AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782364681811
528 pages
Editions du sous-sol (02/03/2017)
3.77/5   311 notes
Résumé :
Le surf ressemble à un sport, un passe-temps. Pour ses initiés, c'est bien plus : une addiction merveilleuse, une initiation exigeante, un art de vivre.
Elevé en Californie et à Hawaï, William Finnegan a commencé le surf enfant. Après l'université, il a traqué les vagues aux quatre coins du monde, errant des îles Fidji à l'Indonésie, des plages bondées de Los Angeles aux déserts australiens, des townships de Johannesburg aux falaises de l'île de Madère.
>Voir plus
Que lire après Jours barbaresVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (58) Voir plus Ajouter une critique
3,77

sur 311 notes
De spots en breaks, William Finnegan nous entraîne sur la vague. Entre réminiscences “surfesque” et carrière journalistique autour du monde, la quête du meilleur ride porte des atours quasi mystiques.

Malheureusement, l'auteur finira par me noyer, car même s'il n'est pas nécessaire d'être un passionné de ce sport, il faut quand même être motivé.

Dommage, car je pense malgré tout que ce livre est plein de qualités. Ce n'était peut-être pas le bon moment...

Abandonné en juillet 2018.
Commenter  J’apprécie          9911
Une magnifique odyssée, un road movie épique du surf, voilà dans quoi nous plonge cette autobiographie d'un passionné, addict à la vague d'exception et au spot isolé. Difficile de ne pas penser à Kerouac tant l'esprit qui y souffle rappelle l'épopée des beatniks une bonne partie, même si l'on y croise plus souvent des beach bums, ces marginaux des plages océaniques.

De la Californie à l'Afrique du Sud en passant par l'Indonésie, Hawaï, la Thaïlande, l'Australie ou les iles Fidji, la bio de William Finnegan se déroule en suivant le fil de son obsession dévorante. Dès 10 ans il entrevoit ce jardin secret qui l'extrait du monde et des siens ; jeune adulte il laissera travail et compagne pour un périple à l'amitié tumultueuse dans le Pacifique Sud avec Bryan, tous deux en quête de la vague au sentiment d'immortalité ; enfin son séjour en Afrique du Sud ancrera sa vie dans une optique moins futile, plus politique et engagée.
L'on y croise quantité de vagues aux descriptions personnalisées et minutieuses, sources de sublimes « rides » ou de mémorables raclées. L'on y rencontre des surfeurs avides de plaisir égoïste capables de beaucoup pour la vague idéale, mais pas toujours d'entraide ou de respect. Un monde rebelle et ascétique, où la violence paraît consubstantielle à la puissance des vagues recherchées : « Les surfeurs appellent cette puissance le juice – le jus – et, quand les vagues deviennent sérieuses, le juice devient l'élément critique, l'essence même de ce que nous sommes venus chercher pour nous mettre à l'épreuve – tantôt en l'affrontant avec témérité, tantôt en l'évitant avec lâcheté. Ma propre relation avec cette quintessence, cette dose de violence pure, s'est faite plus vivace avec le temps. »

Loin d'être un manifeste exclusif pour le surf qui sombrerait dans le rébarbatif de technicité ou d'aveuglement prosélyte, c'est avant tout un superbe texte dense et exigeant, à la saveur littéraire avant d'être sportive, où il est aussi question de voyage, de sens de la vie, de famille ou de société. Le jargon du surfeur est certes bien là aussi, impossible en effet d'échapper aux takeoff, ride, lineup et autres subtilités du vocabulaire adéquat. Mais un glossaire retenu par un marque-page peut faire l'affaire, tandis que le talent et le souffle de conteur de William Finnegan s'occupent du reste.
Un auteur par ailleurs reconnu grand reporter, amateur diplômé de littérature, enclin tout au long du récit à discuter livres et auteurs, écrivant déjà des romans jeune adulte. Surf et littérature, ou quand une passion semble au final en cacher une autre.


