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Les images d'un conflit colonial oublié de 1911 pour dire ce que contient involontairement le très contemporain storytelling de la guerre.

Sur mon blog : http://charybde2.wordpress.com/2015/10/15/note-de-lecture-a-fendre-le-coeur-le-plus-dur-jerome-ferrari-oliver-rohe/

Lien : http://charybde2.wordpress.c..
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Regarder les images de guerre, comprendre leur récit au-delà de l’effroi et ses échos actuels.

À la fin de l’année 1911, l’écrivain et correspondant de guerre Gaston Chérau est envoyé en Tripolitaine (sur le territoire de l’actuelle Libye) par le quotidien Le Matin pour couvrir le conflit italo-turc. De ce photoreportage pour un quotidien dévoué à la cause d’une Italie soucieuse de renforcer sa légitimité de puissance coloniale, tout en exerçant une domination implacable sur la population locale, il reste aujourd’hui plus de deux cent images, matériau de cet essai.

«Mais les photographies survivent aux circonstances dans lesquelles elles ont été prises et elles finissent toujours par dire plus et autre chose que ce qu’on voulait leur faire dire.»

À partir de ces photographies, Jérôme Ferrari et Oliver Rohe sondent la construction d’un récit de propagande par les images, proposent une interprétation des signes que renvoient ces clichés, en particulier les images, insoutenables, de pendaisons de libyens au milieu de la foule, et interrogent en même temps la possibilité d’en rendre compte en littérature, en montrant ces images (plusieurs d’entre elles sont reproduites ici, de même que des extraits du journal de Chérau insérés dans le récit).

Les autres clichés de Gaston Chérau alimentent aussi la propagande, en montrant la vie quotidienne des soldats pour créer la compassion, mais les photographies de pendaison sont le cœur noir de ces archives, qui au premier abord annihilent la pensée, en frappant d’effroi celui qui les regarde.
En dévoilant leurs hésitations premières à écrire et à montrer ces images, les auteurs mettent en lumière leur questionnement moral et le mouvement pour surmonter le sentiment initial d’horreur que ces images suscitent, et, en spectateur émancipé du matériau par un regard approfondi, pour pouvoir interroger la manière dont elles interpellent notre sensibilité, un siècle plus tard, en regard des interventions militaires occidentales actuelles, l’invasion de l’Irak en particulier.

Les images assujetties à un message de propagande, récit officiel conçu pour donner à la nation italienne le visage de la justice et de la civilisation, et à l’ennemi indigène l’apparence du barbare, ces images des suppliciés libyens (cadavres qui semblent à peine être des hommes, dont l’individualité est niée) où c’est "la qualité d’homme qui est visée et atteinte", semblent annoncer d’autres meurtres de masse du XXème siècle, dont on trouve des échos ici.

À l’heure où peur et propagande peuvent facilement brouiller notre vision du monde, cet essai, paru en octobre 2015 aux éditions Inculte dernière marge apparaît comme une lecture nécessaire et précieuse.

Retrouvez cette note de lecture sur mon blog ici :
https://charybde2.wordpress.com/2015/11/15/note-de-lecture-bis-a-fendre-le-coeur-le-plus-dur-jerome-ferrari-oliver-rohe/

Pour acheter ce livre chez Charybde, c'est par là :
http://www.charybde.fr/collectif/a-fendre-le-coeur-le-plus-dur
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Jérôme Ferrari et Oliver Rohe : A fendre le coeur le plus dur (2015)
Le titre de ce petit livre est la citation d'une lettre de Gaston Chérau, journaliste et photographe qui a couvert la guerre italo-turque de 1911-1912 en Lybie. le thème est l'asymétrie physique et morale d'une guerre coloniale où l'attaque massive de l'agresseur est suivie de représailles sauvages, lesquelles sont réprimées avec le travestissement du juge chez les guerriers et les civils : ils étaient trop lointains, trop différents, mouraient trop souvent et se ressemblaient un peu trop dans leur mort (p 35). Les postérités de cette horreur sont la guerre d'Algérie (page 55, une quasi-citation d'Où j'ai perdu mon âme) ou d'Irak : Jusqu'au retrait des forces coalisées, les images du bourbier irakien se contentaient le plus souvent d'embrasser le point de vue exclusif de l'armée américaine, jamais celui de l'ennemi autochtone, civil ou insurgé, ajoutant donc à l'asymétrie militaire celle de l'accès à la parole, au récit, à la représentation (p 57). Les photos ne sont guère lisibles, ce qui est suffisant, et une postface précise l'Histoire.
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Petit essai extrêmement intéressant sur l'interprétation et le rôle de la photographie en temps de guerre, et l'impact différent qu'une image peut avoir sur l'opinion publique suivant l'époque à laquelle on la contemple.
Cet ouvrage met également en lumière un évènement peu connu du XXème siècle, à savoir le conflit entre l'Italie et l'Empire ottoman en Libye.
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Ferrari Jérôme et Rohe Oliver – "A fendre le coeur le plus dur" – Dernière marge / Babel, 2015 (ISBN 978-2-330-08652-7)

