.
Il ne retomba qu’une seule fois. Pendant un instant, ils ressemblèrent presque à un groupe sculpté, les chiens qui n’avaient pas lâché prise, l’ours, l’homme à califourchon sur son dos, tournant et retournant la lame profondément enfoncée. Puis ils s’écroulèrent, basculant en arrière par le poids de Boon, Boon en dessous. Ce fut le dos de l’ours qui reparut le premier, mais aussitôt Boon fut de nouveau sur lui à califourchon. Il n’avait pas lâché le couteau et, de nouveau, le gamin perçut le mouvement presque imperceptible de son bras et de son épaule élargissant et fouillant la blessure ; puis l’ours se mit debout, tout droit, soulevant avec lui l’homme et le chien ; il se retourna, fit deux ou trois pas vers le bois, sur ses pieds de derrière, comme un homme en marche, et s’effondra d’un bloc. (…) Il tomba tout d’une pièce comme un arbre, si bien que tous trois, l’homme, le chien et l’ours, eurent l’air de s’abattre à la fois.

("L’Ours", p. 203-204)
Commenter  J’apprécie          30
Au début du printemps, la jument du major de Spain avait mis bas un poulain mâle. Un soir, alors que Sam ramenait les chevaux et les mulets afin de les mettre à l’écurie pour la nuit, le poulain manquait et tout ce qu’il put faire fut de rentrer dans l’enclos la jument qui était comme folle. Il avait tout d’abord pensé à la laisser le conduire jusqu’à l’endroit où elle avait été séparée de son poulain. Mais ce ne fut pas ce qu’elle fit. Elle ne fit même pas mine de se diriger vers quelque canton particulier des bois ni même d’aller spécialement dans quelque direction. Elle ne fit que galoper à l’aveugle, encore folle de terreur. Elle tournait sur elle-même et revenait tout à coup sur Sam comme pour l’attaquer dans un paroxysme de désespoir, comme si, pour le moment, elle ne pouvait se rendre compte que c’était un homme et qu’elle le connaissait depuis longtemps. (…)
Il se rendit au pavillon prévenir le major de Spain. C’était une bête, naturellement, une grosse bête, et, maintenant, où qu’il fût, le poulain était mort.

("L’Ours", p. 180-181)
Commenter  J’apprécie          40

Videos de William Faulkner (21) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de William Faulkner
Retrouvez les derniers épisodes de la cinquième saison de la P'tite Librairie sur la plateforme france.tv : https://www.france.tv/france-5/la-p-tite-librairie/
N'oubliez pas de vous abonner et d'activer les notifications pour ne rater aucune des vidéos de la P'tite Librairie.
De quel écrivain génial André Malraux parlait-il quand il a dit : « C'est l'intrusion de la tragédie grecque dans le roman policier » ?
« le Bruit et la fureur » de William Faulkner, c'est à lire en poche chez Folio.
Dans la catégorie : Textes diversVoir plus
>Littérature (Belles-lettres)>Littérature américaine en anglais>Textes divers (382)
autres livres classés : romanVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (81) Voir plus



Quiz Voir plus

Les titres des œuvres de William Faulkner

Quel est le titre correct ?

Le Bruit et l'Odeur
Le Bruit et la Peur
Le Bruit et la Fureur
Le Bruit et la Clameur

12 questions
173 lecteurs ont répondu
Thème : William FaulknerCréer un quiz sur ce livre

{* *}