« Se trouver au milieu des grosses vagues a un côté onirique. Terreur et extase rodent toutes deux ensemble, menaçant de submerger le rêveur. Une splendeur surnaturelle émane de la vaste arène d'eau mouvante, de ciel, d'une violence latente et explosions bien trop réelles. Ces scènes qui s'offrent à vous semblent déjà mythiques alors même qu'elles se déploient. Je suis toujours la proie d'une ambivalence féroce : j'aimerais être n'importe où ailleurs à cet instant et, en même temps, je n'aspire qu'à être ici.»
Commenter  J’apprécie          738
Prix Pulitzer 2016
William Finnegan, journaliste et surfeur, grand reporter au « New Yorker », remporte le prix Pulitzer en 2016 avec son roman « Jours Barbares ». Il raconte sa jeunesse passée entre deux vagues, élevé sous le soleil des plus belles plages du monde et sur les meilleurs spots de surf. Une vie d'homme libre, consacrée à ses passions, la vague qui l'emportera loin en état d'apesanteur et la page blanche sur laquelle il ne cessera d'écrire.
Les « Jours Barbares » décrit cette lutte sans merci entre l'élément liquide et l'homme, une lutte à la vie, à la mort. Il s'agit d'une guerre impitoyable pour atteindre la trajectoire idéale, cet état de grâce où la planche flotte entre deux immensités, celle du ciel et celle de l'océan.
Le personnage principal de ce roman est la vague. William Finnegan écrit à ce propos : « Un mot à propos de cette détermination des vagues à vous nuire : pour la plupart des surfeurs – en tout cas à mes yeux -, elles sont d'une effroyable dualité. Quand on s'emploie obstinément à les surfer, elles ont l'air d'être vivantes. Chacune a sa personnalité, compliquée et bien distincte, et est sujette à de rapides changements d'humeur, auxquels il faut réagir le plus intuitivement, voir intimement possible – trop de gens ont assimilé l'acte de prendre une vague à celui de faire l'amour. Et pourtant, les vagues ne sont ni vivantes ni conscientes, et l'amante que vous vous apprêtez à étreindre peut brusquement devenir assassine. Ça n'a rien de personnel. La vague mortelle qui vient d'elle-même s'éventrer sur la barre intérieur ne cherche pas à vous nuire. le croire est un anthropomorphisme instinctif. L'amour avec une vague est une rue à sens unique. »
Les « Jours Barbares » est aussi le roman de cette période bénie où la Beat Génération s'épanouit à travers les Etats-Unis et envahit le monde entier. Culture des substances hallucinogènes qui propulsent vers des voyages trans-dimensionnels, culte de la liberté afin de s'extraire du carcan de la société bourgeoise moralisatrice, l'auteur décide de rejeter un système : études-mariage-enfants-travail-carrière. Il substitut un plan bien établi pour son propre plan : faire le tour du monde des meilleurs spots de surf et en découvrir de nouveaux. Mais quelle courageuse inconscience. Incroyable force de caractère pour laisser le chant monétaire des sirènes de l'argent au profit de sa passion, trouver le ride, faire le drop et être un Dieu parmi les Dieux.
Ce roman est non seulement un ouvrage sur le surf avec tous les détails techniques que le néophyte appréciera, mais c'est aussi un essai sur la philosophie du surfeur, le sacrifice de sa vie qu'il voue à sa passion et une vision personnelle de la vie qui s'ouvre à 360°, une formidable leçon de vie.
Le surf n'est pas un sport comme les autres, ni un loisir, ni une activité d'extérieur, c'est une religion, beaucoup de pratiquants, peu d'élus.
Traduction de Frank Reichert.
Editions du sous-sol, 520 pages.
Commenter  J’apprécie          644
Merik, si je te remercie aujourd'hui pour ton billet qui m'a donné plus qu'envie de surfer les pages de « Jours barbares », je t'ai aussi gentiment maudit. Dès la fin de la lecture de ton ressenti, j'ai commandé le bouquin avant de constater que… putain, 500 pages !!!!!! Mon premier pavé. 500 ça en fera sourire certains mais de mon coté c'est trop. C'est trop sauf que William Finnegan, l'océan, le surf, ça fait passer le temps sans qu'on s'en aperçoive.

