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Carnets d'Orient tome 3 sur 10
EAN : 9782203388475
83 pages
Casterman (01/01/1990)
4.09/5   61 notes
Résumé :
Troisième volet de la chronique algérienne de Ferrandez, ce récit retrace, à travers le regard d'un enfant, les premières années du siècle dans le Sud algérien. Sur cette terre écrasée de chaleur cohabitent, bon an mal an, des communautés venues de tous les rivages de la Méditerranée.

Fragile puzzle humain, toujours au bord de l'éclatement, tant "là-bas", le racisme est ordinaire et la haine banalisée. Comme le dit le petit Paul : "Ici, le Français i... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
L'Algérie devient avec lui plus naturelle, surnaturelle, sublime à pleurer.
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Ce tome fait suite à Carnets d'Orient, tome 2 : L'année de feu (1989). Il a été publié pour la première fois en 1992, après une prépublication la même année dans le magazine (À suivre). Il s'agit d'une bande dessinée en couleurs qui compte 62 planches en couleurs. Elle a été réalisée par Jacques Ferrandez, pour le scénario, les dessins, les couleurs. Ce tome a été réédité dans Carnets d'Orient – Intégrale 1 : 1830-1954. Ce tome s'ouvre avec deux introductions. La première d'une page est rédigée par Jules Roy, écrivain et romancier ayant écrit sur l'Algérie. Il loue la capacité de l'auteur à rendre l'Algérie plus naturelle, surnaturelle, sublime à pleurer. La seconde est rédigée par le bédéaste lui-même : il indique que les deux frères petit Paul et Casimir sont inspirés de son grand-père et de son frère.

En 1904, dans le village de Beni Ounif, le jeune garçon Paul pense à son père : il est chef de gare, à Beni-Ounif. Beni-Ounif, c''est le terminus. Ils sont en train de construire la ligne jusqu'à Colomb-Béchar, en plein Sahara. Déjà, ici, c'est un enfer : du sable et une chaleur épouvantable, comme elle dit sa mère. Son père, il est très ami avec le commandant Courteuil. Avant qu'ils arrivent, les Marocains avaient attaqué les gens de Beni-Ounif. L'armée, pour les effrayer, a tiré un boulet qui n'a pas éclaté, mais qui a traversé le marabout de part en part. Les Marocains ont demandé tout de suite l'aman. C'est le commandant Courteuil qui a réglé ça avec le pacha. Probable que le pacha a été acheté. Il doit palper, ce qui fait que depuis il y a la paix. le Maroc, c'est tout près… Il y a une colline avec un col. le col de la Juive, ça s'appelle, et derrière il y a Figuig, le Maroc. Figuig, c'est une oasis, dès qu'on a passé le col, tout est vert. Il y a des jardins, des légumes, des fruits, du blé, de l'eau à volonté. Les rues sont couvertes. Quand on débouche sur une place, on est ébloui par le soleil. Les jours de marché, ça grouille, là-dedans.

Devant la gare de Beni Ounif, le commandant Courteuil propose de manière directive, à Jules de partir avec lui à cheval, l'accompagner pour sa tournée à Figuig, au Maroc, juste de l'autre côté de la colline. le père emmène son fils Jules. Dans l'artère principale, le commandant se fraye un chemin à grands coups de trique sur les habitants déambulant dans les rues. Ils arrivent devant le pacha Si Abdelassem et le commandant lui présente Jules le chef de gare. C'est ainsi que ce dernier devient un grand ami du pacha, et que le petit Paul se retrouve par mégarde dans le quartier des femmes. Au moment de leur départ, le pacha leur fait un cadeau : un petit quadrupède tout mignon. Il détrompe ses hôtes : ce n'est pas un chien, mais un chacal. Il se nomme Kébir et il fera un très bon compagnon pour les enfants. Paul se rend à l'école à pied avec son grand frère Casimir. Ce dernier aime se bagarrer avec tous les autres et les faire saigner du nez.

