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Jacqueline Remillet (Traducteur)
EAN : 9782221110508
434 pages
Robert Laffont (16/01/2008)
3.45/5   75 notes
Résumé :
Accordez-moi cette valse est un roman autobiographique dans lequel Zelda Fitzgerald a transposé sa vision toute personnelle de son mariage avec Scott Fitzgerald. Elle y apparaît elle-même sous le nom, à peine voilé, d'Alabama Beggs, incarnation de ces belles du Sud dont elle était une parfaite représentante. Son mari y figure, lui, sous le nom de David Knight. Écrit en "six furieuses semaines", le manuscrit fut accepté d'emblée par Maxwell Perkins, le propre éditeur... >Voir plus
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On dirait qu'il y a plus de choses à dire autour du roman que sur le roman lui-même, tant les circonstances de son écriture et de sa publication forment une véritable matière, alors que le récit de fiction ne recèle pas d'extraordinaires qualités.

Cette autobiographie à peine déguisée (quoique magnifiée à certains endroits) relate la rencontre du célébrissime couple Fitzgerald, jusqu'à la décision de Zelda d'abandonner la danse. On est donc loin d'avoir là un témoignage complet de la vie de Zelda, d'autant que ses moments de crise et ses différentes périodes d'internement en hôpital psychiatrique sont éludés. Or le roman a justement été écrit pendant une période d'internement, et Zelda fut encouragée par un de ses médecins à écrire, à des fins thérapeutiques. On ne sait si cette forme d'art-thérapie fonctionna réellement, Scott ayant piqué une véritable colère en apprenant que Zelda écrivait sur sa propre vie : car lui-même, qui avait toujours fait de Zelda et de leur vie commune son sujet principal, la matière première de sa littérature, ne supportait guère, bizarrement, qu'elle se les approprie également... le fait que le propre éditeur de Scott avait accepté de publier le roman de Zelda n'avait évidemment pas arrangé les choses. Mais surtout, Scott travaillait sur Tendre est la nuit depuis longtemps et voyait (à mon avis, à tort) le roman de Zelda comme un oeuvre rivale, voire comme un affront. Scott se fit donc un devoir de dire à Zelda que son roman était nul et de la faire retravailler tout le texte. Il l'aurait apparemment poussée à supprimer des passages (peut-être est-ce pour cela que tout ce qui relève des internements est passé sous silence, je ne sais pas). On sait en revanche qu'il est compliqué de trancher à propos de ce que les époux Fitzgerald ont écrit à deux mains ou pas, à propos de ce qui est de Zelda uniquement ou de ce qui revient à tous deux. Ici, je dirais que peu importe pour le lecteur (mais pas pour l'historien de la littérature, évidemment). Il ne semble pas que Scott ait massacré un roman qui, tel qu'il se présente actuellement à nos yeux, n'offre pas un grand intérêt littéraire.

Zelda y relate la relation de couple compliquée qui fut la leur. Si le début - la rencontre - se lit aisément, dès la période du voyage de noces, les anecdotes sur leur vie commune s'amoncellent et deviennent très vite ennuyeuses. On ne peut pas dire que l'expérience personnelle ait été transcendée par l'écriture, loin de là. Je sauverai tout de même la troisième partie, celle sur la danse. Zelda se décida à étudier la danse très tardivement dans sa vie, décidée à devenir professionnelle, ce qui était une voie de garage. C'est sans doute cette période qu'elle relate avec le plus de sentiment, de verve, et qu'elle y déploie par courts instants un style qui aurait demandé à être exploité autrement, peut-être dans des poèmes. La décision de Zelda d'abandonner la danse y est très dramatisée, présentée comme inéluctable et due à des blessures, ce qui est assez différent de ce qui se passa réellement, puisque Zelda, tout de même engagée dans une petite compagnie, finit par décliner l'offre. Mais c'est justement parce que la version romancée est différente qu'on peut un tant soit peu comprendre que ce fut une grande douleur pour elle, ainsi que toucher du doigt le grand drame de sa vie, qui fut probablement de ne jamais trouver à exploiter son potentiel créatif, qui comportait pourtant bien des facettes.