C'est là un essai relativement bref (109 pages), portant sur les photos faites par un "reporter" photo dénommé Gaston Chérau pendant la guerre que l'Italie mène contre la Turquie pour lui dérober ce qui deviendra la Libye de septembre 1911 à octobre 1912.
Selon les auteurs, il s'agit donc de l'une des toute premières manifestations d'un genre de photojournalisme appelé à connaître un développement de plus en plus important au fil des décennies, à savoir ce qu'il est convenu d'appeler le reportage de guerre.

Gaston Chéreau est financé par l'Italie pour témoigner de l'aspect "civilisateur" de sa guerre de conquête, ce qui est à l'époque couramment admis par toute la classe politique occidentale, quasiment de tout bord ; les auteurs ne le rappellent pas, mais quelqu'un comme Jules Ferry défendra la colonisation, puisqu'elle apporte "la civilisation", et soutiendra (28 juillet 1885, Chambre des députés) que
"les races supérieures ont un droit sur les races inférieures"
elles ont même
"un devoir de civiliser les races inférieures".

Ayant eu l'occasion de travailler sur l'histoire du photojournalisme, ainsi que sur les fonds de photos issus des grandes expéditions "ethnologiques" (genre "la croisière noire" organisée par Citroën en 1924-1925), ce livre ne m'apprend pas grand chose de nouveau, et la tentative d'analyse ou d'explication fournie par les auteurs n'a rien de bien originale.

Finalement, le mérite principal de cet opuscule réside dans le fait d'attester que Jérôme Ferrari s'est réellement concrètement penché sur un fonds de photographies relatifs aux guerres coloniales, et qu'il écrit donc sur ce sujet en connaissance de cause.

Mais c'est dans son roman ultérieur, publié en 2018 et intitulé "A son image" qu'il livre (ou commence à livrer) son ressenti, son analyse, sa connaissance de la problématique particulière à la photographie.
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Ce texte est paru, initialement aux Editons Inculte dont Olivier Rohe est l'un des créateurs, dans le cadre de l'exposition éponyme qui exploite des archives mêlant photographies et textes d'un écrivain-reporter de guerre, Gaston Chérau, envoyé en Libye lors de la guerre italo-turque en 1911. Quelques photos reproduites donnent un reflet de ce terrible corpus de plus de 200 clichés.


Passée la sidération de la découverte de clichés reproduisant la pendaison de 14 rebelles dans une mise en scène soigneusement organisée, les auteurs les mettent en perspective avec le reste du corpus, et réfléchissent à la propagande photographique en temps de guerre, et au sens à décrypter à travers ces cliches, à la question de la représentation de la violence dont l'obscénité même justifie, ici, la nécessité.

Ce texte est constitué de petits chapitres qui lui donnent un côté un peu disparate. Il laisse un petit goût de superficialité cachée derrière une rhétorique pompeuse, qui le mène parfois à la limite de l'obscur. On regrette que la seule réflexion soit mise en avant, au détriment d'une connaissance du photographe, Gaston Chérau, dont la position face à ces clichés n'est que vaguement ébauchée (à tel point qu'on ne peut savoir si elle s'appuie sur l'analyse des documents écrits, ou s'il s'agit d'une interprétation des auteurs). Il n'en demeure pas moins qu'il pose de bonnes questions, fait émerger des documents jusque là oubliés quoique primordiaux, et qu'on y trouve quelques idées à glaner. L'exposition devait être passionnante!
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Actes Sud édite en poche ce court et remarquable essai de Jérôme Ferrari et Olivier Rohe, qui ont exhumé les photographies d'un reportage réalisé par Gaston Chéreau au cours de la guerre italo-turque (1911-1912) en Tripolitaine (actuelle Libye). Leur regard n'est bien évidemment pas le même que celui de Chéreau et de la grande majorité des Européens des débuts du XXe siècle. Ferrari et Rohe démontent la machine de propagande italienne de l'époque pour mettre à jour la barbarie coloniale et la mise en place d'un système judiciaire partial au service de la puissance dite "civilisée".
Ce texte est d'autant plus intéressant qu'il met en avant un conflit peu connu et qu'il nous aide à comprendre les enjeux libyens de l'après Khadafi.
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Un insupportable verbiage pseudo-intellectuel où l'on apprend rien ni sur le faits ni sur l'auteur (le journaliste). La confusion la plus totale où tout est mêlée (Libye et Chili !?!). le seul point intéressant est la mise au point historique à la fin du volume par un autre auteur.
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