Après le début de l'occupation en 1830 au travers de la quête romantique du peintre orientaliste Joseph Constat, puis l'installation du colon Victor Barthélémy et de son épouse Amélie en 1870/1871, le lecteur découvre l'Algérie par les yeux d'un enfant petit Paul, de la naissance du vingtième siècle à 1914. L'auteur reste fidèle au principe qui court tout le long de la série : présenter la situation en Algérie, du point de vue d'un ou plusieurs français de souche. Ici, le lecteur suit un jeune garçon, moins d'une dizaine d'années au début, jusqu'à son départ pour les conflits de la première guerre mondiale dans un régiment de zouaves. Les références historiques apparaissent donc de manière organique dans cette tranche de la vie de petit Paul : la réalité d'être blanc dans un pays arabe, la domination coloniale sur les autochtones. Comme dans les tomes précédents, s'il y est attentif, le lecteur peut détecter des références historiques telle qu'une référence à la Commune de Paris, la rencontre avec avec Mahmoud Saadi / Isabelle Eberhardt (1877-1904), écrivaine suisse, ou le passage avec les forçats du Bat-d'Af (bataillon d'Afrique). L'auteur ne développe pas ces éléments, ni ne réalise un exposé, laissant le lecteur libre de glisser en passant, ou d'aller se renseigner plus avant pour enrichir sa lecture. D'une manière aussi incidente, l'artiste intègre des éléments d'archives comme des reprographies de mauvaise qualité du catalogue d'époque d'armes et cycles de St Étienne.

Le récit fait également voyager le lecteur, de Beni Ounif proche de la frontière marocaine dans la région de la Saoura, à Figuig au Maroc, puis à Mascara une grande ville du nord-ouest d'Algérie et enfin à Alger. le lecteur remarque que l'artiste a conservé ce mélange de technique entre le détourage des formes avec des traits fins encrés, et des zones complétées à la peinture directe. Ferrandez a toujours à coeur de décrire et de représenter les régions de l'Algérie où se déroule l'action, en extérieur, comme en intérieur ainsi que les tenues des individus qui l'habitent, quelle que soit leur origine ou leur nationalité. le lecteur en est d'autant plus conscient du fait des particularités visuelles de la première séquence et ce dès la première page dont les cases sont entièrement réalisées en couleur directe, sans trait de contour encré. L'artiste rend ainsi compte de l'intensité lumineuse qui s'avère aveuglante à cette heure de la journée. Les traits encrés refont leur apparition dans la deuxième page pour les personnages, comme si la vision devenait plus nette, comme si les personnages étaient plus focalisés sur le moment présent. Les sensations de luminosité intense reprennent alors qu'ils voyagent dans le désert à la page suivante. La progression à cheval au milieu de la foule de l'artère principale de Figuig, une ville marocaine située dans la région de l'Oriental.La couleur se mêle aux contours encrés pour rendre compte de l'ombre mouvante dans la rue, grâce à une couverture de feuilles de palmier reposant sur des poutres entre les maisons, une sensation visuelle épatante.

Le lecteur remarque également que l'artiste utilise les cases en couleur directe pour signifier autre chose. S'il ne l'a pas détecté dans la planche 1, il s'en rend compte à partir de la planche 4. de temps à autre, la représentation en couleur directe revêt une apparence plus naïve et le lecteur comprend qu'il s'agit d'une vue subjective, de la représentation que s'en fait l'enfant petit Paul, et du souvenir de sensation qu'il en a gardé. Ferrandez joue alors avec le degré de détail et de précision de la représentation, pour figurer la force du souvenir de l'enfant, plutôt entièrement dans le ressenti et dans la sensation, ou plus dans le concret. Après les décors un peu arides du désert dans le précédent tome, le lecteur éprouve l'impression que ceux-de ce tome-ci sont plus fournis parce que plus diversifiés. Quoi qu'il en soit, ils regorgent de détails, pour les habitations, pour l'école et ses pupitres en bois, pour le jardin maraîcher tenu par Abderhamane, pour les installations du port d'Alger, pour son front de mer.