Je conseillerai donc Accordez-moi cette valse uniquement aux personnes qui intéressent de très près à Zelda Fitzgerald, même s'ils n'y apprendront peut-être pas grand-chose . Ce qui reste de plus intéressant dans son écriture, ce sont à mon sens sa correspondance (du moins ce que j'en ai lu), où elle déploie par moments un talent poétique et sombre loin d'être égalé dans son roman. Malheureusement, on n'a publié en France que quelques une des ses lettres insérées dans la correspondance de son mari. Je ne sais pas si elles ont jamais été publiées pour elles-mêmes aux États-Unis.
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Ou “Ô mon Dieu…accordez-moi cette valse” car ce n'est pas à un soupirant que s'adresse le titre de Zelda mais plutôt à Dieu ou à Diable afin qu'il lui permette de pouvoir danser encore et encore, de martyriser son corps dompté un temps par et pour la danse.

Dans une prose excessivement imagée, Zelda Fitzgerald nous livre ici quelques “fragments” de sa vie avant de retourner à la folie qui l'a détruite… Mais je l'ai trouvé bien édulcoré par rapport à ce que j'ai déjà lu de la vie de ce couple auparavant. D'ailleurs la postface de Matthew J. Bruccoli, de 1968, contributeur à la version actuelle le souligne clairement : ” le premier manuscrit de ce roman n'a pas été conservé, et il semble qu'il ait été un document infiniment plus personnel que la version finalement publiée – c'est-à-dire que le manuscrit original relatait de façon beaucoup plus transparente le point de vue de Zelda sur leur mariage sensationnel et les causes de son échec”. Certes, il n'a eu aucun succès à sortie en 1932, mais il en a depuis les années 1960 jusqu'à maintenant et les “accros” de Fitzgerald sont prêts à explorer tous les chemins qui mènent à lui (et à son oeuvre). Or, Zelda en a été l'axe principal…avec l'alcool, tout le monde le sait.

Divisé en quatre chapitres, ce livre nous retrace la vie d'Alabama Kgnith, née Alabama Beggs qui a grandi dans une famille heureuse malgré la rigidité froide et compassée de son père, le Juge… Dernière d'une fratrie de trois filles, un garçon est mort quelques années auparavant, sa mère lui cède volontiers ses caprices et son père ferme les yeux tant qu'il n'est pas demandé… Elle va immédiatement tomber amoureuse de David Knight (Scott Fitzgerald) lors de leur rencontre au Country Club de Montgomery (Alabama). Scott est alors beau lieutenant de réserve au moment de la démobilisation de 1918 et surtout fraîchement émoulu de West Point. Il repart à New-York mais lui demande de le rejoindre pour l'épouser à New-York. Sa mère l'aidera à préparer sa robe de mariée.

En 1920, Scott est célèbre grâce à L'Envers du Paradis, son premier roman. Dans “Accordez-moi cette valse” il est peintre… Leur folle vie à New-York de party en party, des soirées arrosées dont elle parle ici finalement très peu, Scott n'est pas souvent ivre, elle encore moins. Elle a conscience qu'ils viennent à eux deux de créer la dynastie “des enfants du Jazz”, mais elle nous parle surtout de leurs sorties, des stars de cinéma qui sortent de l'ombre et deviennent à leur tour des célébrités (Charlie Chaplin, Maryline Miller,..). Elle accouche (très vite) de Bonnie (Scottie, leur fille unique) en 1921. Puis vient le voyage (version épouvantable) pour la France où leur paquebot essuie une terrible tempête pendant la traversée, elle sera malade (pas vraiment glam') tout du long pratiquement et en garde un souvenir “mitigé” : beaucoup de beuveries avant la tempête et le reste du temps dans sa cabine, ah si, elle se souvient qu'il s'agissait du Pont G, cabines 35 et 37. Après avoir passé quelques mois à Paris, dans les bars des grands hôtels ou chez les américains exilés pour cause de Prohibition (après ce sera la récession) ils louent une somptueuse villa à Saint-Raphaël pour que David puisse peindre. le temps d'un été elle va rencontrer un aviateur français beau comme un dieu, mais là encore, si on sent déjà la faille dans le couple, elle nous présente cette aventure comme un flirt, bien que certains passages eux, révèlent à quel point le coup de foudre fut immédiat et leur passion inéluctable : ” Elle avait l'impression qu'elle aurait aimé embrasser Jacques au sommet de l'Arc de Triomphe. Embrasser cet étranger vêtu de blanc, c'eût été sacrifier à un rite religieux oublié, ou presque.”

