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Critique de djdri25


En ce début de 20e siècle Adelphe a embrassé une carrière de pasteur et rêve d'oecuménisme. C'est un personnage idéaliste mais la maturité et l'expérience aidant, il perd ses illusions et doute de sa vocation.

Il vit avec sa gouvernante Blanche, lui lit le Goncourt de l'année qui sert de fil conducteur, livre dont une femme servile est l'héroïne, c'est une paroissienne qui le lui a offert, la troublante Gabrielle.

La lecture du livre déclenche alors des réflexions de la part des personnages féminins sur leur rôle dans la société de l'époque. Des revendications et oppositions vont naître chez elles face à ce que subit l'héroïne du Goncourt.

Blanche, d'abord est transformée par la lecture qu'il lui a fait du livre. Comme s'il lui révélait sa condition dans le reflet d'un miroir en lui lisant ce livre, elle devient alors plus exigeante, sur son service, leur relation en est affectée et devient plus ambiguë, plus complexe et bien plus tard, le livre déclenchera le malheur de celle-ci. C'est comme si elle avait ouvert la boite de Pandore.

Quant à Gabrielle, celle-ci est plutôt une femme libre et féministe avant l'heure, avant Simone de Beauvoir pour ne citer qu'elle est loin de la morale rigoriste et religieuse. Elle est qualifiée de « garçonne » par Adelphe, elle le trouble et bien que la sachant mariée, il en est épris. Elle est la médiatrice, son offrande va déclencher des prises de conscience sur de la condition féminine de l'époque.

Pour ce qui est de l'écriture, la typographie est assez resserrée, l'écriture peu aérée, il n'y pas de temps mort, peu de dialogues coupant la narration, une large place est faite à la narration intégrant les paroles des personnages. On est de plus est face à un narrateur omniscient qui fouille les méandres de l'âme d'Adelphe et des autres personnages nous livrant le flot de leurs pensées, leurs idéaux, leurs désirs avec des envolées lyriques et parfois de belles métaphores filées suivant la musique de l'âme d'Adelphe en rendant le texte plus poétique.
Adelphe est à la fois tourmentée et troublée par les révélations et les changements qu'il entrevoit chez les femmes de son entourage et de son époque.

Dans la première partie, la plus intéressante et la mieux écrite, l'histoire nous est livrée du point de vue d'Adelphe, à la fois initiateur et témoin des attitudes et de certains changements qui s'opèrent chez les femmes de sa paroisse. Il doit se mettre à l'évidence, elles ne sont pas telles qu'ils les imaginaient, elles souhaitent échapper aux carcans de la religion, se libérer de son joug ainsi que de celui des hommes et être sur un pied d'égalité avec eux, du coup, sa vision de la condition féminine prend de l'ampleur et s'élargit, Gabrielle va l'y aider.

Dans les autres parties du livre les choses se concrétisent pour Adelphe, la vie avec son lot de bonheurs en malheurs avec la guerre, l'amour, la paternité, la mort, le chagrin. La descendance prend le relais dans la narration, le personnage d'Adelphe et sa problématique s'éclipsent quelque peu dans la dernière partie du livre, à mon grand regret, mais il nous revient plus en forme en fin de livre bien que rongé par la culpabilité et le vieillissement.

Un livre sur la place faite aux femmes dans la société mais aussi sur le désir, celui qui est interdit à l'époque, la morale religieuse et politique sont là qui veillent au grain, le destin aussi qui rattrape les êtres. Une contradiction entre amour et morale est développé tout au long du livre, cela ira jusqu'à l'engendrement d'un fruit défendu.

Un roman qui livre le regard d'un homme au-delà de sa fonction religieuse sur les femmes de son époque et qui va savoir les aimer même si les choses lui échappent parfois. un livre qui dénonce la condition des femmes de la première moitié du 20e siècle. Un roman subversif sur la question de la morale religieuse quelque peu malmenée par l'amour.
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