Après le peintre orientaliste épris d'une belle algérienne, puis le colon qui vient s'installer après avoir combattu lors de la Commune de Paris, le lecteur découvre un jeune enfant qui grandit paisiblement, qui va à l'école, dont la vie est assujettie au changement de poste de son père. Ce dernier se lie d'amitié avec un pacha qui admire le progrès technologique que représente le chemin de fer. L'auteur conserve le même principe : présenter l'Algérie par les yeux d'un français blanc, sans militantisme pour un côté ou l'autre. Les métropolitains se sont installés durablement, et les autochtones demeurent une population soumise. le lecteur oublie rapidement qu'il s'agit pour partie de l'histoire du grand-père de l'auteur. Il observe une certaine douceur de vivre pour petit Paul et ses parents, le plaisir de vivre dans un milieu où les paysages restent naturels. Il observe plusieurs facettes de l'occupation : certains militaires qui usent de la force contre des êtres humains qu'ils considèrent comme des inférieurs parce que moins civilisés (les terribles coups de trique dans l'artère marchande), la réalité de la multiculturalité à l'école de la République qui accueille sans différence Français, Espagnols, Italiens, Maltais et Juifs, les raids de certains pillards algériens, les travaux forcés pour le Bat d'Af, les produits de métropole qui font rêver avec le catalogue d'armes et cycles De Saint Étienne, la place d'un Africain, le sens d'appartenir à une nation et de la défendre. La mainmise des Français de métropole sur la propriété et sur l'économie est devenue systémique. En quelques décennies, cette situation est considérée comme normale, induisant une forme de supériorité, et donc une société à deux niveaux.

Le lecteur en vient à l'oublier, en pleine empathie avec l'enfance et l'adolescence de petit Paul. Puis au cours d'une séance, la réalité de la structure de cette société revient au premier plan, à des degrés divers, entre une brutalité militaire occasionnelle, et la conviction de Jules le père de Paul & Casimir. Il croit à la civilisation et au progrès, que le progrès, ce n'est pas de maintenir les gens sous la domination coloniale. le progrès, c'est d'apporter aux populations, les bienfaits de la civilisation : la santé, l'éducation et la machine à vapeur. Avec le recul des décennies passées depuis l'indépendance, le lecteur relève ces marqueurs de la colonisation avec un jugement d'ordre moral. Dans le même temps, il accompagne des individus qui vivent en fonction de la normalité de la société dans laquelle ils se trouvent. Il constate leur innocence par rapport à cette domination qui est devenue la norme. Il se retrouve avec la gorge serrée dans la dernière page en découvrant les propos de Paul dans son uniforme de zouave : on a quitté nos parents, maintenant on n'est plus des enfants, on est des soldats. On s'appelle Garcia, Tobalem, Lakhdar, Galéa, Dupond, ou Durand. On est les fils du Sud. On est tous sur ce bateau qui nous emporte vers cette France qu'on ne connaît pas. On sait bien que cette guerre ne durera pas. Et quand on reviendra, on sera tous un peu plus français, du sang qu'on aura versé. On est les fils du Sud et on part à la guerre.