Ce bouquin est le bouquin d'une partie des mes fantasmes. Pas difficile de me contenter, l'océan, des vagues et je baigne dans le luxe mais là il y a ce petit plus qui fait toucher du bout des doigts le rêve.
Mon rêve de parisien qui tentait de tenir sur sa planche et de se prendre pour Tom Curren, comme un gamin entre dans la peau de Messi à chaque récré, cinq semaines par an et dès qu'il avait un week end de trois jours pour descendre dans les Landes à Hossegor. Un rêve entretenu tout au long de l'année à travers Surf Session, Surfer's Journal, quelques VHS (oui c'était au siècle dernier… déjà) et puis le film, The endless summer.
Jours barbares c'est un peu The endless summer, deux potes en quête de la vague à travers le monde. Une vie hors système, hors contraintes et une idée fixe qui ferait la joie de n'importe quel psychiatre, bref, une philosophie de vie que j'aurais probablement adopté si j'avais vu le jour près de l'océan ou si j'avais passé mon enfance à Hawaï comme Finnegan. Vu comme ça, certains diront peut être que c'est une vie de branleur. Je répondrai juste que je souhaite à tout le monde ce genre de pratique c'est-à-dire de vivre sa passion sans limites (encore un truc à ne pas oublier dans ma prochaine vie…).
Finnegan nous plonge dans une Amérique de la fin des années 50, celle de son enfance, à Hawaï plus précisément. Ambiance Happy Days sur fond de Beach Boys. Rien pour me faire vibrer en apparence sauf que le gamin Finnegan va découvrir un truc pas possible que font les locaux, le surf.
Enfant, ado, adulte, l'auteur nous conte l'évolution du surf et de cet esprit à travers son expérience. Une expérience qui le mènera sur tous les océans du monde pour chercher la vague parfaite, le spot inconnu et désert. Une expérience qui lui fera découvrir le monde et le fera s'engager et témoigner contre l'apartheid en Afrique du sud, écrire, devenir journaliste, militant et « branleur de surfeur » pour les gens comme il faut.
Ce bouquin est une ode au surf mais pas que. Certains travers de cet esprit ne sont pas éludés parce qu'au pays de Candy tout n'est pas si rose. Une vague c'est comme un coin à champignons, ça ne se partage pas, on se la garde. Faut dire que certains spots ressemblent au périph un mardi de novembre vers 18h sous la pluie et que pour prendre une vague il faut être patient et attendre son tour (vous êtes le numéro 56 dans la file d'attente) soit être inconscient (un con chiant) et griller la priorité à tout le monde ce qui est quasi une déclaration de guerre aux autres surfeurs. La vague c'est un plaisir solitaire, un truc de branleur quoi. Et merde…
Pas facile non plus dans le milieu, d'arriver dans un endroit nouveau. Faut se faire accepter par les locaux. Il faut du temps, il faut les bluffer sur leur terrain.
A première vue le surfeur n'est qu'un abruti, égoïste le nez dans le guidon mais pas que. La solidarité prend tout son sens quand quelqu'un a un problème à l'eau. Et puis les heures passées à observer l'océan, les séries de vagues, cette communion avec la nature, cette connaissance de la météo et de ses effets à venir, font de lui un mec plus réfléchi qu'il n'y parait.
Et puis cette image du blond bodybuildé bronzé paradant sur la plage prend une bonne claque avec ce bouquin pendant des sessions sous le gris, sous la pluie quand la houle chasse le baigneur. le genre de tête à tête avec la passion qui pousse à l'humilité et fait ressentir parfois la fragilité d'une vie.
Quel pied que ce périple nous menant d'Hawaï à Madère en passant par les Fidji, la Californie, l'Afrique du sud et le mythique Jeffreys Bay, Bali, New York (je n'imaginais pas qu'il y avait des spots dans le coin), l'Indonésie, l'Australie, les Philippines.
Tout au long des pages, l'océan bouscule. Une caresse par ici une claque mémorable par là, je t'aime moi non plus dans toute sa splendeur. Quelques pauses parce qu'avec le temps tout est fait pour te faire rentrer dans le moule et puis qu'il faut bien financer les voyages et puis la famille, la vie, enfin tout un tas de choses qui brident une certaine liberté. Faudrait pas vieillir…

Un livre à ne pas mettre entre toutes les mains car même si le surf vous tente, j'avoue qu'une grande partie de chaque chapitre peut perdre et lasser le lecteur avec tous les termes (glossaire en fin de livre) et descriptions de vagues.
Commenter  J’apprécie          5311
Ce que j'ai ressenti:… Screamer de coup de coeur…

« Les surfeurs sont des fétichistes de la perfection. »