David est furieux (quand même), et dès l'automne ils regagnent Paris qui lui semble si grise, si triste qu'elle va, après s'être assurée que son mari s'amusait bien, se lancer (à 28 ans dans la vraie vie) dans une carrière de danseuse classique. Elle met trois ans à pouvoir jouer un ballet avec un rôle de première ballerine (en Italie). Entre temps, David a déménagé en Suisse (pas de raisons données dans le livre) avec Bonnie, elle a commencé à prendre des tranquillisants mais ne nous dit absolument pas pourquoi ou si peu : ” Alabama prenait le sédatif jaune le soir pour oublier les lettres de Bonnie” : seulement pour déculpabiliser de s'occuper si peu de sa fille ? le livre se termine sur la mort de son père, sur le temps qui passe et laisse autant de regrets, sinon plus depuis qu'elle se sent une femme “mûre” (à 32 ans, pas de quoi paniquer !).

Cette autobiographie déguisée et romancée fait la part belle à Scott qui nous est présenté en père modèle, en homme sobre qui ne s'énivre qu'aux party (elles étaient nombreuses il faut dire), au train de vie fastueux qu'ils ont entretenu à cette époque, aux affres de la vie de couple mais du point de vue de l'enfant gâtée qui doit se “dédoubler” pour apprendre à vivre dans l'ombre d'un homme vénéré de part le monde et à la danse… qui a occupé ses jours et ses nuits pendant trois ans environ, la coupant de sa vie de famille : “Elle travaillait jusqu'au moment où elle se sentait comme un cheval éventré par les cornes du taureau dans l'arène et piétinant ses entrailles”. Mais David venait la voir à l'atelier où elle répétait (ce n'était pas l'Opéra !), pendant que Bonnie, adorable enfant éveillée, accompagnée de sa nurse anglaise ou française grandissait sagement à l'ombre de ces deux monstres…sacrés !

D'ailleurs, s'il est évident que Scott a fait des modifications dans le manuscrit, ils avaient tous deux compris l'importance de l'impact qu'ils laisseraient à la postérité et surtout ils avaient à coeur de laisser à leur fille un héritage brillant, comme en témoigne ce passage :

“- Alors, la règle du jeu est de faire cadrer les choses ensemble de façon que lorsque Bonnie aura notre âge (32 et 36 ans) et étudiera notre vie, elle puisse y trouver la belle mosaïque harmonieuse de deux dieux de marbre. En contemplant cette vision, elle se sentira personnellement moins frustrée, d'autant qu'à une certaine période de sa vie elle aura été forcée de sacrifier son désir de pillage, pour protéger ce qu'elle croit être le trésor que nous lui avons légué. Cela lui permettra de croire que son insatisfaction ne durera pas.”

Alors certes, comme chez son époux, il y est beaucoup question de crépuscules, du bonheur qui s'enfuit à peine trouvé, d'ailleurs l'a-t-elle jamais connu ? En dehors de son enfance, de sa première année de mariage et de Jozan, le bel aviateur français… ” La génération adulte est toujours celle qui est privée du réconfort d'avoir des gens qui se penchent sur elle“. Mais ce livre mérite d'être lu malgré un style très imagé, à la limite de l'incompréhension parfois. On y sent battre le coeur d'une femme blessée qui portait sur ce qui l'entourait un regard exacerbé, comme sa sensibilité, avait un humour parfois cinglant et qui aurait voulu que la passion et l'insouciance de l'extrême jeunesse soient les premiers rôles de son existence théâtrale. J'ai aimé ce livre malgré ses défauts, il a aussi des qualités et on ne peut qu'éprouver de la tendresse au final pour Zelda qui a passé la moitié de sa vie à en comprendre l'autre moitié. Elle n'aurait pas dû avoir d'ombre qui la suive et vivre à midi ou à minuit… Mais les témoins de cette époque ont tous disparu aujourd'hui , nous ne saurons jamais vraiment où a commencé la folie et où l'amour a cessé de battre.

SUR ZELDA (et qui n'est pas dit dans ce livre), ci-dessus, ce que la presse américaine de l'époque en pensait… Elle a publié des nouvelles avec son illustre époux.