Ce troisième tome s'avère à la fois plus feutré quant à la situation historique de cette période en Algérie, et à la fois plus émouvant grâce à la douceur de cette enfance, et à la représentation enamourée des paysages de l'Algérie. Dans le même temps, le drame est présent en filigrane, que ce soit la domination de la population autochtone, ou l'approche inéluctable de la guerre. Une réussite remarquable.
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Dans ce troisième tome de ses Carnets d'Orient, Ferrandez expérimente de nouvelles techniques, comme les débuts de chapitres en aquarelles lointaines et très diluées qui donnent un effet narratif certain, et il entre davantage dans la chronique, avec le fils cadet du chef de gare de Béni Ounif comme fil rouge, certes, mais on se contente en vérité de suivre son enfance et son adolescence. D'ailleurs, l'auteur explique dès la préface que cet album est très personnel, dans la mesure où les souvenirs de ce petit Paul aux yeux bleus ne sont autres que ceux de son grand-père, né en 1888 et mort centenaire.
J'ai attendu longtemps le lien avec les albums précédents en me demandant s'il allait finir par venir, et ce n'est en effet qu'à la fin que l'on découvre que Paul est le petit fils du lieutenant Barthélémy, ancien communard et nouveau colon du tome 2, et l'on retrouve même le fameux tableau de harem que l'ancien a été jusqu'à racheter en France en mémoire de sa femme.
Ce lien iconographique entre les albums est vraiment une idée de génie.
Bien qu'il ne soit pas inintéressant de découvrir les moeurs de l'époque en matière scolaire et sociale, et de voir que le melting-pot algérien n'avait rien d'évident et ne s'est fait (et encore, s'est-il vraiment fait un jour ?) que dans la douleur, ces chroniques souffrent cependant d'un manque d'enjeu par rapport aux albums précédents, et notamment le deux.
Cela dit, la fin est poignante, avec tous ces jeunes gens issus de toutes les ethnies et religions qui convergent vers le premier régiment de zouaves et ignorent encore tout de ce qui va leur tomber sur le coin de la figure. La plus cruelle ironie est sans doute celle du fils du caïd, que le père de Paul n'aura eu de cesse d'encourager à mettre son fils à l'école pour "qu'il ait les mêmes chances que les Européens." Belle intention ! Pour que finalement le gamin s'engage volontairement en 1914 en disant : "La France, c'est mon pays."
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Cette première partie de l'intégrale des carnets d'orient reprend les cinq premiers volumes de la série, chacun préfacé par un amoureux de l'Algérie.
Pour le troisième tome ce sera Jules Roy, écrivain, romancier. Son parcours intellectuel a été fait de plusieurs retournements d'opinion, du séminaire à l'Armée, de Pétain à De Gaulle, de l'Algérie française à l'Algérie indépendante.
Jacques Ferrandez choisit de prendre la plume pour annoncer le changement de ton du récit. Il peut enfin parler au nom des souvenirs confiés par son grand père Paul.
Nous sommes à Beny Ounif en 1904, en Algérie profonde près de la frontière marocaine, le grand père de l'auteur, prend la parole et nous présente les lieux du temps où il était gamin.
Un père chef de gare qui se retrouve muté car en désaccord avec le commandement militaire qui considère les arabes comme une sous race.
Départ pour Mascara en 1905, immersion dans l'univers d'un petit garçon qui grandit et gravit les marches de l'éducation.
Nous quitterons Paul en août 1914, quand tous les fils du sud partent à la guerre.
Le scénario décrit avec détail les événements de ces années …
Les couleurs traduisent à merveille les sensations produites par les lieux …
Les dessins reflètent à la perfection les hommes et les lieux nous immergeant dans ces contrées …
À suivre le tome 4 « le centenaire ».
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Les deux premiers tomes de « Carnets d'Orient » étaient de grandes réussites. Ferrandez posait un regard subtil et pertinent sur un sujet pas forcément évident. le ton de ce 3ème tome est très différent des précédents. En effet, dans « les fils du sud » on suit cette fois le destin de Paul, un garçon né là-bas. On partage ses souvenirs d'enfance jusqu'à son départ pour la Grande Guerre. le ton est donc ici beaucoup plus personnel, beaucoup plus intime. J'ai adoré ce tome, peut-être encore plus que les précédents. Si le regard adopté est empreint d'une forme de naïveté, parfois même d'ignorance, il n'en reste pas moins d'une certaine façon très juste. La tonalité douce-amère qui baigne le récit est très séduisante et j'ai trouvé que le dessin était en adéquation totale avec cette ambiance. Les couleurs très chaleureuses sont vraiment très belles. J'ai trouvé ce tome particulièrement émouvant, que ce soit par le regard forcément nostalgique de l'auteur qui dépeint un monde disparu ou par l'aspect assez dramatique de la fin. En effet, voir ces jeunes garçons partir pour la guerre très confiants, presque le sourire aux lèvres, lorsqu'on sait quelle boucherie ce sera ça a quelque chose de vraiment terrible.

C'est avec grand plaisir que je vais poursuivre cette série même si je doute que les prochains volets parviennent à m'émouvoir autant que celui-ci.