Imaginez… Fermez les yeux… Et laissez la Vague Finnegan vous emporter…Il n'est lecture plus immersive, tempétueuse, dangereuse, mais aussi, plus follement addictive et sensationnelle…Du moment, où tu ouvres ces pages, tes pieds se posent sur la planche de surf de ce jeune gamin, et elle t'envoie dans les tourments de l'océan, te valdingue dans les déchaînements du temps, te transportent au delà des continents…Tu retiens ta respiration, tu vibres d'une fureur fébrile, tu ressens un vent de liberté, tu t'en prends plein la vue…Un voyage à l'intérieur des tubes et une splendeur extérieure à couper le souffle, racontés au rythme du reflux d'une vie épanouie, au contact de la mer…Génialissime!

« A l'instar des roses ou des diamants, les vagues sont des objets immuables de la nature. »

Tout l'enchantement de cette lecture tient à cette force d'écriture, au pouvoir incroyable qui te rend palpable toutes les sensations de ce sport exigeant. Même vertigineuses, ses descriptions sont époustouflantes! William Finnegan rend fabuleuses ses mémoires, avec cette passion de tous les dangers, cette invitation au voyage, cette petite porte ouverte pour comprendre cette envie démentielle de se confronter toujours, aux forces maritimes de la nature. Dans le ride, l'émerveillement , au top-turn, l'adrénaline, au Pull-out, la douleur...On fait le tour des émotions de ses hommes qui n'ont pas peur de se mouiller, qui osent défier les lois de la gravité avec leurs planches sur des hauteurs instables, qui affrontent vents et marées…Plus de 500 pages, pour saisir toute l'immensité d'une addiction aux chocs des vagues…

« le nouvel idéal émergeant était la solitude, la pureté, la perfection des vagues, loin de la civilisation.(…) C'était une piste qui nous éloignait de la citoyenneté au sens archaïque du terme, pour nous conduire vers une frontière à demi effacée où nous pourrions vivre comme des barbares de la fin des temps. »

Journaliste de guerre, nous avons presque en vision trouble, le théâtre des pires conflits mondiaux cachés derrière ses lignes. On devine la violence, elle est là, sous-jacente, mais l'auteur décide de nous parler que de beauté. C'est un homme avant tout, qui se frotte au danger, autant dans son métier que dans sa passion : il a comme une urgence dans sa manière de vivre, il a en lui, une fureur tranquille à louvoyer aux quatre coins du monde et affronter les aléas de la vie. Chaque vague se teinte du panorama d'une ville, chaque article s'empreinte des larmes versées, mais toujours le plaisir salvateur de la glisse…C'est un fascinant tour de force que de rendre ses océans démontés, un lieu de rendez-vous d'amitié et de félicité…

« On ne peut que haïr la façon dont le monde tourne. »

C'est une lecture qui ouvre sur le monde, ses joyaux et ses atrocités. Un récit de vie intense et mouvementé…Un roman qui te tient éveillé la nuit, et qui t'attire irrésistiblement vers les flots, le jour. L'appel du large devient violent et libérateur…Jours Barbares est un coup de coeur!

« L'enchantement me porterait là où il voudrait. »

Petit plus: Merci pour le glossaire du surf à la fin!

