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Critique de maevedefrance


Voici le deuxième roman lu pour la rentrée littéraire. Un roman qui parle de Virginia Woolf bien sûr, mais avant qu'elle ne le devienne. de son enfance à ses 22 ans, âge auquel elle envoie sa première critique littéraire au Guardian, sans illusions, en omettant d'y joindre une enveloppe timbrée pour le retour et même son nom. Et pourtant, c'est ce qui la sortira de l'anonymat.

J'avoue que je ne sais pas vraiment comment parler de ce livre. J'en attendais beaucoup. J'en ai appris pas mal sur l'enfance et l'adolescence de l'auteure de Mrs Daloway. le lecteur suit la vie de la famille Stephen, famille recomposée à l'heure victorienne puis édouardienne, de 1875 à 1904. Nous vivons assez furtivement le deuil de Julia, la mère de Ginia, veuve d'Herbert Duckworth, son chagrin noyé dans la charité, malgré un remariage avec un veuf, un voisin : Leslie Stephen, un haut fonctionnaire qui ne manque pas d'ambition. La belle Julia est déjà mère, Leslie aussi, et apparenté par sa feue épouse à Thackeray, l'auteur de la foire aux vanités, dont elle était la fille. de l'union de Julia et Leslie naîtront Vanessa, Thoby et Virginia, en 1882, "une semaine tout juste avant James Joyce" ! Des gamins qui deviennent demi-soeur ou demi-frère de Stella, Gerald, George et Laura. La famille reste dans vivre dans le quartier londonnien de Kensington, au manoir de l'impasse de Hyde Park Gate.

J'ai eu quelques difficultés à m'immerger dans cette biographie romancée. Emmanuelle Favier se perd dans mille détails et digressions qui vous font perdre le fil, surtout au début. Son écriture n'est pas limpide mais surchargée. Cela m'a gênée, surtout au début. J'ai eu le sentiment qu'elle veut tout dire, ou du moins en dire le davantage possible. Cela a des avantages (j'ai appris pas mal de choses) mais en même temps on se demande si cela sert vraiment le récit, dans ses grandes lignes. On a un peu l'impression d'une thèse transformée en roman.
Une autre chose qui m'a dérangée : la narratrice s'immisce sans cesse dans ce récit. J'aurais préféré qu'elle s'efface davantage devant la famille Stephen et en particulier l'objet de sa quête : Virginia. En feuilletant des lettres, albums photos, journaux intimes, elle tente de combler le vide, le mystère sur certains points. Pourtant, on ne peut pas écrire une vie entière dans tous les détails, c'est une quête vaine...

Cependant, ce roman nous immerge parfaitement dans la société victorienne dans laquelle est née Virginia Woolf. Une société patriarcale où si l'on né femme, on n'est pas grand chose ou du moins cantonnée à la maison. Les soeurs Brontë, (dont il est fait allusion, car Virginia Woolf était admirative de ces aînées) l'ont déjà montré. Il y a Leslie, ce père imposant, qui, sans le vouloir, étouffe sa fille. La fin du récit est à ce titre éloquent. Virginia "se lâche" ( :) ) après la mort de son père, elle ose alors devenir elle-même et se faire publier.

On apprend également que cette famille aisée n'a pas été épargnée par les malheurs : la mort, qui hantera Virginia jusquà l'obesession est omniprésente (de façon moins fulgurante que chez les Brontë, mais tout de même) : très jeune, Ginia perd tour à tour sa mère et Stella, sa soeur aînée. A 22 ans, elle est orpheline.

Le refuge de Viriginia est très tôt la littérature. On s'en doute. Elle écume tous les livres qui lui passent dans les mains, avec l'aval de Leslie : "Il lui a ouvert sa bibliothèque car il pense, et c'est un penseur moderne, qu'une jeune fille anglaise a droit à une instruction la plus large possible - tant que c'est sans bourse déliée. Elle lui en est reconnaissante. Pourtant elle pressent que la pensée moderne et l'éducation parfaite des jeunes filles, c'est bien joli, mais qu'en dessous se trame quelque chose qui a plutôt à voir avec la vie et la mort."
"L'obsession que suscitent les livres prend aussi une forme physique : elle se met à la reliure, le contenant prenant le pas sur le contenu le temps de s'asphyxier aux émanations de la peinture dorée dont elle enlumine ses volumes. le goût des livres ne se suffit pas des mots, il lui faut - croit-elle, se méprenant sur la source du manque - l'incarnation physique. La matière, lin, cuir, papier japonais, soie ou parchemin, comble les lacunes sensuelles de la pensée déployée en caractères."

Grande observatrice de ses contemporains, dès qu'elle en a assez, elle décroche et se plonge dans les livres, échappatoire salvatrice ? Rien n'est moins sûr. Car il y a la "bête", la "bestiole" qui sommeille déjà... Une intelligence supérieure, une fragilité qui va de paire.

Malgré une plume complexe qui m'a gênée, j'ai fini par me faire à au style de l'auteure. J'ai globalement apprécié ce livre. Il restitue bien l'époque et la personnalité de Virginia, même si l'on est un peu trop dans le domaine du contemplatif. Peut-être faut-il le lire d'une traite. Je me suis posée la question.

Lien : http://milleetunelecturesdem..
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