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EAN : 9791095360414
136 pages
L'Antilope (24/08/2017)
3.33/5   15 notes
Résumé :
« Mon amour, mon amour, ô mon amour, maintenant je crie en plein visage. Vas-tu pleurer, vas-tu revenir, délaisser tes ombres et me sourire, répondre à cette attente infernale, m'empêcher de sombrer de trop de solitude ? Je voudrais lacérer ton épaule, cracher un venin verdâtre, t'anéantir de mes pensées, souffler sur ma douleur, t'aimer intensément. Tu entends, tu entends ? »Sur le trajet vers l'inéluctable, se croisent les pensées de l'homme brun et de la femme ro... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Un wagon plein d'hommes et de femmes. Un enfant isolé. Un narrateur qui raconte tout ce qu'il voit. Une femme rousse qui évoque le puissant souvenir de son amant. Un homme brun qui n'a jamais porté l'étoile. Des plaintes en yiddish. Des injures en allemand. Des odeurs atroces. Des cadavres. Un voyage vers l'oubli. « Je sais maintenant qu'on ne reviendra pas, il faudrait un miracle pour retourner là-bas, se réveiller du cauchemar, l'indicible se rapproche, nous avons été projetés dans un autre monde, fait de nuit de soif et de froid, on ne saura plus rien de nous. » (p. 24 & 25)

Le chant d'amour de la femme rousse est bouleversant. Il capte des bribes de la tragédie environnante et n'en devient que plus puissant. « Sors-moi de cet enfer, aide-moi, souviens-toi, mon amour. » (p. 44) La frénésie sensuelle qui s'empare de sa mémoire se heurte à l'abjection qui roule vers l'Allemagne. le souvenir de la jouissance est désespéré. La polysémie du titre est troublante : transport vers la mort et transport amoureux. La rencontre d'Éros et Thanatos est un combat de titans. « Mon amour, mon amour, je t'aimerai dans les retraites secrètes où te conduiront la haine et la désillusion, l'injustice, l'ignorance, je t'aimerai dans la tourbe, la boue, le sang, la vermine, la pestilence. » (p. 87) Dans ce cantique délirant de sensualité et de terreur, il y a la certitude de la disparition et de l'inéluctable. Avec eux viennent les regrets et naissent des rêves qui ne fleuriront jamais.

J'ai lu des dizaines de textes sur la Shoah, écrits par des survivants, des descendants ou des artistes. Transport est une merveille du genre, si tant est que l'on puisse parler de genre pour cette littérature née de la destruction et de l'urgence. Il n'y a pas d'accusation, pas de dénonciation, juste la capture sur le vif d'une humanité en souffrance et en mouvement vers nulle part. Son désespoir et son anéantissement donnent la mesure de ce qui attend l'homme. « Qu'allaient-ils faire de nous ? Qu'allaient-ils faire d'eux ? » (p 104) le premier roman d'Yves Flank se lit dans un souffle suspendu, retenu, bloqué. Parce qu'expirer, c'est déjà lâcher la main de ceux qui sont montés dans ce wagon.

Si vous êtes sensible à cette littérature et à cette tranche d'histoire, je vous recommande l'époustouflant À pas aveugles de par le monde de Leïb Rochman.
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Transport, un livre coup de poing !
Un livre fort où la mort rôde et où l'on se raccroche à la vie, à ses souvenirs, où l'amour tente de braver la mort inéluctable. Une grande claque !

Dans le wagon à bestiaux qui les conduit vers la mort, un homme se souvient, une femme revit sa passion amoureuse, petits instants suspendus, petits échappatoires, un peu de poésie dans ce cloaque.

Parfois, un livre vous attire irrésistiblement. Tapi, bien rangé sur les étagères de la médiathèque, ce tout petit livre a attiré mon regard. Son titre, sa couverture, allez savoir !
Et puis, très très rapidement, un oeil sur le dos et dans ma tête un mot s'est imposé à moi : poésie.
J'ai beau lire et relire le résumé maintenant pour le besoin de cette critique. Il n'y apparaît pas.
"Mon amour, mon amour, ô mon amour, maintenant je crie en plein visage.. "
Cette citation bien sûr. Elle est au dos.
Il s'est imposé à moi et je m'en suis emparée ce matin. Une lecture ininterrompue, de quelques heures, en apnée, et voilà déjà terminé !
Il y a des textes qu'on n'ose pas interrompre. Celui-ci en est un.
D'autant plus que sa construction est particulière.
Le premier chapitre étant fort éprouvant, il me fallait passer au second.
Le second chapitre, prière désespérée, hymne à la vie et à l'amour, accolée aux mots de la réalité, me remuent tant qu'il faut que je passe au suivant.
Le chapitre trois et les souvenirs de l'homme brun, m'en apprend plus sur lui, sur eux. Mais qui est-il ? Notre narrateur du début ? La gorge serrée, je ne sais pas si le premier chapitre est finalement le plus dur. Il faut que je poursuive .
Le chapitre quatre est un rêve. La mort s'approche à grands pas. Les souvenirs assaillent, enveloppent, bercent. Ce dernier chapitre m'apaise enfin. J'ai fini.

