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Critique de MarcelP


"(...) ils s'étaient tous ligués comme un seul homme afin de cesser d'être des Snopes en tant que simple espèce animale pour s'élever à une condition où le succès s'obtient grâce à cette règle, cette loi, ce serment inviolables et uniques : ne jamais révéler comment on s'y prend."

Un séculaire rocking-chair, une vieille pipe au tuyau scarifié par les dents de son propriétaire, les effluves musqués d'un vieux plaid -crin de cheval, fumée, sueur-, l'ambre ensorcelant d'un vénérable whiskey... "Papy Will, tell us a story !"

Dans le Hameau, le lecteur avait assisté à la montée en puissance de la dynastie de ces "Po'White" de Snopes, une génération spontanée d'avides criquets humains qui s'étaient abattus sur le lieu-dit Frenchman's Bend. Flem Snopes, reine -pourtant inféconde- de cette colonie de parasites, y poursuivait ses sourdes menées afin d'y prendre possession d'une terre, d'une épouse puis d'une position.

Le temps a passé et avec La Ville, on retrouve Flem, arborant toujours son sempiternel noeud papillon, d'abord directeur de la centrale électrique de Jefferson (Mississippi) puis vice-directeur d'une des deux banques de la cité. Mais son unique objectif n'est ni la fortune, ni le pouvoir. Il s'est avisé que "c'est la respectabilité qu'il veut et qu'il faut qu'il ait, (qu') il est capable de tout pour l'obtenir et ensuite la garder."

Pour cela, le sordide babilan n'hésite donc pas à éliminer ses collatéraux : ainsi il exile le piteux escroc I.O. Snopes contre espèces sonnantes et trébuchantes et moucharde aux autorités Montgomery Ward Snopes, le fils du précédent, qui, non content d'avoir tenu un B.M.C. à Verdun (à l'arrière du front), a monté un peep-show clandestin à Jefferson. Pour cela il prostitue sa femme, la désirable Eula afin d'exercer un subtil chantage sur son prestigieux amant et manipule sa fille bâtarde, la non moins appétissante Linda, pour faire pression sur son grigou de grand-père.

Les Snopes : une lignée de vampires, une mérule, un sarcome !

Cette chronique nous est contée par trois voix distinctes : la parole infantile et maladroite du jeune Charles Mallison, pas encore né ou très jeune lors des événements rapportés ; le babil rustique de Ratliff, marchand ambulant de machines à coudre et de ce fait gazetier du Comté ; le discours emphatique du procureur Gavin -chevalier Gauvin, paladin des jeunes filles en détresse-, éternel soupirant transi et nympholepte honteux. Leurs souvenirs se complètent, se contredisent ou se répètent et le lecteur, archiviste complice, ordonne les faits et prend acte de leurs convictions.

Tout en nous refourguant quelques vieilles nouvelles (Le Centaure de cuivre ou Un mulet dans la cour), Faulkner nous passionne avec ce feuilleton espiègle. Comme dans le Diable boiteux, nous soulevons les toits et découvrons les dessous crasseux d'une Jefferson encore adolescente qui camoufle ses turpitudes sous l'irréprochable aspect d'un château d'eau, d'un atelier d'artiste ou d'un monument funéraire.

Qu'il croque une cacochyme mendiante, la réjouissante Het, qu'il crayonne un duel d'amoureux ou restitue les joutes verbales du Deep South, le grand Will dégaine un humour malicieux et, démiurge bienveillant, observe son "timbre poste" avec alacrité. On en redemande.

L'anecdote qui clôt ce roboratif roman est un régal : l'on y découvre 4 petits Snopes, effroyables mutants, prêts à phagocyter le monde. The Snopes : Alien beings from a dying planet. Their destination: The Earth. Their purpose: To make it their world... The Invaders
Lien : http://lavieerrante.over-blo..
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