Zelda Fitzgerald née Sayre est née en 1900 à Montgomery (Alabama). Son père était juge, son grand-père sénateur. Elle a défrayé la chronique plusieurs fois : en étant élue Miss Alabama à 16 ans, puis en épousant Scott en 1920, il en avait 23 ! Son alcoolisme à lui et sa folie à elle, (qualifiée de schizophrénie) ont eu raison de leur couple, mais ils se sont écrits juqu'à la fin des lettres d'une tendresse incroyable, lire Zelda de Jacques Tournier. Elle a écrit ce livre en 1932 en trois semaines lors de son second séjour en clinique psychiatrique (et à Montgomery dans la maison de ses parents). Après, elle n'a plus jamais connu de vie normale, elle est morte Dans l'incendie de son pavillon hospitalier d'Ashville (Caroline du Nord), elle avait 48 ans. Elle écrivait paraît-il un second roman malgré son état de santé. Fitz était décédé huit ans plus tôt en 1940 d'un cancer.
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Zelda Sayre n'était probablement pas faite pour être la femme de F. S. Fitzgerald. J'ignore si elle a passé sa vie à se le dire... en tous cas elle a passé sa vie a se battre pour sortir de l'ombre, pour se réaliser, vivre pleinement sa destinée et cela suffit, à mon sens, et bien au-delà des frasques et du désespoir qui ont marqué sa vie, à la rendre remarquable. Zelda est une Femme avec un F majuscule, jamais abattue, toujours prête à relever le défi de sa vie. J'ignore si elle a un jour eu le sentiment d'y être parvenue (j'en doute) et sa fin tragique laisse penser que l'insatisfaction ne l'a jamais quittée. Mais le combat ne l'a pas quitté non plus. Elle s'est battue jusqu'au bout pour être la personne qu'elle a rêvé d'être. A t-elle passé sa vie dans un rêve ? A t-elle passé son temps à fuir la réalité ? Peut-être, mais c'est cela qui est fort et magnifique. J'aimerais avoir son courage, sa ténacité. Et même si ce courage et cette ténacité ont probablement participé à la faire sombrer dans la folie, je continuerai d'admirer pendant longtemps Zelda, sa force, son courage, sa beauté. L'hommage que j'essaie de lui rendre ici est certainement très maladroit et pas du tout à la hauteur de son talent, mais il vient du plus profond de mon coeur. Merci Madame, merci... Je vous respecterai éternellement pour avoir tout fait pour changer votre destin, et obstinément refusé ce que la vie se contentait de vous offrir. Avec mon plus profond respect.
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Dans son unique roman, apparemment écrit sous la colère de se voir reléguée aux oubliettes, l'auteur se recrée sous le nom d'Alabama, qu'elle suit religieusement et linéairement pendant douze ans, étrangère à elle-même. Son mari est peintre et non romancier, sa fille se nommera Bonnie, non Scottie. Manque de recul, de talent littéraire ou peur de se regarder en face ? Un peu des trois, j'imagine. Sous la plume de Zelda, la jeune femme apparaît une éternelle adolescente, une éternelle scandaleuse qui n'aura de cesse de prouver sa valeur, son labeur. La majorité du roman traite de la lutte acharnée d'Alabama pour devenir ballerine, malgré son âge, son mari, sa fille. Dans ses yeux, Paris 1920, ses princesses russes réduites aux cours de ballet, les parties éternelles d'américains désoeuvrés, la misère parfois ; dans son corps, les muscles douloureux, les petites mesquineries entre danseuses pauvres, l'incompréhension agacée de David, son époux. C'est une idée idiote, nous en conviendrons de vouloir danser Diaghilev à près de 30 ans, l'entêtement d'Alabama fait peine à voir, il ennuie un peu aussi car on sent bien qu'avoir dansé n'a pas suffi. Zelda a encore des choses à prouver, une présence à affirmer, même bien après. Mais à qui ? Aux yeux du monde ? de Scott ? Aux siens ? Il semblerait que l'entreprise ait échoué : Zelda n'a pas vraiment de voix. À la lecture du roman, on se demande s'il ne s'agit pas d'un manque de force, d'une sorte de vacuité innée qui la pousse à s'incarner à toute force dans le premier idéal venu. Alabama ne choisit pas la danse par amour de l'art – par goût de la contrition et du cilice à la barre, peut-être – mais parce qu'elle se souvient d'avoir été, adolescente, applaudie sur la scène de sa ville natale. Comme si danser conjurait le mauvais sort, effaçait le temps, rendait à la femme assez mal mariée l'adolescence dorée d'une jeune fille en vue. Et d'un bout à l'autre, Alabama expie. Un mariage qui fait la honte de ses parents, une fille qui reste étrangère, un époux qui l'oublie, et un amant surtout. Dans cette obsession même, Alabama reste une épouse. Insoumise, capricieuse, renaclante, certes, mais une propriété néanmoins. Pour autant, Accordez-moi cette valse n'est pas un roman lugubre, loin s'en faut. Zelda Fitzgerald est une plume incontestable, pourvue d'un véritable don pour la métaphore inattendue et le dialogue enlevé. Elle en use beaucoup, c'est un fait. « Glissez, mortels… » : Alabama et David ne se parlent pas, ils se donnent la réplique, virevoltent en rythme à la Fred et Ginger. C'est souvent drôle, un peu grave pas en-dessous, facilement oubliable. La fin du moment montre une Alabama réconciliée, un genre de grand espoir en plan large qui achève de décoller la fiction de la biographie. J'ignore dans quelle mesure le roman comble tout ce qui n'a pas été dans la vie de Zelda. Et je trouve que c'est une bien triste raison d'écrire un roman.
(Au passage, encore une preuve qu'il ne faut jamais se fier aux 4e de couverture. Celle-ci annonce « le portrait d'un homme doué qui s'autodétruit ». Très drôle. Il s'agit de sa femme, en fait, et visiblement elle n'aura même pas gagné le droit d'être reconnue comme l'héroïne de son propre roman.)
Lien : http://luluoffthebridge.blog..
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Roman autobiographique de Zelda Fitzgerald.