Ma note Plaisir de Lecture 10/10

Lien : https://fairystelphique.word..
Commenter  J’apprécie          6011


critiques presse (5)
Bibliobs
23 août 2017
Dans "Jours barbares", le journaliste américain raconte sa passion pour la glisse. Un récit autobiographique couronné du Pulitzer.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
LeFigaro
16 juin 2017
Prix Pulitzer, le journaliste raconte une vie placée sous le signe du surf.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Lexpress
12 juin 2017
Les Jours barbares de William Finnegan brossent le portrait d'un homme insoumis, à la fureur tranquille, qui parvient à transformer son obsession de la Vague en une indestructible boussole.
Lire la critique sur le site : Lexpress
LeMonde
26 mai 2017
En écrivant Jours barbares, qui retrace sa vie par le prisme de cette obsession, et lui a valu le prix Pulitzer de l’autobiographie en 2016, William Finnegan livre ainsi les mémoires d’un addict. Les confessions, non d’un mangeur d’opium anglais, mais d’un boulimique de vagues américain.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LaLibreBelgique
04 avril 2017
En retraçant sa vie de surfeur, William Finnegan dépeint une formidable épopée humaine menée à contre-courant. Quand toutes les réponses sont dans l’océan.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
Citations et extraits (48) Voir plus Ajouter une citation
Dans l'ancienne Hawaï, avant l'arrivée des Européens, le surf avait un caractère religieux. Après les prières et les offrandes, les maîtres artisans confectionnaient des planches dans le bois d'arbres sacrés, koas ou wiliwilis. Les prêtres bénissaient la houle, cinglaient l'eau de lianes pour la faire lever, et sur la plage de certains breaks se dressait un heiau (un temple) où les dévots pouvaient aller prier pour appeler quelques belles vagues. Cette conscience spirituelle n'excluait pas, apparemment, une rude compétition, ni même tout un système de paris. Selon les historiens Peter Westwick et Peter Neushul, « un concours entre des champions de Maui et d'Oahu comportait un prix de quatre cents cochons et de seize canoës de guerre ». Hommes et femmes, jeunes et vieux, rois et roturiers, tous surfaient. Quand les vagues étaient bonnes, « toute idée de travail s'évanouissait, ne restait que celle du sport », écrivait Kepelino Keauokalani, un universitaire du XIXe siècle. La journée entière était consacrée au surf. Nombreux étaient ceux qui sortaient en mer des quatre heure du matin. En d'autres termes, les anciens Hawaïens souffraient d'une fièvre du surf carabinée. Ils avaient aussi beaucoup de loisirs. Les îles bénéficiaient d'un gros surplus de vivres; leurs habitants n'étaient pas seulement d'habiles pêcheurs, chasseurs et cultivateurs de terrasses, mais ils construisaient aussi et géraient des systèmes sophistiqués de bassins de poissons. Leur festival hivernal des moissons durait trois mois, durant lesquels la pratique du surf triomphait fréquemment et où le travail était officiellement interdit.

Ce n’était sans doute pas le mode de vie que les missionnaires calvinistes avaient en tête pour les insulaires. Ils commencèrent d’arriver en 1820. Hiram Bingham, qui menait leur première mission et se retrouva au beau milieu d’une foule de surfeurs avant même de débarquer, écrivait que « la dissolution, l’avilissement et la barbarie manifestes qui régnaient au sein de ces sauvages bavards et presque nus, dont ni les pieds ni les mains, ni la majeure partie de la peau basanée et brûlée par le soleil n’étaient couverts, étaient effroyables. Certains d’entre nous se sont détournés de ce spectacle en pleurant à chaudes larmes. » Vingt ans plus tard, Bingham ajoutait : « Le déclin et l’arrêt définitif du surf, à mesure que la civilisation se répand, peut s’expliquer par les progrès de la pudeur, de l’industrie et de la religion ». S’agissant du déclin du surf, il ne se trompait pas. La culture hawaïenne avait été détruite et la population décimée par les maladies infectieuses venues d’Europe : entre 1778 et 1893, la population d’Hawaï, estimée au départ à huit cent mille âmes, s’était réduite à quarante mille. Et vers la fin du dix neuvième siècle, le surf avait entièrement disparu.
Commenter  J’apprécie          261
Se trouver au milieu de grosses vagues a un coté onirique. Terreur et extase rodent toutes deux ensemble, menaçant de submerger le rêveur. Une splendeur surnaturelle émane de la vaste arène d'eau mouvante, de ciel, d'une violence latente et explosions bien trop réelles. Ces scènes qui s'offrent à vous semblent déjà mythiques alors même qu'elles se déploient. Je suis toujours la proie d'une ambivalence féroce: j'aimerais être n'importe où ailleurs à cet instant et, en même temps, je n'aspire qu'à être ici. Les grosses vagues ("grosses" est un terme relatif, celles dont j'estime qu'elles mettent ma vie en danger, sachant que le quidam d'à coté les trouvera peut être parfaitement surfables) sont un champ de forces qui vous fait vous sentir tout petit, et auquel on ne survit qu'en décryptant soigneusement et distinctement celles qui l'agitent. Mais l'extase que procure les grosses vagues que l'on surfe, exige aussi qu'on mette de coté la terreur, la peur d'être submergé: le filament qui sépare ces deux états d'esprit devient soudain ténu, diaphane. La chance pure pèse lourdement, cruellement, dans la balance. Quand ça tourne mal, ce qui arrive inéluctablement, l'adresse, la vigueur et la jugeote paraissent inutiles. Nul ne saurait conserver sa dignité lorsqu'il se fait retourner par une grosse vague. On ne peut espérer maitriser qu'une seule chose: sa panique.
Commenter  J’apprécie          281
"Non, je veux juste refaire Madère" (…)
Je disposais en fait de très bons arguments en faveur de cet éternel retour. Dont l'exceptionnelle qualité des vagues et leur aspect singulièrement effrayant, totalement différent de toutes celles que nous avions surfées l'un et l'autre jusque là. Et ce n'est pas comme si elles étaient désormais faciles à surfer, comme si nous avions surmonté les nombreux défis qu'elles présentaient. Loin de là. En plus, Madère commençait à acquérir une grande célébrité dans le monde du surf. Elle était un peu plus envahie chaque année. Elle serait donc bientôt frelatée, surpeuplée, à l'instar de Bali et de dizaines de Mecques du surf. On parlait déjà d'organiser à Jardim des concours de grosses vagues sponsorisés par des multinationales, avec un gros prix à la clé. Je voyais tous ces signes, j'entendais tous ces bruits de couloir avec une terreur grandissante. C'était maintenant qu'il fallait la surfer, avant qu'elle ne devienne un enfer.
Commenter  J’apprécie          262
Le surf a toujours eu pour horizon cette ligne tracée par la peur, qui le rend différent de tant de choses et, en tous cas, de tous les autres sports de ma connaissance. On peut sans doute le pratiquer avec des amis, mais, quand les vagues se font trop grosses ou qu’on a des ennuis, on ne trouve plus personne.

