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Critique de Ys


Ys
30 janvier 2015
Naples et ses castrats : de tous les mondes disparus, lesquels suscitèrent à la fois autant d'indignation vertueuse, d'incompréhension horrifiée, d'admiration fascinée, de fantasmes et de rêves ?

Fasciné, Dominique Fernandez l'est indéniablement lorsqu'il entreprend de peindre, à travers les mémoires fictives d'un des derniers castrats, les ultimes moments de ce monde en déclin, depuis la campagne napolitaine où se recrutent les jeunes chanteurs aux fastes des scènes et des palais qui abriteront leurs triomphes, sans oublier l'école aux lois strictes où se forment leurs voix.
Un monde d'ors et de ténèbres, à deux doigts de se voir balayé par les aveuglantes Lumières, par les révolutions intellectuelles, politiques et sociales de la fin du XVIIIe siècle, écrasé par l'implacable triomphe de la Raison et de la Bourgeoisie. Un monde, pourtant, dont la logique répondait peut-être à des aspirations bien plus fondamentales que les simples désirs d'une aristocratie décadente auxquels on l'a trop souvent limité. Un monde où la superstition n'est pas nécessairement, pas uniquement, synonyme d'obscurantisme et d'asservissement, mais fusion instinctive dans une humanité primordiale, épargnée par les diktats réducteurs de la civilisation et de l'âge adulte.
Une humanité où chacun n'est pas contraint de répondre à des définitions précises, de rentrer dans des cases, où fusionnent le pauvre et le riche, le masculin et le féminin.

De cet idéal, deux incarnations radicalement différentes s'opposent. Porporino, qui très vite renonce aux désirs et aux ambitions des hommes, trouve un bonheur un peu fade mais solide dans la certitude de n'être rien. Feliciano, son camarade très aimé, joue de pouvoir être tout avec une soif de vivre, une grâce et une désinvolture qui attisent un peu trop les passions. Entre eux deux, un comte amoureux jusqu'à la folie pathétique et un prince génial et dérangeant, dont les caves abritent de bien curieuses expériences...
Si le personnage principal manque un peu trop de caractère pour attirer mon empathie, il est parfaitement juste dans son rôle, et cette relative fadeur est plus que largement compensée par le flamboiement ambigu des autres acteurs du drame. Mais le plus intéressant, ici, reste peut-être cette très belle, très riche évocation du royaume de Naples et de son identité ambiguë. Certaines réflexions sur l'esprit napolitain, d'ailleurs, m'ont fait penser à quelques unes des plus belles pages de Lampedusa.
Lien : http://ys-melmoth.livejourna..
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