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Vendredi. J'attends devant l'école la sortie de mon dernier fils. Ce soir la maîtresse du petit doit être en retard. Avec le masque et la buée sur les lunettes je distingue mal ce qui se passe au loin, mais j'entends d'autres parents qui râlent, grognent, voire vitupèrent. D'ici cinq minutes peut être voueront-ils aux gémonies l'institutrice nécessairement coupable de négligence aggravée. En ce qui me concerne je m'en contrefiche: j'ai un livre. Ces parents soit-disant pressés n'avaient qu'à prendre le leur. CQFD.

Quatre nouvelles. Rangées de la plus brève à la plus étirée. Une respiration, voire un certain souffle; la respiration souvent malaisée de personnages plus ou moins mollement obsessionnels. Et pourtant il y a respiration et, ce qui ne gâte rien, un certain humour.
Ce recueil ne bouleverse probablement pas la littérature mondiale, mais on est à la maison, avec un texte intelligent, souvent malin, qui nous promène, qui nous ouvre des fenêtres. En particulier il parle du temps, de la perception du temps, de l'existence et il en parle bien. On est à la maison littérature. C'est bon.
Il aurait fallu que je travaille. Mais j'ai un livre.

PS: J'ai lu certaines critiques s'inquiétant des détails techniques cosmologiques dans la dernière nouvelle. En ce qui me concerne je n'ai pas l'impression que l'auteur ait vraiment assommé le lecteur de détails wikipédia. Et le seul détail à comprendre (concernant le fameux mur de Planck), c'est que personne n'a jamais réussi à établi d'équation décrivant les toutes premières fractions de fractions de secondes de l'univers. Au delà de ce mur nous sommes totalement ignorants aujourd'hui. Il existe un point aveugle.
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Ce court recueil paru en 2012 rassemble quatre très belles nouvelles sur la fuite du temps et le rapport de l'écrivain ou de l'homme au quotidien, au réel.

Je ne veux vous parler ici que de la dernière, «Le mur de Planck», nouvelle réaliste mais à l'ambiance fantastique et qui exerce une attraction singulière. Un homme, physicien comme Max Planck, âgé de cinquante ans, arrive au Japon pour assister à un congrès sur l'infiniment petit. Flottement du voyageur fraîchement débarqué après un long vol, confronté à l'étrangeté de la réalité japonaise, il tente d'apercevoir le cône souverain du mont Fuji, qui sans cesse se dérobe. Une magnifique nouvelle très émouvante sur le temps qui passe et la fragilité de l'homme qui cherche à percer les secrets du réel.

«On est en juillet sous une pluie battante après avoir passé les tours de Shinjuku, à moins que ce ne soit Kawasaki ou déjà Yokohama. Encore détendu, le voyageur de l'hikari achète un bento en guise de déjeuner et examine le contenu des cases. Plaisir des yeux avant d'etre celui du palais. Pendant ce temps, le train coulisse à travers des banlieues qui sont constamment le début ou la fin de villes dont l'homme, arrivé par un vol de nuit, méconnaissait les noms, et ces noms égrenés au long de la ligne forment à ses yeux la première page d'un pays dont tout l'étonne. Est-ce la candeur de l'enfance qu'il retrouve avec bonheur ?»
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Quatre nouvelles distillant à merveille cette poésie de l'étrange chère à Éric Faye.

Publié en 2012, ce recueil de quatre nouvelles d'Éric Faye est à nouveau fort réjouissant, portant sur quatre longueurs et quatre terrains bien différents sa rigueur poétique de grand styliste de l'étrange.

Les 30 pages de "L'inachèvement", superbement écrites, sont d'une thématique plutôt classique de fantastique proche et inquiétant, dans le quotidien d'un écrivain, où peut rôder comme l'ombre d'un usurpateur ou d'un doppelgänger.

Les 8 pages de "La nuit du verdict" constituent sans doute l'un des plus beaux hommages littéraires à Franz Kafka qu'il m'ait été donné de lire.

Les 75 pages de "Devenir immortel, et puis mourir" déguisent somptueusement en conte chinois une réflexion sur l'immortalité - et donc sur le contenu de la vie -, en un palais des miroirs que ne renierait sans doute pas Borges.

Les 80 pages du "Mur de Planck", avec leur physicien français de modeste renommée que tel ou tel colloque ramène épisodiquement au Japon dans une longtemps vaine tentative de "voir pour de bon" le Fuji-Yama, distille ce charme extraordinaire de l'intellect aux prises avec le réel, tardant à se laisser aider par la poésie, dans un climat toujours curieux où rôdent aussi bien le risque de se perdre dans la traduction en Bill Murray des particules subatomiques, que de s'engager dans une forêt noire concoctée peut-être par un Romain Verger. Magnifique, troublant, l'Éric Faye que j'adore.
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Magnifique recueil de quatre nouvelles. Deux très courtes ouvrent ce recueil et porte sur l'écriture et la recherche du "mot", les deux autres beaucoup plus importantes parlent de la quête d'un graal absolu, l'éternité et la connaissance de l'origine de l'univers.
Un texte magnifique, une écriture simple et efficace. Un petit bijou.
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Quatre nouvelles, quatre héros obnubilés par des aspirations philosophiques ou créatrices, s'entêtent dans leur démarche jusqu'à la limite de la folie. En quête d'une vérité qu'ils perçoivent intimement, ils s'attachent à trouver dans ce quotidien qu'ils rejettent une preuve, un indice qui les rassurerait sur leur propre existence, quelque chose qui justifierait leur présence dans ce monde. Dans cette recherche désespérée pour atteindre la vérité, surmenage, lassitude, anéantissement moral et physique les guettent. Les nouvelles fricotent avec le fantastique comme si la révélation appartenait à un monde pareil au nôtre et dissemblable. Dans leur démarche existentielle, les héros se heurtent à un mur infranchissable, quelque chose d'indéfini, à la fois à leur portée mais qui s'amuse à s'éloigner, à les détourner de leur entourage, à les pousser vers les confins de la déraison. Au bord de la capitulation, n'espérant plus que la lumière jaillisse, isolés par leur obstination maladive, voilà que la réponse à leurs angoisses s'offre brutalement à eux.

