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Je n'avais jamais osé sauté le pas et lire un texte de Francis Scott Fitzgerald. Mais cette année sera une année à part, je pense. Car c'est ma troisième découverte d'un écrivain réputé pour autre chose que de la littérature dite de l'imaginaire. Hé oui ! Cette année a été pour moi l'occasion de découvrir Colette, Proust et Fitzgerald. Trois grands écrivains que je pensais bien ne jamais lire. Et là, en cette fin d'année, je découvre que les éditions ActuSF publient une version illustrée de L'étrange histoire de Benjamin Button. Encore une fois c'est totalement par hasard... mais ce n'est pas en fouillant les numéros des journaux des années 1920 :-) Non. Mais ActuSF a proposé ce petit volume en Service Presse à ma moitié. Je ne pouvais pas passer à côté. Un peu de sérieux. Maintenant, qu'en est-il du livre ? Les très nombreuses illustrations de Fanny Liabeuf (alias Naïky) sont superbes. Chacune, ou presque, bénéficie d'une page entière. Certaines sont en couleurs. C'est sans hésiter que je découvrirai le travail de cette graphiste dans d'autres ouvrages. À suivre, donc. Et la nouvelle ? Oui. Je la désigne par le label de nouvelle et non novella. Car le texte n'occupe que 33 pages dans le volume (format poche) de Tales of the jazz publié par l'auteur en 1922. Peut-être un peu long pour une nouvelle mais indubitablement trop court pour une novella. Mais ceci n'enlève rien à ce texte charmant. Il peut être surprenant de découvrir que l'histoire commence en 1860, soit 36 ans avant la naissance de l'auteur. Il semble qu'ainsi, l'auteur se complique la vie en décrivant une société américaine qu'il n'a pas connue. Mais cette date a l'avantage de faire vivre la jeunesse du héros dans les années 1900-1920 période que l'auteur connais bien puisqu'il s'agit des ses propres années de jeunesse, et je subodore une part d'autobiographie dans certain éléments de la vie de B. Button : fils de commerçant, difficultés scolaires, etc. Mais la ressemblance s'arrête là. Je mettrai un petit B-mol à mon enthousiasme. La nouvelle est centrée sur Benjamin. Rien que de très normal. Mais du coup, les personnages secondaires sont trop effacés. Sa mère en particulier. Son épouse également. Et que dire de l'épouse de son fils dont on ne sait qu'une chose : elle existe. Bref. le personnage féminin le plus présent est sans doute la nounou qui s'occupe de lui pendant ses dernières années de vie à rebours. En bref : À lire absolument. Et plutôt qu'une édition quelconque (Librio par exemple. Dix fois moins chère, il est vrai) achetez celle d'ActuSF pour profiter des illustrations de Fanny Liabeuf. Lien : http://livres.gloubik.info/s.. + Lire la suite |
« L'histoire de ma vie est celle du combat entre une envie irrésistible d'écrire et un concours de circonstances vouées à m'en empêcher.
[…] Puis, mon roman a été publié. Puis, je me suis marié. Maintenant, je passe mon temps à me demander comment tout cela est arrivé.
Selon les mots de l'immortel Jules César : « Tout est dit ; il ne reste plus rien. » (Francis Scott Fitzgerald, « Qui est qui, et quoi? », paru dans le Saturday Evening Post du 18 septembre 1920.)
« […] En mai 1934, Fitzgerald [1896-1940] s'ouvre de son projet subtil à son éditeur, Maxwell Perkins [1884-1947] : « Comme vous le savez, je n'ai jamais rien publié de personnel sous forme de livre parce que j'ai toujours eu besoin de tout le matériel possible pour mes oeuvres de fiction. Toutefois, un certain nombre d'articles et de textes divers ont attiré l'attention d'un vaste public et pourraient le faire de nouveau si nous pouvions trouver, entre le titre et les textes, le lien qui puisse nouer l'humour à un soupçon de sagesse. » […] Perkins ne répond pas. Mais l'idée refait surface deux ans plus tard, en mars 1936, quand Fitzgerald lui propose « un livre de réminiscences, non pas une autobiographie, mais des réminiscences ». […] Fitzgerald, plus précis encore : « Il est plus triste de retrouver le passé et de s'apercevoir qu'il n'est pas à la hauteur du présent que de le voir s'échapper pour demeurer à tout jamais une construction harmonieuse de la mémoire. » Il s'agit donc, dans ce livre des réminiscences, au cours de cette délicate chasse aux papillons, de retrouver, en dépit de la tristesse et contre elle, un passé à la hauteur du présent, un passé qui tienne ses promesses à l'avenir. […] « Il se trouve que la plus grande partie de ces articles sont intensément personnels : alors qu'un journaliste doit trouver un sujet sur lequel écrire son article quotidien ou hebdomadaire, j'ai écrit ces articles uniquement lorsque l'impulsion venait de l'intérieur. En fait, j'ai les mains plus propres pour la non-fiction que pour la fiction. » […] le projet « Mains propre » était resté lettre morte. Que vive Un livre à soi. » (Pierre Guglielmina, Qu'est-ce qu'un « livre à soi »?)
« […]
[…] Jamais la foi dans le destin de l'homme n'avait atteint les sommets auxquels elle est parvenue dans les années 1890 - rarement cette même foi a plongé aussi bas qu'aujourd'hui. Lorsque nous observons autour de nous un rapide déclin des idéaux de conduite, il existe nécessairement une cause fondamentale pour l'expliquer. Il est impossible d'être vicieux dans le vide. Quelque chose de sérieux (que seuls les évangélistes professionnels, les romanciers de gare et les politiciens corrompus prétendent comprendre) affecte le monde. Il faudra un coeur solide pour nager à contre-courant dans ces eaux troubles et ne pas être, comme ma génération, un peu cynique, un peu las et un peu triste. […] - doit-on s'étonner que nous redoutions presque d'ouvrir les journaux le matin de peur d'y découvrir une nouvelle dérive de la civilisation, une nouvelle infamie dans cette chambre obscure que nous appelons le coeur humain !
C'est sur ce monde que nos enfants ouvrent aujourd'hui les yeux. […]
[…] si mon enfant est un meilleur homme que moi, il viendra me voir enfin pour dire, non pas : « Père, tu avais raison concernant la vie », mais plutôt : « Père, tu avais complètement tort. »
Et quand ce moment viendra, et il viendra, puis-je être assez juste et sage pour dire : « Bonne chance et adieu, car j'ai possédé autrefois ce monde qui t'appartient, mais je ne le possède plus. Suis ta voie à présent, avec vaillance dans le combat, et laisse-moi en paix, au milieu de tous ces torts passionnés que j'ai aimés, car je suis vieux et ma tâche est accomplie. » (Francis Scott Fitzgerald, « Attendez d'avoir des enfants à vous ! », paru dans Woman's Home Companion, juillet 1924)
« Crack-up (titre original de ce texte [Craquer]) signifie certes « craquer nerveusement », mais aussi, « rire » ou « faire rire ». Fitzgerald a certainement ce double sens en tête […] » (Note de Pierre Guglielmina)
0:04 - Craquer
13:51 - Générique
Référence bibliographique :
Francis Scott Fitzgerald, Un livre à soi, traduit par Pierre Guglielmina, Éditions Les Belles Lettres, 2017
Image d'illustration :
https://www.npr.org/2015/01/10/376118599/west-of-sunset-imagines-f-scott-fitzgeralds-last-years-in-hollywood
Bande sonore originale : Gotama - Inner Silence
Site :
https://gotama-music.bandcamp.com/track/inner-silence
#FrancisScottFitzgerald #Craquer