Alabama est la dernière fille du strict juge Austin Beggs et de son épouse Millie. Choyée et couvée à outrance, elle grandit dans un monde où chaque caprice lui est accordé. "Glaneuse d'enthousiasmes vagabonds, elle s'appropriait tout ce qui tombait à portée de sa main." (p. 27) Très jeune, elle vit l'amour par procuration en regardant ses aînées, Joan et Dixie, entrer dans le tourbillon des soupirants et des bals. Dans la moiteur, la touffeur et "l'apathie mélancolique du Sud" (p. 36), Alabama devient une Belle du Sud, jeune fille qui fait tourner les têtes des officiers américains qui vont et viennent lors du premier conflit mondial. "La guerre amenait dans la ville des tas d'hommes qui, sauterelles bienveillantes, s'attaquaient au fléau des filles sans mari qui avait frappé le Sud depuis son déclin économique. [...] Les filles tourbillonnaient de l'un à l'autre avec l'impulsion interne d'un cocon que l'on dévide." (p. 71) Alabama collectionne les insignes des officiers et flirte éhontément avec plusieurs hommes en même temps. L'officier David Knight parvient à ravir son coeur. David a des ambitions d'artiste et acquiert assez vite une renommée dans le monde de la peinture. Les époux Knight connaissent le succès mondain et l'arrivée de la petite Bonnie marque l'apothéose de ce couple amoureux idéal. L'argent leur brûle les doigts, file à toute allure en divertissements et accessoires. le couple s'échappe en Europe et les failles apparaissent. Alabama flirte avec un aviateur français et David se ronge de jalousie, alors qu'il a bien du mal à créer. "David était plus âgé qu'Alabama; il ne s'était jamais plus senti vraiment heureux depuis son premier succès." (p. 197) Malheureuse et délaissée, Zelda se lance à corps perdu dans la danse, elle veut devenir étoile de ballet. Elle s'acharne et plie son cors à une volonté plus grande que la douleur. le couple dérive, sombre. Ni Alabama ni David n'ont la force de le sauver.

Alabama/Zelda est une Scarlett O'Hara moderne. J'avais beaucoup aimé le texte de Gilles Leroy, Alabama Song et j'avais fondu en étudiant The Great Gatsby de John Scott Fitzgerald, qui romance également la rencontre entre une belle jeune fille riche et un officier issu d'un milieu modeste. le texte produit par Mrs Fitzgerald avait tout pour me plaire mais c'était sans compter le de l'auteure. La langue de Zelda est sinueuse, pâteuse et plonge le lecteur dans un état d'abrutissement dangeureux. Il m'a été très difficile de me concentrer dès la seconde partie du texte. Avec les premières jalousies et les premières rancoeurs, le texte devient épais et collant. Assister au théâtre de ce couple qui surjoue l'amour et tous les sentiments est pénible. La vie emphatique que mène les époux Knight/Fitzgerald se traduit par un ampoulé très indigeste.

Alabama est une jeune femme inconséquente, profondément malheureuse alors qu'elle sait tout avoir. le spectacle de la déchéance de son mariage et de la perte de ses illusions est douloureux. le texte s'achève sur une fin de réception, entre les coupes vides et renversées et les chaises déplacées, comme la fin d'un grand tourbillon et le retour à la solitude qui suit une douce pagaille. le livre se lit assez vite mais il ne m'a pas charmé.