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Jacques Ferrandez, comme pour les deux autres albums, nous livre, ici encore, une autre tranche de vie de l'Algérie française. Pour la première fois, le narrateur, un enfant que l'on suivra jusqu'à son départ pour la Grande Guerre, est un natif d'Algérie. Durant cet opuscule qui dure environ 10 ans (1904-1914), Paul, grand-père de Jacques Ferrandez, et son frère Casimir, côtoient une variété d'Algériens. Il y a d'abord Jacob, le Juif d'Algérie qui souhaite réussir à l'école selon le souhait de son père, puis Antonio enfant du pays, lointain descendant d'Espagne qui garde les bêtes et répugne l'école. Il y a également Béchir, le grand-frère (protecteur de Paul et Casimir) Musulman qui souhaite apprendre et qui, selon les mots de l'instituteur est « doué » (p. 44), Octave, fils d'un riche Français qui, par son comportement, méprise les Algériens et enfin Noémie, celle qui fait chavirer les coeurs. À travers ces personnages, c'est toute la population algérienne qui nous est merveilleusement décrite. On voit très vite les tensions en devenir qui se trament entre eux comme étant, eux-mêmes l'incarnation des communautés qui composent l'Algérie. Ces personnages sont accompagnés de leur histoire, de leur place dans cette colonie et surtout des rapports qu'ils entretiennent les uns envers les autres. C'est à la fin, lorsque tous ces « fils du Sud » partent combattre pour sauver la mère patrie, qu'ils savent qu'ils ont tous comme dénominateur commun le fait qu'ils sont Français d'Algérie.
Les aquarelles sont de véritables tableaux, elles nous permettent de visualiser les différents lieux (Beni Ounif en1904, Mascara un an plus tard et enfin Alger à la veille de la guerre) où se déroule la narration.
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Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
J’ai poussé tout d’un coup. À 14 ans, j’avais une petite vois pointue, et, brusquement, c’est devenu une voix d’homme. Les filles se moquaient de moi, ça me rendait timide. En clase, il y avait des copains qui étaient fils de paysans débarqués quelques années auparavant dans le début du siècle. Le matin, ils mangeaient de la soupe. Ils ne connaissaient pas le café au lait. Nous on se fichait d’eux. Après les grèves des vignerons du midi en 1907, le vin qui était à un ou deux sous le litre est monté à sept sous. Ils sont devenus riches et après, c’est eux qui se fichaient de nous. Mais ici, c’est comme ça. Le Français, il se croit plus fort que l’Espagnol. L’Espagnol, il se crache sur l’Italien. L’Italien, il dit que le Maltais c’est un chien. Le Maltais, il traite l’Arabe de fainéant, et l’Arabe, il méprise le Juif. Et encore, des fois, c’est l’inverse. […] À part ça, avec les Arabes, on vit côte à côte, mais chacun chez soi. Dans la rue, on ne les voit même plus, pourtant il y en a beaucoup.
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Oserai-je dire, pas tout à fait comme Flaubert pour Madame Bovary, que Ferrandez, c’est moi ? Ferrandez, c’est nous de là-bas, enfants, gamins, puis adolescents, puis zouaves ! Ah ! Les beaux zouaves. Est vrai tout ce qui jaillit du crayon suprêmement alerte et artiste de Ferrandez. Plus même que vrai. Ferrandez est un magicien, un enchanteur. L’Algérie devient avec lui plus naturelle, surnaturelle, sublime à pleurer. – Jules Roy (1907-2000)
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Mon père, il est chef de gare, à Beni-Ounif. Beni-Ounif, c’’est le terminus. Ils sont en train de construire la ligne jusqu’à Colomb-Béchar, en plein Sahara. Déjà, ici, c’est un enfer : du sable et une chaleur épouvantable, comme elle dit ma mère. Mon père, il est très ami avec le commandant Courteuil. Avant qu’on arrive, les Marocains avaient attaqué les gens de Beni-Ounif. L’armée, pour les effrayer, a tiré un boulet qui n’a pas éclaté, mais qui a traversé le marabout de part en part. les Marocains ont demandé tout de suite l’aman. C’est le commandant Courteuil qui a réglé ça avec le pacha. Probable que le pacha a été acheté. Il doit palper, ce qui fait que depuis on a la paix. Le Maroc, c’est tout près… Il y a une colline avec un col. Le col de la Juive, ça s’appelle, et derrière il y a Figuig, le Maroc. Figuig, c’est une oasis, dès qu’on a passé le col, tout est vert. Il y a des jardins, des légumes, des fruits, du blé, de l’eau à volonté. Les rues sont couvertes. Quand on débouche sur une place, on est ébloui par le soleil. Les jours de marché, ça grouille, là-dedans.
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Mais ici c'est comme ça.
Le Français, il se croit plus fort que l'Espagnol.
L'Espagnol, il crache sur l'Italien.
L'Italien, il dit que le Maltais est un chien.
Le Maltais, il traite l'Arabe de fainéant, et l'Arabe méprise le juif.
Et encore, des fois, c'est l'inverse.
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Moi, voyez-vous, je ne suis qu’un modeste employé de chemins de fer, mais (peut-être à cause de mon métier) je crois à la civilisation et au progrès. Et le progrès, ce n’est pas de maintenir les gens sous notre domination. Le progrès, c’est d’apporter aux populations, les bienfaits de notre civilisation : la santé, l’éducation et la machine à vapeur.
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Vidéo de Jacques Ferrandez
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