Les deux premières nouvelles très courtes parlent de la difficulté d'être écrivain.

L'inachèvement raconte les tribulations d'un rond-de-cuir qui s'astreint depuis des années à terminer sa toute dernière oeuvre qui porte sur l'inachèvement. Tous les matins, installé avant l'aube devant son bureau, cet homme au talent peu reconnu part à la pêche du mot juste, activité longue et fastidieuse que vient troubler des petits coups répétés provenant d'un appartement, celui situé dans l'immeuble à côté. Intrigué par ces bruits qui ressemblent à des appels au secours, le héros finit par s'immerger complètement dans la résolution de ce mystère perdant du même coup sa vie, sa santé et sa raison d'être. La parution de son livre écrit par un bellâtre inconnu le catapulte dans la folie.

La nuit du verdict évoque les difficultés d'un écrivain assommé par la pollution sonore qui l'entoure de se consacrer à sa passion et de répondre à son absurde question: Pourquoi la nécessité d'écrire se fait-elle plus grande quand ce bonheur élémentaire paraît inatteignable? Il vient de terminer son récit pour la revue Arkadia et songe déjà à son prochain projet celui concernant la Grande Muraille et son empereur.

Les deux dernières nouvelles plus longues ont des airs de courts romans, les thèmes principaux étant le temps/l'attente et la pérennité de nos actions.

Devenir immortel, et puis mourir relate les aventures du premier empereur de Chine, Qin Shi Huangdi. Sa dernière lubie est d'obtenir ces fameux champignons de l'immortalité qui poussent sur les îles des Immortels. Faisant confiance aux ragots colportés par les marchands, il envoie une flotte de trois mille hommes, femmes, marins et soldats à sa recherche. Pour tuer l'attente et combattre sa peur de mourir, il fait construire un mausolée, son meilleur vaisseau contre l'immortalité, sa consolation si l'entreprise venait à échouer. Les années passent. Sans nouvelles de son expédition, lassé par cette interminable attente, Qin Shi Huangdi quitte son palais incognito accompagné de ses plus fidèles serviteurs, parcourt le pays, scrute la mer dans l'espoir de voir enfin le retour de sa flotte, lit, se tient informé des différents évènements qui secouent son pays. le temps s'égrènera inexorablement sans jamais satisfaire sa curiosité.

Le mur de Planck, titre de la dernière nouvelle, est selon le site Wikiversité Jean Ruelle, physicien quinquagénaire, débarque au Japon pour la première fois pour participer à un colloque sur les avancées scientifiques sur l'infiniment petit. Au cours de ce congrès international, sa rencontre avec une collègue japonaise lui rappelle de vieux souvenirs cinématographiques, des souvenirs flous dont sa mémoire n'arrive pas à retracer. D'autres insatisfactions lui tombent dessus comme l'impossibilité d'apercevoir le Fuji-san perpétuellement embrumé ce qui le pousse à douter de l'existence de cette montagne sacrée. Ses tentatives avortées pour percer le sens de Au dessous du volcan l'agacent mais pas autant que son collègue et ami, Lachenay, un puits de sciences à qui tout sourit. Son irritation tient en une petite phrase mesquine que ce dernier lui a lancé: Une phrase anodine qui se transformera au fil des ans en une malédiction, du moins c'est ainsi qu'il le ressent au point d'en devenir si obsédé que la vie telle qu'il a connu n'a plus de saveurs.



C'est le second ouvrage que je lis de cet auteur dont j'avais apprécié Nagasaki, une histoire concise, épurée, centrée sur la solitude, la mise à l'écart sociale. Celui-ci est plus verbeux, volontairement nébuleux sans doute pour mieux faire entendre au lecteur la singularité des philosophies orientales, le taoïsme et le confucianisme qui s'opposent avec le point de vue d'un occidental. Pas que ce soit mal fait mais ça ressemble à ces films à l'esthétisme parfait, très beaux mais un tantinet chiant. Les différentes longueurs des nouvelles surprennent. Les deux premières, très courtes, se concluent brutalement. Si cela est parfait pour l‘inachèvement que je trouve incroyablement bien écrite, le verdict laisse un arrière-goût d'inachevé; la fin est précipitée, l'ensemble ressemble à la retranscription d'un cauchemar sans plus de détails. Les dernières, plus développées, enlisent le lecteur dans un certain ennui. le mur de Planck l'illustre bien. c'est long, trop long de suivre de ce cher Jean Ruelle dans ses méandres existentiello-philosophiques. Il patine, nous avec. Après, il y la langue de Eric Faye, toujours séduisante, une atmosphère inquiétante, emprunte de surnaturel, un humour grinçant, un titre épatant mais cela ne suffit pas à alléger la part ennuyeuse de l'ensemble du recueil. le véritable point positif est que cette lecture m'a donnée envie d'en savoir un peu plus sur ces philosophies si étrangères à mon monde. Un recueil inégal.
Lien : http://www.immobiletrips.com..
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bof
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