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Critique de traversay


Au sortir la guerre, bon nombre de serviteurs zélés du 3ème Reich s'en tirèrent sans dommage et, certains, retrouvèrent même, quelque temps plus tard, une place privilégiée au sein des cercles du pouvoir de la RFA. D'un point de vue historique, le sujet du roman très érudit du norvégien Kjartan Fløgstad, Des hommes ordinaires, suscite, au moins a priori, une très grande attention. Mais en choisissant de ne pas intervenir, de laisser ses personnages (fictifs mais plus que réalistes) s'exprimer par eux-mêmes, il a écrit un livre d'une incroyable froideur, dominée par la suffisance et l'arrogance des élus d'une "classe supérieure". Une phrase telle que : "Seuls les plus forts et les plus purs étaient capables de tuer des femmes et des enfants et en sortir indemnes", dépasse largement les limites du cynisme et a pour double effet de glacer les sangs et de se demander si la barbarie mérite d'être romancée. Une question qui se posait déjà, à un degré moindre, à la lecture de Limonov et plus encore d'Avenue des Géants. Si l'on pouvait éprouver une certaine fascination/répulsion pour les forces du mal en action dans les deux livres précédents, il n'en est pas question dans Des hommes ordinaires, tellement la monstruosité assumée par cette élite nazie, issue des milieux bourgeois et universitaires, est insupportable. du coup, l'intérêt de voir la façon dont les compétences (sic) de ces hommes furent "récupérées" et utilisées par le monde occidental contre le communisme, des années 50 à 80, retombe singulièrement. Et pourtant, Fløgstad le fait de façon magistrale, avec une précision diabolique et vertigineuse. du point du vue du style, le roman est de très haute volée, brillant notamment par son ironie et la qualité de ses dialogues. La construction du livre, très complexe, ne facilite pas la tâche du lecteur auquel il est demandé une constante attention, avec des ellipses temporelles hardies et des changements de narrateur constants. Malgré des qualités littéraires certaines et un sujet riche en contrastes, et posant des questions pertinentes, Des hommes ordinaires est en définitive un livre décourageant, dont la densité et l'apparente neutralité devant l'horreur majuscule provoquent un sentiment proche de l'aversion. Question de point de vue, évidemment, mais autant alors lire un véritable ouvrage historique, si tant est que l'honnêteté intellectuelle puisse en être garantie.
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