Il faudra que je tente Tendre est la nuit, écrit par Mr. Fitzgerald pour avoir un autre point de vue sur la vie de ce couple unique.
Lien : http://lililectrice.canalblo..
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Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
Il semblait à Alabama que si elle atteignait son but, elle pourrait maîtriser les démons qui l’avaient jusqu’alors dominée – qu’en s’affirmant, elle trouverait la paix qu’elle s’imaginait être l’apanage de la maîtrise de soi – qu’elle serait capable, grâce au truchement de la danse, de commander ses émotions, d’évoquer l’amour, la pitié ou le bonheur, selon son désir, leur ayant ainsi frayé une voie de passage nouvelle par laquelle ils pourraient affluer.
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Elle acheta des roses jaunes avec son argent, des roses comme un brocart satin Empire, des lilas blancs et des tulipes roses comme des fleurs cristallisées de confiseur, et des roses d'un rouge sombre comme un poème de Villon, noires et veloutées comme l'aile d'un insecte, des hortensias d'un bleu froid, propres comme un mur fraîchement chaulé, les gouttes cristallines du muguet, un vase de capucines qui ressemblaient à du cuivre battu, des anémones et d'espiègles tulipes-perroquets qui égratignaient l'air de leurs collerettes dentelées, et les voluptueuses circonvolutions tortueuses des violettes de Parme. Elle acheta des œillets jaunes citron qui sentaient le sucre d'orge ; et des roses de jardin pourpres comme la gelée de framboise et toutes les espèces de fleurs blanches que le fleuriste savait cultiver. Elle donna à Madame des gardénias qui ressemblaient à des gants de chevreau blancs et des myosotis de la Madeleine, des branches de glaïeuls menaçants, et le doux ronronnement régulier de tulipes noires. Elle acheta des fleurs qui ressemblaient à des salades et des fleurs qui ressemblaient à des fruits, des jonquilles et des narcisses, des coquelicots et des coucous, et des fleurs brillantes qui avaient les qualités carnivores de Van Gogh.
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Les enfants aiment toujours la nouveauté, ne se rendant pas compte que tout se retrouve en chaque chose, pour peu qu'elle soit complète. L'été et l'amour et la beauté sont les mêmes, que ce soit à Cannes ou dans le Connecticut.
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Tout art n’était-il pas l’expression de l’inexprimable ? Et l’inexprimable n’est-il pas toujours le même, quoique variable – comme le X en physique ? … Il peut représenter absolument n’importe quoi, mais en même temps, il est toujours X en fait.
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Elle resta assise là, longtemps. Elle détestait la manière qu'avait l'infirmière de s'affairer dans la pièce comme si son père était un petit enfant. Son père savait tout. Son cœur sanglotait.
Le vieillard ouvrit fièrement les yeux comme il en avait l'habitude.
« Est-ce que tu ne voulais pas me demander quelque chose ?
– Je pensais que tu pourrais me dire si notre corps nous est donné pour servir de dérivatif à notre âme. Je pensais que tu saurais pourquoi lorsque notre corps devrait prendre la relève de notre esprit torturé, il échoue et s'effondre ; et pourquoi, quand nous sommes tourmentés dans notre corps, notre âme ne peut nous servir de refuge. »
Le vieil homme restait silencieux, immobile,
« Pourquoi devons-nous gaspiller des années à fatiguer notre corps pour nourrir notre esprit d'expériences pour finalement découvrir que notre esprit se tourne, alors, vers notre corps épuisé pour y trouver une consolation ? Pourquoi, dis, papa ?
– Demande-moi quelque chose de facile, répondit le vieillard très faible est lointain.
– Il faut que le Juge se repose, dit l'infirmière.
– je m'en vais. »
Alabama resta debout dans le couloir. Il y avait la lumière que son père éteignait quand il allait se coucher ; il y avait la patère avec son chapeau accroché.
Quand l'homme n'est plus le gardien de ses vanités et de ses convictions, il n'est plus rien du tout, pensa-t-elle ? Rien ! Il n'y a rien qui gît sur le lit – mais c'est mon père, et je l'ai aimé. Sans son désir je n'aurais jamais vécu, pensa-t-elle. Peut-être ne sommes-nous tous que les figurants d'un théâtre très expérimental de libre arbitre organique. Il n'est pas possible que je sois le but même de la vie de mon père… Mais il se peut par contre, que tout ce que je suis capable d'apprécier de son esprit si fin soit le but de la mienne.
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