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Comme il y a les livres avec papier épais, couverture onctueuse et typographie soignée qui éveillent les sens et multiplient les plaisirs (Vade Retro bouquinus numericus!), il y a les bandes dessinées dessinées. Oui, oui. Des bandes dessinées qui cachent un artiste avec pinceaux et couleurs. Des bandes dessinées qui font chanter les yeux comme des aquarelles égarées dans une pile de moches sérigraphies. Kililana song compte parmi celles-ci. Grand bourlingueur devant l'éternel, Benjamin Flao ramena un bout de l'ile de Lamu dans ses bagages et une galerie de personnages gravitant autour du garnement Naïm. Naïm, 11 ans, cavalcade dans les rues de sa bourgade kenyanne afin d'échapper à l'école coranique dans laquelle son frère veut à tout prix le fourrer. Au cours de ses tentatives pour échapper à l'idée fixe détestable, Naïm côtoie, frôle, rencontre moult protagonistes qui composent une Afrique oscillant entre tradition et modernité, écrasée par un nouveau colonialisme rachetant ses maisons, faisant de ses jeunes des domestiques. Il y a du Gary et des racines du ciel ici. Sans les éléphants. Avec des mots en moins et des dessins en plus. Le très mal léché Günter, capitaine alcoolique, trafiquant de drogue, ferait pâlir son homologue Hadock. Les moules à gaufre, bachi bouzouk et autres sabords par paquet de mille font pâle figure devant "la grosse putain de sa race de grosse tuile de nom de Dieu de Bordel de chiotte"; il s'avère pourtant fort sympathique, le mal élevé Günter, blond et bedonnant, dans ses démêlés avec l'Europe riche, ridicule, vulgaire. Car la vulgarité n'est pas toujours où l'on croit. Les rifflars qui viennent poser leurs grosses villas comme des étrons sur toutes les plages du monde, ça le débecte à Günter. On lui pardonne bien volontiers quelques écarts langagiers. Le Nacuda, vieillard impotent, que Naïm approvisionne en qat raconte une époque révolue et mâchonne son amphétamine écologique. On poserait bien nos fesses à ses côté juste pour l'écouter. Pas comme Naïm qui continue de courir, toujours poursuivi par son musulman de frangin increvable et entêté, parmi les touristes naïfs que l'on embrouille et les djinns cachés. Elle reste magique, cette Afrique, flanquée de ses prostituées et de ses promoteurs véreux (bouh le vilain pléonasme) car elle abrite aussi un vieux shaman, voleur de bateau à ses heures aux fins de protéger un territoire sacré. La suite, c'est quand Benjamin Flao le voudra. En attendant, les esprits chantent. Et l'on peut écouter Sélim, ami de Naïm, "muet comme un pot et bavard à coup de bruits et de signes". + Lire la suite |
11 novembre 2009 :
Mot de l'éditeur :
Pain d'Alouette :
Après le succès de L¹Aigle sans orteils, la suite que l¹on attendait! Sur les pavés de Paris-Roubaix, dans les entrailles des mines du Nord ou dans la noirceur de l¹orphelinat, Pain d¹alouette est le récit sublime de l¹humaine condition! le vélo, métaphore de la souffrance et de la dignité des humblesŠ Avril 1919, dans le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais. Quentin Ternois, ancien coureur cycliste, gazé à Ypres deux années plus tôt, emmène son neveu Élie découvrir Paris-Roubaix, «l¹Enfer du Nord». La souffrance et la persévérance de ces trimards du vélo forcent le respect du jeune mineur, qui sait ce qu¹« aller au charbon » veut dire. Et pour lui, ce sera une révélation. Au même moment, dans un orphelinat du Sud-Ouest, une très jeune enfant est en butte à la brutalité du directeur. C¹est Reine Fario, la fille d¹Amédée, «l¹Aigle sans orteils», tué sur le frontŠ Quatre ans plus tard, Camille Peyroulet, ingénieur en retraite de l¹observatoire du pic du Midi, grand ami d¹Amédée, apprend l¹existence de Reine, et la mort d¹Adeline, sa mère. Désormais, dans le souvenir ému d¹Amédée, Camille n¹aura de cesse de retrouver Reine, pour l¹adopter. Ce ne sera pas une mince affaire...
Rebetiko :
À travers ces musiciens grecs qui, avant guerre, chantaient la nuit ce qu¹ils vivaient le jour, brûlant leur vie par les deux bouts, David Prudhomme signe l¹un des tout grand roman graphique de ces dernières années!
Fin des années 30, en Grèce. La dictature militaire s¹installe et les libertés fondent comme neige au soleil. L¹esprit frondeur de Stavros, amateur de jolies filles, de hachisch, (et vendeur occasionnel) a du mal à se plier aux lois en vigueur. Il retrouve son ami Markos à sa sortie de prison. Ensemble, autour d¹un narguilé, ils refont le monde, avant d¹aller jouer et danser le rebetiko toute la nuit au son du bouzouki.
Il fallait l¹invention et l¹élégance naturelle de David Prudhomme pour réussir à restituer l¹ambiance des bouges d¹Athènes dans les années trente, et l'atmosphère électrique qui y régnait. Pour ce récit, David Prudhomme puise son graphisme noir et charbonneux aux sources du cinéma néo-réaliste italien.
Quant à cette musique populaire grecque d¹avant-guerre, elle est dans Rebetiko ce que Casque D¹Or a été aux guinguettes du bord de la Marne : omniprésente et le moteur essentiel du récit.
Mauvais garçons :
Comment rendre en bande dessinée toute la force émotionnelle du flamenco ? le projet était si ambitieux et les planches si expressives qu¹il a fallu en faire deux tomes dans un format plus grand! Un mois seulement après la sortie du 1er volume, Flao & Dabitch nous entraînent dans le sillage de deux "mauvais garçons" qui vivent le jour ce qu¹ils chanteront et danseront la nuit. En Andalousie, de nos jours. Il se nomme Manuel, sa famille est originaire d¹Andalousie, mais il a vécu en France jusqu'à ce qu'il décide de revenir s'y installer. Il a un ami gitan qui se nomme Benito, un chanteur hors norme. Manuel et Bénito sont inséparables. Car, ce qui lie avant tous les deux jeunes hommes, c¹est l¹amour du flamenco, le vrai, le pur, pas le flamenco rock comme peuvent le jouer certains frimeurs méprisables (mais qui, à contrario, gagnent très bien leur vie). Ces «mauvais garçons» vivent au jour le jour d¹expédients. Seul leur amour des femmes leur fait tourner la tête.