Page 34, Points, 2018.
Commenter  J’apprécie          580
Les vagues sont le terrain de jeu. Le but ultime. L’objet de vos désirs et de votre plus profonde vénération. En même temps, elles sont votre adversaire, votre Némésis, voire votre plus mortel ennemi.

Page 34, Points, 2018.
Commenter  J’apprécie          520

Videos de William Finnegan (7) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de William Finnegan
William Finnegan, lauréat du Prix Pulitzer en 2016 avec "Jours barbares", revient avec une adaptation illustrée de son chef d'oeuvre, en collaboration avec AJ Dungo, lui-même lauréat du Prix BD Fnac France Inter 2020 pour son roman graphique "In Waves". Une nouvelle façon de découvrir cette oeuvre profonde, qui aborde une vie remplie de voyages et de contemplations, entre apprentissage rigoureux d'un sport exigeant et quête obsessionnelle de la plus belle vague.
Pour cette Claque Interview, William Finnegan nour parle du processus qui l'a amené à rencontrer AJ Dungo et à collaborer avec le dessinateur. Il nous livre aussi sa vision de l'adaptation, le rapport de sa génération au surf, de la manière d'aborder la frustration dans son oeuvre. L'auteur se montre particulièrement prolixe.
Découvrez la version collector de "Jours barbares" sur Fnac.com : https://livre.fnac.com/a16111711/William-Finnegan-Jours-barbares-Collector
Et toutes les vidéos de la Claque Fnac sur L'Éclaireur Fnac : https://leclaireur.fnac.com/categorie/la-claque-fnac
Retrouvez-nous sur Facebook @Fnac : https://facebook.com/Fnac Instagram @fnac_officiel : https://www.instagram.com/fnac_officiel Twitter @fnac : https://twitter.com/fnac
#LEclaireurFnac #William Finnegan #JoursBarbares #AJDungo #RDVFnac #Pulitzer #Surf #RDVFnac
+ Lire la suite
autres livres classés : surfVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus

Autres livres de William Finnegan (1) Voir plus

Lecteurs (768) Voir plus



Quiz Voir plus

Les écrivains et le suicide

En 1941, cette immense écrivaine, pensant devenir folle, va se jeter dans une rivière les poches pleine de pierres. Avant de mourir, elle écrit à son mari une lettre où elle dit prendre la meilleure décision qui soit.

Virginia Woolf
Marguerite Duras
Sylvia Plath
Victoria Ocampo

8 questions
1709 lecteurs ont répondu
Thèmes : suicide , biographie , littératureCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..