Mon avis
Un tout petit livre qui peut se lire d'une traite et je le conseille car le sujet est poignant. Je trouve ce récit très beau et très juste. Lorsque la mort plane autour de nous, nos corps luttent et se réveillent parfois avec brutalité. Ainsi la femme rousse revit une passion amoureuse, intensément. Les images sont parfois crues. Autant de scènes d'amour pour se raccrocher à son être, à la vie, un instinct de survie.
L'homme brun lui, revient sur les évènements qui ont précipité ce drame, se questionne, puis devant l'inéluctable, choisit également d'agréables souvenirs.
Et l'écriture, l'art, les mots, pour perpétuer la mémoire, pour faire revivre l'espace d'un instant ces hommes et ces femmes. Une écriture qui touche en plein coeur. Et de l'art naît le beau...
Ce texte rend hommage aux victimes de l'holocauste. L'auteur le dédie à ses grands- mères.
Premier roman époustouflant !
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Quatre parties pour ce court roman de 133 pages.
1) le cri de l'homme brun assis au fond du wagon : très factuel, il décrit le calvaire des déportés dans les wagons . Deux personnages semblent plus forts que les autres, l'homme brun et la femme rousse.
2) le cantique de la femme rousse : comme un appel au secours, "sors-moi de cet enfer", "mon amour, mon amour", la femme rousse revit son histoire d'amour.
3) le récit de l'homme brun qui n'a jamais porté l'étoile : il revit sa vie d'avant, les deux mois précédents,la dénonciation et son arrestation, Drancy, la longue attente et le départ.
4) Les rêves de l'homme brun qui n'a jamais porté l'étoile : il rêve (dans le wagon ?) jusqu'à la faiblesse extrême.

Entre réalité, souvenirs et rêves, Yves Flank nous livre un récit étrange, poignant.
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Peut-on dire aujourd'hui qu'on n'a pas aimé un livre sur la Shoah ? La langue y est malheureusement pour moi très factuelle. J'ai eu du mal à croire aux plaintes de chacun. Encore moins à celles de la femme rousse. On est très loin de Imre Kertesz.
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critiques presse (2)
LeMonde
08 décembre 2017
« Transport », premier roman d’Yves Flank, est un huis clos dans un wagon à destination d’un camp de la mort. Eprouvant et lumineux.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LeMonde
08 décembre 2017
Transport est un chant funèbre psalmodié par des morts comme une prière charnelle, un mouvement du corps vers la vie, vers le plaisir, vers la lumière.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Au début, je ne savais rien. Je ne connaissais personne. Assez tôt, plusieurs m'ont dit ne parle pas à la première personne, ne dis pas "je", tu n'es pas seul au monde. Intéresse-toi aux autres. Alors je faisais des tentatives. Plusieurs fois par jour, selon l'occasion. J'allais vers eux, pour de bon. Je ne parle pas des formules de politesse, bien que finalement là aussi les contacts se nouent. Pour se faire accepter c'est assez efficace. Accepter dans ce cas, c'est un bien grand mot, flairer est pus adapté. Je me laissais sentir comme un animal, et après je croyais qu'ils allaient me laisser tranquille. La loge de la concierge embaumait la soupe de légumes. Elle avait un poêle à charbon, un tapis, un ou deux chats, la radio, un réveil tic-tac, des photos de paysages et une boule de verre avec de la neige à l'intérieur à côté de la tour Eiffel. A l'entrée de l'immeuble, la loge se trouvait à droite, après l'escalier. Je ne sais pas ce qui lui a pris de dénoncer les gens, de les accabler, de répandre de mauvaises rumeurs, de sourire aux policiers, de leur offrir à boire pendant qu'on nous emmenait, tout en caressant ses chats. A partir de quand la haine croise-t-elle la vie des gens ?
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Pourtant, elle était si gentille, cette concierge sans âge, on se saluait plusieurs fois par jour, je faisais une remarque aimable"Ah, madame Feulard, vous êtes gaie aujourd'hui", elle me gratifiait d'un demi-sourire, gardait le silence, parfois le lui rapportais le pain, caressais ses chats, lui donnais des "étrennes"chaque fin d'année, glissais les remarques habituelles sur le temps, toute cette politesse sans accroc qui me faisait passer partout pour un homme simple, courtois et sans histoires, serviable et français dans l'âme, partageant avec ses élèves son goût de l'histoire de Clovis à Pétain, en passant par Jeanne d'Arc et la révolution.
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Sors-moi de cet enfer, aide-moi, souviens-toi, mon amour. J'aurais dû emmêler ma peau à ta peau, noyer mes yeux dans tes cheveux, te caresser à chaque instant du jour, de la nuit, coller mes lèvres à tes lèvres sous la pluie, te bercer de poèmes, accompagner tes larmes, fleurir ta mélancolie, éloigner les sorcières, j'aurais dû échanger nos rêves, nos sangs, à la vie à la mort, t'emporter dans les prairies de mon enfance, j'aurais dû t'offrir des parfums d'Orient, des fleurs immortelles, des bijoux d'argent, des vins flamboyants, j'aurais dû partager l'ivresse et la solitude, et arrêter le temps.
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L'Eglise catholique prétendait depuis deux mille ans que j'étais déicide, je croyais depuis la réhabilitation du capitaine Dreyfus que la République avait repris le dessus, mais le fond de l'air était vicié, il fallait bien se débarrasser de quelque chose ou de quelqu'un pour pouvoir à nouveau respirer. Et les concierges,ça nettoie, ça débarrasse.
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« Je sais maintenant qu’on ne reviendra pas, il faudrait un miracle pour retourner là-bas, se réveiller du cauchemar, l’indicible se rapproche, nous avons été projetés dans un autre monde, fait de nuit de soif et de froid, on ne saura plus rien de nous. » (p. 24 & 25)
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